3b) Le rôle actif des trotskistes dans la stratégie de la bourgeoisie : Les magouilles de "Lutte Ouvrière''

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"Coordination du Personnel de Santé" 

 

"Lutte Ouvrière" prétend défendre de façon intransigeante les intérêts des travailleurs. Mais, une nouvelle fois, la politique et les méthodes de cette organisation au cours de la grève dans les hôpitaux ont fait la preuve qu'elle n'a d'ouvrier que le nom et la phraséologie.

L.O. magouille pour saboter les votes

Le 8 octobre se réunit l'assemblée générale de la "Coordination du personnel de santé" créée le 29/9 et chapeautée sur le champ par un "Bureau" contrôlé par L.O. Immédiatement, L.O. déploie ses magouilles. Dès le début de la réunion, urne infirmière, soutenue par plusieurs participants, demande un vote sur la proposition d'envoyer une délégation massive à l'AG de la "Coordination infirmière", qui se tient au même moment juste à côté, afin de lui proposer une fusion des deux assemblées. Mais le Bureau, et notamment son porte parole (membre de L.O.), refuse systématiquement qu'elle soit mise aux voix malgré l'insistance d'une partie de l'assemblée.

Les arguments spécieux donnes par L.O. pour combattre la proposition (du style : "ce ne serait pas "poli" de faire une intrusion à l'assemblée de la Coordination infirmière contre sa volonté") cachent mal sa propre volonté de ne pas remettre en cause le partage du territoire qu'elle a négocié, dans le dos des travailleurs, avec la "Coordination infirmière". D'ailleurs, malgré toutes ses déclamations "unitaires" et "anti-corporatistes",  le journal "Lutte Ouvrière" du 8/10 se trahit en écrivant: "une 'Coordination des Personnels de Santé", cherchant à regrouper et à diriger la lutte du personnel non infirmier, s'est créée." On ne peut être plus clair ! Comme les gangsters se partagent les commerçants à racketter ("à toi les restaurants, à moi les fripiers"), L.O. et les autres organisations de gauche et gauchistes se sont partagé le personnel hospitalier : "A toi les infirmières, à moi les autres".

Ce mépris pour les travailleurs, nous le retrouvons dans la volonté du Bureau de censurer le vote. L.O. a beau se gargariser dans sa presse de phrases du style "Oui, c'est aux travailleurs de la base de prendre l'initiative. Car la base peut faire mieux que constituer les troupes de la lutte dirigée par d'autres" (Éditorial de "LO" du 8/10). Dans la pratique, ses grandes déclarations se révèlent n'être que purs mensonges démagogiques. Lorsque la "base" risque de prendre une position pouvant compromettre ses petits rackets, LO, avec son savoir faire politicard, s'arrange pour lui fermer sa gueule. Bravo LO ! Tu as bien appris de tes maîtres staliniens.

L.O. récidive et aggrave son cas

Ce même mépris pour les assemblées qu'il convoque lui-même, le Bureau-LO nous en a donné une nouvelle preuve lors de l'AG de la coordination du 13/10. Ainsi; à cette assemblée, il est remis au Bureau une lettre adressée par l'AG de tous les personnels d'un grand hôpital de la banlieue parisienne (le CHS de Maison Blanche), protestant contre la magouille du 8/10 et demandant que "cette lettre soit lue aux prochaines assemblées... de la coordination des personnels de santé". Évidemment, le Bureau-LO n'en souffle mot : comme il se sent morveux, il a peur qu'on le mouche.

Ensuite, on va voir le Bureau, par toute une série de manœuvres provoquant la plus grande confusion, s'arranger pour empêcher une nouvelle fois que deux amendements contrariant sa politique de sabotage de la lutte ne soient soumis au vote.

Le premier amendement proposait que cette coordination soit basée sur des délégués élus et révocables des AG des hôpitaux. C'était un gros pavé dans la mare de LO qui voulait continuer à pouvoir "bourrer" les AG de la coordination par la claque de ses propres militants et sympathisants.

Quant au second amendement,, il proposait que l'AG se prononce en faveur de l'extension immédiate de la lutte aux autres secteurs. Là encore on voit clairement la distance qui sépare les déclarations platoniques de la presse de LO de sa tactique réelle. Ainsi, les éditoriaux de "LO" des 24/9, 1/10 et 22/10, c'est-à-dire avant et après le plus fort de la mobilisation dans les hôpitaux, sont autant d'appels à l'extension et à l'unification des luttes dans tous les secteurs de la classe ouvrière. En revanche, dans "LO" des 8 et 15/10, au moment où cette question est immédiatement cruciale, on ne trouve pas un mot dessus tandis que, sui le terrain, les militants de LO font toutes les magouilles possibles pour empêcher de tels appels.

Le naïf ou l'amnésique pourrait croire que c'est un hasard ou une erreur de L.O. Il n'en est rien. En réalité, LO nous a déjà fait le coup à deux reprises : au sein de la coordination inter-catégorielle de la SNCF en décembre 86 (cf. RI de février 87) et dans la coordination INTER-SNECMA au printemps 88 (cf. RI 169). Non, LO n'a pas fait "des erreurs" ! Elle a appliqué une politique systématique d'enfermement des luttes comme le font les syndicats et le P.C.F.. Et pour mettre en oeuvre la même politique que les staliniens, LO a fait appel aux mêmes méthodes "musclées". Ces méthodes, nous en avions eu un avant-goût lors de l'AG du 13/10 lorsque, face à la colère que toutes ces magouilles avaient provoqué dans l'assemblée, un membre du Bureau-LO s'était écrié : "C'est fini ce bordel ! Maintenant taisez-vous et écoutez le Bureau !". Ces pratiques de petits voyous devaient être utilisées avec leur pleine "vigueur" lors de l'assemblée du 15/10.

