Après l'effondrement du bloc de l'est, déstabilisation et chaos

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Après l'effondrement du bloc de l'est, déstabilisation et chaos ([1])

L'effondrement du bloc de l'Est, auquel nous venons d'assister, constitue, avec la reprise his­torique du prolétariat à la fin des années 1960, le fait le plus important depuis le dernière guerre mondiale. En effet, ce qui s'est passé dans la seconde moitié de l'année 1989 met fin à la configuration du monde telle qu'elle s'était maintenue durant des décennies. Les Thèses sur la crise économique et politique en URSS et dans les pays de l'Est" (voir Revue Internationale n°60), rédigées en septembre 89, donnent le cadre de compréhension des causes et des enjeux de ces événements. Pour l'essentiel, cette analyse a été amplement confirmée par les faits advenus au cours de ces derniers mois. C'est pour cela qu'il n'est pas nécessaire d'y revenir longuement ici, sinon pour rendre compte des principaux événements qui se sont produits depuis la parution du précédent numéro de notre revue. En revanche, il est essentiel pour les révolutionnaires d'examiner les implications de cette nouvelle situation historique, du fait notamment de l'importance considérable des différences qu'elle comporte avec la période précédente. C'est ce que se propose principalement de faire le présent article.

Pendant plusieurs mois, l'évolution de la situation dans les pays de l'Est a semblé combler les voeux de la bourgeoisie en faveur d'une "démocratisation pacifique". Cependant, dès la fin décembre 89, la perspective d'affrontements meurtriers annoncée dans les "thèses" trouvait une confirmation tragique. Les convulsions brutales et les bains de sang que viennent de connaître la Roumanie et l'Azerbaïdjan soviétique ne sont en effet pas destinés à rester une exception. La "démocratisation" de la Roumanie constituait la fin d'une période dans l'effondrement du stalinisme : celle de la disparition des "Démocraties populaires" ({C}[2]{C}). En même temps, elle inaugurait une nouvelle période : celle des convulsions sanglantes qui vont affecter cette partie du monde, et tout particulièrement le pays d'Europe où le parti stalinien conserve encore son pouvoir (mise à part la minuscule Albanie) : l'URSS elle-même. En effet, les événements des dernières semaines dans ce pays confirment la perte totale de contrôle de la situation par les autorités, même si, pour le moment, Gorbatchev semble être en mesure de maintenir sa position à la tête du Parti. Les chars russes dans Bakou ne constituent nullement une démonstration de force du pouvoir qui dirige l'URSS ; ils sont au contraire un terrible aveu de faiblesse. Gorbatchev avait promis que, désormais, les autorités n'emploieraient plus la force armée contre la population : le bain de sang du Caucase a signé l'échec total de sa politique de "restructuration". Car ce qui se passe dans cette région n'est que le signe annonciateur des convulsions bien plus considérables encore qui vont secouer et finalement terrasser l'URSS.

L’URSS s'enfonce dans le chaos

En quelques mois, ce pays vient de perdre le bloc impéria­liste qu'il dominait jusqu'à l'été dernier. Désormais il n'existe plus de "bloc de l'Est", il est parti en lambeaux en même temps que s'effondraient comme des châteaux de cartes les régimes staliniens qui dirigeaient les "Démocraties populaires". Mais une telle déconfiture ne pouvait s'arrêter là : dans la mesure même où la cause première de la décomposition de ce bloc est constituée par la faillite économique et politique totale, sous les coups de l'aggravation inexorable de la crise mondiale du capitalisme, du régime de sa puissance dominante, c'est dans cette dernière qu'une telle faillite devait nécessairement s'exprimer avec le plus de brutalité. L'explosion du nationalisme dans le Caucase, les affronte­ments armés entre azéris et arméniens, les pogroms de Ba­kou, toutes ces convulsions qui furent à l'origine de l'intervention massive et sanglante de l'Armée "rouge", constituent un pas de plus dans l'effondrement, dans l'éclatement de ce qui constituait, il y a encore moins d'un an, la deuxième puissance mondiale. La sécession ouverte de l'Azerbaïdjan (où même le Soviet suprême local s'est dressé contre Moscou), mais aussi celle de l'Arménie où la rue est tenue par des forces armées qui n'ont rien à voir avec les autorités officielles, ne font que précéder la séces­sion de l'ensemble des régions qui entourent la Russie. Par l'emploi de la force armée, les autorités de Moscou ont es­sayé de mettre un terme à un tel processus dont la séces­sion "en douceur" de la Lituanie, et les manifestations natio­nalistes en Ukraine du début janvier, annoncent les pro­chaines étapes. Mais une telle répression ne peut, au plus, qu'en retarder quelque peu les échéances. A Bakou, déjà, sans parler des autres villes et de la campagne, la situation est loin d'être sous contrôle des autorités centrales. Le si­lence qu'observent désormais les médias ne signifie nulle­ment que les choses soient "rentrées dans l’ordre". En URSS, comme en Occident, la "glasnost" est sélective. Il s'agit de ne pas encourager d'autres nationalités de suivre l'exemple des arméniens et des azéris. Et même si, pour le moment, les tanks ont réussi à rétablir une chappe de plomb sur les manifestations nationalistes, rien n'est réglé pour le pouvoir de Moscou. Jusqu'à présent, ce n'était qu'une partie de la population qui s'était mobilisée ac­tivement contre la tutelle de la Russie, l'arrivée des chars et les massacres ont soudé l'ensemble des azéris contre l’"occupant". Les arméniens ne sont plus les seuls à craindre pour leur vie : les populations russes d'Azerbaïdjan risquent maintenant de payer pour cette opération militaire. De plus, les autorités de Moscou n'ont pas les moyens d'employer partout la même méthode de "maintien de l'ordre". D'une part, les azéris ne représentent qu'un vingtième de la totalité des populations non russes qui peuplent l'URSS. On se demande avec quels moyens, par exemple, le gouvernement de ce pays pourrait mettre au pas les 40 millions d'ukrainiens. D’autre part, les autorités ne peuvent compter sur l'obéissance de l'Armée "rouge" elle-même. Dans celle-ci, les soldats appartenant aux différentes minorités qui aujourd'hui réclament leur indépendance sont de moins en moins disposés à se faire tuer pour garantir la tutelle russe sur ces minorités. En outre, les russes eux-mêmes rechignent de plus en plus à assumer ce genre de travail. C'est ce qu'ont démontré des manifestations comme celle du 19 janvier à Krasnodar, dans le Sud de la Russie, dont les slogans montraient clairement que la population n'est pas prête à accepter un nouvel Afghanistan, manifestations qui ont contraint les autorités à libérer les réservistes mobilisés quelques jours auparavant.

