Publié sur Courant Communiste International (https://fr.internationalism.org)

Accueil > Révolution Internationale - les années 2000 > Révolution Internationale - 2007 - n° 375 à 385 > Révolution Internationale n° 381 - juillet-août 2007

Révolution Internationale n° 381 - juillet-août 2007

  • 2777 lectures
 

Editorial : le gouvernement Sarkozy révèle la nature bourgeoise de la gauche

  • 2836 lectures

A peine investi, le gouvernement Fillon-Sarkozy démarre sur les chapeaux de roue et prouve aux travailleurs que son titre de « droite décomplexée » n'est pas une plaisanterie. En effet, le nouveau gouvernement n'a même pas attendu la fin des élections législatives pour mettre en chantier une série d'attaques lourdes : heures supplémentaires, obstacles à l'accès aux soins, hausse des impôts indirects, suppressions massives de postes dans la fonction publique (notamment entre dix et vingt mille chez les enseignants)... Bref, un avant-goût pour l'avenir qui traduit finalement en acte ce « changement de vie » tant annoncé par la classe politique française tout au long des campagnes électorales de 2007.

Contre la classe ouvrière...

« Travailler plus pour gagner plus » : l'annonce phare du candidat Sarkozy sera donc le premier coup de boutoir.

En effet, depuis le 6 juin, un texte préparant la défiscalisation des heures supplémentaires a été déposé pour être adopté cet été et appliqué dès le 1er octobre. Avec cette détaxation, les heures supplémentaires coûteront aux employeurs (privé/public) presque la même chose que des heures ordinaires. Il serait dommage de ne pas en profiter ! La porte est donc grande ouverte et le signal donné aux employeurs pour qu'ils utilisent au maximum le contingent de 220 heures supplémentaires autorisées par an. Les salariés seront vite contraints dans ces conditions aux dépassements horaires mais, « gracieuse compensation », pour « gagner plus »... quelques euros de plus ! Les ouvriers de l'usine Kronenbourg à Obernai, en grève début juin, ont bien compris de leur côté qu'il s'agissait en fait de «Travailler plus pour mourir plus vite ». Alors que la loi facilitant le recours aux heures supplémentaires n'est pas encore entrée en vigueur, les salariés de Kronenbourg enchaînent, depuis le mois de mai, les semaines de 50 heures et ont l'impression de « passer leur vie au boulot ». « Cela fait quatre semaines que j'arrête de travailler à 6 h du matin le dimanche et que je reprends lundi à 6 h », expliquait un salarié.

Cette politique de défiscalisation, visant à alléger les charges patronales a toutefois son revers : où l'Etat va-t-il puiser ses recettes ? Très simple, il suffit de pressurer davantage la classe ouvrière. C'est Jean-Louis Borloo qui (bien malgré lui) a lâché le morceau sur le plateau de TF1 au soir du 1er tour des législatives : « On va regarder l'ensemble des sujets, y compris l'éventualité de la TVA. » L'augmentation de l'impôt indirect sur la consommation impliquant, de facto, une baisse drastique du pouvoir d'achat des ménages.

Aussi, en matière de soins, l'instauration d'une nouvelle franchise d'ici l'automne prochain viendra accentuer la longue marche de démolition du système de santé mise en œuvre à tour de rôle par la droite et la gauche.

Ainsi, chaque année, lors de la première visite chez le médecin ou à l'hôpital, lors du premier examen en laboratoire ou du premier achat de médicament, le malade devra payer une franchise avant de prétendre à un remboursement par la Sécu.

L'objectif ici est sans équivoque, faire des remboursements médicaux un parcours du combattant tel que les malades finiront par renoncer tout simplement à se soigner. En effet, d'ores et déjà, les réformes en vigueur depuis 2004 (déremboursement de médicaments, franchise de 1 euro sur tout acte médical 1, augmentation du forfait hospitalier qui atteint aujourd'hui 18 euros par jour) amènent de plus en plus de personnes à retarder leurs soins ou à accumuler des dettes vis-à-vis de l'hôpital.

...droite et gauche, du pareil au même !

Et si la gauche avait gagné les élections, l'avenir n'aurait-il pas été plus radieux... ou moins âpre ? Loin s'en faut !

Pour s'en convaincre, il suffit de voir l'échafaudage du gouvernement en charge de toutes ces attaques. En effet, dans celui-ci, quelques têtes (et pas des moindres) de la gauche (politique et associative) côtoient fraternellement les figures de la droite sarkozyste. Illustration, on ne peut plus brillante, de la formule de campagne de Ségolène Royal, le « gagnant, gagnant » ! Ainsi, non contente d'avoir endigué la vague bleue redoutée au 1er tour des législatives, la gauche se paye le luxe de gagner des sièges... au sein même du gouvernement Fillon II.

Jusqu'à présent, gauche et droite se succédaient au pouvoir tout en assurant la continuité des attaques sur les grands dossiers (santé, retraite, emploi, etc.). Aujourd'hui, le « nouveau style » présidentiel veut que ces coups contre la classe ouvrière soient portés collégialement par un gouvernement de droite où le confrère de gauche a sa place : Kouchner (l'humanitaire sans frontières), Jouyet (l'intime de l'ex-couple Hollande/Royal), Hirsch (le petit frère des pauvres qui a vite compris que charité bien ordonnée commence par soi-même) jusqu'aux derniers entrants du maire PS de Mulhouse, Jean-Marie Bockel, à Fadela Amara (présidente de l'association « Ni Putes Ni Soumises », mais tout compte fait un peu « pute » quand même). La bourgeoisie avait pourtant insisté pour nous faire croire que la gauche et la droite « ce n'est pas blanc bonnet et bonnet blanc ». Une députée PS des Deux-Sèvres déclarait ainsi avant le 1er tour présidentiel que « la gauche et la droite, ce n'est pas la même chose... ce sont deux façons de voir le monde, deux façons de distribuer le fruit du travail ». Ben voyons !

Aussi, l'extrême gauche dans l'entre deux tour, sur le thème du "Tout Sauf Sarkozy", nous avait fait passer exactement le même message.

Tant d'efforts, d'acharnement idéologique et patatras... des élus de la gauche font leur « coming out » en embrassant goulûment Sarkozy.

Le PS peut toujours expliquer que ce ne sont là que des Judas, de vils traîtres qui ont vendu leur « idéal social » au diable pour un plat de lentilles . Il n'empêche que la greffe n'aurait jamais été possible sans une compatibilité certaine.

Sarkozy n'aura eu d'ailleurs que l'embarras du choix dans le grand magasin de la gauche. Encore aujourd'hui les dirigeants historiques, et parmi les plus influents du PS, les DSK, Fabius ou Jack Lang, donnent la patte et remuent la queue sur le péron de l'Elysée dans l'espoir d'être honorés de quelque poste clef (présidence du FMI) ou autres missions ministérielles.

Malek Boutih (ancien président de SOS Racisme et membre du PS) s'est lui aussi habilement positionné en tête de gondole en accueillant la nomination de Fadela Amara comme une « bonne nouvelle » ! « On ne peut pas, au nom des clivages politiciens, condamner les personnes. »

Mais de quel clivage parle-t-il ? S'agit-il de celui opposant une gauche « historiquement ancrée dans le social », « étrangère » et « ennemie héréditaire» d'une droite « attachée aux patronat »... franchement, la supercherie qui avait déjà bien du plomb dans l'aile, vole désormais aussi bien qu'une enclume.

La hâte de ces quelques élus socialistes ou associatifs de gauche à rejoindre le gouvernement Fillon, après avoir mené campagne (férocement) contre Sarkozy, de même que la récente déclaration de Ségolène Royal avouant n'avoir jamais cru au programme du PS qu'elle défendait (notamment sur le SMIC à 1500 euros) en dit long sur le genre de convictions qui animent ces vedettes de la gauche, prétendus défenseurs de la classe ouvrière et des pauvres.

Finalement, la seule chose dont ils sont convaincus, et dont nous devons nous convaincre, c'est de leur appartenance, corps et âme, à la classe exploiteuse.

Jude (28 juin)

 

1   Le directeur de la CNAM vient de présenter par ailleurs un plan de redressement des comptes de la Sécu prévoyant de réaliser 1,455 milliard d'euros d'économie. Ainsi, la Sécu ne remboursera plus qu'à 50% les actes médicaux délivrés à des patients ne passant pas par un médecin traitant référent et le forfait de 1 euro qui ne pouvait être prélevé que pour un seul acte par jour pourrait l'être jusqu'à 4 actes par jour dans la limite d'un plafond annuel de 50 euros.

Situations territoriales: 

  • Vie de la bourgeoisie en France [1]

Affrontements Hamas/Fatah : la bourgeoisie palestinienne est aussi sanguinaire que les autres

  • 4022 lectures

"Pour un Etat palestinien libre et autonome"... voici le mot d'ordre scandé depuis des décennies par tous les gauchistes de la planète. Dénonçant la politique barbare de l'Etat d'Israël et les conditions de vie inhumaines des populations de Gaza ou de Cisjordanie, leur "solution" a toujours été de souhaiter la création d'une vraie nation palestinienne, avec son Etat, son armée, sa bourgeoisie.

Les populations de cette région du monde sont effectivement en proie en permanence à la misère, à la répression violente et à la guerre. Mais, contrairement aux apparences, toutes les "bonnes intentions" avancées par les gauchistes, leurs larmes et leur cris humanistes ne font que justifier toujours plus d'horreur et de morts. La perspective d'un Etat palestinien autonome est une impasse. Pire, elle a toujours été un mythe servant à embrigader les populations palestiniennes dans des combats sanguinaires, utilisant leur colère et leur désespoir pour alimenter en chair à canon la boucherie impérialiste du Moyen-Orient.

Les combats inter-palestiniens de ces dernières semaines en sont une nouvelle preuve flagrante. La population est prise entre le feu de deux fractions corrompues et surarmées, censées construire ensemble ce bel "Etat autonome plus humain". La guerre qui fait rage entre le Hamas et le Fatah plonge en fait la population encore un peu plus dans la faim, la terreur et le chaos.

Territoires palestiniens : la construction du mythe nationaliste

Pourquoi qualifier le vœu d'un Etat autonome palestinien de mythe? Le processus de paix enclenché après la première Intifada de 1987 n'a-t-il pas prouvé le contraire ? En effet, à la fin des années 1980, des discussions officielles entre Israël et des représentants de la bourgeoisie palestinienne furent ouvertes. L'Organisation de Libération de la Palestine (OLP 1) fut reconnue "représentant du peuple palestinien" par l'Organisation des Nations Unies. Cette organisation palestinienne négocia ensuite les accords d'Oslo avec le gouvernement israélien de Yitzak Rabin, donnant naissance à l'Autorité palestinienne. Ayant proclamé en 1988 un Etat de Palestine, l'OLP va siéger à l'ONU en tant qu'observateur permanent. En 1996, l'OLP modifie même sa charte qui visait la destruction de l'Etat d'Israël. Mais en réalité, tout ce processus montre justement qu'il ne peut y avoir d'Etat palestinien autonome. Tous ces accords, toutes ces "avancées", ces "reconnaissances" se sont faites sous l'autorité américaine. Pendant ces années, l'Etat américain avait, en tant que super-puissance, les moyens de freiner les velléités impérialistes de tous les rapaces impliqués dans cette région du globe, y compris l'Etat d'Israël. Son intérêt était alors d'avoir sous sa coupe et sa domination une Palestine la plus calme possible.

