La candidate à l'élection présidentielle Arlette Laguiller
prétend que son programme est l'expression de la défense des intérêts
de la classe ouvrière. Mensonges ! Duperie sur toute la ligne ! Ses grands
thèmes martelés tout au long de la campagne électorale
sont non seulement destinés à engager un maximum d'ouvriers sur
le terrain électoral bourgeois mais aussi à enfermer les prolétaires
dans de dangereuses illusions réformistes et à dénaturer
le sens même de la lutte de classe. Quel est donc ce "programme"
?
"Faire payer les riches"
"faire payer le patronat", "prélever l'argent sur les
profits patronaux" ou "sur la fortune des actionnaires" pour
"redistribuer les richesses sociales et financer les emplois" , autrement
dit la formule qu'emploie également LO : "faire payer les riches
" . Cette bonne vieille recette de la gauche dans l'opposition a fait en
son temps les choux gras du PCF, en particulier quand le parti stalinien s'en
prenait aux "200 familles" dans les années 1930. Ce n'est rien
d'autre qu'une vaste entreprise de mystification qui revient à faire
croire que la solution au chômage et à la misère engendrés
par le capitalisme se trouverait dans une meilleure gestion de ce système.
Cela ne fait que renvoyer en permanence aux prolétaires l'idée
d'un capitalisme viable, un système qu'il suffirait de réformer,
qu'il serait possible d'orienter dans un sens favorable aux travailleurs et
surtout qu'il n'est pas nécessaire de détruire. Pour exploiter
ce filon électoral, notre "Arlette nationale" va jusqu'à
reprendre aujourd'hui à son compte la vieille idée d'autogestion
galvaudée par les anarchistes d'un côté, par le "modèle
yougoslave" à la Tito de l'autre en passant par les courants ouvertement
réformistes comme le PSU à la fin des années 1960 et dans
les années 1970, reprise par un syndicat comme la CFDT à l'époque.
Quelle que soit la couleur au goût du jour de la façade : au nom
plus libertaire de l'autogestion ou au nom d'une phraséologie empruntée
au marxisme comme l'appropriation collective des moyens de production, le fonds
de commerce reste le même : LO et sa candidate répandent le mythe
que la misère croissante engendrée par le capitalisme n'est pas
le résultat d'un système aux abois mais une simple question de
gestion et de "répartition des richesses". Elles prétendent
que les inégalités sociales et le chômage viennent de ce
que les "riches" amassent du fric qu'ils ne veulent pas partager,
et non pas de la logique même des rapports de production capitalistes.
Depuis Marx dans sa brochure "Salaire, prix et profit", tous les révolutionnaires
n'ont jamais cessé de combattre l'illusion qu'il n'y a pas de société
juste et équitable dans le cadre du capitalisme, que la seule réponse
historique que puisse apporter le prolétariat face aux iniquités
engendrées par ce système, c'est de le détruire, d'abolir
le salariat en développant les luttes contre l'exploitation de la force
de travail et les rapports capitalistes de production. En masquant le caractère
antagonique et inconciliable des intérêts des ouvriers avec ceux
du capital, LO cherche à ramener les ouvriers derrière la défense
de leur entreprise et de l'Etat bourgeois. Quand il arrive à LO de parler
de crise, ce n'est jamais pour y voir la manifestation de la faillite du système
qui fonde la nécessité et la possibilité de la révolution
prolétarienne. C'est pour la présenter soit comme un mythe inventé
par les méchants patrons pour s'en mettre davantage plein les poches,
soit comme le produit d'une mauvaise gestion de l'entreprise. En même
temps, en désignant la poche des "patrons privés" comme
cause de la misère des exploités, LO dédouane le premier
responsable de l'austérité capitaliste et du chômage, le
premier donneur d'ordre des licenciements et de la régression sociale
: l'Etat de la société bourgeoise qui ne peut être qu'un
Etat bourgeois, capitaliste. Pour LO, la solution est toute trouvée :
il suffirait de concentrer les moyens de production aux mains de l'Etat. Car
cet Etat et par voie de conséquence son gouvernement sont présentés
comme un arbitre au-dessus des classes sociales, qui pourraient indifféremment
pencher en faveur de l'une ou de l'autre classe : la bourgeoisie ou le prolétariat.
Le reproche qu'adresse LO à la gauche au gouvernement, c'est "de
se mettre au service des patrons", de "faire des cadeaux au patronat".
LO masque ainsi la nature de l'Etat capitaliste en faisant croire que c'est
lui qui sert les patrons privés alors que c'est la politique des patrons
privés qui est bel et bien au service de la défense du capital
national dont l'Etat représente le garant, le meilleur et le plus rigoureux
représentant. En réalité, le gouvernement "n'obéit"
nullement aux patrons mais ce sont les patrons qui sont contraints d'obéir
à l'Etat et aux intérêts du capital national. Cette recette
miracle c'est la même camelote, les mêmes vieilles recettes que
le PCF a servi pendant des décennies : mieux gérer le capitalisme,
c'est marcher vers une économie rationnellement organisée et planifiée,
capitaliste d'Etat, il suffit que l'Etat "s 'approprie et contrôle
les moyens de production" sur le modèle stalinien au nom de "l'Etat
ouvrier" qui en URSS aurait fait pendant 70 ans "la preuve de sa supériorité
économique". La raison profonde de cette mystification, c'est que
LO a pris la place et le flambeau du PC stalinien pour apparaître aujourd'hui
comme le plus fervent défenseur, le champion du capitalisme d'Etat.