Ainsi, le même phénomène qui a conduit il y a quelques mois à l'explosion de l'ancien bloc russe, se poursuit au­jourd'hui avec l'explosion de son chef de file. De même que les régimes staliniens eux-mêmes, le bloc de l'Est ne tenait en place que par la terreur, par la menace, plusieurs fois mise à exécution, d'une brutale répression armée. Dès lors que l'URSS, du fait de son effondrement économique et de la paralysie qui en résultait pour son appareil politique et militaire, n'a plus eu les moyens d'une telle répression, son empire s'est immédiatement disloqué. Mais cette disloca­tion portait dans son sillage celle de l'URSS elle-même puisque ce pays est, lui aussi, constitué par une mosaïque de nationalités sous la tutelle de la Russie. Le nationalisme de ces minorités, dont l'impitoyable répression stalinienne n'avait fait qu'empêcher les manifestations ouvertes, mais qui s'était encore accru du fait même de cette répression et du silence auquel il était condamné, s'est déchaîné dès qu'il est apparu, avec la "perestroïka" gorbatchévienne, que s'éloignait la menace de la répression. Aujourd'hui, cette répression est à nouveau à l'ordre du jour, mais il est désor­mais trop tard pour faire tourner à l'envers la roue de l'histoire. De même que la situation économique, la situa­tion politique échappe complètement au contrôle de Gor­batchev et de son parti. La seule chose que sa "perestroïka" ait permise, c'est encore moins de biens sur les étalages des magasins, encore plus de misère et, en outre, la libération des pires sentiments chauvins et xénophobes, les pogroms et les massacres de tous ordres.

Et ce n'est qu'un début, le chaos qui règne dès à présent en URSS ne peut que s'aggraver car le régime qui gouverne encore ce pays, de même que l'état de son économie, n'offrent aucune perspective. La "perestroïka", c'est-à-dire la tentative d'adapter "à petits pas" un appareil économique et politique paralysé face à l'aggravation de la crise mondiale, démontre chaque jour plus sa faillite. Le retour à la situation passée, le rétablissement de la centralisation complète de l'appareil économique et de la terreur de la période stalinienne ou brejnévienne, même s'il est tenté par un sursaut des secteurs "conservateurs" de l'appareil, ne pourra rien résoudre. Ces méthodes ont déjà fait faillite puisque la perestroïka partait justement du constat de cette faillite. Depuis, la situation n'a fait que s'aggraver sur tous ces plans à une échelle considérable. La résistance encore très forte d'un appareil bureaucratique qui voit s'écrouler sous ses pieds les bases mêmes de son pouvoir et de ses privilèges ne pourrait aboutir qu'à de nouveaux bains de sang sans permettre pour autant de surmonter le chaos. Enfin, l'établissement de formes plus classiques de la domination capitaliste - autonomie de gestion des entreprises, introduction de critères de compétitivité liés au marché - même s'il constitue de toutes façons la seule "perspective", ne peut, dans l'immédiat, qu'aggraver encore plus le chaos de l'économie. On peut voir à l'heure actuelle en Pologne les conséquences d'une telle politique : 900 % d'inflation, montée irrépressible du chômage et paralysie croissante des entreprises (au 4e trimestre 89, la production des biens alimentaires traités par l'industrie a chuté de 41 %, celle des vêtements, de 28 %). Et dans un tel contexte de chaos économique, une "démocratisation en douceur", la stabilité politique, n'ont pas de place.

Ainsi, quelle que soit la politique qui sortira des instances dirigeantes du parti communiste de l'URSS, quel que soit le successeur éventuel de Gorbatchev, le résultat ne saurait être très différent, la perspective pour ce pays est celle de convulsions croissantes dont celles des dernières semaines ne nous donnent qu'une petite idée : famines, massacres, règlements de compte armés entre fractions de la "Nomenklatura" et entre populations saoulées par le natio­nalisme. C'est avec une épouvantable barbarie que le stali­nisme avait établi son pouvoir sur le cadavre de la Ré­volution communiste d'octobre 1917, victime de son isole­ment international. C'est dans la barbarie, le chaos, le sang et la boue que ce système agonise aujourd'hui.

De plus en plus, la situation de l'URSS et de la plupart des pays d'Europe de l'Est va ressembler à celle des pays du "Tiers-monde". La barbarie complète qui depuis des décen­nies a transformé ces derniers pays en un véritable enfer, la décomposition totale de toute vie sociale, la loi des gangs armés, tel que le Liban, par exemple, nous en offre aujourd'hui le tableau, seront de moins en moins réservées à des zones éloignées du coeur du capitalisme. Désormais, c'est toute la partie du monde jusqu'à présent dominée par la seconde puissance mondiale qui est menacée de "urbanisation". Et cela, en Europe même, à quelques centaines de kilomètres des concentrations industrielles les plus an­ciennes et importantes du monde.

C'est pour cette raison que l'effondrement du bloc impéria­liste de l'Est, non seulement constitue un bouleversement pour les pays de cette zone et pour les constellations impé­rialistes telles qu'elles étaient sorties de la seconde guerre mondiale, mais porte avec lui une instabilité générale qui ne manquera pas d'affecter tous les pays du monde, y compris les plus solides. En ce sens, il importe que les révolutionnaires soient capables de prendre la mesure de ces bouleversements et en particulier d'actualiser le cadre d'analyse qui était valable jusqu'à l'été dernier, au moment où s'est tenu notre dernier congrès international (voir Revue Internationale n°59), mais que les événements de la seconde partie de 1989 se sont chargés de rendre en partie caduc. C'est ce que nous nous proposons de faire sur les trois points "classiques" de l'analyse de la situation internationale :

{C}-  {C}la crise du capitalisme,

{C}-  {C}les conflits impérialistes,

{C}-  {C}la lutte de classe.

La crise du capitalisme

C'est le point sur lequel les analyses du dernier congrès du CCI restent le plus d'actualité. En effet, l'évolution de la situation de l'économie mondiale au cours des 6 derniers mois a pleinement confirmé l'analyse du congrès sur l'aggravation de la crise du capitalisme. Les illusions que les "spécialistes" bourgeois avaient essayé d'entretenir sur la "croissance" et sur la "sortie de la crise" - illusions basées sur les chiffres de 1988 et début 1989 concernant les principaux pays avancés - sont, d'ores et déjà, rudement battues en brèche (voir les articles à ce sujet dans ce numéro de la Revue Internationale et dans le précédent).

Pour ce qui concerne les pays de l’ex-bloc de l'Est, la "Glasnost", qui aujourd'hui permet de se faire une idée plus réaliste de leur situation véritable, permet en même temps de mesurer l'étendue du désastre. Les chiffres officiels antérieurs, qui déjà rendaient compte d'un sinistre de première grandeur, étaient encore bien en deçà de la réalité. L'économie des pays de l'Est se présente comme un véri­table champ de ruines. L'agriculture (qui pourtant emploie une proportion bien plus élevée de la force de travail que dans les pays occidentaux) se trouve, dans la plupart des pays, absolument incapable de nourrir la population. Le secteur industriel est non seulement totalement anachro­nique et obsolète, mais, de plus, complètement grippé, incapable de fonctionner, du fait des carences des transports et de l'approvisionnement en pièces détachées, de l'usure des machines, etc., et surtout de la désimplication générale de tous ses acteurs, depuis les manoeuvres jusqu'aux directeurs des usines. Près d'un demi-siècle après la seconde guerre mondiale, l'économie qui devait, aux dires de Kroutchev au début des années 60, rattraper et dépasser celle des pays occidentaux et "faire la preuve de la supériorité du 'socialisme' sur le capitalisme", semble tout droit sortie de la guerre. Et la situation, comme on l'a vu, n'est pas prêt de s'améliorer. Si c'est bien la faillite totale de l'économie stalinienne, enregistrée depuis déjà des années face à l'aggravation de la crise mondiale, qui se trouve à l'origine de l'effondrement du bloc de l'Est, cette faillite n'a pas encore atteint son point le plus extrême, loin de là. Et cela d'autant plus qu'au niveau mondial, la crise économique, non seulement ne peut que s'aggraver encore, mais sera encore amplifiée par les conséquences de la catastrophe qui touche les pays de l'Est.