Et c'est toujours pour défendre ses intérêts impérialistes qu'à la fin des années 1990, les Etats-Unis vont être contraints de changer de stratégie et de mener, aux côtés de la bourgeoisie israélienne, une politique toujours plus offensive en direction de la bourgeoisie palestinienne. Immédiatement, le « peuple » palestinien va se retrouver dans la misère et le désespoir.

La seconde Intifada, en 2000, mettra cruellement en lumière cet état de dénuement. Qui ne se souvient pas de ces gosses en haillons jetant des pierres aux chars israéliens ! Qui ne se souvient pas de ces populations parquées et assassinées dans des camps ! Il n'en fallait pas plus à l'Autorité palestinienne et à l'OLP pour déverser à flot son poison nationaliste comme aux gauchistes de tout poil pour crier de plus belle au droit des palestiniens à avoir un Etat bien à eux ! Ce langage nationaliste n'hésitait pas à cacher tous les scandales, escroqueries et assassinats auxquels se livraient les différentes fractions bourgeoises palestiniennes composant l'OLP, dont le Fatah et le Hamas.

Gaza : un concentré des tensions inter-impérialistes

Aujourd'hui, ce conflit entre le Hamas et le Fatah ne peut plus être caché. Il s'est transformé en une guerre totale où l'ennemi doit être exterminé. Et chacune de ces deux fractions bourgeoises s'est alliée à des puissances impérialistes étrangères. Voilà le vrai visage, celui du sang, de la guerre et des alliances impérialistes, des fractions bourgeoises de la Palestine que nos chers gauchistes voudraient nous faire soutenir !

Gaza est aujourd'hui aux mains du Hamas, et est rebaptisé le « Hamastan ». Cette fraction, créée en 1978 par le Cheikh Yassine, est de tendance sunnite. Sa branche militaire est connue sous le nom de Moudjahidin. On retrouve des camps d'entraînement de ses combattants au Liban, au Soudan et en Iran chiite. En apportant leur soutien, la Syrie et surtout l'Iran espèrent profiter de l'affaiblissement américain et avancer leurs pions.

Quant au Fatah, ce n'est pas un hasard si ses combattants armés ont pu fuir en Egypte ou en Jordanie. Dans les pays arabes, les communautés Chiites et Sunnites sont de plus en plus prêtes à l'affrontement. Des pays à majorité sunnite tels que l'Egypte, la Jordanie ou encore l'Arabie Saoudite sont particulièrement inquiets de la montée en puissance de l'Iran chiite. Ces nations s'empressent donc d'apporter leur soutien au gouvernement moribond de Mahamoud Abbas. Toute cette agitation n'a rien à voir avec un quelconque souci pour les populations palestiniennes de Gaza. En effet l'inquiétude est telle que l'Egypte vient de proposer l'idée d'un déploiement d'une force internationale à Gaza, qui pourrait se faire sans l'accord de la « Palestine » et d'Israël.

Tous ces requins impérialistes, du plus gros aux plus petits, se sont réunis ces derniers jours pour tenter d'enrayer le développement de ce chaos. A Charm el-Cheick, en Egypte, vient de se tenir un sommet réunissant MM Abbas et le chef du gouvernement israélien Olmert, le président égyptien Hosni Moubarak et le roi Abdallah de Jordanie. Tout ce beau monde se retrouve afin de voir comment soutenir les lambeaux restants du pouvoir du Fatah, notamment en Cisjordanie. M Olmert n'a pas hésité ce jour-là, afin d'aider au mieux le gouvernement de M Abbas, de proclamer la libération prochaine de 250 prisonniers du Fatah.

Le Moyen-Orient est au bord du gouffre

Le drame de Gaza est le révélateur que toute la région d'Asie du Sud-Ouest est au bord du gouffre. Dans cette région, il existe aujourd'hui quatre épicentres de conflits et de tensions : l'Irak, l'Iran, la Syrie, et le Liban, sans oublier le conflit israélo-palestinien. Tout en développant leur propre logique guerrière et barbare, ces conflits sont en train désormais de s'entremêler de telle manière qu'il est désormais impossible de séparer leur dynamique profonde. Quelques semaines avant la guerre interpalestiniene à Gaza, les affrontements entre l'armée libanaise et les milices armées du Fatah Al-Islam, probablement soutenues par la Syrie, dans le camp palestinien de Nahr El bared au nord du Liban, en furent une concrétisation sanglante. Et le Courrier International du 5 juin dernier dans une revue de la presse israélienne peut alors avancer froidement : « La presse israélienne commente l'opportunité de déclencher des opérations militaires contre Damas dès cet été et interpelle les responsables politiques afin de prendre une décision. ». Le chaos de Gaza ne peut que s'étendre dans tous les camps palestiniens, au Liban et en Cisjordanie. Le gouvernement palestinien de Mahmoud Abbas qui ne règne plus que sur quelques camps de Cisjordanie est appelé à s'affaiblir toujours plus. Et l'affrontement entre le Fatah et le Hamas, malgré les paroles apaisantes de ces derniers jours, va s'amplifier. La cause de la nation palestinienne n'a toujours été qu'une mystification aux mains des différentes fractions bourgeoises palestiniennes, pour entraîner le prolétariat et la population dans des boucheries qui ne les ont jamais concernés. Avec la guerre à outrance que se livrent maintenant sans retenue le Hamas et le Fatah, il apparaît clairement où mène une telle politique : à la barbarie et au néant.


Rossi (6 juillet)

 

1 L'OLP fut créée en 1964 et composée de plusieurs organisations dont le Fatah, le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) et le Front démocratique pour la libération de la Palestine (FDLP).

Géographique: 

  • Palestine [2]

Réchauffement climatique : il faut détruire le capitalisme avant qu'il ne détruise la planète (réunion publique à Bruxelles)

  • 3909 lectures

Après tout le battage autour du film documentaire d'Al Gore Une vérité qui dérange, après les sommets du GIEC de Paris à Bangkok, tous les grands de ce monde déclarent haut et fort leur volonté d'agir pour protéger l'environnement et assurer l'avenir des générations futures. Cependant, malgré les précédentes déclarations enflammées du sommet de la Terre à Rio (1992) ou les résolutions du Protocole de Kyoto (1998), c'est à vue d'œil qu'augmente la pollution et que les menaces liées à un dérèglement climatique s'amplifient.

Dans l'enchevêtrement de ces déclarations et campagnes mystificatrices, les causes réelles de ce phénomène dramatique sont habilement cachées et les questions sur les solutions possibles demeurent inlassablement sans réponse .

Pour stimuler le processus de réflexion sur les dangers et les racines du réchauffement climatique, le CCI a organisé différentes réunions publiques. Ce fut entre autres le cas à Bruxelles, le 17 mars dernier. Nous publions ci-dessous l'exposé introductif de cette réunion, ainsi que les grandes lignes du débat qui l'ont suivi.

L'exposé

C'est maintenant officiel: le rapport de l'ONU sur le climat nous dit qu'en ce moment des changements climatiques menaçants sont à l'œuvre et seront encore plus sensibles à l'avenir. La chose est certaine et nous pouvons nous attendre aux plus graves scénarios-catastrophes : disparition d'écosystèmes entiers, sécheresse et vagues de chaleur mortelles, tempêtes toujours plus fréquentes et intenses, apparition d'une migration d'un nouveau genre, les « réfugiés climatiques », etc.

Ces changements climatiques sont-ils dus à "l'Homme", à "l'humanité", comme nous le suggère le rapport de l'ONU ? Le journal De Morgen titre : "C'est presque certain : c'est notre faute", en se référant au rapport des Nations Unies où il est dit que "l'Homme" est presque certainement responsable du réchauffement de la terre à cause de l'utilisation des combustibles fossiles. "L'humanité" ? Un monstre d'égoïsme, incapable de penser aux générations suivantes ? Non, la cause du phénomène n'est pas "l'Homme" ou "l'humanité".

Alors, la cause des changements climatiques est-elle l'individu ? Nous utiliserions trop d'énergie, trop d'eau, nous roulerions trop en voiture. C'est ce que nous racontent toujours les médias. Serait-ce à chaque individu d'adapter son comportement de consommateur ou sa consommation d'énergie ? Mais dans la société actuelle, on ne peut choisir qu'entre une voiture polluante et une moins polluante, entre un moyen de chauffage polluant mais meilleur marché et des panneaux solaires, plus chers. Pourquoi travaillons-nous la nuit, à la lumière artificielle, au lieu de travailler de jour, à la lumière du soleil ? Non, la faute n'incombe pas plus aux individus.

La source du phénomène est-elle l'industrie ? En elle-même, l'industrie n'est pas quelque chose de mauvais. En effet, pour la première fois dans l'histoire, le développement des forces productives offre la possibilité de produire suffisamment pour tous. Grâce à l'industrie, les besoins de base de tous les hommes peuvent potentiellement être satisfaits.

La responsabilité des changements climatiques incombe à la société capitaliste, au système de production capitaliste. La véritable origine des changements climatiques n'est effectivement pas dans la "nature destructrice de l'homme", ou dans les "comportements consciemment ou inconsciemment polluants de l'individu", ou enfin dans l'appareil de production en tant que tel, mais dans la manière dont l'industrie, la science et la technique sont aujourd'hui utilisées et développées, donc dans le système de production actuel. Car si les techniques actuelles et les connaissances scientifiques nous permettent de limiter, voire d'éviter la catastrophe écologique, alors pourquoi la société capitaliste ne nous offre-t-elle pas cette possibilité ?

Pouvons-nous résoudre le problème du changement climatique au sein de la présente société capitaliste, des structures économiques, politiques et sociales actuelles ? L'Etat, ou une association d'Etats peuvent-ils résoudre le problème ? C'est la question suivante qu'il faut se poser. Est-ce que le capitalisme peut sauver l'humanité, par exemple au travers de ses structures politiques, de son Etat ? On peut légitimement en douter. Vera Dua, présidente de Groen!, écrivait en mars 2007 sur le site de ce groupe: "On émet à peine moins de CO2 qu'au début des années 1990. Alors qu'il est maintenant clair que dans la période d'après Kyoto, des efforts encore beaucoup plus importants devront être faits". C'est donc très clair : même la bourgeoisie concède que son protocole "révolutionnaire" de Kyoto n'apporte rien. Et que signifient concrètement ces "efforts beaucoup plus importants" ? Payer plus cher les sacs-poubelles, l'électricité et l'eau ? Céder une part du salaire de chacun "pour l'environnement" ? Les Etats du monde entier peuvent-ils s'unir par-dessus les frontières et former un bloc pour prévenir cette catastrophe ? Si les pourparlers entre Etats produisent des résultats au même rythme qu'au récent sommet européen sur le climat, c'est mal parti.

