Incendies en Amazonie: Le capitalisme brûle la planète

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Cet été, les images de l’Amazonie en flammes ont fait le tour du monde. Cette forêt luxuriante, trésor unique de biodiversité et véritable “poumon vert de la planète”, a été consumée par plus de 40 000 incendies. L’ampleur de la catastrophe est telle que le cours du fleuve Amazone en est lui-même perturbé. Les scientifiques craignent que la baisse de son débit n’engendre des déséquilibres océaniques. 1

Face à ce désastre, les dirigeants de tous les pays ont réagi en multipliant les déclarations pour… mieux s’écharper par la suite dans une véritable foire d’empoigne. Le dernier G7, théâtre d’un affrontement entre l’État brésilien et l’État français, en est un exemple tragi-comique. La planète peut bien brûler, chaque nation capitaliste n’y voit qu’une occasion de porter des coups à ses concurrents dans l’arène économique mondiale, véritable métaphore d’un système en putréfaction.

La destruction par les flammes de l’Amazonie n’est pas un accident naturel ponctuel, ni le fruit d’une politique locale anormalement ir­responsable. Elle est le symbole de ce que réserve le capitalisme à toute la planète, à toutes les espèces et à l’humanité.

Le nombre d’incendies augmente partout sur la planète

Au cours de la seule année 2018, 12 millions d’hectares de canopées ont disparu de la surface de la terre, dont 3,6 millions de forêts tropicales humides. Le système traditionnel de “brûlage” de la forêt pour les cultures vivrières et l’auto-consommation des communautés rurales a cédé la place aux ravages de la déforestation massive et aux incendies à l’échelle industrielle.

Dans toute l’Amérique du Sud, les arbres sont brûlés pour faciliter la pénétration de l’exploitation minière et forestière, pour créer de nouveaux pâturages destinés à nourrir un bétail à faible coût, et pour produire massivement du soja et de l’huile de palme. Cette politique de destruction massive est menée dans tous les pays, quel que soit le parti au pouvoir.

Au Brésil, avant le populiste Bolsonaro, la même politique de déforestation sauvage était pratiquée sous les gouvernements successifs de Lula, Dilma Roussef et Temer. Au Paraguay, au Pérou ou en Bolivie, c’est le même désastre. Le “révolutionnaire” Evo Morales, figure emblématique de toutes les gauches radicales dans le monde, a baissé les contrôles environnementaux et accordé aux entreprises l’autorisation de détruire davantage la forêt. Depuis le début de l’année, 400 000 hectares d’arbres ont ainsi disparu en Bolivie dans la région de la Chiquitanía (20 000 incendies).

Au Venezuela, sous le règne du “socialiste du XXIe siècle” Nicolás Maduro, “l’Arc minier” engendre lui aussi des destructions d’ampleurs : cette vaste région subit une exploitation incontrôlée afin de favoriser l’extraction de l’or et d’autres métaux, ce qui permet aux dirigeants civils et militaires du chavisme de conserver un certain revenu au pouvoir. Depuis l’époque de Chavez, “l’Arc minier” est en effet placé sous le contrôle d’une camarilla militaire.

En Colombie, la guérilla “marxiste” de l’Armée de libération nationale (ELN) est également active dans l’exploitation des ressources minières. Avec la bénédiction du duo Chavez-Maduro, ces mafias, qui occupent des positions élevées dans leur gouvernement, exploitent (sur un territoire beaucoup plus vaste qu’au Brésil, en Équateur et au Pérou) les mines d’or, de diamants et de coltan. 2 Ces activités détruisent les végétaux, la faune et engendrent une pollution élevée des rivières.

Au Mexique, le président Andrés Manuel López Obrador (AMLO) a également lancé de grands travaux qui vont encore un peu plus grignoter les surfaces boisées : le “train Maya” et la raffinerie Dos Bocas. “Le président a affirmé que pas un seul arbre ne serait abattu pour construire le “train maya”, ce qui semble improbable puisque la péninsule du Yucatán est presque entièrement recouverte d’une végétation tropicale très dense, sans parler des forêts du Chiapas. Les scientifiques évoquent une menace pour la biodiversité, et notamment pour l’immense population de jaguars du Yucatán”. 3

Le même constat peut être établi en Afrique et en Asie. En Angola, gouverné par le MPLA, 130 00 incendies ont déjà eu lieu cette année. En 2015, en Indonésie, les forêts tropicales de Bornéo et Sumatra ont été frappées par de gigantesques feux, principalement à cause de la généralisation des plantations de palmiers (pour obtenir l’huile destinée à la fabrication de biocarburant).

Même en Alaska et dans la zone arctique, les terres grillent. En Sibérie, en un an, 1,3 million d’hectares ont brûlé et des villes comme Novossibirsk ou Krasnoiarsk ont subi des nuages de fumée toxiques qui ont amené des milliers de personnes aux urgences.