En effet, il importe de souligner la totale ineptie (propagée par certains secteurs de la bourgeoisie, mais aussi par certains groupes révolutionnaires) suivant laquelle l'ouverture de l'économie des pays de l'Est sur le marché mondial pourrait constituer un "ballon d'oxygène" pour l'ensemble de l'économie capitaliste. La réalité est toute autre.

En premier lieu, pour que les pays de l'Est puissent contri­buer à une amélioration de la situation de l'économie mondiale, il faudrait qu'ils constituent un marché réel. Ce ne sont pas les besoins qui font défaut, comme ils ne font pas défaut aux pays sous-développés, d'ailleurs. La question est : avec quoi peuvent-ils acheter tout ce qui leur manque ? Et c'est là qu'on mesure immédiatement l'absurdité d'une telle analyse. Ces pays N'ONT RIEN pour payer leurs achats. Ils ne disposent d'absolument aucune ressource financière : en fait, il y a déjà longtemps qu'ils ont rejoint le lot des pays gravement endettés (ainsi la dette extérieure de l'ensemble des ex-démocraties populaires se montait en 89 à 100 milliards de dollars ([3]), soit un chiffre proche de celui du Brésil pour une population et un PNB également comparables). Pour qu'ils puissent acheter, il faudrait qu'ils puissent vendre. Mais que peuvent-ils vendre sur le marché mondial alors que la cause première de l'effondrement des régimes staliniens (dans le cadre, évidemment de la crise générale du capitalisme) est justement le manque complet de compétitivité sur ce même marché des économies qu'ils dirigeaient ?

A cette objection, certains secteurs de la bourgeoisie répon­dent qu'il faudrait un nouveau "Plan Marshall" qui permettrait de reconstituer le potentiel économique de ces pays. En réalité, même si l'économie des pays de l'Est comporte des points communs avec celle de l'ensemble de l'Europe au lendemain de la seconde guerre mondiale, un nouveau "Plan Marshall" est totalement impossible aujourd'hui. Ce plan (dont la vocation essentielle, d'ailleurs, n'était pas en soi de reconstruire l'Europe, mais de soustraire celle-ci à la menace d'un contrôle par l'URSS), a pu réussir dans la me­sure où le monde entier (à l'exception des Etats-Unis) était à reconstruire. A cette époque ne se posait pas un problème de surproduction généralisée de marchandises ; et c'est justement la fin de la reconstruction de l'Europe occidentale et du Japon qui se trouve à l'origine de la crise ouverte que nous connaissons depuis le milieu des années 60. C'est pour cela qu'aujourd'hui, une injection massive de capitaux vers les pays de l’Est visant à développer leur potentiel économique, et particulièrement industriel, ne peut être à l'ordre du jour. Même en supposant qu'on puisse remettre sur pieds un tel potentiel productif, les mar­chandises produites ne feraient qu'encombrer encore plus un marché mondial déjà sursaturé. Il en est des pays qui aujourd'hui sortent du stalinisme comme des pays sous-développés: toute la politique de crédits massifs injectés dans ces derniers au cours des années 70 et 80 n'a pu abou­tir qu'à la situation catastrophique que l'on connaît bien (une dette de 1400 milliards de dollars et des économies encore plus ravagées qu'auparavant). Les pays de l'Est (dont l'économie s'apparente d'ailleurs à celle des pays sous-développés par bien des côtés) ne peuvent connaître de sort différent. D'ailleurs, les financiers des grandes puis­sances occidentales ne s'y trompent pas : ils ne se bouscu­lent pas pour apporter des capitaux aux pays qui, comme la Pologne fraîchement "déstalinisée", les réclament à cors et à cris (il faudrait à ce pays au minimum 10 milliards de dol­lars en trois ans), y compris en leur envoyant l'"ouvrier" prix Nobel Walesa. Et comme ces responsables financiers sont tout sauf des philanthropes, il n'y aura ni crédits ni ventes massives des pays les plus développés en direction des pays qui viennent de "découvrir" les "vertus" du libéralisme et de la "Démocratie". La seule chose à laquelle on puisse s'attendre, c'est l'envoi de crédits ou d'aides d'urgence per­mettant à ces pays de s'éviter une banqueroute financière ouverte et des famines qui ne feraient encore qu'aggraver les convulsions qui les secouent. Et ce n'est pas cela qui pourra constituer un "ballon d'oxygène" pour l'économie mondiale.

Parmi les pays de l'ex-bloc de l'Est, la RDA constitue évi­demment un cas à part. En effet, ce pays n'est pas destiné à se maintenir comme tel. La perspective de son absorption par la RFA est d'ores et déjà admise, à contre-coeur, non seulement par l'ensemble des grandes puissances, mais y compris par son gouvernement actuel. Cependant, l'intégration économique, première étape de cette "réunifi­cation", et qui constitue le seul moyen de mettre fin à l'exode massif de la population de RDA vers la RFA, pose dès à présent des problèmes considérables, tant à ce dernier pays qu'à l'ensemble de ses partenaires occidentaux. Le "sauvetage" de l'économie d'Allemagne de l'Est constitue un fardeau énorme du point de vue financier. Si, d'un côté, les investissements qui ne manqueront pas d'être réalisés dans cette partie de l'Allemagne peuvent constituer un "débouché" momentané pour certains secteurs industriels de la RFA et de quelques autres pays d'Europe, de l'autre côté, ces investissements ne pourront qu'accentuer l'aggravation de l'endettement généralisé de l'économie capitaliste tout en contribuant à engorger encore plus le marché mondial. C'est pour cela que l'annonce récente de la création d'une union monétaire entre la RFA et la RDA, décision qui avait des motivations plus politiques qu'économiques (comme en témoignent les réticences du président de la Banque fédérale), n'a pas soulevé l'enthousiasme, loin de là, dans l'ensemble des pays occidentaux. En fait, la RDA constitue, sur le plan économique, un cadeau empoisonné pour la RFA. Dans la corbeille de mariage, l'Allemagne de l'Est n'apporte qu'une industrie délabrée, une économie essoufflée et poussive, une montagne de dettes et des wagons de marks-Est qui valent à peine le papier dont ils sont faits, mais que la RFA devra racheter au prix    fort     lorsque le Deutsch-Mark deviendra la monnaie commune aux deux parties de l’Allemagne. En RFA, la "planche à billets" a de beaux jours devant elle, l'inflation aussi.