Au sens large, ce problème écologique en revient à poser la question de savoir si le capitalisme peut satisfaire les besoins humains, et donc aussi s'il est capable d'assurer à chacun un environnement sain. Si ce système d'exploitation existait pour satisfaire les besoins humains, on n'aurait pas en même temps une surproduction de nourriture et des famines, on utiliserait depuis longtemps des moyens de transport non polluants, et on développerait la science dans d'autres directions que la production d'armes.

La dernière question, peut-être la plus importante à laquelle il faudrait répondre, est : quelle alternative à la société capitaliste, qui semble être à l'origine de cette misère écologique ? Le débat est ouvert.

La discussion

Rapidement, la discussion a tourné autour de la question "Quelles sont alors les causes? La nature humaine ? L'individu ? Le capitalisme ?". Le deuxième rapport du GIEC désigne l'homme et l'individu consommateur comme un pollueur: "chacun participe à la problématique (voiture, sacs plastique, chauffage...)", c'est comme ça qu'il pose le problème. Mais tout est individualisé, bâti selon les règles de la concurrence mortelle, et n'a donc pas de solution individuelle, ont répondu les participants. Ce rapport n'apporte qu'un sentiment de culpabilité.

Différents intervenants ont essayé de montrer qu'effectivement, l'homme modifie son environnement, la nature, et que les modifications climatiques ne sont pas seulement un phénomène naturel, mais sont de plus en plus provoquées par l'activité humaine. Lorsque le système capitaliste est entré en décadence au début du vingtième siècle, les ravages sur le milieu naturel ont pris une autre dimension. Ils deviennent impitoyables, comme est impitoyable la lutte que se livrent entre eux les rats capitalistes pour se maintenir sur le marché mondial. Réduire les coûts de production au minimum pour être aussi concurrentiel que possible devient une règle incontournable pour survivre. Dans ce contexte, les mesures visant à endiguer la pollution industrielle deviennent naturellement un surcoût inacceptable. Le capitalisme ne s'est jamais beaucoup préoccupé du bien-être de la planète ou de l'humanité, mais avec sa faillite historique, c'est devenu beaucoup plus grave et le processus s'accélère. L'accumulation de capital est le but premier de la production capitaliste, et le sort imposé à l'humanité ou à l'environnement n'a aucune importance... : tant que ça rapporte, c'est bon. Le reste est finalement quantité négligeable, un détail sans importance.

Les campagnes idéologiques qui sont menées actuellement à grand bruit cherchent à empêcher la prise de conscience du fait que la logique capitaliste est l'unique responsable de ce réchauffement climatique. Plus fort, le problème est exploité pour exiger des sacrifices, non de la part de la bourgeoisie, mais de celle de la classe ouvrière. Sous différentes formes, des mesures d'austérité et des impôts "pour l'environnement" sont mis en œuvre par des moyens détournés (journée pull-overs, dimanches sans voiture, journée du vélo, taxe sur les vieilles voitures, sur les sacs plastique, sur le chauffage...). Mais ce n'est pas tout. La problématique est également utilisée dans la bataille concurrentielle avec d'autres pays. Ainsi, on essaye d'imposer des normes écologiques à la Chine pour protéger ses propres marchés.

La participation active au débat de la majorité des participants a fait qu'il ne restait plus de temps pour une discussion approfondie sur les alternatives et les solutions durables. Différents participants ont tout de même montré par de nombreux exemples que, déjà avec le niveau actuel de la science et de la technologie, beaucoup de choses sont possibles avec des conséquences beaucoup moins nuisibles. C'est ainsi entre autres qu'on a parlé de projets spectaculaires mis en oeuvre dans différentes parties du monde par un bureau d'architectes de New York. Mais la discussion a rapidement montré qu'aujourd'hui, de telles expériences ne voient le jour qu'à la condition de mener à un profit suffisant. Dans un certain nombre de cas, ces projets ne servent qu'à donner une image de "bonne volonté" pour pallier la mauvaise réputation d'entreprises polluantes (par exemple, Shell, Nike, Monsanto...). Mais cette discussion a révélé qu'implicitement, sur le plan scientifique et technologique, les jalons d'une autre manière de produire et de vivre sont présents. Les intervenants étaient d'accord que la seule entrave à la réalisation de cette alternative était celle du capitalisme et des lois du marché, pas les limites de la technologie ou de la science.

La plupart étaient d'accord sur la nature et la gravité des problèmes, et aussi avec l'analyse globale développée par le CCI. Et surtout, tous étaient d'accord que la création d'une société centrée sur l'homme et son avenir est devenue un besoin urgent.

D'après Internationalisme n°331, publication du CCI en Belgique

Vie du CCI: 

  • Réunions publiques [3]

CPE, réforme des universités,... dans les facs aussi, les syndicats sabotent la lutte

  • 3594 lectures

L'objectif du projet de réforme des universités ne fait pas mystère. Derrière l'hypocrite intitulé "développement de l'autonomie" et contrairement à ce qu'il prétend, l'Etat français veut réduire les dépenses et coupe encore un peu plus le robinet à l'enseignement supérieur. En se contentant de financer quelques pôles universitaires de haut rang, capables d'alimenter la recherche et les innovations industrielles, il condamne les autres à devenir de véritables "facs poubelles". En perspective, cette attaque contient évidemment aussi la hausse progressive des frais d'inscription : quitte à ce que les enfants d'ouvriers fassent des études qui ne débouchent sur rien, autant qu'elles leur coûtent un maximum.

Les syndicats étudiants ont tenté de saboter le mouvement anti-CPE...

Pour mieux faire passer cette attaque, l'Etat a pu une nouvelle fois compter sur ses chiens de garde, les syndicats... en l'occurence, les syndicats étudiants. Ces derniers ont parfaitement joué leur rôle, gonflant le torse devant le gouvernement Fillon juste ce qu'il faut pour être crédibles et focaliser l'attention sur une quantité d'alinéas sans importance de la loi (tel que le nombre de représentants étudiants aux Conseils d'administration). Mais le pire est sans conteste le fait qu'ils aient mené ce sale boulot en revendiquant la paternité du mouvement anti-CPE.

Parfois, les journalistes nous en racontent de bien bonnes. N'hésitant pas à ré-écrire l'histoire, les médias ont en effet présenté les jeunes bonzes syndicaux assis à la table des négociations gouvernementales comme les chefs légitimes du mouvement du printemps 2006. Bruno Julliard, président de l'Union Nationale des Etudiants de France (Unef, véritable marionnette du Parti socialiste) est ainsi élevé par ces plumitifs au rang de "leader [...] de la révolte anti-CPE", un « combattant » qui n'hésite pas à menacer Sarkozy en personne : "Le leader anti-CPE tient Sarkozy et sa réforme de l'université en ligne de mire"[1] [2].

Halte-là et bas les pattes ! Si une chose est sûre, c'est que la lutte contre le CPE n'appartient pas aux syndicats ! L'UNEF, la Confédération étudiante, la Fédération Syndicale Etudiante (FSE), tous n'ont eu de cesse, derrière leurs beaux discours, de mettre des bâtons dans les roues aux étudiants en lutte, d'endiguer l'extension du mouvement vers l'ensemble de la classe ouvrière.

Les plus grandes résistances à l'ouverture des assemblées générales aux travailleurs, aux retraités, aux chômeurs, sont venues explicitement des membres patentés du syndicat étudiant Unef. Lors d'une réunion de la coordination nationale le samedi 4 mars à l'université Jussieu à Paris, des militants du CCI se retrouvent parmi une trentaine d'ouvriers bloqués devant les portes de l'amphithéâtre. Les militants de l'UNEF refusent de nous laisser entrer sous prétexte de "protéger l'assemblée et de veiller à son bon déroulement". Un Rmiste, venu de Lyon tout spécialement pour témoigner sa solidarité, en reste sidéré. Il faudra que les étudiants se revendiquant "non syndiqués" affirment et ré-affirment pendant plus de deux heures à la tribune de l'AG leur volonté de nous laisser entrer (tout en venant nous informer régulièrement de l'état de la discussion) pour qu'enfin les portes s'ouvrent. Ce sabotage caractéristique de la part d'officines syndicales n'est pas une simple anecdote, un fait isolé. Au fur et à mesure du développement du mouvement, de plus en plus d'étudiants ont pris conscience du véritable rôle de l'Unef. Ainsi, scandé par des dizaines de jeunes, a retenti dans l'amphithéâtre de l'université de Tolbiac à Paris un message sans ambiguïté: "UNEF-MEDEF... UNEF-MEDEF !..."

... de façon organisée et consciente !

L'UNEF a transmis à toutes ses sections dès le début de la lutte une véritable recette pour le noyautage des AG et leur sabotage. Ce document édifiant intitulé "CPE : Fiche pratique de mobilisation" [3] a circulé entre les mains de centaines d'étudiants. En voici un petit extrait : "La tribune [...] est un outil technique important pour le bon déroulement de l'AG, il faut donc la maîtriser parfaitement. [...] Il faut donc absolument que l'UNEF y soit représentée et même majoritaire si possible. [...] Le président de séance : le mieux c'est que ce soit la personne de l'UNEF." Pourquoi vouloir à tout prix maîtriser la tribune ? Pour "le bon déroulement de l'AG" ? Pas du tout, puisqu'il s'agit en fait de "limiter dès le début le temps d'intervention pour tous et intercaler un mec UNEF et autres forces mais sans que cela soit visible" et toujours plus fort "il faut absolument un ou deux cadres qui soient chargés de gérer la salle, faire intervenir les camarades pour que l'UNEF ou des proches UNEF interviennent dans notre sens, aller parler aux gauchistes ou droitiers pour les occuper et minimiser leur prise de parole" (souligné par nous).

Ces méthodes crapuleuses pour accaparer le contrôle des AG sont à l'opposé de la nature réelle du mouvement anti-CPE, marqué par la volonté des étudiants de débattre, de façon ouverte et fraternelle, entre eux et avec toute la classe ouvrière. Ce travail de sape de l'UNEF avait pour but de limiter l'extension du mouvement, d'en faire un problème purement estudiantin, pour que surtout les ouvriers ne se joignent pas à la lutte. En voici une nouvelle preuve toujours tirée de la fameuse "Fiche pratique" : "Les AG doivent débattre du CPE et pas de toutes les réformes gouvernementales ou du bonheur sur la terre, il faut axer nos interventions sur ce qui touche les étudiants." (souligné par nous) Fort heureusement, les étudiants ne sont pas tombés dans le panneau et ont, au contraire, mis de plus en plus en avant les revendications communes à toute la classe ouvrière : le chômage, la paupérisation, etc.

Voilà le vrai visage de l'UNEF et de son président, celui que les journalistes ont hissé au titre de "leader de la révolte anti-CPE" !

