Le CCI a-t-il modifié son analyse à l’égard des “gilets jaunes”? (partie 2)

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Nous publions ci-dessous un extrait du courrier adressé par notre camarade D au sujet de l’analyse du mouvement des « gilets jaunes » et de notre réponse à son premier courrier.

Chers camarades

[…] En relisant la réponse de SJ du 4 avril à ma précédente lettre, je suis tout à fait d’accord avec la réaffirmation du caractère inter-classiste de ce mouvement et de l’impossibilité de son évolution en tant que mouvement vers des positions franches de la classe ouvrière. Néanmoins, comme je suis d’accord avec l’impossibilité d’évolution d’un groupe trotskyste en tant que tel (BPA, LO, lambertistes) vers une transformation en groupe ou parti utile à la classe ouvrière dans une période prérévolutionnaire, je suis également d’accord avec une position “historique” du CCI : c’est-à-dire la possibilité de sécrétion d’un petit groupe issu de ces partis bourgeois qui émergerait sur des positions de classes. [...] Il reste dans la mouvance des gilets jaunes des personnes susceptibles d’évoluer de façon positive et s’il n’est pas question de brosser ces personnes dans le sens du poil, il ne faut pas commettre d’erreurs d’expressions littérales péjoratives qui seraient des freins à la poursuite de cette évolution positive. Je vous encourage à bien faire attention aux mots utilisés si des personnes de cette mouvance surgissaient en se posant des questions intéressantes et à bien différencier le fond (la fermeté sur l’interclassisme) et la forme (un ton positif). Je vous envoie en annexe un article du journal local qui s’intéresse à ceux qui se réclament encore de ce mouvement. Si les illusions démocratiques sont majoritaires, à part un travailleur indépendant les autres intervenants sont des salariés ou à la retraite. Cela indique que c’est cette composante d’ouvriers qui reste fidèle à ce mouvement de contestation. […]

Bon courage, amitiés

D.

Comme nous pouvons le constater, il y a un accord avec le camarade D sur la nature interclassiste de ce mouvement, mais le camarade n’a, semble-t-il, pas été convaincu par nos arguments sur une partie de notre intervention qui n’aurait pas été suffisamment « positive » et pourrait même être un « frein » pour « l’évolution positive » (nous comprenons sur des positions de classes) d’éléments ayant participé à ce mouvement. Encore une fois, il ne nous semble pas avoir fait preuve d’un « ton agressif » ou de condescendance vis-à-vis des éléments de la classe ouvrière prisonniers de ce mouvement, aussi stérile et nocif qu’il ait été pour le développement de la conscience de classe. D’autre part, notre intervention s’adressait non pas à tel ou tel élément participant ou non aux « gilets jaunes » mais à l’ensemble de la classe ouvrière, en la mettant en garde contre le danger que font peser les luttes interclassistes. Si le CCI a été amené à utiliser un certain nombre de termes (tels que « zones périurbaines » ou encore « secteurs les plus pauvres ») pour dessiner les contours de la composante ouvrière participant à ce mouvement, c’était uniquement pour mettre en évidence qu’il s’agissait essentiellement des franges les plus précaires et écrasées du prolétariat, des parties extrêmement vulnérables à l’idéologie bourgeoise et petite-bourgeoise et donc plus enclines à se faire embarquer dans des mobilisations qui ne font pas partie du combat du prolétariat. Comme l’indiquait la Gauche communiste de France dans un article paru dans la revue Internationalisme en 1947, (1) « dans de telles luttes [celles qui renforcent le capitalisme] les révolutionnaires n’ont pas à pousser des “hourra !” ni à se frotter les mains d’aise en clamant “dans le monde entier les ouvriers entrent en lutte”, mais à expliquer sans cesse aux ouvriers le rôle de dupes et de victimes qu’ils jouent réellement. Seules les luttes dont les objectifs sont la défense des intérêts immédiats et historiques des ouvriers présentent un caractère de lutte de classe du prolétariat et peuvent être prises pour mesure de l’intensité de la lutte et seules de telles luttes engendrent les conditions pour la constitution du Parti de classe ».

Si les échanges d’arguments entre le camarade D et le CCI sur cet aspect ne sont, pour le moment, pas parvenus à une pleine clarification, cela ne signifie pas pour autant que le débat soit clôt. Nous invitons donc nos lecteurs à prendre part à cette discussion en apportant leur contribution par courriers.

CCI

 

1 « Problèmes actuels du mouvement ouvrier : les conditions historiques de la formation du parti », Internationalisme n°19 (1947).

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