Ainsi, ce que, fondamentalement, l'économie capitaliste peut attendre de l'effondrement du bloc de l'Est, ce n'est certainement pas une atténuation de sa crise mais des diffi­cultés accrues. D'une part, comme on l'a vu, la crise finan­cière (la montagne des dettes non solvables) ne peut que s'aggraver, mais, en outre, l'affaiblissement de la cohésion du bloc occidental et, à terme sa disparition (comme nous le verrons plus loin), portent avec eux la perspective d'un surcroît de difficultés pour l'économie mondiale. Comme nous l'avons mis en évidence depuis longtemps, une des raisons pour lesquelles le capitalisme a pu ralentir jusqu'à présent le rythme de son effondrement, c'est la mise en oeuvre d'une politique de capitalisme d'Etat à l'échelle de tout le bloc occidental (c'est-à-dire de la sphère dominante du monde capitaliste). Une telle politique supposait une discipline très sérieuse de la part des afférents pays qui composent ce bloc. Cette discipline était obtenue principalement grâce à l'autorité qu'exerçaient les Etats-Unis sur leurs alliés du fait de leur puissance économique mais aussi militaire. Le "parapluie militaire" des Etats-Unis face à la "menace soviétique" (de même, évidemment, que la place prépondérante de ce pays, et de sa monnaie, dans le système financier international) appelait, en contre­partie, une soumission aux volontés américaines dans le domaine économique. Aujourd'hui, avec la disparition de toute menace militaire de l'URSS sur les Etats du bloc occidental (notamment ceux d'Europe occidentale et le Japon), les moyens de pression des Etats-Unis sur leurs "alliés" se sont sensiblement réduits, et cela d'autant plus que l'économie américaine, avec ses énormes déficits et le recul continu de sa compétitivité sur le marché mondial, est en très nette perte de vitesse vis-à-vis de ses principaux concurrents. La tendance qui va donc s'affirmer de plus en plus est celle d'une tentative des économies les plus performantes, en premier lieu celles du Japon et de la RFA, de se dégager de la tutelle américaine pour jouer leur propre carte sur l'arène économique internationale, ce qui conduira à une accentuation de la guerre commerciale et à une aggravation de l'instabilité générale de l'économie capitaliste.

En fin de compte, il faut affirmer clairement que l'effondrement du bloc de l'Est et les convulsions écono­miques et politiques des pays qui le constituaient, n'augurent nullement une quelconque amélioration de la situation économique de la société capitaliste. La faillite économique des régimes staliniens, conséquence de la crise générale de l'économie mondiale, ne fait qu'annoncer et précéder l'effondrement des secteurs les plus développés de cette économie.

Les antagonismes impérialistes

La configuration géopolitique sur laquelle a vécu le monde depuis la seconde guerre mondiale est désormais complè­tement remise en cause par les événements qui se sont dé­roulés au cours de la seconde moitié de l’année 1989. Il n'existe plus aujourd'hui deux blocs impérialistes se parta­geant la mainmise sur la planète.

Le bloc de l'Est, c'est devenu une évidence (y compris pour les secteurs de la bourgeoisie qui, pendant des années avaient jeté des cris d'alarme contre le danger présenté par "l'Empire du Mal" et sa "formidable puissance militaire"), a cessé d'exister. Cette réalité a été confirmée par toute une série d'événements récents tels que :

- le soutien que les principaux dirigeants occidentaux (Bush, Thatcher, Mitterrand, notamment) apportent à Gor­batchev (soutien qui s'accompagne même d'éloges dithy­rambiques à son égard) ;

- les résultats des différentes rencontres au sommet ré­centes (Bush-Gorbatchev, Mitterrand-Gorbatchev, Kohl-Gorbatchev, etc.) qui tous font apparaître la réelle dispari­tion des antagonismes qui ont opposé pendant quatre dé­cennies l'Est et l'Ouest ;

- l'annonce par l'URSS du retrait de l'ensemble de ses troupes basées à l'étranger ;

- la réduction des dépenses militaires des Etats-Unis qui est planifiée dès à présent ;

- la décision conjointe de réduire rapidement à 195 000 les effectifs des armées soviétique et américaine basées en Europe centrale (essentiellement dans les deux Allemagnes), et qui correspond en fait à un retrait de 405 000 hommes pour l'URSS contre 90 000 pour les Etats-Unis ;

{C}- {C}l'attitude des principaux dirigeants occidentaux, lors des événements de Roumanie, demandant à l'URSS d'intervenir militairement pour apporter un soutien aux forces "démocratique" face aux résistances qu'elles rencon­traient de la part des derniers "fidèles" de Ceaucescu ;

{C}- {C}le soutien apporté par les mêmes à l'intervention des chars russes à Bakou, en janvier.

Dix ans après le tollé général provoqué dans les rangs des pays occidentaux par l'arrivée des mêmes chars à Kaboul, cette différence d'attitude est on ne peut plus significative du bouleversement complet de la géographie impérialiste de la planète. Ce bouleversement est d'ailleurs confirmé par la tenue, à Ottawa, début février, d'une conférence (co-présidée par le Canada et la Tchécoslovaquie) entre l'OTAN et le Pacte de Varsovie et au cours de laquelle l'URSS a accepté pratiquement toutes les exigences des occidentaux.

Cette disparition du bloc de l'Est signifie-t-elle que, désormais, le monde sera dominé par un seul bloc impérialiste ou que le capitalisme ne connaîtra plus d'affrontements impérialistes ? De telles hypothèses seraient tout à fait étrangères au marxisme.

Ainsi, la thèse du "super-impérialisme", développée par Kautsky avant la première guerre mondiale a été combattue autant par les révolutionnaires (notamment Lénine) que par les faits eux-mêmes. Elle est restée tout autant mensongère lorsqu'elle a été reprise et adaptée par les staliniens et les trotskystes pour affirmer que le bloc dominé par l'URSS n'était pas impérialiste. Aujourd'hui, l'effondrement de ce bloc ne saurait remettre en selle ce genre d'analyses : cet effondrement porte avec lui, à terme, celui du bloc occidental. De plus, ce ne sont pas seulement les grandes puissances à la tête des blocs qui sont impérialistes, contrairement à la thèse défendue par le CWO. Dans la période de décadence du capitalisme, TOUS les Etats sont impérialistes et prennent les dispositions pour assumer cette réalité : économie de guerre, armements, etc. C'est pour cela que l'aggravation des convulsions de l'économie mondiale ne pourra qu'attiser les déchirements entre ces différents Etats, y compris, et de plus en plus, sur le plan militaire. La différence avec la période qui vient de se terminer, c'est que ces déchirements et antagonismes qui auparavant   étaient  contenus et  utilisés par les   deux grands blocs impérialistes, vont maintenant passer au premier plan. La disparition du gendarme impérialiste russe, et celle qui va en découler pour le gendarme américain vis-à-vis de ses principaux "partenaires" d'hier, ouvrent la porte au déchaînement de toute une série de rivalités plus locales. Ces rivalités et affrontements ne peuvent pas, à l'heure actuelle, dégénérer en un conflit mondial (même en supposant que le prolétariat ne soit plus en mesure de s'y opposer). En revanche, du fait de la disparition de la discipline imposée par la présence des blocs, ces conflits risquent d'être plus violents et plus nombreux, en particulier, évidemment, dans les zones où le prolétariat est le plus faible.

