Mediator : la santé ne vaut pas cher... mais rapporte gros !

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Le scandale du Mediator est venu mettre en lumière les louches accointances qui unissent laboratoires pharmaceutiques, profit et partis politiques.

Le président Sarkozy nous a promis “la transparence la plus complète” sur la façon dont un médicament, soupçonné d’avoir tué entre 500 et 2000 personnes en France, interdit aux Etats-Unis depuis 1997, a été officiellement soutenu par l’Etat. Pendant 33 ans, ce “Terminator” médicamenteux a sévi malgré des rapports d’experts médicaux répétés signalant sa dangerosité.

Xavier Bertrand, re-ministre de la Santé, qui avait décidé de maintenir le remboursement à 65  % du Mediator en 2006, s’est lancé récemment à coups de flonflons dans ce qu’il voudrait faire passer pour un grand nettoyage des ces véritables écuries d’Augias grâce à une loi prémunissant contre “les conflits d’intérêts” au sein de l’Etat. Après le feuilleton Woerth-Bettancourt, il est l’heure pour la bourgeoisie française d’orchestrer une mascarade d’opération “main blanche” !

Tout cela n’est que du tape-à-l’œil, bien sûr, et n’empêchera pas les sales méthodes et les affaires de continuer comme avant. Rappelons les liens reconnus entre Sarkozy et Servier, qui a financé sa campagne électorale. Rappelons que Martine Aubry en 1999 et Kouchner en 1998 avaient eux aussi en leur temps ignoré les rapports et leurs avertissements sur le Mediator. Et si celui-ci est autant sur le devant de la scène, ce n’est pas parce que le gouvernement s’est décidé à jouer les “Monsieur Propre”, c’est pour mieux enterrer et masquer l’ensemble des pratiques hautement dangereuses et mortelles qui font le quotidien de cette partie du monde de la santé publique.

Ainsi, la France a continué jusqu’en 2004 à commercialiser le Vioxx (1), médicament anti-douleur et anti-inflammatoire, interdit aux Etats-Unis en 2004 : ce dernier serait responsable entre 1999 et 2004, selon la FDA (Food and Drug Administration, agence de régulation américaine des médicaments), de 160 000 attaques cardiaques ou cérébrales et de 40 000 décès. Dans l’Hexagone, il a fallu l’arrêt pur et simple du Vioxx par le laboratoire Merck pour que l’Afssaps (Agence française de sécurité des produits sanitaires) reconnaisse dans un discret communiqué 9 mois plus tard que ce médicament avait de graves conséquences sur le plan cardio-vasculaire. Silence radio sur le nombre de morts !

On se souvient du Tamiflu, hautement préconisé en cas de grippe A (porcine) par le gouvernement à l’automne 2009 et pendant l’hiver suivant, bien que de nombreuses sonnettes d’alarme aient retenti dans le monde médical. Une étude du British Medical Journal sortait le 8 décembre 2009 pour dénoncer le fait que le Tamiflu n’avait pas d’effet mesurable ni en prévention, ni sur l’intensité de la maladie, ni sur les complications, ni sur le nombre d’hospitalisations, ni sur la mortalité. En revanche, la Société scientifique de médecine générale et le Forum des associations de généralistes mettaient en garde sur les effets indésirables importants sur les enfants, et éventuellement sur les femmes enceintes. On sait que le laboratoire Roche avait totalement trafiqué les résultats de ses études : mais pour 33 millions de médicaments achetés par la France que ne ferait-on pas.

Evidemment, il ne s’agit pas d’une spécificité française. Jouer sans vergogne avec la vie humaine en faisant du profit et au nom du profit est un sport international pour la bourgeoisie. Cela fait partie de son être profond, dans le domaine de la santé comme dans tous les autres.

Pour ce qui concerne les laboratoires pharmaceutiques, le marché est juteux. Une étude de 2007 faite pour ces entreprises, intitulée “Pharma 2020 : The vision – What path will you take ?” projette que le marché mondial de l’industrie pharmaceutique sera de 1300 milliards de dollars en 2020. Les rédacteurs misent en particulier sur l’augmentation des maladies chroniques dans les pays “en voie de développement”. Il s’agit de “l’intérêt des patients”, on n’en doute pas. Patients auxquels il est reproché de ne pas prendre sérieusement leurs traitements, alors que s’ils montraient un plus grand sérieux dans ce suivi, grâce à des stratégies de “com” ad hoc, c’est un bonus de 30 milliards de dollars qui pourrait être gagné par les laboratoires. Il faut donc “innover” avec de nouvelles “molécules” et convaincre les gens qu’elles leur sont bénéfiques ; la preuve, c’est la caution scientifique. Et elle vaut son pesant de gélules ! 6 à 43  %, chiffre indéterminé dans l’opacité de la nébuleuse pharmaceutique, des résultats des essais ne sont pas fournis par les laboratoires. Mais il suffit qu’ils n’en fournissent que deux positifs, même si c’est au milieu d’une myriade de résultats négatifs. De plus, ils sont seuls habilités à les fournir, les autres se faisant au fil du temps et à l’usage. Alors, pourquoi se gêner ? Entre des instances sans moyens et des politiciens qui encouragent ces pratiques, au nom de la santé… de l’économie, c’est l’eldorado assuré.

Les laboratoires ne lésinent sur aucun moyen pour “aider à la guérison” de multiples maladies, comme le sida. Ils font ainsi des pieds et des mains aux différents sommets de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) pour empêcher la concurrence indienne ou chinoise de produire des génériques à bas prix et de les exporter vers les pays pauvres qui sont les plus frappés par le virus. Dans le même souci permanent d’œuvrer au bien-être des populations, ils expérimentent à tout va, galvanisés par la concurrence qui fait rage mondialement. A New York (2), les foyers de l’Aide à l’enfance de Harlem servent de plaque-tournante pour un immonde commerce d’enfants séropositifs servant de cobayes, sous la houlette du comité d’éthique de la ville. Ceux-ci proposent aux parents de ceux qui sont dans leur famille de toucher 25 dollars par mois en acceptant qu’ils servent de cobayes, avec de nombreuses souffrances à la clé sinon la mort. Et les services sociaux d’Aide à l’enfance sont, là encore, mis à contribution : les enfants sont donc enlevés à leur famille, pour “carence de soins” (sic !), pour être placés en foyer où les laboratoires pourront œuvrer à leur guise pendant des années.

Soigner les populations pour le bien-être de tous, par humanisme et bonté d’âme ? C’est pour la galerie. La bourgeoisie s’efforce d’extirper le moindre sou(ffle) de chaque être humain, malade ou en bonne santé. Il est significatif que, selon l’OMS (Organisation mondiale de la santé), 80  % des pathologies cardiaques, des accidents vasculaires cérébraux, des diabètes et 40  % des cancers pourraient être évités avec une réelle prévention. Or, cette dernière ne représente que 3  % des dépenses de santé des pays de l’OCDE… car elle n’est pas “rentable” !

Les choses ne peuvent être plus claires. Les larmes de crocodiles et les discours offensés que versent les représentants de la bourgeoisie ne peuvent pas masquer leur cynisme et l’incurie phénoménale de ce système capitaliste décadent.

Mulan (27 janvier)

 

1) Source www.lmous.com

2) Dailymotion

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