La lutte contre le CPE a montré l'importance de voir derrière chaque attaque, la paupérisation générale de toute la classe ouvrière. La réforme actuelle des universités, si elle vise en particulier les jeunes générations, s'inscrit elle aussi dans le flot continuel d'attaques qui touchent toute la classe ouvrière. C'est cette vérité-là que les officines syndicales étudiantes, tout comme leurs grandes sœurs, tentent de cacher. Tout ce qu'ils ont dit ou fait durant ces négociations est un véritable bras d'honneur au mouvement de 2006.

Ne laissons pas ces chefs syndicaux récupérer frauduleusement une victoire de la classe ouvrière et de ses nouvelles générations ! Ne les laissons pas dénaturer les leçons vitales de cette lutte !

Pawel (2 juillet)

1.  20 Minutes du 22 juin 2007

2.  C'est tout un art des médias que d'imposer aux esprits ce genre d'icones toutes faites et d'idées tout aussi préfabriquées qui permettent de dénaturer le sens profond d'un mouvement. Julie Coudry par exemple, gauchiste et présidente de la Confédération étudiante (filiale de la CFDT), avait été sacrée l'an dernier "égérie de la contestation anti-CPE"... en toute simplicité.

3.  Ce texte a été reconnu très officiellement par le président de l'Unef dans Le Monde du 14 février 2007. En voici le contenu :

… Comment préparer une AG

ATTENTION : le nombre de personnes présentes à la 1ère AG dépend du nombre de personnes que vous aurez rappelé et donc de votre nombre de pétitions avec n° de tel. En gros si vous rappelez efficacement 1500 personnes vous aurez 150 personnes à l¹AG donc pas de précipitation une AG se prépare !

De même si vous avez plusieurs facs, n¹hésitez pas à centrer sur une seule pour après étendre le mouv¹ !
-Avoir fait une information massive sur le CPE, il faut donc faire campagne largement avant la tenue de l¹AG

La journée type où l¹on apparaît en tant qu¹UNEF, c¹est très important !
- Diff à 7h45
- Coller partout l¹affiche accompagnée d¹un bandeau local avec date de l¹AG
- Tenue de tables
- Interv en amphi avec diff massive à l¹entrée du tract (+ flyer AG) et circulation de pétition. C¹est ce qui permet de toucher le plus de monde et donc d¹avoir des AG massives
- Passage en cité U (porte à porte)
- Rappels + taper fichier tous les soirs à partir de 18h

Il faut en plus :
- Le week-end qui précède l¹AG : faire des rappels massifs : adhérents, contacts pétition

- LUNDI : organiser le Collectif d¹AGE avec les plus motivés que vous avez rencontrés. Ce collectif doit être : préparé (répartition des interv, préparer un point d¹analyse en amont), dynamique (plusieurs personnes doivent prendre la parole), efficace (prévoir un planning militant à l¹avance sur lequel les gens peuvent s¹inscrire) et concret (fixer avec les étudiants une date de 1ère AG d¹information).

- Le soir qui précède le jour de tenue d¹AG : envoyer un texto à tous les numéros de portables récoltés à programmer pour le lendemain matin 10h.

-La fac doit avoir un aspect de mouv¹ : affiche partout, banderolle, etc

-Le soir qui précède faire une réunion spéciale préparation de l¹AG avec les camarades pour se répartir les rôles, les interv¹, l¹ODJ (voir organisation de l¹AG) uniquement avec les cadres et cadres intermédiaires.
 

… Comment organiser une assemblée générale

Les différents éléments d¹une AG :
-la tribune
-l¹ordre du jour
- l¹assemblée en elle même
C¹est éléments ont une importance différentes en fonction des autres forces présentes. Ils varieront donc en fonction (gauchistes veulent être ou non à la tribune, autres mobilisation qui se font en parrallèle)

- la tribune :
La tribune sert à éviter que les AG soient trop bordéliques. Elle est un outil technique important pour le bon déroulement de l¹AG, il faut donc la maîtriser parfaitement. Sa fonction est d¹organiser les débats. Il faut donc absolument que l¹UNEF y soit représentée et même majoritaire si possible. Elle peut être composée de 3 personnes aux taches différentes :

* Le président de séance : le mieux c¹est que ce soit la personne de l¹UNEF.
Il lance le débat en introduisant les différents points à l¹ordre du jour et distribue la parole. Il doit gérer l¹AG ( énervement, confusion, enthousiasme, longueurs ) et rythmer le déroulement de celle ci. Sa fonction la plus difficile est d¹essayer tout au long de l¹AG de récapituler les
différents points de vue et de formuler des propositions. Quand cela est nécessaire il doit aussi faire passer aux votes sur des propositions claires.

Il est fondamental que cette personne sache s¹imposer, qu¹elle est un sens "politique " de la situation, qu¹elle sache où elle veut arriver à la fin de l¹AG, qu¹elle connaisse parfaitement la tête de toutes les autres forces,
qu¹elle soit assez intelligente pour gérer une liste d¹inscrits. (limiter dès le début le temps d¹interv¹ pour tous et intercaler un mec UNEF et autres forces mais sans que cela soit visible)

* Les 2 preneurs de notes : il faut mieux qu¹il y en ait un des deux qui soit de l¹UNEF Ils prennent en notes les débats propositions et décisions de l¹AG qui seront ensuite proposées par le président de séance

Pour aider, le camarade qui tient la présidence, il faut absolument un ou deux cadres qui soient chargés de gérer la salle, faire intervenir les camarades pour que l¹UNEF ou des proches UNEF interviennent dans notre sens, aller parler aux gauchistes ou droitiers pour les occuper et minimiser leur prise de parole, gérer tout événement perturbateur puisque celui qui est à la tribune ne peut pas le faire.

Il faut aussi un camarade qui soit en charge spécifiquement de faire passer une feuille de présence pour récupérer les coordonnées. Il ne doit pas quitter la feuille des yeux et la récupérer obligatoirement à la fin. Ces contacts sont la chose la plus précieuse de l¹AG.

- l¹ordre du jour
Afin que l¹AG soit bien organisée, il est utile de proposer un ordre du jour. Il faut toujours commencer par un point sur le projet CPE et ces conséquences pour les jeunes et les salariés (Cela permet que si de nouvelles personnes viennent à chaque AG elles soient informées et donc capables d¹en parler après autour d¹elle). Il faut toujours faire un point sur l¹état de la mobilisation (sur la fac et ailleurs) et le calendrier.

L¹ordre du jour doit être inscrit au tableau et les points rayés au fur et à mesure de leur traitement.

- l¹assemblée générale
Une assemblée est toujours longue. C¹est une chose que l¹on ne pratique pas souvent. Les débuts sont souvent chaotiques. C¹est pourquoi elle doit être organisée très en amont. Il faut se placer dans la salle non pas tous ensemble (bien au contraire) mais éparpillés dans l¹amphi pour discuter avec
les gens autour. Il faut avoir préparé des interventions des camarades en amont pour que l¹AG soit dynamique et que nos mots d¹ordre et rythmes passent dans l¹AG. Lorsque l¹on prend la parole il est important de s¹adresser avant tout à l¹AG et non pas à la tribune ce sont les étudiants
dans la salle qu¹il faut convaincre pas les autres forces.

Tous les documents d¹analyse doivent être présents à l¹AG

Attention , les gauchistes vont vouloir voter la grève le plus tôt possible. Lorsqu¹on vote la grève il faut pour voir l¹organiser, donc il faut que l¹AG soit massive. On ne vote pas la grève à 50 ni même à 300. Une prochaine fiche arrivera sur la gestion de la grève.

 

… Conseils pratiques pour organiser des commissions et des AG massives


Voici l¹ensemble des commissions qui peuvent être crées mais les deux plus importantes sont le comité de mobilisation et la presse. Dans l¹idéal la commission presse ne doit pas exister et c¹est l¹UNEF qui doit gérer cela mais si insistance bien mettre un mec de l¹UNEF dans cette
commission. Surtout ne jamais donner le fichier presse de l¹UNEF à qui que ce soit, seul le président ou le responsable presse doivent l¹avoir.

- Comité de mobilisation
Il coordonne les commissions et prépare les assemblées générales. Il peut notamment proposer un calendrier pour la semaine

-Commission Action
Elle propose au comité de mobillisation des actions (manifestations , occupations, évènements artistiquesŠ) qui seront ensuite votées par l¹AG, et les organise.

Cette commission s¹occupe donc de plusieurs groupes de travail :
- Confection de banderoles, pancartes, etc(confection)
- Commission chants / slogans
- Service d¹ordre et parcours des manifs
C¹est la commission dans laquelle s¹investissent le plus les gauchistes: il faut donc la blinder pour ne pas se retrouver avec des occupations.

- Commission Externe
Elle s¹occupe de diffuser l¹information à l¹extérieur de l¹université, et est donc divisée en sous groupes :
- Presse (plusieurs personnes peuvent s¹occuper d¹écrire les communiqués de presse qui doivent se terminer par le numéro du président d¹AGE, mais une seule doit être le référent auprès des journalistes)
- Lycées : organise l¹envoi de délégations dans les lycées pour y faire de l'information et appeler aux manifs, ce qui est essentiel car ce sont les lycéens qui permettent de rendre très massives les manifestations. Un tract spécifique doit être fait pour eux.

- Autres universités : envoi de délégations pour lancer la mobilisation dans les autres facs de la ville, quand c¹est nécessaire

- Commission interne
Elle gère l¹information et les actions à l¹intérieur de l¹université. Elle permet de centraliser toutes les informations et de les mettre à disposition
- Point information : Le point information doit être un point central de l¹université, vers lequel on renvoie tous les étudiants. Il met à disposition des étudiants : les tracts de l¹AG et des différentes organisations, les textes de loi, la revue de presse de la mobilisation. Il s'occupe de centraliser et d¹afficher les différents rendez-vous : comité d¹action, commissions, groupes de travail, actions et prochaine AG. Il peut organiser des amphis d¹informations

- Organisation des piquets de grève : lorsque les piquets de grève sont mis en place, un référent doit en permanence organiser la rotation sur les piquets. Des réunions avec les IATOS s¹occupant de la gestion des locaux et de la sécurité permettent de décider quelles portes sont fermées (par la fac ou par des tables et chaises) et quelles portes sont filtrées par les piquets de grève. Cette sous-commission peut également proposer à l¹AG une liste de filières qui ont le droit de faire cours (genre prépas concours)
- Caisse de mobilisation : Composée si possible d¹un militant de l¹UNEF et d¹un étudiant lambda (ce qui empêche que l'on accuse l¹UNEF de quoi que ce soit), elle s'occupe de récupérer de l¹argent pour la grève, et d'autoriser
les dépenses. Elle rend des comptes au comité de mobilisation


 