Jusqu'à présent, dans la période de décadence, une telle si­tuation d'éparpillement des antagonismes impérialistes, d'absence d'un partage du monde (ou de ses zones déci­sives) entre deux blocs, ne s'est jamais prolongée. La dispa­rition des deux constellations impérialistes qui étaient sor­ties de la seconde guerre mondiale porte, avec elle, la ten­dance à la recomposition de deux nouveaux blocs. Cepen­dant, une telle situation n'est pas encore à l'ordre du jour du fait :

- de la permanence d'un certain nombre de structures is­sues de la configuration passée (par exemple, l'existence formelle des deux grandes alliances militaires, l'OTAN et le Pacte de Varsovie, avec le déploiement des dispositifs militaires qui y correspondent) ;

{C}- {C}de l'absence d'une grande puissance capable de prendre, dans l'immédiat, le rôle - perdu définitivement par l'URSS - de chef de file du bloc qui devrait faire face à celui qui serait dominé par les Etats-Unis.

Pour tenir ce rôle, un pays comme l'Allemagne, notamment après sa réunification, serait évidemment le mieux placé, du fait de sa puissance économique et de sa situation géogra­phique. C'est pour cette raison que, dès à présent, il existe une unité d'intérêts entre les pays occidentaux et l'URSS pour ralentir (ou tout au moins tenter de contrôler) le pro­cessus de cette réunification. Cependant, si, d'un côté, il faut constater l'affaiblissement considérable de la cohésion du bloc américain, affaiblissement qui ne fera que s'accentuer, il faut prendre garde également, comme on vient de le faire ressortir, de ne pas annoncer de façon prématurée la reconstitution d'un nouveau bloc dirigé par l'Allemagne. Sur le plan militaire, ce pays est loin d'être prêt à assumer un tel rôle. Du fait de sa situation de "vaincu" de la seconde guerre mondiale, la puissance de son armée est loin d'être à la hauteur de sa puissance économique. En particulier, la RFA n'a pas été autorisée, jusqu'à présent, à se doter de l'arme atomique, l'énorme quantité d'engins nucléaires qui se trouvent sur son sol étant entièrement contrôlée par l’Otan. En outre, et plus important encore à long terme, la tendance à un nouveau partage du monde entre deux blocs militaires est contrecarrée, et pourra peut-être même être définitivement compromise, par le phénomène de plus en plus profond et généralisé de décomposition de la société capitaliste tel que nous l'avons déjà mis en évidence (voir Revue Internationale n° 57).

Ce phénomène, qui s'est développé tout au long des années 1980, résulte de l'incapacité pour les deux classes fondamentales de la société à apporter leur propre réponse historique à la crise sans issue dans laquelle s'enfonce le mode de production capitaliste. Si la classe ouvrière, en refusant de se laisser embrigader derrière les drapeaux bourgeois, contrairement à ce qu'elle fit dans les années 30, a pu jusqu'à présent empêcher le capitalisme de déchaîner une troisième guerre mondiale, elle n'a pas, en revanche, trouvé la force d'affirmer clairement sa propre perspective : la révolution communiste. Dans une telle situation où la société se trouve momentanément "bloquée", privée de toute perspective, alors que la crise capitaliste ne cesse de s'aggraver, l'histoire ne s'arrête pas. Son "cours" se traduit par une putréfaction croissante de toute la vie sociale dont nous avons déjà analysé dans cette Revue les manifestations multiples : depuis le fléau de la drogue jusqu'à la corruption généralisée des hommes politiques, en passant par les menaces sur l'environnement, la multiplication de catastrophes dites "naturelles" ou "accidentelles", le développe­ment de la criminalité, du nihilisme et du désespoir des jeunes (le "no future"). Une des expressions de cette décomposition réside dans l'incapacité croissante de la classe bourgeoise à contrôler, non seulement la situation économique, mais aussi la situation politique. Un tel phéno­mène est évidemment particulièrement avancé dans les pays de la périphérie du capitalisme, ceux qui, pour être arrivés trop tard dans le développement industriel, ont été les premiers et les plus gravement frappés par la crise de ce système. Aujourd'hui, le chaos économique et politique qui se développe dans les pays de l'Est, la perte complète de contrôle de la situation par les bourgeoisies locales, constitue une nouvelle manifestation de ce phénomène général. Et la bourgeoisie la plus forte, c'est-à-dire celle des pays avancés d'Europe et d'Amérique du Nord, est elle-même consciente de ne pas être à l'abri de ce type de convulsions. C'est pour cela qu'elle apporte tout son soutien à Gorbatchev dans sa tentative de "remettre de l'ordre" dans son empire, même quand c'est fait de façon sanglante comme à Bakou. Elle a trop peur que le chaos qui est en train de se développer à l'Est ne franchisse, tel le nuage radioactif de Tchernobyl, les frontières et ne vienne se répercuter à l'Ouest.

A cet égard, l'évolution de la situation en Allemagne est si­gnificative. La rapidité incroyable avec laquelle se sont enchaînés les événements depuis l'automne dernier ne signifie nullement que la bourgeoisie soit saisie d'une frénésie de "démocratisation". En réalité, si la situation en RDA a cessé depuis longtemps de répondre à une quelconque politique délibérée de la bourgeoisie locale, il en est de même, de plus en plus, pour la bourgeoisie de RFA, et aussi pour î'ensemble de la bourgeoisie mondiale. La réunification des deux Allemagnes, dont aucun des "vainqueurs" de 1945 ne voulait il y a quelques semaines (il y a 3 mois, Gorbatchev l'envisageait pour "dans un siècle") de peur que la reconstitution d'une "Grande Allemagne" hégémonique en Europe n'aiguise ses appétits impérialistes, s'impose de plus en plus à tous comme le seul moyen de combattre le chaos en RDA, et par contagion, dans tous les pays voisins. Même la bourgeoisie d'Allemagne de l'Ouest trouve que les choses vont "trop vite". Dans les conditions où elle se présente, cette réunification, qui était pourtant appelée de ses voeux depuis des décennies, ne pourra lui apporter que des diffi­cultés. Mais plus elle retarde son moment, et plus ces diffi­cultés seront considérables. Que la bourgeoisie de RFA, une des plus solides du monde, en soit aujourd'hui réduite à courir après les événements en dit long sur ce qui attend l'ensemble de la classe bourgeoise.

Dans un tel contexte de perte de contrôle de la situation par la bourgeoisie mondiale, il n'est pas dit que les secteurs dominants de celle-ci soient aujourd'hui en mesure de mettre en oeuvre l'organisation et la discipline nécessaires à la reconstitution de blocs militaires. Une bourgeoisie qui ne maîtrise plus la politique de son propre pays est bien mal armée pour s'imposer à d'autres bourgeoisies (comme on vient de le voir avec l'effondrement du bloc de l'Est dont la cause première réside dans l'implosion économique et politique de sa puissance dominante).

C'est pour cela qu'il est fondamental de mettre en évidence que, si la solution du prolétariat -la révolution commu­niste - est la seule qui puisse s'opposer à la destruction de l'humanité (qui constitue la seule "réponse" que la bourgeoisie puisse apporter à sa crise), cette destruction ne résulterait pas nécessairement d'une troisième guerre mondiale. Elle pourrait également résulter de la poursuite, jusqu'à ses conséquences extrêmes (catastrophes écologiques, épidémies, famines, guerres locales déchaînées, etc.) de cette décomposition.

L'alternative historique "Socialisme où Barbarie", telle qu'elle a été mise en évidence par le marxisme, après s'être concrétisée sous la forme de "Socialisme ou Guerre impé­rialiste mondiale" au cours de la plus grande partie du 20e siècle, s'était précisée sous la forme terrifiante de "Socia­lisme ou Destruction de l'humanité" au cours des dernières décennies du fait du développement des armements atomiques. Aujourd'hui, après l'effondrement du bloc de l'Est, cette perspective reste tout à fait valable. Mais il convient de mettre en avant qu'une telle destruction peut provenir de la guerre impérialiste généralisée OU de la décomposition de la société.

