Soumis par Révolution Inte... le
Et rebelote ! L'agitation qui oppose le MEDEF aux
syndicats sur les modalités du financement des retraites
complémentaires dans le secteur privé a un goût
de déjà vu. On se rappelle il y a quelques mois des
négociations sur l'assurance-chômage qui ont donné
lieu au Plan d'Aide au Retour à l'Emploi (PARE).
"L'intransigeance" du patronat, les "protestations"
syndicales et les hauts cris du gouvernement qui avait prétendu
pendant des mois que le PARE était "inacceptable",
n'auront servi qu'à préparer le terrain à
l'accouchement d'une violente attaque contre les ouvriers au
chômage et contre les conditions de travail de tous les
salariés.
On assiste au même scénario aujourd'hui avec l'attaque sur les retraites. Comme à chaque fois qu'il faut attaquer la classe ouvrière, chacun des partenaires sociaux est appelé à jouer son rôle. Au MEDEF d'annoncer la couleur : il faut en finir avec la retraite à 60 ans dans le secteur privé et il s'agit désormais de se rapprocher d'un régime d'assurance privée qui prendrait en compte l'espérance de vie moyenne des salariés et entraînerait à terme une durée des cotisations sur 45 ans. En outre, pour justifier sa réputation de méchant, le patronat mettait le "couteau sous la gorge" des syndicats et du gouvernement en menaçant de ne plus lever les cotisations pour l'ASF (Association pour la Structure Financière) dès le mois de janvier, paralysant ainsi le fonctionnement de l'organe de financement des retraites complémentaires. Devant une telle "intransigeance", le gouvernement s'est posé, une fois de plus, comme le "garant des acquis sociaux" et il n'a eu de cesse de vouloir rassurer les ouvriers en jurant qu'il maintiendra, coûte que coûte, la retraite à 60 ans. Quant aux syndicats, ils dénoncent de façon radicale, le "chantage" du patronat et ont lancé un appel à manifester derrière la bannière unitaire de tous les syndicats du privé comme du public, à l'occasion de la journée d'action du 25 janvier, contre la remise en cause de la retraite à 60 ans.
Cela n'a pas loupé : au lendemain des manifestations massives de ce fameux 25 janvier, on a eu droit aux gros titres : "Le Medef fléchit face à la rue" et aux interviews du Seillière de service qui, "frappé par le caractère imposant des cortèges" s'est dit ouvert à "réouvrir les négociations". Ce à quoi le Thibault de service, au nom de la CGT, a répondu à la télévision que les syndicats ont "des pistes" à proposer pour la suite des discussions. C'est clair, on va nous concocter un nouvel accord, juste un peu moins violent que celui annoncé d'emblée par le patronat et qu'on nous fera passer pour une "victoire" de la mobilisation syndicale. Quant au gouvernement, il n'attend bien sûr que cela pour, dans la foulée du nouveau sort réservé aux ouvriers du privé, faire accepter un "alignement progressif" du secteur public sur celui-ci.
Une fois de plus, lorque le gouvernement et les syndicats se présentent comme les défenseurs de la classe ouvrière, contre la "logique libérale" du patronat, ce n'est que pour mieux faire accepter aux prolétaires de nouvelles attaques, en leur faisant croire que l'initiative en serait venue du seul MEDEF. Car il est clair que l'attaque contre les retraites qui a déjà commencé à se mettre en place sous diverses formes ces dernières années, sous les divers gouvernements de droite comme de gauche, est depuis longtemps dans les cartons de la classe dominante et de l'Etat. Comme le souligne la presse bourgeoise, "l’enjeu n’est d’ailleurs pas de savoir si la retraite à 60 ans sera remise en cause, il est de choisir comment elle va disparaître". (Libération du 21 décembre 2000).
Pour les ouvriers du privé c'est depuis 1993, sous le gouvernement Balladur, que la disparition de la retraite à 60 ans est programmée, et le gouvernement de gauche n'est jamais revenu sur cette attaque. D'ici 2003, l'allongement de la durée de cotisation passe de 37 ans et demi à 40 ans et d'ici 2008, la retraite sera calculée sur les 25 meilleures années au lieu de 10 précédemment. En sachant qu'on entre dans la qu'on entre dans la vie active de plus en plus tard, compte tenu du chômage ou des études de plus en plus longues, il faudra souvent trimer jusqu'à 64 ans pour avoir son compte d'annuités. Par ailleurs, l'augmentation du nombre d'années à prendre en compte pour calculer le montant des pensions va amputer sérieusement celles-ci à la baisse, compte tenu de l'augmentation de la précarité, des périodes de plus en plus fréquentes de chômage, sans parler des ouvriers qui vivent l'imposition du temps partiel ou des petits boulots, qui ne font plus partie des sordides prévisions des spécialistes bourgeois.