… Quelques conseils pratiques supplémentaires


- Si il y a d¹autres forces, l¹UNEF se met à disposition du mouvement et des étudiants quand elle estime que les revendications sont aussi les siennes.
Pas la peine d¹apparaître en tant qu¹UNEF absolument (autocollants), les étudiants savent que vous êtes à l¹UNEF. Par contre les militants de l¹UNEF doivent être toujours présents, faire des propositions.
- Les AG doivent débattre du CPE et pas de toutes les réformes gouvernementales ou du bonheur sur la terre, il faut axer nos interventions sur ce qui touche les étudiants
- Il faut donc voter des appels courts uniquement sur le CPE. S¹il y a d¹autres revendications, il faut les voter à part. L¹argument pour ne jamais élargir les mots d¹ordre c¹est de rester sur le plus petit dénominateur commun qui fait l¹unité de tous : le retrait du CPE.
- Les documents d¹analyse du CPE doivent être largement utilisés.
- Dans chaque ville universitaire, il faut qu¹il y ait un référent pour les étudiants mobilisés qui est à la tribune de l¹AG, c¹est le président de séance, celui qui va répondre à la presse..
- Dans les AG où des mobilisations sont votées où les étudiants sont très nombreux, il faut mettre en place des commissions (action, réflexion, extérieurŠ) qui préparent les AG.
- Si certains s'amusent à taper sur l¹UNEF, il faut en appeler à l'unité pour le retrait du CPE

 

… Exemple d¹appel court à faire voter quand une AG est très massive

" Nous, étudiants de XXXX, réunis en Assemblée Générale le XXXX, exigeons le retrait pur et simple du CPE
- Il permet de faire des jeunes un main d¹¦uvre corvéable et jetable en permettant que l¹employeur puisse licencier pendant deux ans sans motif quasiment sans préavis et sans indemnités les jeunes employés sous ce type de contrat
- Il empêche les jeunes de faire des projets d¹avenir (logement, naissance, prêt,...) et d¹organiser un parcours professionnel
- Il constitue un véritable cadeau aux grandes entreprises
- Il déréglemente entièrement le Code du Travail
- Il ne permettra pas de résoudre le chômage

Nous, étudiants de XXXX, refusons d¹être un main d¹oeuvre corvéable et jetables Nous exigeons le retrait pur et simple du CPE. En ce sens, nous appelons l¹ensemble de la communauté universitaire française et les salariés de ce pays à se mobiliser pour le retrait du Cpe et à participer aux actions allant dans ce sens "
+ rajouter appel à la manif ou autres AG en fonction

 

 

Géographique: 

  • France [4]

Récent et en cours: 

  • Mouvement étudiant [5]

Fête annuelle de Lutte Ouvrière : comment LO sabote l'unité de classe

  • 3928 lectures

Lors de sa traditionnelle fête de la Pentecôte à Presles, Lutte Ouvrière (LO) a, comme à son habitude, organisé deux types de débats : "forums politiques" et "forums d'entreprises".

La distinction n'est pas gratuite. Pour LO, il s'agit avant tout de séparer les discussions d'ordre " général " (conflits sociaux à l'étranger, histoire du mouvement ouvrier ou actualité politique...) confinées, soit dit en passant dans un espace ridiculement petit et confidentiel nommé " Cité politique ", des questions prétendument particulières à telle ou telle entreprise, disséminées en une multitude de forums aux quatre coins de la fête, consacrés exclusivement, tour à tour, à Alcatel, Peugeot-Citroën, la Sécurité sociale, etc.

Ainsi, lors d'un de ces " forum de boîte " intitulé "De Peugeot-Citroën à Renault, les travailleurs de l'automobile face aux suppressions de poste et aux pressions patronales", le CCI est intervenu pour mettre en avant la nécessité de briser l'enfermement corporatiste dans les luttes en s'appuyant sur le fait que, dans la plupart des secteurs, les ouvriers sont confrontés en même temps exactement aux mêmes attaques : à la fois aux suppressions massives d'emploi, à la question des salaires et à la détérioration des conditions de travail. Pour montrer qu'il n'était pas possible de s'en tenir au seul secteur de l'automobile, nous avons illustré nos propos par les exemples édifiants d'Airbus et d'Alcatel. Aussitôt, un militant de LO a rétorqué qu'il "ne fallait pas tout mélanger" et qu'ici c'était "un forum sur les problèmes de l'automobile" : "Si tu veux parler de l'aéronautique ou d'Alcatel, il y a d'autres forums prévus pour cela." Voilà bien une réaction caractéristique de la méthode et du rôle de LO ! Derrière des slogans comme "Tous ensemble !" et des phrases ronflantes dans sa presse ou ses discours sur "l'unité et la solidarité des travailleurs", dans sa pratique, LO n'a de cesse de morceler et diviser les ouvriers, cherchant à isoler, à enfermer, à engluer chacun d'eux dans les problèmes particuliers de "son" entreprise, de "son" secteur.

Mieux encore, au moment même où se tenait ce forum sur "l'automobile française", LO organisait séparément une autre discussion "sur la situation politique et sociale en Espagne" centré sur les suppressions d'emplois chez l'équipementier automobile Delphi à Puerto Real ! Cette lutte, sans conteste, concernait pourtant bien le secteur de l'automobile mais ce qui prévalait là, selon LO, c'était les "spécificités nationales". Rien à voir avec la France puisque, là-bas, de l'autre côté de la frontière, les attaques sont menées sous la houlette du gouvernement "socialiste" de Zapatero (sic !). LO met en avant cette "spécificité" dans le seul but de masquer ce que révèle à l'évidence la lutte des ouvriers de Delphi : droite ou gauche au pouvoir, ce sont les mêmes attaques qui pleuvent sur la classe ouvrière. Cette vérité toute nue est aujourd'hui fort gênante pour LO, faisant tomber l'alibi essentiel de son appel à voter pour la candidate socialiste Ségolène Royal : "faire barrage aux mesures de la droite sarkozyste"1. Quand le CCI est intervenu dans ce débat pour souligner l'unité du combat de la classe ouvrière, rappelant que dans cette région d'Espagne les ouvriers d'Airbus avaient commencé à se joindre à la lutte et à développer une solidarité ouvrière2, la seule réponse de LO a été que cette mobilisation n'avait servi à rien puisqu'elle n'avait pas suffi à empêcher les licenciements. C'est pourquoi LO prônait "une autre orientation politique" : il fallait plutôt "faire pression sur le gouvernement pour réclamer l'expropriation des employeurs qui licencient et demander l'ouverture et le contrôle des livres de compte de l'entreprise".

Quelle surprise ! On reconnaît là un des refrains favoris entonnés par LO tout au long de sa campagne électorale en France. Les recettes de LO pour saboter la solidarité ouvrière ne connaissent certes pas de frontières. Chaque fois que le prolétariat affirme et développe quelque part la solidarité dans ses luttes, LO s'y oppose toujours et partout plus ou moins directement sous prétexte que "ce n'est pas le lieu", ni le "bon moment", ni encore la "bonne stratégie". Cette organisation dévoile ainsi sa véritable nature et sa véritable fonction : diviser et saboter les luttes aux côtés des autres organes bourgeois chargés d'encadrer la classe ouvrière.

W (21 juin)

 

1  Rappelons en passant que le CCI se trouve interdit de stand depuis 1992 pour avoir osé brandir les Unes de LO appelant à voter Mitterrand en 1974 et en 1981.

2  Lire notre article "Fermeture de l'usine Delphi en Espagne : Nous ne serons forts que dans la lutte massive et solidaire" publié dans RI n°378 d'avril et disponible sur notre site Internet www.internationalism.org [6]


Courants politiques: 

  • Trotskysme [7]

Après les tentatives d'attentats de Londres, le Big Brother à la française

  • 2444 lectures

Trois tentatives d'attentats à la voiture piégée lors du dernier week-end du mois de juin, dans le centre de Londres et à Glasgow, suivi par l'interpellation éclair des poseurs de bombes, auront suffi pour exposer à la face du monde l'incroyable efficacité des services de police de Sa Majesté. Mais si Scotland Yard a pu remonter aussi vite la piste des coupables ce n'est pas grâce au flair ou à l'œil acéré de quelque Sherlock Holmes en puissance mais plutôt grâce aux milliers de caméras de vidéosurveillance high-tech qui scrutent, 24h sur 24, jusqu'au moindre recoin des plus insignifiantes ruelles de Londres.

De quoi faire pâlir d'envie, de l'autre côté de la Manche, une bourgeoisie française très en deçà des 4,2 millions de caméras du Big Brother anglais (soit une caméra pour 14 habitants).

Le réveil de la menace terroriste, via l'Angleterre, constitue donc pour la France une sérieuse aubaine afin de moderniser son dispositif policier. Avec 330 caméras dans ses rues « Paris n'est pas au niveau de Londres », forte (pour sa part) de 65 000 caméras ! Voilà donc la grande leçon que les médias français n'ont cessé de mettre en exergue, préparant par là le terrain justifiant une « remise à niveau ». Ainsi, d'après le nouveau préfet de Paris, Michel Gaudin, « La capitale doit de toute urgence rattraper son retard en matière de vidéosurveillance ».

Cependant, il n'est pas du tout évident de faire accepter à une population, surtout lorsqu'elle vit dans un des pays centraux du monde capitaliste, la surveillance quasi-permanente de ses moindres faits et gestes... l'illusion démocratique de vivre dans un monde libre en serait instantanément écornée. C'est pourquoi, si la France, sous couvert de lutte anti-terroriste, s'est dotée depuis 2005 d'un arsenal juridique offrant la possibilité d'implanter davantage de caméras, leur installation effective est plus délicate. Fort heureusement, au regard du glorieux succès de l'enquête menée par la police britannique, c'est en toute décontraction que le gouvernement français a pu faire l'annonce de la mise en place d'un « plan de grande ampleur de caméras en France », (déclaration du porte parole de Matignon, Laurent Wauquiez, le 4 juillet).

« Moins de liberté pour plus de sécurité»... la lutte contre le terrorisme est indéniablement le meilleur prétexte pour légitimer le flicage tous azimuts. Il faut dire qu'avec la bourgeoisie, la qualification de « terroriste » est aussi souple que vaste. Ainsi, tout ce qui bouscule ou remet un tant soit peu en cause l'ordre établi de son système est immédiatement associé au « terrorisme fanatique » ou au « grand banditisme ». Nous ne sommes pas dupes, il est clair que le but ultime de ces caméras omniprésentes est moins de déjouer d'éventuels attentats concoctés par des fous de Dieu que la surveillance de son ennemi mortel, la classe ouvrière. Le Figaro, en date du 4 juillet, nous en donne d'ailleurs un aperçu : « Sur certains sites, de simples webcams suffisent, pour visionner les foules ou les embouteillages. Mais pour l'identification judiciaire, il faut du matériel beaucoup plus performant. Lors du mouvement contre le CPE, la police a même expérimenté le renvoi des images par satellite considéré comme une solution d'avenir. »

Parce que la bourgeoisie sait que seule la classe laborieuse est une classe dangereuse pour la survie de son système d'exploitation, elle se fait un devoir de la surveiller avec autant d'attention qu'une casserole de lait sur le feu.

