Guerre du Golfe : massacres et chaos capitalistes

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Seule la classe ouvrière Internationale peut Instaurer un véritable nouvel ordre mondial

Au moment où nous mettons sous presse, la guerre du Golfe est officiellement terminée. Elle a été rapide, bien plus rapide que les états-majors ne le laissaient prévoir ou peut-être même ne l'escomptaient. L'article éditorial qui suit a été écrit au début de l'offensive terrestre de la coalition américaine contre l'Irak, il est donc daté, cependant, la dénonciation qu'il contient de la boucherie qu'a représentée cette guerre est toujours d'actualité. L'introduction reprend en quoi les positions politiques et les analyses qui y sont défendues sont confirmées dès les premiers jours de I'« après-guerre ».

Introduction

Fin de la guerre du Golfe : les USA, « gendarme du monde »

La fin de la guerre est venue confirmer les véritables objectifs de la bourgeoisie américaine : la démonstra­tion de son énorme supériorité militaire vis-à-vis, non seulement des pays périphériques, tel l'Irak, que l'impasse économique risque de plus en plus de pous­ser vers des aventures militaires, mais aussi et surtout vis-à-vis des autres puissances du monde, et particu­lièrement celles qui constituaient le bloc occidental : le Japon et les grands pays européens.

La disparition du bloc de l'Est, en faisant disparaître, pour ces/puissances, le besoin du « parapluie » mili­taire américain, portait avec elle la disparition du bloc occidental lui-même et la tendance vers la reconstitution d'un nouveau bloc impérialiste. L'effacement complet, au cours de la guerre, des deux seuls candidats sérieux au « leadership » d'un tel nou­veau bloc éventuel, l'Allemagne et le Japon, la mise en évidence de leur impuissance militaire constituent un avertissement pour l'avenir : quel que soit le dynamisme économique de ces pays (en réalité, leur capacité à mieux résister à la crise que leurs rivaux), les USA ne sont nullement disposés a les laisser piéti­ner leurs plates-bandes. De même, toutes les petites velléités de la France « d'affirmer sa différence » (voir l'éditorial de la Revue Internationale, n° 64) jusqu'à la veille du 17 janvier, se sont volatilisées dès que les USA ont réussi à imposer LEUR « solution » à la crise : l'écrasement militaire de l'Irak. Aujourd'hui, la bourgeoisie française en est réduite à frétiller de la queue comme un petit caniche lorsque Schwarzkopf félicite les troupes françaises pour leur « absolutely superb job » et que Bush reçoit Mitterrand en lui pro­diguant des amabilités. Quant à la Communauté européenne, que certains présentaient comme le futur grand rival des USA, elle a été parfaitement inexis­tante tout au long de la guerre. En somme, s'il était encore nécessaire d'identifier les véritables objectifs des USA eh rendant cette guerre inévitable et en la menant, ses résultats sont la pour mettre en évidence ces objectifs.

Une « victoire à la Pyrrhus »

De même, avec la fin des combats est apparu très vite ce que nous annoncions dès le début du conflit (voir Revue Internationale, n° 63) : à la guerre ne succédera pas la paix, mais le chaos et encore la guerre. Chaos et guerre en Irak même comme l'illustrent tragique­ment les affrontements et les massacres dans les villes du sud ainsi qu'au Kurdistan. Chaos, guerre et désordres dans toute la région : Liban, Israël et les territoires occupés. Bref, la glorieuse victoire des « alliés », l'instauration du « nouvel ordre mondial » que l'on veut mettre en oeuvre, donnent leurs pre­miers fruits : le désordre, la misère et les massacres pour les populations, les guerres qui couvent. Le nouvel ordre mondial ? D’ores et déjà c'est une instabilité encore plus grande dans tout le Moyen-Orient !