Le recul de la conscience dans la classe ouvrière

Les "Thèses sur la crise économique et politique dans les pays de l'Est" (Revue Internationale 60) mettent en évidence que l'effondrement du bloc de l'Est et l'agonie du stalinisme vont se répercuter sur la conscience du proléta­riat par un recul de celle-ci. Les causes d'un tel recul sont analysées dans l'article "Des difficultés accrues pour le pro­létariat" (Ibid). On peut les résumer ainsi :

{C}-{C}au même titre que le surgissement, en 1980, d'un syndicat "indépendant" en Pologne, mais à une échelle beaucoup plus vaste, compte tenu de l'ampleur considérable des événements actuels, l'effondrement du bloc de l'Est et l'agonie du stalinisme vont permettre une poussée très importante des illusions démocratiques, non seulement au sein du prolétariat des pays de l'Est, mais également dans celui des pays occidentaux ;

{C}-{C}"le fait que cet événement historique considérable se soit produit indépendamment de la présence du prolétariat ne peut engendrer au sein de celui-ci qu'un sentiment d'impuissance" (Ibid) ;

{C}-{C}"dans la mesure ou l'effondrement du bloc de l'Est fait suite à une période de 'guerre froide’  avec le bloc de l'Ouest, où ce dernier apparaît comme le 'vainqueur', sans coup férir, d'une telle 'guerre', cela va engendrer dans les populations d'Occident, et aussi parmi les ouvriers, un sentiment d'euphorie et de confiance envers leurs gouvernements simi­laire (toutes proportions gardées) à celui qui avait pesé sur le prolétariat des pays 'vainqueurs' lors des deux guerres mondiales";

{C}-{C}la dislocation du bloc de l'Est ne peut qu'exacerber le poids du nationalisme, dans les républiques périphériques de l'URSS et dans les anciennes "Démocraties populaires", mais également dans un certain nombre de pays d'Occident et, en particulier, dans un pays aussi important que l'Allemagne du fait de la réunification des deux parties de ce pays ;

-"ces mystifications nationalistes vont peser également sur les ouvriers d'Occident... par le discrédit et l'altération que va subir dans leur conscience l'idée même d'internationalisme prolétarien..., notion dénaturée complètement par le stali­nisme, et dans sa foulée par l'ensemble des forces bour­geoises, qui l'ont identifié avec la domination impérialiste de l'URSS sur son bloc" ;

-"en fait,... c'est la perspective-même de la révolution communiste mondiale qui est affectée par l'effondrement du stalinisme (...) ; l'identification entre le communisme et le stalinisme avait permis, dans les années 1930, à la bourgeoisie d'embrigader la classe ouvrière derrière ce dernier afin de parachever sa défaite (...) ; au moment où le stalinisme est complètement déconsidéré aux yeux de tous les ouvriers, ce même mensonge lui sert pour les détourner de la perspective du communisme."

On peut compléter ces éléments en considérant l'évolution de ce qui reste des partis staliniens des pays occidentaux.

L'effondrement du bloc de l'Est implique, à terme, la dispa­rition des partis staliniens, non seulement dans les pays où ils dirigeaient l'Etat, mais aussi dans ceux où ils avaient pour fonction d'encadrer la classe ouvrière. Soit ces partis se transformeront radicalement - comme est en train de le faire le PC d'Italie - en abandonnant complètement ce qui faisait leur spécificité (y compris leur nom), soit ils seront réduits à l'état de petites sectes (comme c'est déjà le cas aux Etats-Unis et dans la plupart des pays d'Europe du Nord). Ils pourront encore intéresser les ethnologues, ou les archéologues, mais ne joueront plus aucun rôle sérieux comme organes d'encadrement et de sabotage des luttes ouvrières. La place qu'ils tenaient dans ce domaine, jusqu'à présent, dans un certain nombre de pays, sera prise par la social-démocratie ou par des secteurs de gauche de celle-ci. De ce fait, le prolétariat aura de moins en moins l'occasion, dans le développement de sa lutte, de s'affronter au stali­nisme, ce qui ne pourra que favoriser encore l'impact du mensonge qui identifie celui-ci au communisme.

Les perspectives pour la lutte de classe

Ainsi, l'effondrement du bloc de l'Est et la mort du stalinisme créent de nouvelles difficultés pour la prise de conscience dans le prolétariat. Est-ce à dire que ces événe­ments vont également déterminer un ralentissement sen­sible des combats de classe ? Sur ce point, il est nécessaire de rappeler que les "Thèses" parlent d'un "recul de la conscience" et non d'un recul de la combativité du proléta­riat. Elles précisent même que "les attaques incessantes et de plus en plus brutales que le capitalisme ne manquera pas d'asséner contre les ouvriers vont les contraindre à mener le combat", car il serait faux de considérer que le recul de la conscience s'accompagnera d'un recul de la combativité. En de nombreuses reprises, déjà, nous avons mis en évidence la non-identité entre conscience et combativité. Il n'y a donc pas lieu d'y revenir ici en tant que question générale. Dans le cas précis de la situation actuelle, il faut souligner que le présent recul de la conscience ne découle pas d'une défaite directe de la classe ouvrière suite à un combat qu'elle aurait engagé. C'est complètement en dehors d'elle et de ses luttes que se sont produits les événements qui, aujourd'hui, sè­ment le désarroi dans ses rangs. De ce fait, ce n'est pas la démoralisation qui pèse sur elle à l'heure actuelle. Si sa conscience est affectée, son potentiel de combativité, en re­vanche, n'est pas fondamentalement atteint. Et ce potentiel, avec les attaques de plus en plus brutales qui vont se dé­chaîner, peut se révéler à tout moment. Il importe donc de ne pas être surpris face aux explosions prévisibles de cette combativité.   Elles ne   pourraient   pas   être interprétées comme une remise en cause de notre analyse sur le recul de la conscience ni "oublier" que la responsabilité des révolu­tionnaires est d'intervenir en leur sein. .

En deuxième lieu, il serait faux d'établir une continuité dans l'évolution des luttes et de la conscience du prolétariat entre la période qui précède l'effondrement du bloc de l'Est et la période présente. Dans la période passée, le CCI a critiqué la tendance dominante, au sein du milieu politique prolétarien, à sous-estimer l'importance des luttes de la classe et des pas accomplis par celle-ci dans sa prise de conscience. La mise en évidence du recul actuel de cette prise de conscience ne signifie nullement une remise en cause de nos analyses pour la période passée, et notamment celles qui avaient été dégagées par le 8e Congrès du CCI (Revue Internationale n°59).