Azel (6 juillet)

 

Situations territoriales: 

  • Situation sociale en France [8]

Récent et en cours: 

  • Attentats [9]

Au Darfour, la guerre au nom de l'humanitaire

  • 3186 lectures

Depuis son indépendance en 1956, la population du Soudan n'a connu que la guerre et la misère. Mais à partir de 2003, une odeur de sang et de mort va se répandre au Darfour comme jamais auparavant. Cette province du Soudan, à peu près grande comme la France, ne compte que 200 kilomètres de route asphaltée, aucune infrastructure. On n'y trouve rien, si ce n'est du pétrole ! De fait, cette région n'est qu'un immense mouroir, livré aux pires atrocités. "L'histoire de cet homme qui a fui le village de Kurma, à 65 kilomètres d'El-Fasher, résume à elle seule, ce que veut dire la vie au Darfour ! En février 2004, des Janjawids, ces cavaliers armés, ont fondu sur ce village d'agriculteurs, brûlé les maisons, violé les femmes." (Courrier International du 24 juin). La presse bourgeoise déverse jusqu'à la nausée ces témoignages de massacres. Aucun être humain normalement constitué ne peut rester indifférent devant autant d'horreur. En quatre ans, il y aurait eu 200 000 morts et deux millions de déplacés. Plus de 230 000 d'entre eux auraient fui de l'autre côté de la frontière tchadienne, vivant dans des camps sans aucune ressource et en proie à la violence quotidienne de bandes armées sans foi ni loi.

Et, comme d'habitude, tous les vautours impérialistes participent frénétiquement à la curée, le plus répugnant étant sans nul doute les discours humanitaires déclamés sur un ton indigné par les "grands de ce monde" afin de justifier leur politique barbare. L'humanitaire est toujours le parfait alibi pour les campagnes guerrières.

Le Darfour, enjeu des rivalités impérialistes internationales

Même s'il en prend les apparences et que ces apparences sont amplifiées médiatiquement, même si c'est localement que la population souffre, le conflit au Darfour n'est pas en soi un événement local ou régional. Ce sont les intérêts impérialistes à l'échelle de la planète qui déterminent les enjeux de ce drame.

Depuis plus de 50 ans, le Tchad, l'Erythrée ou l'Ouganda, la France, Israël ou les Etats-Unis, tous se vautrent à tour de rôle ou simultanément dans des conflits qui ravagent le Soudan. Ce pays, proche de la péninsule arabique, borde les eaux de la mer Rouge et a pour pays frontalier l'Egypte. Sa position lui confère donc une importance géostratégique qui attise les convoitises impérialistes. Et aujourd'hui, ce qui déclenche une telle flambée guerrière est sans aucun doute l'arrivée d'un nouveau venu dans l'arène, la Chine. En effet, profitant de l'affaiblissement américain, suite au fiasco de la guerre en Irak, la Chine avance ses pions partout où elle le peut. La Chine ne peut pas encore rivaliser avec les plus grandes puissances pour se faire une place significative au Moyen-Orient. Elle est donc pour l'instant contrainte de se rabattre sur les zones de seconde importance, notamment en Afrique. Et sur ce continent, le Soudan est pour ce nouveau vautour impérialiste une cible stratégiquement primordiale. Il faut savoir que le Soudan possède les plus vastes ressources de pétrole inexploitées d'Afrique. L'exploitation de l'or noir y a débuté en 1960, mais ce n'est qu'en 1993 que la production a véritablement commencé. Actuellement, il y est produit près de 750 000 barils par jour. Toutes les grandes puissances de ce monde ont besoin de pétrole pour faire tourner leur économie. Mais surtout, aujourd'hui plus que jamais, le pétrole est une arme stratégique.

Pour chacune des grandes puissances, contrôler les zones d'approvisionnement en pétrole, c'est en priver directement les principaux adversaires, c'est affaiblir d'autant leur puissance guerrière et impérialiste. Pour la France ou les Etats-Unis notamment, ce qui ne peut pas être contrôlé doit tout simplement être détruit. Telles sont les raisons cachées du génocide en cours au Darfour.

Plus concrètement, la Chine protège aujourd'hui sans vergogne le régime soudanais d'Omar El-Béchir et les milices armées "janjawids", en place depuis 1989. C'est pourquoi, depuis 1997 et l'embargo décrété à l'égard du Soudan par les Etats-Unis pour cause de lutte contre le terrorisme, ce pays s'oppose à toute mesure de rétorsion à son égard. Il est de notoriété publique que la Chine fournit massivement des armes au régime de Khartoum. Le 10 mai dernier, Pékin promettait encore d'envoyer sur place 275 ingénieurs militaires. De l'autre côté, les Etats-Unis veulent mettre à mal le pouvoir soudanais, qu'ils ne peuvent pas contrôler, par une manœuvre claire qui consiste à soutenir militairement tous les mouvements armés qui s'opposent au régime d'El-Bachir. Quant à la France, déjà massivement implantée militairement aux alentours directs du Soudan par la présence de 1200 soldats au Tchad et des centaines d'hommes surarmés et suréquipés en République centrafricaine et au Gabon, il s'agit maintenant directement de tenter de renforcer son rôle et sa présence au Darfour, tout en tentant d'empêcher le chaos de s'étendre dans ses zones d'influence limitrophes.

L'hypocrisie des impérialismes français et américain

La cause humanitaire a toujours constitué un alibi de choix des puissances impérialistes pour justifier leurs interventions militaires et occulter les massacres qui s'en suivent.

Pour alimenter cette macabre mise en scène, la bourgeoisie a, d'ailleurs, toujours pu compter sur la participation active des guignols du « show-business ». Conscients ou non de leur rôle, marionnettes ou cyniques arrivistes, les acteurs, les chanteurs et autres bonnes âmes célèbres s'empressent toujours d'envahir les écrans de télévision pour pleurer sur le sort des populations et appeler à la réaction internationale. On se souvient des années 1980 marquées par l'engagement des artistes américains pour l'Afrique (le célèbre « USA for Africa ») auquel la France avait réagi avec orgueil en chantant quelques mois plus tard pour l'Ethiopie. Vingt ans après, on mesure le succès de ces opérations à l'aune de la misère et de la barbarie qui ont continué imperturbablement de ravager le continent.

Aujourd'hui, France et Etats-Unis se retrouvent ponctuellement ensemble dans un bras de fer diplomatique les opposant à la Chine afin de faire reconnaître officiellement à la communauté internationale l'existence d'un génocide au Darfour, reconnaissance qui offrirait à ces carnassiers un blanc-seing pour déployer leurs forces dans la région et participer à la boucherie générale.

Dans cette bataille, les Julien Clerc, Samuel Le Bihan et autres Brad Pitt prennent leur place en lâchant leurs larmes de crocodiles en même temps que leur supplique... « Save Darfour ! » Plus directement encore, l'actrice Angelina Jolie, ambassadrice du Haut Commissariat pour les Réfugiés à l'ONU (ce repaire de brigands impérialistes), en visite au Tchad, a reçu pour mandat d'« alerter l'opinion publique », suivie en cela de près par George Clooney, auteur du reportage Urgences Darfour. Dans ce dernier, l'acteur hollywoodien se montre très persuasif : « Qu'on ne s'y trompe pas, c'est le premier génocide du 21e siècle, et si l'on permet qu'il se poursuive ce ne sera pas le dernier ». D'où la nécessité d'envoyer les troupes... et le massacre de continuer.

Dans un cadre encore plus officiel, le ministre français des affaires étrangères, le très médiatique et narcissique Bernard Kouchner, commis voyageur de l'impérialisme tricolore, a entrepris sous couvert d'humanitaire (sa grande spécialité) un périple qui l'a conduit du Mali au Tchad pour terminer sa tournée à Khartoum afin d'y présenter officiellement ce qui a été baptisé "l'initiative française". Il est proposé, sous couvert de mise en place de corridors humanitaires au Darfour, d'envoyer au sein d'une force internationale, un contingent de soldats français qui assureraient ainsi de fait le maintien d'une forte présence de l'impérialisme français dans cette province soudanaise.

Dernier acte en date de cette répugnante comédie : la rencontre internationale à Paris du 25 juin. En effet, tous avaient à la bouche les belles déclarations d'intentions sur l'aide nécessaire aux peuples pour, en réalité, sous ce langage diplomatique, s'écharper et défendre bec et ongles leurs propres intérêts. Par conséquent, derrière le discours officiel de Kouchner nous déversant immédiatement après la réunion son auto-satisfaction accompagnée de son habituel poison humanitaire, il est clair qu'aucune position commune et de paix ne pouvait sortir de cette conférence. Au contraire ! Cette rencontre au sommet n'aura permis que d'exacerber encore un peu plus les tensions et les velléités guerrières, la France y réaffirmant particulièrement sa volonté renouvelée de s'engager militairement.

Il est parfaitement visible que personne n'est en mesure aujourd'hui de contrôler le Soudan. La période de domination sans partage de ce pays par des puissances extérieures, comme cela a pu exister par le passé, est totalement révolue. Dans cette région du monde, comme dans le reste de l'Afrique noire, la tendance inexorable est au développement de l'instabilité et du chaos. Ethiopie, Somalie, Zaïre, région des Grands Lacs, la liste s'égrène et les massacres deviennent permanents. Pour toutes les puissance impérialistes, y compris la Chine, la France ou les Etats-Unis, la seule politique durable en Afrique est celle de la terre brûlée, des puits de pétrole en feu, de la destruction et de la barbarie.

Tino (26 juin)

 

Géographique: 

  • Afrique [10]

Etats-Unis / Russie : la course aux armements s'intensifie

  • 3604 lectures

Les projets du gouvernement américain de mettre en place un système de défense anti-missiles en Pologne et une base de radars en République tchèque ont relancé récemment un climat d'hostilité entre les Etats-Unis et la Russie. Ainsi, le président russe avait pu déclarer à la veille du G8 en Allemagne début juin : «Si le potentiel nucléaire américain s'étend sur le territoire européen, nous devrons nous donner de nouvelles cibles en Europe.» Les petites phrases ont alors fusé, Bush critiquant l'état des libertés en Russie et Poutine comparant l'Amérique au «3e Reich».

Evidemment, le souvenir de la Guerre froide est revenu dans toutes les têtes, cette période où les ex-blocs de l'Ouest et de l'Est se tenaient prêts à en découdre à coups de bombes nucléaires. La menace de la destruction de régions, voire de pays entiers, sans compter toutes les conséquences "collatérales" et secondaires à de tels événements, étaient alors une réelle éventualité. La course aux armements, qui faisait rage entre les deux superpuissances de l'époque, était justifiée au nom d'un "équilibre de la terreur", prétendue "garantie de la paix", alors qu'en fait une véritable épée de Damoclès était suspendue au-dessus de l'humanité.