Et cette instabilité n'est pas prête à se limiter à cette région. La fin de la guerre contre l'Irak n'ouvre pas la perspective d'une baisse des tensions entre grandes puissances impérialistes. Bien au contraire. Ainsi, les différentes bourgeoisies européennes se préoccupent toutes déjà de la nécessité d’adapter, moderniser et renforcer leurs armements. Ce n'est sûrement pas en vue d'une « nouvelle ère de paix ». En outre, on com­mence à voir des pays comme le Japon, l'Allemagne et même l'Italie, revendiquer une réévaluation de leur statut international, par leur entrée au Conseil de Sécurité de l'ONU comme membres permanents. Ainsi, les USA, s'ils ont réussi avec la guerre à admi­nistrer la preuve de leur énorme supériorité militaire, s'ils sont parvenus, de ce fait, à ralentir pour un temps la tendance au chacun pour soi, ont remporté en réa­lité une victoire à la Pyrrhus. L'exacerbation des ten­sions impérialistes et l'engloutissement de la planète dans un chaos croissant sont inévitables, au même titre que l'aggravation de la crise économique qui se trouve à leur origine. Et il faudra encore bien d'autres « punitions » comme celle infligée à l'Irak, bien d'autres « exemples » sous forme de monstrueux mas­sacres pour « garantir le droit et l'ordre ».

Le « nouvel ordre mondial » :                                          ,

Misère, famines, barbarie, guerres

Il y a encore un an, après la chute du mur de Berlin, la bourgeoisie, les gouvernements, les médias, nous ont clamé triomphalement que le capitalisme «libéral» avait gagné, qu'une ère de paix et de prospérité s'ouvrait avec la disparition du bloc impérialiste de l'Est et l'ouverture des marchés de ces pays. Ces men­songes ont été anéantis : à la place clés marchés de l'Est, se trouvent des économies ravagées et le chaos; à la place de la prospérité retrouvée, se développe la récession mondiale à partir des USA. A la place de la paix, nous avons eu l'intervention sanglante de la force militaire la plus gigantesque depuis la seconde guerre mondiale. Aujourd'hui, toujours aussi triom­phalement, les secteurs dominants de la bourgeoisie internationale nous affirment qu'avec la défaite de l'Irak, l'instauration d'un « nouvel ordre mondial » est maintenant une chose acquise : la paix sera atteinte, la stabilité internationale gagnée. Le mensonge ne pourra que tomber à son tour.

La conclusion rapide de la guerre, le faible nombre de tués du côté des « coalisés », ont permis à la bourgeoi­sie de plonger momentanément dans le désarroi la classe ouvrière des métropoles capitalistes, celle dont dépend en fin de compte le sort de l'affrontement entre le prolétariat et la bourgeoisie à l'échelle mon­diale et historique. Même si beaucoup d'ouvriers res­sentent comme une blessure l'extermination de dizaines ou de centaines de milliers d'exploités irakiens, ils se sentent impuissants face à la campagne de triomphalisme chauvin qui, pour un temps, grâce aux mensonges des médias, étourdissent les esprits. Mais l'avenir de misère, de famine, de chaos, de massacres impérialistes toujours plus monstrueux qui est le seul que la classe dominante puisse proposer va nécessairement ouvrir les yeux des masses ouvrières et permettre que leurs combats s'imprègnent de plus en plus de la conscience de la nécessité de renverser ce système. C'est à cette prise de conscience que doivent participer activement les révolutionnaires.

RF, 11/3/91

 

Editorial

 

Horreur, barbarie et terreur. Voilà la réalité du capi­talisme mise à nu par la guerre contre l'Irak.

Horreur et barbarie. La guerre, la guerre entre gang­sters impérialistes, continue. C'est l'heure de l'offensive terrestre des forces de la coalition. Et l'Irak en sortira défait. Des centaines de milliers de morts -on ne sait exactement pour l'instant-, sans doute autant de blessés, de disparus, des destructions mas­sives en Irak, au Koweït seront, et sont déjà, le résul­tat sanglant et terrible du conflit.

Horreur et cynisme de la bourgeoisie des pays « coalisés ». Sans aucune pudeur, se vautrant dans le sang et en jouissant, elle se vante de ses prouesses techniques dans la guerre. Dans un premier temps, afin d'endormir les réticences à la boucherie, c'était « la guerre propre »: les missiles ne touchaient que des cibles militaires, rentraient par les fenêtres et les cages d'escalier, mais ne tuaient personne, tout au moins parmi les civils. Quelle merveille. Il s'agissait d'une opération « chirurgicale ». Puis la macabre réa­lité ne put être plus longtemps masquée. Des milliers de civils sont morts sous les bombardements massifs des B52 et des missiles de croisière. Saurons-nous jamais l'effroyable vérité? Comble du cynisme: lorsque l'explosion de l'abri de Bagdad a fait sans doute 400 morts, c'est tout juste si le Pentagone ne désignait pas comme coupables ces civils qui n'auraient pas du se réfugier dans cet abri et se mettre sur le chemin des bombes !