En Europe, l’État français, par la bouche de son président, s’est fait donneur de leçon au monde. Lors du récent sommet du G7 à Biarritz, Macron a ainsi brandi la menace de mettre un terme aux accords UE-Mercosur 4 et a dénoncé à grands renforts de trompettes l’incurie du président brésilien, incapable d’éteindre le feu. Mais ces grandes envolées lyriques sont d’une hypocrisie et d’un cynisme sans nom. Rappelons que la France est un des acteurs majeurs de la pollution environnementale (notamment par l’usage massif de pesticides) et détruit également les écosystèmes par son agriculture intensive. Il s’agit également d’un pays amazonien, propriétaire de la seule forêt tropicale européenne : la Guyane française, qui est la deuxième plus vaste région de France. Si pour l’instant son projet criminel de faciliter l’implantation d’opérations minières des multinationales dans ce qu’on appelle la “Montagne d’Or” semble abandonné par le gouvernement du fait de “l’incompatibilité du projet actuel avec les exigences de protection de l’environnement”, le fait d’en programmer désormais “une évaluation complète” ne signifie pas son abandon total et définitif. D’ailleurs, “les récentes annonces n’ont aucune valeur légale tant qu’une demande faite par la société minière n’aura pas été déboutée par les services de l’État”. 5

Toujours est-il qu’un tel projet a bien été envisagé sachant qu’il entraînerait des quantités énormes de déchets toxiques (arsenic, cyanure, etc.). Si aujourd’hui Macron et son gouvernement affirment vouloir laisser tomber le projet afin de se montrer responsables et soucieux de la défense de l’environnement, rappelons qu’en août 2015, le ministre de l’économie Macron était prêt à “tout faire pour qu’un projet de cette envergure puisse voir le jour”.

Le capitalisme entraîne l’humanité vers l’abîme

Ces feux de forêts, qui n’ont donc rien de “naturels”, sont une véritable catastrophe pour la vie. Au-delà des destructions qu’ils causent directement, ils aggravent aussi le réchauffement climatique. Aujourd’hui, la fumée des incendies est responsable d’environ 25 % des émissions mondiales de gaz à “effet de serre”. 6 L’industrie agroalimentaire est aujourd’hui plus polluante que les compagnies pétrolières ! C’est un cercle vicieux : le réchauffement favorise les incendies, ce qui facilite la déforestation, qui à son tour permet la propagation des incendies, qui libèrent plus de carbone, ce qui accroît le réchauffement climatique, dans une spirale infernale.

La pollution de l’air (comme celle qu’on a évoquée en Sibérie ou celle qui a obscurci le ciel de São Paulo, 15 heures après les incendies) est une des principales causes des décès prématurés. Une étude récente de l’ONU estime que 8,8 millions de personnes meurent chaque année de cette pollution. Ce taux est comparativement plus élevé dans les pays les plus “développés”.

Le capitalisme tue. Il détruit la planète et assassine les êtres humains. Voilà la vérité toute crue ! La bourgeoisie veut faire croire à la classe ouvrière qu’un capitalisme plus vert et plus juste est possible, un capitalisme où l’Amazonie ne serait plus considérée comme une entreprise mais comme une “réserve environnementale”, où partout la nature et ses forêts seraient plus raisonnablement cultivées. Mensonges ! Le capitalisme est basé sur l’exploitation par une minorité d’une immense majorité, sur la division de l’humanité en classes, la transformation des ressources naturelles et des êtres humains en marchandises. Le capitalisme est un système dont le moteur est la recherche de profit et l’accumulation. Rien d’autre ! Sa seule autre motivation a pour objet de masquer son exploitation sauvage en la recouvrant d’un voile hypocrite, celui de l’idéologie démocratique. Le capitalisme divise l’humanité en nations prêtes à se livrer une compétition à mort (jusqu’à la guerre).

La planète entière doit cesser d’être prisonnière de la dictature de ce système ; la nature doit être libérée de sa condition de marchandise. Mais cela n’est possible qu’en établissant un nouvel ordre sur toute la planète : le communisme, issu de la révolution internationale de la classe ouvrière.

Valerio, 30 août 2019

 

1) Le fleuve Amazone représente 18 % des eaux douces déversées dans les océans.

2) Minerai très convoité formé par deux minéraux (colombite et tantalite), exploité pour sa grande résistance à la corrosion et notamment utilisé pour la fabrication de composants électroniques (téléphonie mobile) mais également dans l’aéronautique et particulièrement la fabrication des réacteurs.

3) “Au Mexique, le projet présidentiel de train maya sur la voie de la polémique”, France Info (7 mars 2019).

4) Le Marché commun du Sud a d’abord été formé par l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay, puis par le Venezuela (maintenant suspendu) et la Bolivie (cette dernière étant en voie d’adhésion).

5) “Montagne d’or : les paroles du gouvernement n’enterrent pas le projet”, Reporterre (19 juin 2019).

6) “Déforestation : anatomie d’un désastre annoncé”, Le Figaro (21 août 2017).

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Destruction de l’environnement