Mais avec l'effondrement du bloc de l'Est en 1989, puis de l'URSS l'année suivante, la situation change : le bloc américain se délite et la Russie revoit brutalement à la baisse ses prétentions impérialistes. La bourgeoisie en profite alors pour nous débiter de grandes phrases sur l'avènement d'un "nouvel ordre mondial", de "paix". Ces déclarations mensongères feront long feu, la "nouvelle période" s'ouvrant très symboliquement dès 1991 par... la guerre du Golfe. Toute la période des années 1990, puis des années 2000, sera marquée en effet par une aggravation et une explosion des tensions guerrières sur des zones de plus en plus larges du globe, sans espoir d'amélioration. De nouvelles puissances nucléaires apparaissent comme le Pakistan, l'Iran et la Corée du Nord, tandis que d'autres, comme la Chine et l'Inde, renforcent leurs capacités destructrices. N'étant plus bridés par la discipline de bloc, les appétits impérialistes se révèlent partout, le "chacun pour soi" devient la règle. La remise en cause des prétentions des Etats-Unis à rester le gendarme du monde s'est donc généralisée sur tous les continents.

Aussi, il est évident que la course aux armes de destruction massive ne s'est pas ralentie mais s'est accélérée et que le monde capitaliste de l'après-1989 est devenu plus dangereux que jamais. Les Etats-Unis n'ont pas cessé de moderniser et sophistiquer leur armement, sous prétexte de se "défendre" contre les éventuelles attaques des Etats-voyous. Ainsi, la justification officielle du projet de défense anti-missile est la prétendue menace que font peser sur les Etats-Unis les missiles à longue portée de l'Iran et de la Corée du Nord. Il est clair qu'il s'agit d'un faux prétexte car ces deux pays n'ont aucunement la capacité de mettre en danger Washington. Ce bouclier est de toute évidence bien plus destiné à asseoir les positions stratégiques américaines sur l'Europe et à tenir en respect en particulier la Chine et la Russie. Les États-Unis poussent ainsi à sa mise en œuvre aujourd'hui, alors que Moscou s'est engagé dans une modernisation de sa capacité nucléaire qui doit lui permettre d'ici à 2015 de disposer des moyens offensifs et défensifs nécessaires pour contrecarrer une éventuelle attaque aérospatiale.

Face à cette montée des tensions américano-russes, l'Europe réagit évidemment non pas de façon unie, mais en ordre dispersé, chaque pays défendant ses propres intérêts. D'importantes frictions sont apparues en effet au sein de l'Union européenne, la Grande-Bretagne soutenant pleinement le projet américain, la France essayant mollement de s'y opposer, tandis que l'Allemagne, qui n'y adhère pas, joue la carte de l'apaisement.

Malgré le "happy end" médiatique de juillet entre les deux présidents russe et américain réunis au ranch de Bush, toutes les conditions sont réunies pour une nouvelle phase de la course aux armements nucléaires et d'accélération des tensions impérialistes, avec tous les risques d'escalade et de dérapage qui les accompagnent.

C'est la seule perspective qu'offrent les dirigeants de la planète et leur système capitaliste décomposé.

Mulan (5 juillet)

 

Géographique: 

  • Etats-Unis [11]
  • Russie, Caucase, Asie Centrale [12]

Salut à la création d'un noyau du CCI au Brésil !

  • 2815 lectures

Nous informons nos lecteurs de la création d'un noyau du CCI au Brésil. C'est pour nous un événement de grande importance qui vient concrétiser le développement de la présence politique de notre organisation dans le premier pays d'Amérique latine, avec les plus grosses concentrations industrielles de cette région du monde et qui comptent aussi parmi les plus importantes à l'échelle mondiale..Il existe également dans ce pays un milieu d'éléments attirés par les positions révolutionnaires, de même que des groupes politiques prolétariens. Parmi ceux-ci, nous avons déjà signalé dans notre presse et sur notre site en portugais l'existence de l'Opposition Ouvrière (OPOP) à propos des évènements suivants : tenue de réunions publiques communes et réalisation en commun d'une prise de position sur la situation sociale ; publication, sur notre site en langue portugaise du compte-rendu d'un débat entre nos deux organisations sur le matérialisme historique ; publication sur notre site de certains textes de OPOP que nous jugeons particulièrement intéressants. Expression de cet intérêt réciproque entre nos organisations, OPOP a aussi participé, en tant que groupe invité, aux travaux du XVIIe congrès de notre section en France et à ceux de notre XVIIe congrès international.

Existe aussi dans l'Etat de São Paulo un groupe en constitution, influencé par les positions de la Gauche communiste, avec lequel nous avons établi plus récemment des relations politiques régulières, dont la tenue de réunions publiques en commun.

Nous espérons évidemment que la collaboration avec ces groupes sera de plus en plus étroite et fructueuse, perspective qui n'est nullement contradictoire avec notre volonté de développer spécifiquement la présence politique du CCI au Brésil. Bien au contraire, notre présence permanente dans ce pays permettra que se renforce encore la collaboration entre nos organisations, d'autant plus qu'entre notre noyau et OPOP existe déjà une longue histoire commune, faite de confiance et de respect mutuels.

La création de notre noyau est la concrétisation d'un travail engagé par le CCI de façon ponctuelle, il y a plus de 15 ans et qui s'est intensifié ces dernières années à travers la prise de contact avec différents groupes et éléments, la tenue de réunions publiques dans différentes villes, dont certaines dans des universités ayant suscité un grand intérêt de la part d'une assistance nombreuse. Il ne s'agit évidemment pas pour nous d'un aboutissement mais d'une étape significative dans le développement de la présence des positions de la Gauche communiste sur le continent sud-américain. Loin de constituer une exception brésilienne, cet événement fait partie du même phénomène d'apparition de groupes partout dans le monde et qui est le produit, dans une dynamique de reprise des combats de classe à l'échelle internationale, de la tendance de la classe ouvrière à sécréter des minorités révolutionnaires.

CCI (Juin 2007)


 

Géographique: 

  • Amérique Centrale et du Sud [13]

Conscience et organisation: 

  • Courant Communiste International [14]

Juillet 1917 en Russie : face aux manoeuvres de la bourgeoisie, le rôle vital du Parti bolchevique

  • 3046 lectures

Les évènements de juillet 1917 à Petrograd, connus sous le nom de « journées de juillet », constituent un des épisodes les plus importants de la Révolution russe. Dans une situation de bouillonnement particulièrement intense dans les rangs des ouvriers et des soldats qui poussaient à l'insurrection contre le Gouvernement provisoire, le Parti bolchevique sut éviter une confrontation prématurée contre les forces de la bourgeoisie. En effet, à ce moment du processus révolutionnaire, toute tentative de prise du pouvoir ne pouvait qu'aboutir à une tragique défaite et à l'échec de la révolution. Les leçons de ces évènements sont exemplaires et restent vitales pour le prolétariat d'aujourd'hui.

L'insurrection de février 1917 à Petrograd, alors capitale de la Russie, menée spontanément par les ouvriers rejoints rapidement par les soldats, avait conduit au renversement du tsarisme et à la constitution d'un Gouvernement provisoire. Mais une situation de double pouvoir s'était alors instaurée : d'un côté la classe ouvrière, organisée dans les soviets, des délégués des ouvriers, des soldats et des paysans pauvres, dont le plus important et le plus prolétarien était celui de Petrograd, et de l'autre la bourgeoisie, représentée par le Gouvernement provisoire et soutenue par les « conciliateurs » mencheviks et socialistes-révolutionnaires, majoritaires dans le Comité exécutif du Soviet de Petrograd. Plus la révolution se développait et plus cette situation devenait intenable.

La montée de la révolution

La classe ouvrière était pleine d'illusions sur les capacités des démagogues mencheviks et socialistes-révolutionnaires à répondre à leurs revendications principales : la paix, la journée de 8 heures, le problème agraire, etc. Mais au fil du temps, surtout à Petrograd puis à Moscou, l'exaspération des masses grandissait devant l'irrésolution et les atermoiements du Comité exécutif du Soviet et leur confiance dans ce dernier s'émoussait du fait du soutien toujours plus ouvert des conciliateurs au sein du Soviet à l'égard du Gouvernement provisoire. Il devenait de plus en plus clair que le Comité exécutif agissait comme un rempart en faveur des objectifs du Gouvernement provisoire, c'est-à-dire d'abord et avant tout pour le rétablissement de l'ordre au front comme à l'arrière afin de pouvoir continuer la guerre. A travers ses bastions les plus radicaux, la classe ouvrière commençait à sentir confusément qu'elle était dupée et trahie par ceux-là même en qui elle avait placé sa confiance pour diriger les conseils.

La radicalisation des ouvriers, leur souci grandissant de comprendre ce qui était en jeu, s'étaient une nouvelle fois exprimés à la mi-avril, suite à une note provocatrice du ministre libéral Milioukov réaffirmant la volonté de la Russie de continuer la guerre. Déjà exaspérés par toutes sortes de privations, les soldats et les ouvriers répondirent immédiatement par des manifestations spontanées et des assemblées massives dans les quartiers et les usines. Le 20 avril, une manifestation monstre poussa Milioukov à la démission. La bourgeoisie fut obligée de reculer momentanément dans ses plans de guerre. Les bolcheviks furent très actifs dans ce soulèvement prolétarien et ils gagnèrent en influence sur les ouvriers. La radicalisation du prolétariat s'était ainsi forgée autour du mot d'ordre mis en avant par Lénine dans ses "Thèses d'avril" : "Tout le pouvoir aux soviets !" Durant le mois de mai, ce slogan inspirera de plus en plus d'ouvriers, tandis que le Parti bolchevique était de plus en plus considéré comme le seul parti aux côtés de la classe ouvrière. Partout en Russie, le ferment révolutionnaire s'exprimait dans un développement frénétique de soviets d'ouvriers et de paysans et les agitateurs bolcheviques connaissaient un succès grandissant. A Petrograd, si le Parti bolchevique avait moins d'un tiers des voix dans la section ouvrière du Soviet de Petrograd en avril, bien que les comités d'usine aient été déjà dominés dans la même période par les bolcheviks, cette proportion atteignit de façon significative les deux-tiers au début juillet.

En juin, l'agitation politique continua, de même que l'ascension irrésistible du bolchevisme. Celle-ci devint évidente lors de la manifestation géante du 18. Initialement appelée par les mencheviks, les socialistes-révolutionnaires et le Comité exécutif du Soviet pour soutenir le Gouvernement provisoire, qui venait de lancer une nouvelle offensive militaire "décisive", elle se retourna directement contre les conciliateurs... Lors de cette manifestation du dimanche 18 juin, la tension était telle que les bolcheviks avaient dû faire tous leurs efforts pour qu'elle reste pacifique et ne soit pas armée. Aussi, lorsque les conciliateurs installés dans leur tribune virent passer les manifestants, ils purent prendre la mesure de leur échec car l'immense majorité des quatre à cinq cent mille manifestants, loin de saluer la nouvelle offensive militaire et la coalition gouvernementale ou de reprendre les slogans officiels, scandaient les mots d'ordre bolcheviques : "A bas les dix ministres capitalistes ! A bas l'offensive ! Tout le pouvoir aux soviets ! Ni paix séparée avec les Allemands, ni traités secrets avec les capitalistes franco-anglais ! Le droit de vivre est au-dessus du droit de propriété ! Paix aux chaumières, guerre aux châteaux !" (Cité dans La révolution russe de Marcel Liebman)

Maxime Gorki, bien qu'à l'époque opposé à Lénine, notait ainsi que "la manifestation de dimanche a dévoilé le complet triomphe du bolchevisme dans le prolétariat pétersbourgeois". (Ibid.)