L'admiration sans borne des médias, des journalistes, des spécialistes militaires, à l'égard des prouesses techniques, scientifiques, mises au service de la mort et de la destruction, est absolument écoeurante. Pen­dant ce temps, le capitalisme est incapable d'enrayer les épidémies de toutes sortes dans le monde, le cho­léra en Amérique Latine, le SIDA, et combien d'autres encore. La science et la technique sont au service de la mort et de la destruction à une échelle de masse. Voilà la réalité du capitalisme.

La terreur, la terreur capitaliste, la terreur d'une société pourrissante, s'est abattue sur les populations. Terreur à grande échelle sur l'Irak et sur le Koweït. La coalition américaine use des armes les plus sophisti­quées, les plus meurtrières, les plus « scientifiques » et massives. Nous ne sommes pas des spécialistes mili­taires, et reconnaissons-le, ne trouvons aucun goût dans le sinistre décompte. Au bas mot: 100 000 tonnes de bombes ont été larguées, 108 000 sorties aériennes accomplies. Combien de missiles lancés des bateaux de guerre croisant dans 1e Golfe Persique, dans la Méditerranée ? La bourgeoisie américaine et ses al­liées n'hésitent pas à utiliser les moyens de destruc­tion les plus massifs -exception faite de l'arme nucléaire, la prochaine fois sans doute - tels que les bombes à souffle et le napalm. En comparaison les exactions, tout aussi horribles, de la soldatesque de Saddam Hussein ne sont que de l'artisanat.

Même au sein des abris, les populations civiles ne sont pas en sécurité. Peut-on imaginer les dégâts, les peurs, la panique, l'angoisse, des enfants, des femmes, des hommes vieux ou jeunes au milieu des bombardements, des explosions - quand Bassorah est touchée, la terre tremble jusqu'en Iran -, des sirènes, et souvent des morts et des blessés lorsqu'on sait que l'aviation US bombardait 24 heures sur 24. Lorsqu'on sait que, la première nuit de guerre, il avait été largué sur l’Irak une fois et demi équivalent de la bombe atomique d'Hiroshima. Lorsqu'on sait qu'au bout d'un mois, l'Irak et le Koweït ont reçu plus de bombes que l'Allemagne durant toute la deuxième guerre mondiale !

Le coût d'un missile « Patriot » est d'un million de dollars US. Le coût d'un avion furtif de 100 millions de dollars. Le coût total de la guerre va très certaine­ment dépasser les 80 milliards de dollars dans les cas de figure les plus minimes. En fait, certainement beaucoup plus, ne serait-ce qu'en prenant en compte les destructions massives de l'Irak, du Koweït, des puits de pétrole. Au bas mot, on parle déjà de 100 milliards de dollars pour chacun des deux pays. Vingt années de travail des prolétaires en Irak viennent d'être anéanties. Est-il besoin de rappeler que la dette de l'Irak avant l'invasion du Koweït était seulement -si l'on peut dire - de 70 milliards ? Nous assistons à un immense gaspillage de biens et de richesses qui partent en fumée.

Pendant ce temps, les trois quarts de l'humanité ne mangent pas à leur faim et vivent dans le dénuement le plus total, et chaque jour plus tragique. Pendant ce temps, 40 000 enfants de moins de 5 ans meurent chaque jour de sous-alimentation dans le monde ! Combien, sans en mourir, en souffrent et en seront marqués de manière irréversible, à vie ?

Les capacités de production sont au service des moyens de destruction et de mort, non au service de l'humanité et de son bien-être. Telle est la réalité sans fard du capitalisme.