Pour les ouvriers du public, dans la continuité des gouvernements de droite, la gauche plurielle démontre toute sa duplicité, et les syndicats sont pertinemment au courant que "le 21 décembre 2000, le gouvernement a transmis à Bruxelles le programme pluriannuel de finances publiques 2002-2004, dans lequel figure l’objectif d’aligner progressivement la durée de cotisation des fonctionnaires pour une retraite au taux plein (37,5 ans) sur celle des salariés du secteur privé (40 annuités) " (Le Monde du 5 janvier 2001)
Voilà ce qui nous attend pour les régimes de base, et du soi-disant droit à la retraite à 60 ans. Quant aux retraites complémentaires, la gauche et les syndicats nous ont vanté pendant des années les louanges des mutuelles qui font du "social", à l'opposé des fonds de pension que prône le patronat. Outre le fait que le choix entre les deux formules n'en est pas vraiment un car, de toutes façons, vu les misérables versements des régimes de base, les ouvriers sont bel et bien obligés d'amputer leurs salaires de nouvelles ponctions pour se constituer des retraites complémentaires, les mutuelles sont capables des mêmes pratiques malhonnêtes que les fonds de pensions des assurances privées.
Ainsi, la gauche et les syndicats se sont bien gardés de faire du bruit et, encore moins d'appeler à la mobilisation, quand la MRFP (Mutuelle retraite de la fonction publique, gérée directement par les syndicats !) a décidé de baisser de 16,7% au 1er janvier 2001 le montant des retraites complémentaires auxquelles auront droit les 450 000 cotisants au CREF (Complément Retraite Epargne Fonction Publique). Et ce n'est qu'une moyenne, puisque la baisse ira jusqu'à 25% pour ceux qui ont opté pour un contrat ne comprenant aucune capitalisation. Le tout ne s'appliquant évidemment pas seulement aux contrats à venir, mais aussi aux contrats en cours. Ainsi les salariés qui ont souscrit un contrat avec une retraite complémentaire soi-disant garantie et qui, pendant des années, ont cotisé sont bel et bien escroqués. Cela représente une baisse de 43 à 383 francs par mois, soit pour un couple de fonctionnaires, une perte de près de 7000 francs sur l'année. Le tout, alors que depuis plusieurs années déjà, le prétexte du "vieillissement de la population" a été utilisé pour augmenter régulièrement les cotisations des différentes mutuelles. Et comme si cela ne suffisait pas, Maurice Duranton, le président de la mutualité fonction publique, se fait le porte-parole de l'ensemble des mutuelles en annonçant que "tout le monde doit participer à l’effort de solidarité, comme demain on devra le faire dans le domaine de la santé" (Le Monde du 30 janvier 2000), ce qui veut dire que les ouvriers qui ont une mutuelle complémentaire à la sécurité sociale, doivent s'attendre à des baisses de remboursement des soins et des médicaments. Voilà la solidarité que nous proposent la gauche et les syndicats, voilà la réalité du "social" que pratiquent leurs mutuelles, elles n'ont rien à envier aux fonds de pension du patronat !
Oui mais quand même, pourrait-on nous rétorquer,
il faut prendre en compte la dégradation du rapport
cotisants-retraités. La commission européenne
n'a-t-elle pas remis en avril dernier, un rapport aux quinze, qui
prévoit que, si rien n'est fait, le ratio actifs/retraités
s'inversera vers 2050, d'où ses recommandations pour un
relèvement général de l'âge de départ
à la retraite ?
L'alibi démographique
Effectivement, ce ne sont pas les seuls ouvriers de France qui sont concernés par ses attaques mais l'ensemble des ouvriers européens. Le fait qu'il n'y aurait plus assez d'actifs pour payer, financer les retraites, dû au vieillissement de la population et à l'allongement de l'espérance de vie sont un problème de gestion pour le capitalisme. Comment faire avec tous ces "vieux salariés" qui visiblement vivent trop longtemps, -au goût du capitalisme. Après avoir exploité leur force de travail tout au long de leur vie de salarié et ponctionné leurs salaires : pour des retraites de base, puis complémentaires, des assurances-vie, des mutuelles, des fonds de pension, le capitalisme se plaint encore d'avoir à les nourrir une fois qu'ils ne sont plus productifs !
Mais le cynisme de la bourgeoisie et le caractère totalement déshumanisé de son système ne s'arrêtent pas là. Si la société ne compte "plus assez d’actifs" en termes capitalistes, comment croire sérieusement qu'il s'agit d'un simple problème démographique alors que tous les chômeurs, les précaires et autres types d'exclus des rangs des "actifs" ne demanderaient pas mieux que d'être complètement intégrés au monde du travail. La véritable cause de la pénurie de "salariés actifs" c'est la crise et le chômage, que le capitalisme engendre, dont il est responsable.
Ouvriers du privé, ouvriers du public, nous devons lutter contre les attaques que sont en train de préparer danréparer dans notre dos, les patrons, le gouvernement de gauche et les syndicats sur les retraites. N'oublions pas que c'est en nous promettant du temps libre, pour notre bien, qu'ils nous ont imposé les 35 heures, dont on mesure partout les bienfaits : à savoir une généralisation de la flexibilité, l'intensification des cadences de travail, le blocage des salaires. Pour les retraites, c'est au nom de la solidarité entre générations de prolétaires dont ils se moquent bien qu'ils vont encore nous demander de faire des sacrifices. C'est tous ensemble et unis que nous serons capables de faire reculer les attaques à venir.
Dan (21 janvier 2001)