Soumis par ICConline le
En fin d'année se tiendra à Paris un nouveau sommet international sur les changements climatiques. Sous le patronage du président français, François Hollande, presque l'ensemble des dirigeants de la planète devraient se réunir avec l'objectif "d'aboutir, pour la première fois, à un accord universel et contraignant permettant de lutter efficacement contre le dérèglement climatique et d'impulser/d'accélérer la transition vers des sociétés et des économies résilientes et sobres en carbone." Depuis plusieurs décennies, les conférences environnementales "décisives" se succèdent, les promesses et les accords se multiplient sans qu'aucune mesure probante ne soit appliquée en faveur de l'environnement. Les "bons chiffres" et les réalisations parfois avancés pour justifier la bonne foi des États et des entreprises sont systématiquement tronqués, quand ils ne relèvent pas de la magouille pure et simple. La Conférence de Paris (COP 21) n'échappe bien entendu pas à cette logique. S'agirait-il de préserver l'atmosphère terrestre pour les générations futures ? Allons bon ! Même les médias bourgeois ne cachent pas que les gesticulations de François Hollande en vue de la COP 21 relèvent de la basse manœuvre politicienne et de la navrante campagne de com'.
Quelques faits suffisent d'ailleurs à mesurer la réalité de l'engagement de la classe dominante en faveur de l'environnement. En 1997, était signé à Kyoto un premier accord international, qualifié d'historique, visant la réduction de 5% de la concentration de gaz à effet de serre à l'horizon 2012. Ce ridicule et bien insuffisant objectif "historique", signé par 184 États, s'est conclu, en 2013, par un rapport de l'Organisation météorologique mondiale1 démontrant que la concentration de gaz à effet de serre n'avait jamais été aussi élevée dans l'atmosphère. Depuis 1990, année de référence du protocole de Kyoto, elle a même augmenté de 45% selon le GIEC !
Le climat n'est pas l'unique domaine environnemental où la bourgeoisie peut exercer ses talents de bonimenteur : selon l'Organisation des Nations unies, pour l'alimentation et l'agriculture, environ 13 millions d’hectares de forêts disparaissent chaque année sur terre, en dépit de la réglementation et des dispositifs prétendument "durables" de la gestion des ressources. De la même façon, selon une étude publiée en juin 2015 par des experts des universités américaines de Stanford, Princeton et Berkeley, la disparition d'espèces animales est telle que nous assisterions actuellement à la sixième vague d'extinction de masse après celle des dinosaures ! Pourtant, quel politicien n'a pas poussé son cri d’alarme en faveur des ours polaires ?
Gestion désastreuse des déchets, pollution à grande échelle des océans, pillage insensé des ressources naturelles, stérilisation des terres arables,… : nous pourrions multiplier les exemples de la nocivité du mode de production capitaliste pour la planète. Car, contrairement aux discours tranquillisants de la bourgeoisie assurant qu'il est encore possible de tout arranger avec un peu de bonne volonté et que la capitalisme aurait tout à gagner d'une "transition écologique", la réalité de la crise environnementale est extrêmement préoccupante et menace de plus en plus sérieusement la survie de l'espèce humaine.2 Avec la systématisation accélérée du pillage et l'exploitation à très grande échelle, la pollution et la destruction des ressources naturelles qui en découlent ont pris une dimension planétaire. C'est donc, non plus comme par le passé, à l'échelle d'un espace géographique ou d'une société que la menace environnementale pèse, mais bien sur l'ensemble de l'humanité.
Cependant, le développement des forces productives ne signifie pas nécessairement que l'humanité est intrinsèquement incapable de les maîtriser. Alors pourquoi se montre-t-elle à ce point impuissante ? En réalité, ce sont les contradictions du système capitaliste qui sont à l'origine des problèmes écologiques les plus déterminants, indépendamment de l'irresponsabilité ou de la bonne volonté de tel ou tel acteur bourgeois. Comme l'écrivait déjà au début du XXe siècle Rosa Luxemburg, le capitalisme n'existe que par la destruction de l'environnement : "la croissance incessante de la productivité du travail, qui est le facteur le plus important de l'augmentation du taux de la plus-value, implique et nécessite l'utilisation illimitée de toutes les matières et de toutes les ressources du sol et de la nature. Il serait contraire à l'essence et au mode d'existence du capitalisme de tolérer quelque restriction à cet égard."3 En effet, le capitalisme se développe sous la forme d'une accumulation toujours plus grande de marchandises qui a pour conséquence logique le pillage croissant des ressources naturelles à une échelle elle-même toujours plus grande. Un des effets notoires de ce mode de production est la surproduction et son corollaire de plus en plus choquant : le gaspillage généralisé des ressources.
Si les problèmes écologiques sont alarmants et coûteux, ils sont surtout instrumentalisés par l'Etat et ses cliques en vue de manœuvres commerciales et politiciennes. Plus encore, leur mise en avant permet seulement de relancer des campagnes médiatiques destinées à orchestrer un véritable enfumage de la conscience dans la classe ouvrière. Il faudrait, nous dit-on, plus de législations, plus de traités, de régulation. En réalité, l'État cherche à masquer qu'il est le principal responsable des catastrophes majeures ! S'il coordonne sa production, légifère, c'est toujours pour mieux défendre son capital national au sein de l'arène internationale et s'assurer le droit de polluer davantage (à condition, naturellement, de taxer davantage les populations !). Son but est essentiellement de mieux répondre à une concurrence exacerbée afin de protéger ses propres intérêts. Pour cela, il ne peut faire autrement que de continuer ses pillages, ses gaspillages et pollutions en tous genres. C'est ce que font tous les Etats industrialisés les plus démocratiques qui, au-delà des discours hypocrites, cherchent une issue désespérée face à la crise économique mondiale et à la faillite historique de leur système. Cela, ils le font au mépris total de l'humanité et de son avenir.
R.B. (23 juin)
1 Afin d'éviter toute contestation, l'article ne mentionnera que les données officielles validées par les institutions bourgeoises, bien que de nombreux scientifiques affirment régulièrement que ces chiffres sont en deçà de la réalité.
2 Cf. Le monde à la veille d'une catastrophe environnementale, Revue internationale n°135.
3 Rosa Luxemburg, L'accumulation du Capital (Les conditions historiques de l'accumulation. La reproduction du capital et son milieu)