Les bolcheviks évitent le piège d'une confrontation prématurée

L'effervescence révolutionnaire ne cessait de grandir. Les ouvriers de l'usine Poutilov1 et des autres districts de Petrograd étaient en grève quasi-permanente. Les soldats des casernes de Petrograd, particulièrement chez les mitrailleurs, votaient des résolutions contre l'envoi d'unités au front. Il était de plus en plus patent et connu dans la capitale que l'offensive militaire déclenchée le 18 juin était un véritable échec. Devant les fraternisations toujours plus fréquentes entre soldats allemands et russes et devant la déroute, les chefs de l'état-major russe donnaient l'ordre de fusiller les « traîtres ». Ces informations arrivant dans la capitale, elles ne pouvaient que raviver les flammes et radicaliser ouvriers et soldats qui tenaient des meetings communs quotidiennement.

Arrive début juillet : quatre ministres cadets2 démissionnent du Gouvernement provisoire. Alors que les mencheviks et les socialistes-révolutionnaires avaient justifié jusque-là leur refus du mot d'or­dre "tout le pouvoir aux soviets" par la nécessité de collaborer avec ces représentants de la "bourgeoisie démocratique" qu'étaient les cadets, le retrait de ces derniers de la coalition ne pouvait que provoquer, parmi les ouvriers et les soldats, une relance des revendications pour le pouvoir immédiat aux soviets. Il s'agissait en effet d'une tentative de la bourgeoisie libérale de pousser les ouvriers et les soldats à l'affrontement. "Supposer que les cadets pouvaient ne pas prévoir les répercussions de leur acte de sabotage déclaré à l'égard des soviets, ce serait résolument sous-estimer Milioukov. Le leader du libéralisme s'efforçait évidemment d'entraîner les conciliateurs dans une situation critique qui n'aurait d'issue que par l'emploi des baïonnettes : en ces jours-là, il croyait fermement que, par une audacieuse saignée, l'on pouvait sauver la situation." (Trotsky, Histoire de la Révolution russe)

Les esprits sont chauffés à blanc ; le 3 juillet, soldats et ouvriers décident massivement de manifester, cette fois armes à la main, pour chasser le Gouvernement provisoire et exiger des dirigeants du Soviet qu'ils prennent le pouvoir.

Des milliers d'ouvriers et de soldats se rendent au siège du Parti bolchevique, tandis que des dizaines de milliers d'autres assiègent le Palais de Tauride où se tenaient les réunions du Comité exécutif du Soviet. Dans le même temps, les soldats et marins casernés sur l'île voisine de Kronstadt se préparent à descendre sur la capitale dans le même esprit d'exigence. La nuit du 3 au 4 juillet est décisive pour la révolution. Les bolcheviks sont dans une situation difficile. Pressés par les masses d'appeler à la prise du pouvoir, mais considérant que le moment est loin d'être propice à l'insurrection, ils décident après différents atermoiements de prendre la tête du mouvement, mais en appelant les ouvriers et les soldats à leur sens des responsabilités et à faire en sorte que la manifestation garde un caractère pacifique. Principalement, aucune directive immédiate n'est donnée au mouvement mais les bolcheviks rappellent cependant inlassablement, à l'instar de Lénine, que le mot d'ordre "Tout le pouvoir aux soviets" sera "finalement vainqueur" et appellent à la persévérance et à la fermeté.

Dans les rues, les manifestants essuient de nombreuses attaques des partisans de la bourgeoisie, ses agents provocateurs tirant sur la foule, voire sur les troupes de cosaques fidèles au gouvernement, afin de mieux discréditer le mouvement et de pousser aux affrontements armés.

Cependant, la fermeté des bolcheviks et leur influence sur les ouvriers et les soldats empêchent que le mouvement ne dégénère dans un bain de sang. Car si l'on dénombre quelques dizaines de morts et de blessés, la bourgeoisie espérait alors opérer une véritable saignée dans les rangs du prolétariat le plus avancé de Russie.

Au soir du 4 juillet, tandis que le Comité exécutif fait traîner des débats exprimant l'irrésolution et le désarroi grandissant des mencheviks et des socialistes-révolutionnaires qui cherchent à gagner du temps, les trente mille ouvriers de l'usine Poutilov, surexcités, exigent qu'on leur livre Tseretelli, chef de file menchevik au Soviet de Petrograd. C'est alors qu'intervient Zinoviev, membre du Comité central du Parti bolchevique, afin de calmer les esprits. En conclusion de son discours, il prie les ouvriers "de se disperser aussitôt, pacifiquement, en maintenant un ordre parfait et en ne se laissant, en aucun cas, provoquer à des gestes agressifs. Les hommes assemblés se mettent en rangs et commencent à se disperser". (Zinoviev, cité par Trotsky dans La Révolution russe)

Laissons Trotsky conclure : "Cet épisode illustre au mieux, et l'acuité du mécontentement des masses, et l'absence en elles d'un plan d'offensive, et le rôle réel du parti dans les évènements de Juillet."

Les journées de Juillet s'étaient achevées dans un calme et un sérieux exemplaires. Les semaines qui suivirent virent alors fondre la réaction bourgeoise qui lança une répression violente contre les ouvriers radicaux et les bolcheviks. Ces derniers avaient montré qu'ils étaient les véritables représentants de la classe ouvrière qui était prête à les suivre, il fallait qu'ils le paient. Ainsi, tandis que les ouvriers et les soldats regagnaient leurs faubourgs et leurs casernes, les agents provocateurs de la bourgeoisie avaient produit au sein de régiments arriérés et restés neutres des documents "prouvant" que Lénine était un espion à la solde de l'Allemagne, les faisant basculer du côté de la réaction.

L'été 1917 verra donc le déchaînement des forces de la bourgeoisie et la tentative de prise du pouvoir par ses éléments les plus rétrogrades avec Kornilov à leur tête. Cependant, Lénine sut voir la signification de cette période dès son ouverture : "Une nouvelle phase commence. La victoire de la contre-révolution déclenche la déception au sein des masses vis-à-vis des partis socialiste-révolutionnaire et menchevik, et ouvre la voie au ralliement de celles-ci à la politique qui soutient le prolétariat révolutionnaire." (Lénine, « Sur les illusions constitutionnelles », Oeuvres complètes)

Les leçons de juillet 1917

Ces journées de juillet révèlent l'importance des responsabilités du Parti. Trotsky résume ainsi admirablement le rôle des révolutionnaires et leur lien avec l'ensemble de la classe ouvrière : "Si le parti bolchevik, s'entêtant à juger en doctrinaire le mouvement de Juillet 'inopportun', avait tourné le dos aux masses, la demi-insurrection serait inévitablement tombée sous la direction dispersée et non concertée des anarchistes, des aventuriers, d'interprètes occasionnels de l'indignation des masses, et aurait épanché tout son sang dans de stériles convulsions. Mais aussi, par contre, si le parti, s'étant placé à la tête des mitrailleurs et des ouvriers de Poutilov, avait renoncé à son jugement sur la situation dans l'ensemble et avait glissé dans la voie des combats décisifs, l'insurrection aurait indubitablement pris une audacieuse ampleur, les ouvriers et les soldats, sous la direction des bolcheviks, se seraient emparés du pouvoir, toutefois et seulement pour préparer l'effondrement de la révolution. La question du pouvoir à l'échelle nationale n'eût pas été comme en Février résolue par une victoire à Petrograd. La province n'eût pas suivi de près la capitale. Le front n'eût pas compris et n'aurait pas accepté le changement de régime. Les chemins de fer et le télégraphe auraient servi les conciliateurs contre les bolcheviks. Kerenski et le Grand Quartier Général auraient créé un pouvoir pour le front et la province. Petrograd eût été bloqué. Dans ses murs aurait commencé une désintégration. Le gouvernement aurait eu la possibilité de lancer sur Petrograd des masses considérables de soldats. L'insurrection aurait abouti, dans ces conditions, à la tragédie d'une Commune de Petrograd. En juillet, à la bifurcation des voies historiques, c'est seulement l'intervention du parti des bolcheviks qui élimina les deux variantes d'un danger fatal : soit dans le genre des Journées de Juin 1848, soit dans le genre de la Commune de Paris de 1871. C'est en prenant hardiment la tète du mouvement que le parti obtint la possibilité d'arrêter les masses au moment où la manifestation commençait à se transformer en un engagement général de forces armées. Le coup porté en juillet aux masses et au parti fut très grave. Mais ce coup n'était pas décisif. On compta les victimes par dizaines, mais non point par dizaines de milliers. La classe ouvrière sortit de l'épreuve non décapitée et non exsangue. Elle conserva intégralement ses cadres de combat, et ces cadres avaient beaucoup appris." (Histoire de la révolution russe, Trotsky).

WM

 

1 La plus grande concentration ouvrière de Russie qui avait déjà été la première usine à se mettre en grève dès le 9 janvier lors de la révolution de 1905.

2  Parti cadet : parti libéral représentant la bourgeoisie industrielle et qui s'était distingué dans la répression des ouvriers du Soviet de Petrograd et des soldats de Kronstadt en 1905.

Histoire du mouvement ouvrier: 

  • Révolution Russe [15]

Heritage de la Gauche Communiste: 

  • La vague révolutionnaire, 1917-1923 [16]
  • L'organisation révolutionnaire [17]

URL source:https://fr.internationalism.org/content/revolution-internationale-ndeg-381-juillet-aout-2007

Liens
[1] https://fr.internationalism.org/tag/situations-territoriales/vie-bourgeoisie-france [2] https://fr.internationalism.org/tag/5/58/palestine [3] https://fr.internationalism.org/tag/vie-du-cci/reunions-publiques [4] https://fr.internationalism.org/tag/5/36/france [5] https://fr.internationalism.org/tag/recent-et-cours/mouvement-etudiant [6] http://www.internationalism.org [7] https://fr.internationalism.org/tag/courants-politiques/trotskysme [8] https://fr.internationalism.org/tag/situations-territoriales/situation-sociale-france [9] https://fr.internationalism.org/tag/recent-et-cours/attentats [10] https://fr.internationalism.org/tag/geographique/afrique [11] https://fr.internationalism.org/tag/5/50/etats-unis [12] https://fr.internationalism.org/tag/5/60/russie-caucase-asie-centrale [13] https://fr.internationalism.org/tag/5/52/amerique-centrale-et-du-sud [14] https://fr.internationalism.org/tag/conscience-et-organisation/courant-communiste-international [15] https://fr.internationalism.org/tag/histoire-du-mouvement-ouvrier/revolution-russe [16] https://fr.internationalism.org/tag/heritage-gauche-communiste/vague-revolutionnaire-1917-1923 [17] https://fr.internationalism.org/tag/heritage-gauche-communiste/lorganisation-revolutionnaire