Du procès d'Outreau au "gang des barbares" : La pourriture de la propagande bourgeoise contre la classe ouvrière

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Entre l'affaire d'Outreau et le fait divers du gang des barbares de Bagneux, l'actualité des dernières semaines fut particulièrement sordide. Torture, meurtre, enfants violés, vies détruites… l'étalement de toutes ces horreurs  met à nu le pourrissement de cette société.

Mais ce qui confine à l'écœurement, c'est l'exploitation cynique  par  la bourgeoisie de ces atrocités. Sans aucune vergogne, les médias et les hommes politiques de tous bords se sont jetés sur ces événements tels des charognards. En braquant ainsi tous les projecteurs sur des monstruosités et des individus en particulier, la bourgeoisie a cherché à jeter une ombre sur la misère et la barbarie générales de son système.

Un battage médiatique  au service de la bourgeoisie

Dans la presse, les magazines, les émissions spéciales et les 20 heures, le procès d'Outreau et ses suites tiennent le haut du pavé de l'information. Non seulement, le juge d'instruction  tout désigné comme bouc-émissaire a été jeté dans la fosse aux lions pendant des heures sous l'œil de caméras de télévision mais, comment ne pas éprouver un malaise devant l'aspect dégradant,  choquant et indécent du spectacle de télé-réalité organisé auquel nous avons été conviés : celui d'hommes et de femmes tardivement innocentés  (sans compter le drame de 25 enfants traumatisés à vie et séparés de leurs parents) dont les vies ont été irrémédiablement broyées, saccagées et qui sont jetés en pâture au spectacle télévisuel. Leur désarroi, voire leur désespoir, est exploité pour les balader comme des zombies errants de tribunaux en prétoires, de caméras en micros pour répéter sans fin leur haine parfois, leur incompréhension et leur hébétude. Pourquoi ? A quoi peut bien servir un tel déballage de souffrance ?

Ce flot de propagande pousse chaque "citoyen" à prendre partie et à se prononcer pour savoir qui doit être tenu pour responsable de ce fiasco. On voudrait nous faire croire, soit que l'erreur est à la charge d'un juge d'une immaturité flagrante, soit que la faute incombe à un appareil juridique inadapté. Quelle hypocrisie ! Avec un cynisme incroyable quand on sait qu'à Outreau pas moins de 67 magistrats ont participé au dossier d'instruction en soutenant et cautionnant les décisions du juge Burgaud, la bourgeoisie déploie la politique du bouc-émissaire en faisant porter le chapeau à un magistrat, lâché par ses corélligionnaires et livré au réquisitoire implacable d'une commission d'enquête parlementaire de circonstance. La vrai responsabilité ne repose pas sur tel ou tel individu ni sur une justice imparfaite mais sur l'ensemble de la bourgeoisie. C'est pour défendre ses intérêts, pour développer une propagande mystificatrice qu'elle a jeté en 2001 son appareil judiciaire sur un événement sordide et local stigmatisant la pédophilie.

La focalisation des médias sur un fait divers n'est en effet jamais gratuite. A l'origine, ce gigantesque battage médiatique a permis de frapper les esprits  face à la "découverte", particulièrement horrible et monstrueuse, d'un vaste réseau pédophile impliquant une vingtaine de personnes. Le retentissement  avait été comparable à l'affaire Dutroux en Belgique en 1996. La publicité était à la mesure de ce qu'on nous présentait avec cynisme comme un des plus "fameux procès du siècle". Alors que les affaires de pédophilie se multipliaient, ce procès devait être "exemplaire" de la fermeté de la justice. L'heure n'était pas à la prudence… les chiens étaient lâchés.

La réalité, c'est que plus un phénomène paraît horrible et monstrueux, plus il sert à masquer l'horreur et la monstruosité du système social qui l'engendre. Car l'objectif principal de cette vaste campagne idéologique était d'empêcher la remise en cause du système capitaliste dans son ensemble. Il s'agissait de masquer que le véritable responsable de la multiplication de pratiques sexuelles perverses et criminelles, notamment contre des enfants, c'est le capitalisme. La misère et la barbarie que le capitalisme porte en lui et qu'il diffuse à profusion tous les jours partout sur la planète sont indissolublement liées à une misère sexuelle et affective grandissante pour l'humanité. La réduction à des rapports humains marchands pousse à la frustration, au sadisme, à la violence et à la perversion. Ce sont les produits contaminés d'une société capitaliste pourrissante et déshumanisée qui s'enfonce dans le fumier de sa propre dégénérescence.