 

La dictature et le totalitarisme du capitalisme

Horreur et mensonges éhontés. Au bombardement de l'Irak, répond le bombardement médiatique, propa­gandiste, des populations, et spécialement de la classe ouvrière, du monde entier. Les médias appa­raissent réellement pour ce qu'ils sont : au service de la bourgeoisie, au service de ses buts de guerre. Depuis le premier jour de celle-ci, du temps de la « guerre propre », la mobilisation et l'enthousiasme des médias sont à vomir. Mais la manipulation des informations et les propos « va-t-en-guerre » des jour­nalistes bourgeois ne devaient pas suffire encore. Les différents Etats capitalistes belligérants, surtout les plus « démocratiques », en premier lieu les USA, ont imposé la censure militaire, tout comme de vulgaires Etats fascistes ou staliniens, afin d'imposer la dicta­ture la plus complète sur les informations et sur «l'opinion publique». Voilà ce qu'il en est de la démocratie bourgeoise tant vantée.

Autre mensonge: il s'agirait d'une guerre pour le res­pect du Droit international transgressé par la bour­geoisie irakienne. De quel Droit s'agit-il, sinon de celui du plus fort, du droit capitaliste ? C'est soit par intérêt, telles la Syrie, l'Egypte, la Grande-Bretagne, soit par le chantage et les menaces, envers l'URSS, la Chine, la France, etc., que les USA ont obtenu l'accord de l'ONU pour intervenir militairement.

Saddam Hussein a beau jeu de crier au scandale quand il affirme qu'il y a deux poids, deux mesures et que jamais l'ONU, ni bien sûr les USA, n'ont déployé les mêmes forces armées pour qu'Israël respecte les résolutions lui enjoignant de quitter les territoires occupés. La bourgeoisie ne s'embarrasse guère du Droit, de son Droit, du Droit capitaliste, quand celui-ci ne la sert plus directement.

Apres la guerre, ni paix, ni reconstruction : encore la guerre impérialiste

Une fois le conflit déclenché, toute « raison », toute « morale », ont complètement disparu. Les USA veu­lent mettre à genoux l'Irak, lui infliger des destruc­tions colossales et insurmontables. A n'importe quel prix. Tel est le processus implacable de la guerre impérialiste. La bourgeoisie américaine n'a pas le choix. Pour remplir ses objectifs politiques, pour affirmer sans ambiguïté son hégémonie impérialiste sur le monde, son leadership, elle est contrainte d'aller jusqu'au bout de la guerre en utilisant les énormes moyens de destruction dont elle dispose. Raser l'Irak, raser le Koweït, jusqu'à la capitulation complète, sont les objectifs de la bourgeoisie US. Telles sont ses consignes aux militaires.

Saddam Hussein, dans sa tentative désespérée de s'en sortir, est poussé à l'utilisation sans retenue, sans frein, suicidaire, de tout ce qui lui tombe sous la main: les Scuds, la marée noire dans le Golfe Persique, l'incendie des puits de pétrole pour se protéger des vagues incessantes des bombardiers. Lui non plus, il n'a pas le choix.

Les deux pays, l'Irak et le Koweït, à feu et à sang. Leur principale richesse, le pétrole, flambe et les puits seront certainement dévastés pour un bon moment. C'est tout l'environnement de la région qui est gravement menacé. Les dégâts sont sans doute déjà considérables. Peut-être même en grande partie irréversibles.

Et dans ce bain de sang, nous avons entendu les pleurs mensongers et hypocrites des opposants bour­geois à la guerre. Les pacifistes, les gauchistes qui quant ils ne soutiennent pas ouvertement 1’impérialisme irakien comme le font les trotskistes appellent  à manifester « contre  la guerre pour le pétrole » et pour la paix. La paix est impossible dans le capitalisme. Elle n'est qu'un moment de prépara­tion a la guerre. Le capitalisme porte en lui la guerre impérialiste. La guerre au Proche-Orient vient encore de le confirmer avec éclat.

Même si le contrôle du pétrole reste important, l'objet central de la guerre n'est pas là. La paralysie depuis le 2 août des puits de pétrole d'Irak et du Koweït, leur embrasement par la suite, n'ont pas vu un renchérissement du baril, mais au contraire sa baisse. Il n'y a aucun risque de pénurie. Il y a surpro­duction de pétrole comme il y a surproduction généralisée de marchandises, et récession mondiale.

