Attaques anti-ouvrières : le prolétariat ne peut pas compter sur les syndicats pour se défendre

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Après la victoire du Non au référendum, le gouvernement avait lancé la promesse de s'attaquer en priorité au problème de l'emploi et du chômage. Dans la bouche de la bourgeoisie, cela ne pouvait signifier qu’une chose : une nouvelle attaque en règle contre les chômeurs et contre l'ensemble de la classe ouvrière. Aujourd'hui, les "100 jours" que s'était donnés de Villepin pour régler la question arrivent à leur terme. Et la bourgeoisie aura largement profitée des vacances d’été pour faire passer en urgence (et par voie d’ordonnance) sa série de nouvelles mesures anti ouvrières.

Une attaque contre les chômeurs

Chirac avait déjà donné le sens de l'action du gouvernement lors de la Garden Party du 14 juillet à l'Elysée : "Il y a trop de Français qui ne sont pas incités ou encouragés par des procédures adaptées à prendre des emplois." Autrement dit, les ouvriers réduits au chômage seraient des fainéants et des tire-au-flanc qu'il faudrait inciter à travailler...

Donc, le gouvernement s'est engagé plus résolument encore que ses prédécesseurs, de droite comme de gauche, à les éliminer purement et simplement des listes de l'ANPE et à supprimer leurs allocations. Ainsi, l'accès aux indemnité-chômage va diminuer de façon drastique, sous prétexte de "pousser à la recherche d'emploi" : moins 20% de l'allocation après un premier refus de l'emploi "sans motif légitime", 50% au deuxième, puis suppression totale pour "absence d'actes positifs de recherche d'emploi". Par la mise en oeuvre de ces directives, le gouvernement prétend "abolir l'assistanat" qui ronge la société française, portant en réalité un coup violent sur les chômeurs, en faisant baisser à la fois le coût qu'ils représentent et les chiffres officiels du chômage.

Les trois millions d'ouvriers au chômage qui existent officiellement en France vont donc être mis en demeure de choisir entre le travail à n'importe quelles conditions et n'importe quel salaire ou la disparition dans le néant avec la pire misère. Et ils seront nombreux à subir inexorablement la seconde "solution". Ainsi, officiellement, seulement 215 000 emplois ne trouvent pas preneurs sur l'ensemble du marché du travail, ce qui ne représente qu'un emploi environ pour cinq chômeurs ; mais, de plus, l'ANPE estime elle-même qu'en réalité ce chiffre se réduirait à 97 000 du fait que les employeurs ne déclarent pas leurs embauches à celle-ci. On mesure là l'énormité de l'hypocrisie et des mensonges gouvernementaux.

Pour mettre en évidence l'efficacité d'une accélération de son action "pour défendre l'emploi", le gouvernement s'est vanté de la baisse du chômage de 1,4% fin juin. Et il s'avère en effet que cette diminution est la conséquence de la "mise à jour" des fichiers de l'ANPE, c'est-à-dire de la radiation de nombreux chômeurs.

Pour le premier ministre de Villepin, le contrat nouvelle embauche (CNE) repose sur un "équilibre fondamental", celui de "plus de souplesse pour l'employeur les deux premières années, plus de garanties pour le salarié en cas de rupture". Il est clair que c'est tout bénéfice pour les employeurs, pour lesquels la "ristourne" est évidente : virer à volonté le personnel, directement en fonction des besoins du marché, sans préavis, sans justification aucune, et faire peser en permanence sur la tête des ouvriers la menace du licenciement afin d'avoir une main d'oeuvre plus corvéable et docile. Comme le disait un chef d'entreprise : "Le CNE nous permet de minimiser les risques si le projet ne marche pas. Rompre un contrat en CDI est plus compliqué." (Le Monde du 10 août 2005)

La seule "garantie" pour les jeunes salariés embauchés dans le cadre d'un CNE sera à coup sûr d'être exploités sans merci.

Voilà donc une des armes de choc que le gouvernement a sorties de son chapeau et dont il s'est empressé de faire accélérer la mise en oeuvre avant même septembre, contrairement à ce qui était prévu initialement. Loin de régler la question de l'emploi et du chômage, elle va accentuer la précarité des conditions de vie et de travail d'une partie mais aussi de toute la classe ouvrière. Ainsi, pendant le dernier trimestre 2004, 3 recrutements sur 4 ont été effectués en CDD, ce qui est révélateur de cette tendance que le CNE va encore venir alourdir.

De plus, la création du CNE, liée aux mesures sur les chômeurs pour leur faire accepter n'importe quoi sous peine de radiation, vient ajouter à la pression grandissante qui existe dans tous les secteurs et pour tous les âges à la baisse des salaires.

Dans le contexte de concurrence internationale qui fait rage, il s'agit de faire payer la crise économique aux prolétaires et de leur imposer les exigences d'un capital national aux prises avec la guerre commerciale.

La "riposte" des syndicats : une mascarade pour mieux faire passer les attaques anti-ouvrières

Les syndicats nous parlent de journées d'action pour "fêter l'anniversaire des 100 jours" à la rentrée. Quelle foutaise ! Pendant l'été, les mesures gouvernementales sont allègrement passées, devant des syndicats sans réaction, et qui parlent à présent de "rentrée chaude" et de "riposte unitaire". Mais si, d'un côté, ils ont laissé se mettre en place les attaques de fond dans le silence le plus complet, ils ne sont pas restés inactifs sur le terrain, face à de nombreuses grèves qui se sont déroulées cet été et dans tous les secteurs.

Chez Bata, à La Poste, dans certains centres de tri, chez Michelin, chez Nestlé, Virgin, Pizza Hut, dans le transport aérien, chez les cheminots d'Effia (entreprise privée employant des cheminots pour la SNCF), à FR3, chez les saisonniers agricoles, etc., partout, face à la lutte, les syndicats se sont efforcés d'enfermer les ouvriers dans le cadre du corporatisme de boîte le plus étroit, pour mieux faire passer les multiples attaques dont les ouvriers sont l'objet. Licenciements, fermetures d'usines, baisses des salaires, ils n'ont eu de cesse de canaliser la colère dans le secteur et d'isoler les ouvriers pour mieux briser la lutte et surtout empêcher la prise de conscience que c'est partout que la classe ouvrière est attaquée.

Face à l'offensive que la bourgeoisie, en France comme ailleurs, est contrainte de mener avec violence et avec une force qui ne peut que s'accroître, les ouvriers ne peuvent nullement compter sur les syndicats pour se défendre et pour mettre en avant les besoins vitaux d’extension et d’unité de la lutte ; au contraire, leur boulot, c’est de la saboter, de l'éparpiller en divisant et en affaiblissant la classe ouvrière. Ce sont les ouvriers eux-mêmes qui peuvent développer cette riposte, en prenant conscience de leurs propres forces, en sortant de l'isolement que leur imposent les syndicats et en allant chercher la solidarité avec leurs frères de classe qui subissent les mêmes attaques. La classe ouvrière en a les moyens : les ouvriers de l'aéroport d'Heathrow qui se sont mis en grève en solidarité avec des ouvriers d'un autre secteur ont encore montré cette capacité et cette nécessité qui se fait de plus en plus jour dans les rangs des prolétaires. Mais pour cela, il ne faut pas faire confiance aux syndicats et les rejeter, car ce sont les premiers ennemis de la solidarité ouvrière et du développement de ses forces.

KW (25 août)

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