C'est le lien profond entre l'existence du capitalisme et la putréfaction des rapports sociaux que cette propagande médiatique et judiciaire cherchait à masquer. Et il ne faut pas croire qu'à travers toutes les commissions parlementaires actuelles ou les excuses gouvernementales, l'esprit qui anime les dirigeants politiques et les médias est aujourd'hui différent ou plus humain.

Derrière la prétendue remise en cause des institutions judiciaires, la dénonciation des "dysfonctionnements de la machine judiciaire", il s'agit encore et toujours de semer un maximum d'illusions sur la possibilité de réformer la justice.

Une diversion dirigée contre la classe ouvrière

 Avec l'affaire du "gang des Barbares", la bourgeoisie utilise de nouveau l'horreur au service de sa propagande.L'enlèvement crapuleux et le  meurtre sadique d'Ilan Halimi constituent une nouvelle manifestation édifiante de la décomposition du tissu social et le reflet abject d'un monde où il s'agit de gagner de l'argent par n'importe quel moyen. Mais l'énorme publicité médiatique là encore assurée à cet événement a permis d'en dénaturer le sens. S'il a été bruyamment présenté comme un "crime raciste et antisémite", c'est en fait que la bourgeoisie y trouvait son intérêt. Toute la classe politique a cyniquement exploité et instrumentalisé cet horrible assassinat pour appeler la population à une "union sacrée" autour de la défense des valeurs citoyennes et démocratiques. Ainsi, de l'extrême gauche jusqu'à … Le Pen, tous ont sauté sur l'occasion pour appeler à une grande manifestation à Paris sur le thème de "l'antiracisme". Plus insidieusement, c'est la jeunesse immigrée de banlieue, majoritairement noire ou maghrébine, qui se retrouve potentiellement stigmatisée et sur  laquelle on fait retomber le soupçon de racisme et d'antisémitisme. Le déclenchement de cette campagne, elle-même vécue comme une provocation par ceux qui sont ainsi montrés du doigt, ne peut en retour que mettre de l'huile sur le feu, attiser pour de bon des réflexes racistes et développer  un climat de haine et de tension entre communautés ethniques.

La fonction idéologique la plus pernicieuse de ce type de propagande est qu'elle participe d'une entreprise systématique pour saper la confiance et la solidarité des prolétaires entre eux. Une partie de la classe ouvrière est opposée à une autre. La bourgeoisie dresse des barrières entre différentes communautés ethniques ou religieuses pour mieux diviser les prolétaires entre eux. Plus largement, la classe dominante a recours à cette méthode pour alimenter une méfiance généralisée envers l'autre, pour susciter un sentiment de peur et d'insécurité envers lui. On pousse chacun à percevoir le collègue de travail, le voisin de palier,  l'enseignant,   les parents des copains de vos enfants, le quidam qui vous aborde dans le la rue, dans les transports, comme un ennemi potentiel susceptible d'être reconnu demain comme un individu asocial, un assassin monstrueux, un terroriste intégriste ou un dangereux pédophile. Cette entreprise vise à alimenter un sentiment d'isolement, d'atomisation individuelle parmi les exploités. La presse a d'ailleurs enfoncé le clou en multipliant les témoignages de voisins n'ayant rien vu ni rien entendu ou se déclarant sidérés d'avoir côtoyé si longtemps tel ou tel criminel qui paraissait si poli, calme et gentil. Le message ici délivré est qu'en banlieue, les prolétaires vivent cloîtrés, sans se soucier de l'autre. Plus écœurant encore, les commentaires journalistiques insinuaient que même ceux qui savaient n'ont pas réagi par peur et indifférence. Il s'agit d'entretenir à tout prix la division entre les ouvriers. La bourgeoisie et ses médias tentent ainsi d'empêcher les prolétaires de se reconnaître entre eux comme ayant les mêmes intérêts de classe à défendre et de les détourner de la nécessité de lutter ensemble face aux attaques massives du capitalisme. Elle cherche, derrière cette propagande, à briser la force collective que représente la classe ouvrière et à étouffer dans l'œuf tout élan de solidarité potentielle entre prolétaires. Il s'agit en fait de les empêcher de prendre conscience de la force collective qu'ils représentent et de s'opposer à leur unification qui n'est possible qu'à travers le développement de leurs luttes sur un terrain de classe.

Wim (23 février)

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