C'est vrai que l'année 1988 et la première moitié de 1989 ont été marquées par un certain nombre de difficultés dans le développement de la lutte et de la conscience de la classe, et notamment par un certain retour au premier plan des syndicats. Ce fait avait d'ailleurs été relevé dès avant le 8e congrès, notamment dans l’éditorial de la Revue Internationale n°58 qui notait que "cette stratégie (de la bourgeoisie) a réussi pour le moment à désorienter la classe ouvrière et à entraver sa marche vers l'unification de ses combats". Cependant, en s'appuyant sur les données de la situation internationale qui étaient celles de l'époque, notre analyse relevait les limites d'un tel moment de difficultés. En fait, les difficultés que rencontrait la classe ouvrière en 1988 et début 1989 se situaient sur un même plan (même si elles étaient plus sérieuses) que celles qu'elle avait pu rencontrer au cours de l'année 1985 (et relevées lors du 6e congrès du CCI : voir dans la Revue Internationale n° 44 la "Résolution sur la situation internationale" adoptée par ce congrès). Elles n'excluaient nullement la possibilité "de nouveaux surgissements massifs, de plus en plus déterminés et conscients de la lutte prolétarienne" (Revue Internationale n°58), de la même façon que le ralentissement de 1985 avait débouché en 1986 sur des mouvements aussi impor­tants et significatifs que les grèves massives du printemps en Belgique et la grève des chemins de fer en France. En revanche, les difficultés que rencontre le prolétariat aujourd'hui se situent à un tout autre niveau. L'effondrement du bloc de l'Est et du stalinisme est un événement historique considérable dont les répercutions sur tous les aspects de la situation mondiale sont-elles mêmes extrêmement importantes. Ainsi, cet événement ne saurait être placé, du point de vue de son impact sur la classe, sur le même plan que telle ou telle série de manoeuvres de la bourgeoisie comme on les a connues de­puis 20 ans, y compris la mise en avant de la carte de la gauche dans l'opposition, à la fin des années 1970.

En fait, c'est une autre période qui s'est ouverte au­jourd'hui, distincte de celle que nous avons vécue pendant 20 ans. Depuis 1968, en effet, le mouvement général de la classe, malgré certains moments de ralentissement ou de courts reculs, s'est développé dans le sens de luttes de plus en plus conscientes, se libérant notamment de façon crois­sante de l'emprise des syndicats. En revanche, les conditions mêmes dans lesquelles s'est effondré le bloc de l'Est, le fait que le stalinisme n'ait pas été abattu par la lutte de classe mais par une implosion interne, économique et politique, déterminent le développement d'un voile idéologique (indépendamment même des campagnes médiatiques qui se déchaînent aujourd'hui), d'un désarroi pour la classe sans commune mesure avec tout ce qu'elle avait dû affronter jusqu'à présent, y compris la défaite de 1981 en Pologne. En fait, il nous faut considérer que, même si l'effondrement du bloc de l'Est s'était produit au moment où les luttes du prolétariat étaient en plein essor (par exemple fin 1983-début 1984, ou en 1986), cela n'aurait changé strictement rien à la profondeur du recul que cet événement aurait provoqué dans la classe (même si ce recul aurait pu éventuellement tarder un peu plus à faire sentir ses effets).

C'est pour cette raison, en particulier, qu'il convient au­jourd'hui de mettre à jour l'analyse développée par le CCI sur la "gauche dans l'opposition". Cette carte était néces­saire à la bourgeoisie depuis la fin des années 1970 et tout au long des années 1980 du fait de la dynamique générale de la classe vers des combats de plus en plus déterminés et conscients, de son rejet croissant des mystifications démo­cratiques, électorales et syndicales. Les difficultés rencon­trées dans certain pays (par exemple la France) pour la mettre en place dans les meilleures conditions, ne retirait rien au fait qu'elle constituait l'axe central de la stratégie de la bourgeoisie contre la classe ouvrière, ce qui était illustré par la permanence de gouvernements de droite dans des pays aussi importants que les Etats-Unis, la RFA et la Grande-Bretagne. En revanche, le recul actuel de la classe n'impose plus à la bourgeoisie, pour un certain temps, l'utilisation prioritaire de cette stratégie. Cela ne veut pas dire que dans ces derniers pays on verra nécessairement la gauche retourner au gouvernement : nous avons, à plusieurs reprises (voir, en particulier, la Revue Internationale n° 18), mis en évidence qu'une telle formule n'est indispensable que dans les périodes révolutionnaires ou de guerre impé­rialiste. Par contre, il ne faudra pas être surpris s'il advient un tel événement, ou bien considérer qu'il s'agit d'un "acci­dent" ou l'expression d'une "faiblesse particulière" de la bourgeoisie de ces pays. La décomposition générale de la société se traduit pour la classe dominante par des difficul­tés accrues à maîtriser son jeu politique, mais nous n'en sommes pas au point où les bourgeoisies les plus fortes du monde pourraient laisser se dégarnir le terrain social face à une menace du prolétariat.

Ainsi, la situation mondiale, sur le plan de la lutte de classe, se présente avec des caractéristiques très sensiblement différentes de celles qui prévalaient avant l'effondrement du bloc de l'Est. Cependant, la mise en évidence de l'importance du recul présent de la conscience dans la classe ne saurait conduire à une remise en cause du cours historique tel qu'il a été analysé par le CCI depuis plus de 20 ans (même s'il convient de préciser cette notion comme on l'a vu plus haut).

En premier lieu, à l'heure actuelle, un cours vers la guerre mondiale est exclu du fait de l'inexistence de deux blocs impérialistes.

En second lieu, il importe de souligner les limites du recul actuel de la classe. En particulier, même si on peut com­parer la nature des mystifications démocratiques qui au­jourd'hui se renforcent dans le prolétariat avec celles qui se sont déchaînées au moment de la "Libération", il convient aussi de marquer les différences entre les deux situations. D'une part, ce sont les principaux pays industrialisés, et donc le coeur du prolétariat mondial, qui ont été directe­ment impliqués dans la seconde guerre mondiale. De ce fait, c'est également de façon directe que l'euphorie démo­cratique a pu peser sur ce prolétariat. En revanche, les sec­teurs de la classe qui se trouvent aujourd'hui en première ligne de ces mystifications, ceux des pays de l'Est, sont rela­tivement périphériques. C'est principalement à cause du "vent d'Est" qui souffle aujourd'hui, et non parce qu'il serait dans "l'oeil du cyclone", que le prolétariat de l'Ouest doit affronter ces difficultés. D'autre part, les mystifications dé­mocratiques du lendemain de la guerre ont trouvé un relais puissant dans la "prospérité" qui a accompagné la recons­truction. La croyance en la "Démocratie" comme le "meil­leur des mondes" a pu s'appuyer pendant deux décennies sur une amélioration réelle des conditions de vie de la classe dans les pays avancés et sur le sentiment que donnait le capitalisme d'avoir réussi à surmonter ses contradictions (sentiment qui a même pénétré certains groupes révolu­tionnaires). La situation est toute autre à l'heure actuelle où les bavardages bourgeois sur la "supériorité" du capitalisme "démocratique" vont se heurter aux faits têtus d'une crise économique insurmontable et de plus en plus profonde.