Les mœurs staliniennes de L.O.

Comme celle du 8/10, cette assemblée était "filtrée" : à l'entrée, il fallait donner son nom et son adresse au service d'ordre de LO (à quelles fins ?). Quelques travailleurs d'autres secteurs de la Fonction Publique ont pu quand même entrer dans la salle en signalant qu'ils n'étaient pas hospitaliers et que, par conséquent, ils ne participeraient pas aux votes. Avant même le début de la séance, ces travailleurs ont été systématiquement mitraillés sous tous les angles par un photographe (était-ce une tentative d'intimidation ou l'occasion pour LO de compléter son propre fichier policier des éléments "perturbateurs ? Les deux probablement). Puis, dès le début de la séance, le porte-parole du Bureau demandait à ces travailleurs de quitter la salle sous prétexte que cette assemblée ne devait pas être "troublée par des personnes extérieures à la santé". Et comme ces travailleurs tentaient de défendre la nécessité pour les assemblées ouvrières d'être ouvertes, ils ont été vidés manu-militari par le service d'ordre de LO, en même temps d'ailleurs que les travailleurs de la santé qui protestaient contre ces méthodes répugnantes.

Ainsi, L.O. reprend aujourd'hui à son compte la politique crapuleuse des "ouvriers" sociaux-démocrates allemands, Ebert et Noske, qui, en novembre 1918, firent interdire la porte du Congrès des conseils ouvriers aux révolutionnaires Karl Liebknecht et Rosa Luxembourg sous prétexte qu'ils n'étaient pas ouvriers. L.O. ne puise pas son inspiration uniquement auprès des staliniens mais aussi auprès de ceux qui les ont précédés dans la trahison du prolétariat : ces mêmes sociaux-démocrates qui, deux mois après, allaient faire assassiner Liebknecht et Luxembourg en même temps qu'un millier d'ouvriers de Berlin.

"Camarades" de L.O., à quand les coups de flingue contre les "perturbateurs" ?

Mais LO ne devait pas en rester là: à la brutalité il fallait encore ajouter l'hypocrisie. Arès l'interruption de séance, le porte-parole du Bureau faisait, la main sur le cœur, une déclaration pour s'excuser de "ce malencontreux incident" (dixit LO) résultant, à ses dires, d'un "malentendu". Pourquoi de telles "excuses" ? Tout simplement parce que, durant la pause, les "expulsés" étaient revenus distribuer le texte d'une motion qu'ils voulaient proposer à l'assemblée et qui appelait "tous les travailleurs du public et du privé à entrer immédiatement et massivement dans la lutte".. Il était alors difficile pour le Bureau-LO, pris au dépourvu, de continuer à dénoncer ces éléments comme de simples "fouteurs de merde" (d'autant plus que certains des hospitaliers expulsés avec eux avaient distribué de leur côté la lettre de protestation du personnel de Maison Blanche que le Bureau avait mise sous la table lors de l'AG du 8/10). Pour montrer sa "bonne foi", le Bureau-LO, contraint de tourner casaque, a alors annoncé qu'il allait soumettre aux voix cette motion. Mais pour éviter toute "mauvaise surprise", il a encore magouillé en ne la faisant voter qu'au dernier moment alors que beaucoup de participants étaient déjà partis ou s'apprêtaient à partir. Magouille encore renforcée par sa proposition d'une motion concurrente "allant dans le même sens", à ses dires, mais qui en réalité, derrière ses phrases verbeuses, n'était qu'un salut" platonique à "l'entrée en lutte des autres secteurs de la fonction publique".

La grève des hôpitaux n'a pas seulement permis à "Lutte Ouvrière" d'apporter sa petite contribution au succès de la manœuvre bourgeoise visant à prévenir une explosion généralisée du mécontentement ouvrier. Elle a été aussi une occasion pour cette organisation d'utiliser le type de méthodes qui accompagnent nécessairement une telle politique bourgeoise : les magouilles politicardes, la manipulation, les votes truqués, les mensonges, l'intimidation, le flicage et, pour couronner le tout, la violence physique contre les empêcheurs de magouiller en rond. Et ce n'est qu'un début. Il ne faut pas se faire d'illusions: comme ses aînés P.S. et PC, LO n'hésitera pas demain à massacrer les ouvriers quand ce sera "nécessaire".

Révolution internationale N' 173

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  • Si la classe ouvrière a des illusions sur la nature des "coordinations", la bourgeoisie, elle, sait ce qu'elle fait quand elle les met en place. Voila ce qu'en dit le "Monde", célèbre et réputé organe de presse bourgeois, dans son édition du 21 octobre 1988, au sein de l'article "Le retour du "baron noir" de l'agitation sociale" :

"Allumée depuis plusieurs mois auparavant, la mèche lente a fait son office. Une conjonction d'intérêts (UNASIF) avait poussé à entrer dans la danse l'encadrement infirmier par le canal d'une union syndicale et associative, corporatiste, l'Union nationale des associations et syndicats infirmiers et des infirmières français (UNASIF) reprise en main récemment par les amis de M. Chevènement. M. Bernard Desormière, secrétaire général de la fédération CGT de la santé, voit du reste, dans l'UNASIF "la première tentative de recomposition du mouvement syndical" effectuée en juin, qui, selon lui, se poursuit aujourd'hui d travers la coordination pour le compte du P.S. et de la social-démocratie."

 

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