La guerre n'est pas encore finie et que ne voit-on pas déjà ? Les ignobles vautours baptisés « hommes d'affaires » fondre sur les décombres et s'arracher, au titre de la reconstruction, les dépouilles du carnage. Les compagnies anglaises s'indigner de la rapacité de leurs concurrentes américaines. Mener la guerre ensemble est une chose morale et juste, mais business is business. Contre ces nouveaux mensonges, soyons clairs il n'y aura pas de reconstruction qui puisse permettre une reprise de l'économie mondiale. Un pays comme l'Irak était déjà incapable de rembourser sa dette de 70 milliards de dollars avant la guerre. C'est d'ailleurs une des raisons de son aventure tra­gique. Alors comment, avec quoi, reconstruire? Alors que le capitalisme mondial s'avère impuissant à remettre un tant soit peu en état de fonctionner les économies ruinées des pays de l'ex-bloc capitaliste stalinien.

Tout cela n'est que mensonges et propagande afin de faire passer la guerre et ses sacrifices auprès des populations et, tout particulièrement auprès de la classe ouvrière des pays les plus industrialisés. Afin de présenter des « raisons » de soutenir l'effort de guerre.

Mais de raison pour soutenir cette guerre, comme dans toute guerre impérialiste, pour l'humanité comme un tout il n'y en a pas. Pour le prolétariat comme classe exploitée et révolutionnaire, il y en a encore moins. Ni sur un plan historique, ni écono­mique, ni humanitaire (voir "Le prolétariat face à la guerre", p.14). Ce n'est qu'un massacre de vies humaines, un gaspillage incroyable de moyens tech­niques et de forces productives, qui disparaissent à jamais. Et au bout, ce n'est pas la « paix» qui appa­raît, mais de nouveau la guerre, la guerre impérialiste.

Car, contre tous les mensonges dont on nous abreuve, de paix il n'y en aura pas. Ni au Proche-Orient, ni sur le reste de la planète. Bien au contraire.

La guerre contre l'Irak prépare les guerres de demain

La défaite de l'Irak bien évidemment va marquer une grande victoire des USA. Loin de ses déclarations pacifiques, morales sur le bien et le mal, la bourgeoi­sie américaine menace en réalité tous ceux qui vont être  tentés   ou  contraints  de  suivre   l'exemple  de Saddam Hussein. Les USA sont la première puissance impérialiste mondiale, la seule « super-puissance » depuis l'effondrement de l'URSS. A ce titre, parce que c'est le seul pays qui puisse réellement le faire, ils ne resteront pas sans réaction face à la multiplication des guerres locales, aux remises en cause des fron­tières, au développement du chacun pour soi entre Etats, au chaos. Tel est l'avertissement. Il en va de leur autorité, de leur hégémonie, d'un « ordre mon­dial » dont ils sont le principal bénéficiaire. Voilà une des raisons du jusqu’au-boutisme sanglant des USA, de leur volonté délibérée de raser l'Irak, de mener la guerre jusqu'à la reddition complète. Mais cet aver­tissement ne s'adresse pas qu'aux imitateurs poten­tiels - ils sont nombreux - de Saddam Hussein. Il y a une autre raison plus fondamentale au jusqu'auboutisme américain.

C'est aussi et surtout un avertissement aux autres grandes puissances, l'Allemagne, le Japon, les pays européens, et dans une moindre mesure l'URSS. La domination impérialiste américaine est toujours d'actualité. Envoyer les forces armées au Proche-Orient, faire la démonstration évidente et meurtrière de leur immense supériorité militaire, entraîner les autres - la France par exemple - dans l'intervention, mener la guerre jusqu'au bout, écraser l'Irak dans le feu et le sang, est l'occasion de renforcer leur « leadership » mondial. Et surtout d'essayer d'éteindre toute velléité de politique indépendante alternative, d'émergence d'un éventuel autre pôle impérialiste concurrent capable de remettre en cause leur domina­tion. Même si ce dernier est hautement improbable dans l'immédiat.

Voilà la raison de leur refus systématique de tous les plans de paix et propositions de négociation menant au retrait de l'Irak, proposés tour à tour par la France le 15 janvier, et par l'URSS avant l'offensive terrestre -à chaque fois soutenus par l'Allemagne, l'Italie... Voilà la raison des réponses à chaque fois plus intran­sigeantes, des ultimatums chaque fois plus durs, ren­voyés à la figure de ceux qui présentaient ces plans de paix.