Ceci dit, il importe aussi de ne pas se laisser bercer et en­dormir par des illusions. Même si la guerre mondiale ne saurait, à l'heure actuelle, et peut-être de façon définitive, constituer une menace pour la vie de l'humanité, cette me­nace peut très bien provenir, comme on l'a vu, de la dé­composition de la société. Et cela d'autant plus que si le dé­chaînement de la guerre mondiale requiert l'adhésion du prolétariat aux idéaux de la bourgeoisie, phénomène qui n'est nullement à l'ordre du jour à l'heure actuelle pour ses bataillons décisifs, la décomposition n'a nul besoin d'une telle adhésion pour détruire l'humanité. En effet, la décom­position de la société ne constitue pas, à proprement parler, une "réponse" de la bourgeoisie à la crise ouverte de l'économie mondiale. En réalité, ce phénomène peut se dé­velopper justement parce que la classe dominante n'est pas en mesure, du fait du non embrigadement du prolétariat, d'apporter SA réponse spécifique à cette crise, la guerre mondiale et la mobilisation en vue de celle-ci. La classe ou­vrière, en développant ses luttes (comme elle l'a fait depuis la fin des années 1960), en ne se laissant pas embrigader derrière les drapeaux bourgeois, peut empêcher la bour­geoisie de déchaîner la guerre mondiale. En revanche, seul le renversement du capitalisme est en mesure de mettre fin à la décomposition de la société. De même qu'elles ne peu­vent en aucune façon s'opposer à l'effondrement écono­mique du capitalisme, les luttes du prolétariat dans ce sys­tème ne peuvent constituer un frein à sa décomposition.

En ce sens, si jusqu'à présent nous avions pu considérer que "le temps travaillait pour le prolétariat", que la lenteur du développement des combats de la classe permettait à celle-ci, de même qu'aux organisations révolutionnaires, de se re­constituer une expérience que la contre-révolution avait en­gloutie, cette analyse est devenue désormais caduque. Il ne "s'agit pas pour les révolutionnaires de s'impatienter et de 1 vouloir "forcer la main de l'histoire", mais ils doivent être conscients de la gravité croissante de la situation s'ils veu­illent être à la hauteur de leurs responsabilités.

C'est pour cela que, dans leur intervention, s'ils doivent mettre en évidence que la situation historique reste encore entre les mains du prolétariat, qu'il est tout à fait capable, /par et dans ses combats, de surmonter les obstacles que la bourgeoisie a semés sur son chemin, ils doivent également insister sur l'importance des enjeux de la situation présente, et donc de sa propre responsabilité.

Pour la classe ouvrière, la perspective actuelle est donc celle de la poursuite de ses combats en réponse aux attaques économiques croissantes. Ces luttes vont se dérouler, durant toute une période, dans un contexte poli­tique et idéologique difficile. C'est particulièrement vrai, évidemment, pour le prolétariat des pays où s'instaure aujourd'hui la "Démocratie". Dans ces pays, la classe ouvrière se retrouve dans une situation d'extrême faiblesse, comme le confirment, jour après jour, les événements qui s'y déroulent (incapacité d'exprimer la moindre revendica­tion indépendante de classe dans les différents "mouve­ments populaires", enrôlement dans des conflits nationalistes - notamment en URSS -, participation même à des grèves typiquement xénophobes contre telle ou telle mino­rité ethnique, comme récemment en Bulgarie). Ces événe­ments nous donnent un exemple de comment se présente une classe ouvrière prête à se laisser enrôler dans la guerre impérialiste.

Pour le prolétariat des pays occidentaux, la situation est, évidemment, très différente. Ce prolétariat est très loin de subir les mêmes difficultés que celui de l'Est. Le recul de sa conscience se traduira notamment par un retour en force des syndicats dont le travail sera facilité par l'accroissement des mystifications démocratiques et des illusions réfor­mistes : "le patronat peut payer", "partage des bénéfices", "intéressement à la croissance", mystifications facilitant l'identification par les ouvriers de leurs intérêts avec ceux du capital national.

En outre, la poursuite et l'aggravation du phénomène de pourrissement de la société capitaliste exerceront, encore plus qu'au cours des années 1980, ses effets nocifs sur la conscience de la classe. Par l'ambiance générale de déses­poir qui pèse sur toute la société, par la décomposition même de l'idéologie bourgeoise dont les émanations putrides viennent empoisonner l'atmosphère que respire le prolétariat, ce phénomène va constituer pour lui, jusqu'à la période prérévolutionnaire, une difficulté supplémentaire sur le chemin de sa prise de conscience.

Pour le prolétariat, il n'y a pas d'autre chemin que de reje­ter l'embrigadement interclassiste derrière la lutte contre certains aspects particuliers de la société capitaliste mori­bonde (l'écologie, par exemple). Le seul terrain sur lequel il peut à l'heure actuelle se mobiliser comme classe indépen­dante (et c'est une question encore plus cruciale au mo­ment du déferlement de la mystification démocratique qui ne connaît que des "citoyens", ou le "peuple") est celui où ses intérêts spécifiques ne peuvent être confondus avec les autres couches de la société et qui, plus globalement, dé­termine l'ensemble des autres aspects de la société : le ter­rain économique. Et c'est justement en ce sens que, comme nous l'avons affirmé depuis longtemps, la crise constitue "le meilleur allié du prolétariat". C'est l'aggravation de la crise qui va obliger celui-ci à se rassembler sur son terrain, à dé­velopper ses luttes qui constituent la condition du dépasse­ment des entraves actuelles à sa prise de conscience, qui va lui ouvrir les yeux sur les mensonges à propos de la "supé­riorité" du capitalisme, qui va le contraindre à perdre ses il­lusions sur la possibilité pour le capitalisme de se sortir de sa crise et donc sur ceux, les syndicats et les partis de gauche, qui veulent l'attacher à ï'"intérêt national" en lui parlant de "partage des profits" et autres foutaises.

Aujourd'hui, alors que la classe ouvrière se débat contre tous les rideaux de fumée que la bourgeoisie a réussi momentanément à jeter devant ses yeux, restent toujours va­lables les mots de Marx :

"Il ne s'agit pas de ce que tel ou tel prolétaire ou même le prolétariat entier se représente à un moment comme le but. Il s'agit de ce qu'est le prolétariat et de ce que, conformément à son être, il sera historiquement contraint défaire."

Il appartient aux révolutionnaires de contribuer pleinement à la prise de conscience dans la classe de ce but que lui assigne l'histoire afin qu'elle puisse enfin transformer en réa­lité la nécessité historique de la révolution qui n'a jamais été aussi pressante.

CCI, 10 février 1990.

{C}

{C}

{C}[1]{C} Ce texte est basé sur un rapport adopté par le CCI lors d'une réunion internationale tenue à la fin janvier 1990.

{C}[2]{C} La très faible résistance opposée par la presque totalité des anciens dirigeants des "Démocraties populaires", et qui a permis des "transitions en douceur" dans ces pays, n'exprime nullement le fait que ces dirigeants, de même que l'appareil des partis staliniens, auraient volontairement sacrifié leur pouvoir et leurs privilèges. En fait, ce phénomène illustre, outre la faillite économique totale de ces régimes, leur extrême fragilité politique, fragilité que nous avions signalée depuis longtemps mais qui s'est révélée bien plus considérable encore que tout ce qui avait pu être imaginé.

{C}[3]{C} Parmi ces pays, la Pologne et la Hongrie font figure de "champions" avec respectivement 40,6 et 20,1 milliards de dollars de dettes, soit 63,4 et 64,6% de leur PNB annuel. A côte d'eux, le Brésil, avec un endettement équivalent à "seulement" 39,2% de son PNB, apparaît comme un "bon élève".

 

 

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