La guerre, les dizaines de milliers de tonnes de bombes, les centaines de milliers de morts, les des­tructions innombrables, l'Irak et le Koweït rasés pour que la bourgeoisie américaine affirme et renforce sa domination et son pouvoir impérialistes dans un monde en crise, en guerre, en pleine décomposition. Voilà les véritables buts de la guerre !

C'est par la perspective de la guerre et son déclen­chement que la bourgeoisie américaine a réussi tant bien que mal à imposer aux autres puissances la « coalition » derrière ses buts de guerre. A chaque fois que la pression s'est relâchée, Tes tendances centri­fuges, a l'opposition aux USA, à l'émergence d'une alternative aux menées guerrières des USA, se sont exprimées (voir Revue internationale, n°64, Editorial). Preuve que ces pays étaient bien conscients du piège et du terrain dans lesquels leur rival impérialiste américain les menait, les enfermait et les rendait impuissants, encore plus affaiblis.

Une fois la guerre finie, les tensions entre les USA et les pays européens, l'Allemagne tout particulière­ment, et le Japon, vont se développer inévitablement. Devant la force économique de ces pays, leur montée en puissance, les USA vont être amenés de plus en plus à imposer un corset de fer sur ces antagonismes naissants, à utiliser la force dont ils disposent, c'est-à-dire la force militaire et donc la guerre.

La guerre contre l'Irak est la préparation des autres guerres impérialistes. Non de la paix. D'un côté, l'aggravation de la crise économique et la situation de décomposition, de chaos, dans laquelle s'enfonce le capitalisme, poussent inévitablement à d'autres aven­tures guerrières de même nature que celle de l'Irak. De l'autre, et dans cette situation, la première puis­sance impérialiste, face au chaos, face à ces nivaux potentiels, va utiliser de plus en plus sa force militaire et les guerres pour essayer d'imposer son « ordre » et sa domination. Tout pousse à l'accentuation des ten­sions économiques et guerrières. Tout pousse à la multiplication des guerres impérialistes.

Voilà ce qu'annonce la victoire militaire sanglante de la coalition occidentale.

Cette guerre impérialiste au Proche-Orient, comme toute guerre impérialiste, c'est en premier lieu la classe ouvrière qui la paye, qui en est la victime. De sa vie quand elle est sous 1’uniforme, enrôlée de force sur les terrains de bataille, ou quand elle se trouve tout simplement sous les bombes et les missiles. De sa sueur, de son labeur et de sa misère, quand elle a le « bonheur » de n'être pas directement massacrée.

Marx et Lénine sont morts et enterrés, clamait la bourgeoisie lors de l'effondrement du stalinisme. Pourtant le «Prolétaires de tous les pays, unissez-vous » de K.Marx est d'une actualité et d'une urgence brûlantes face à la folie nationaliste et guerrière qui s'abat sur l'ensemble de l'humanité.

Oui, le prolétariat international reste bien la seule force, la seule classe sociale qui puisse s'opposer à cette machine chaque fois plus infernale et folle qu'est le capitalisme en décomposition. Elle est la seule force qui puisse mettre à bas cette barbarie et construire une autre société où toute cause de guerre et de misère aura disparu.

Le chemin est encore long. Il faut pourtant s'y enga­ger avec détermination car les échéances dramatiques se rapprochent chaque jour.

Refuser les sacrifices économiques, la logique de la défense de l'économie nationale, est la première des étapes. Refuser l'unité et la discipline nationale, la logique de la guerre impérialiste, refuser la paix sociale, voilà le chemin. Voilà les mots d'ordre que les révolutionnaires doivent lancer.

La crise économique, la guerre commerciale accrue, exacerbent l'impérialisme et la guerre. Crise et guerre sont au capitalisme ce que pile et face sont à la pièce de monnaie. La première, la crise, mène à la guerre. Celle-ci à son tour aggrave la crise. Les deux sont liées. La lutte économique, revendicative, de la classe ouvrière contre les attaques et les sacrifices, et la lutte contre la guerre impérialiste, sont une seule et même lutte: la lutte révolutionnaire de la classe ouvrière, la lutte pour le communisme.

Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !

RL, 2/3/91.

 

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