Soumis par Révolution Inte... le
Napoléon, ce grand homme de la bourgeoisie, disait que la meilleure
figure de rhétorique était la répétition.
C'est ce que font les dirigeants des pays développés qui
nous répètent tous les ans que cela ira mieux demain.
Les ministres des finances et les dirigeants des banques centrales l'ont
encore confirmé lors du dernier sommet du G7, début février,
se félicitant que la reprise serait "plus ferme qu'espérée".
Trichet, président de la Banque Centrale Européenne, soulignait
même que ce sommet était arrivé à "une
situation gagnante pour tout le monde", affirmant par là
que les perspectives de croissance américaine allaient profiter
à tous et en particulier à l'économie européenne.
En réalité, depuis trois ans, la bourgeoisie prévoit
la croissance économique et, comme Sœur Anne, elle ne voit
rien venir. Révisant systématiquement à la baisse
les taux d'une croissance espérée comme le messie et,
comme lui, fondée sur des espérances quasi-mystiques,
les dirigeants des pays développés ont systématiquement
cherché à masquer que nous étions dans une période
de récession qui s'est avérée être une des
plus longues depuis la fin des années 1960. Pour la classe ouvrière,
les perspectives optimistes annoncées ne seront pas porteuses
d'améliorations car même s'il y a reprise, elle est fondée
sur des artifices porteurs d'orages économiques plus violents
que jamais pour l'avenir.
L'endettement astronomique de l'économie américaine montre la voie
Les grands spécialistes de l'économie mondiale eux-mêmes
sont les premiers à s'inquiéter de ce que l'endettement
astronomique de l'Etat américain, locomotive de l'économie
mondiale, ne pourra pas durer et qu'il constitue même le facteur
majeur d'une aggravation à terme de la crise. Les Etats-Unis
se sont ainsi maintenus à flot depuis juin 2003 avec une croissance
positive (en rythme annuel) de plus de 8% pour le dernier trimestre
2003 et de 3% pour l'ensemble de l'année. Mais à quel
prix ? Fin 2003, l'endettement global de l'économie américaine
(ménages, entreprises et gouvernement confondus) était
d'environ 36 850 milliards de dollars, en augmentation de quasiment
10% sur un an. En augmentation explosive de 8000 milliards de dollars
depuis 2000, et d'environ 3100 milliards entre 2002 et 2003, cette dette
correspond à 5% du Produit Intérieur Brut américain.
Et la perspective d'un taux de croissance de 4% prévu pour 2004
est en réalité fondée sur une aggravation de ce
déficit prévu pour atteindre le sommet historique de 8%
du PIB si l'administration Bush poursuit la même politique.
Avec de telles projections économiques, le président américain
prétend pourtant diminuer de moitié le déficit
budgétaire d'ici 2007, s'il est réélu. On se demande
comment, alors que déjà la production industrielle a diminuée
de 0,5% pour le seul mois de janvier 2004 et que le déficit de
la balance commerciale, de 490 milliards de dollars pour 2003, se trouve
en augmentation de 43,1 milliards, c'est-à-dire de plus 0,9%
par rapport à décembre dernier ! De plus, le recours à
une politique de remises fiscales aux entreprises les plus performantes
et de baisse des taux d'intérêt jusqu'à 1% (des
taux aussi bas ne s'étaient pas vus depuis 45 ans) afin de "doper"
l'économie, tout en diminuant par la même occasion sa propre
dette, ont été un moyen de dépasser les risques
de déflation de la mi-2003 mais pour rentrer en fait dans une
période inflationniste.
Quant aux pays européens, dont certains comme la France se targuent
de la prévision d'un taux de croissance de 1,7% pour 2004, ils
se sont enfoncés dans la récession, ils affichent également
des déficits grandissants. Bien que contraints par le Pacte de
Stabilité européen de rester sous la barre des 3% de déficit,
ce qui restreint leur marge de manœuvre contrairement aux Etats-Unis,
les plus importants d'entre eux ont plongé dans l'endettement
et le déficit public afin de ne pas couler sous la pression américaine
: endettement de 63% du PIB et 4,1% de déficit public pour la
France, respectivement de 64% et de 3,9% pour l'Allemagne. Le Royaume-Uni
lui-même affiche un déficit public de 3,2%, le double de
l'année précédente.
Outre l'endettement monstrueux des pays développés, une
des caractéristiques majeures de la situation économique
se voit dans le développement toujours plus intense de la spéculation
financière. Les OPA font rage dans tous les secteurs et le gros
des investissements se fait toujours plus vers la spéculation
boursière ou sur les monnaies. Cette bulle spéculative
qui gonfle démesurément est une expression supplémentaire
du fait que les profits sur lesquels sont basés les discours
sur la "reprise" sont du vent, des bénéfices
virtuels car ce n'est que de l'argent qui tourne sur les marchés
boursiers sans être injecté dans la production elle-même.
L'aggravation de la guerre commerciale
Tous les pays sont intéressés à la reprise économique,
mais le capitalisme est un système fondamentalement concurrentiel
et sa logique est la suivante : "ce qui me profite fait forcément
du tort aux autres". Aussi le battage prétendant que tout
le monde va se retrouver derrière la locomotive américaine
est un mensonge, car la reprise américaine ne se fera qu'au détriment
de ses économies concurrentes. C'est ce qu'on a vu se développer
autour de la guerre des taux de change qui s'est menée depuis
2002. Ainsi, les Etats-Unis ont baissé de 20% environ la valeur
du dollar par rapport à l'euro, la principale monnaie concurrente.
C'est donc directement au détriment de l'Europe que Washington
a pu réaliser des bénéfices à l'exportation,
grâce à un dollar faible. Il faut noter que, malgré
la pression sur les puissances économiques rivales permise par
la baisse du dollar, les exportations américaines ne représentent
toujours que 75% des importations, venant rendre encore plus criante
l'insolvabilité de la dette américaine.
Dans cette guerre économique qui fait rage, et de façon
à mettre plus sûrement l'Europe sur la touche, les Etats-Unis
se sont appuyés sur la Chine à travers par exemple l'acceptation
d'une parité entre le yuan et le dollar, malgré l'échec
jusqu'ici des demandes américaines de réévaluation
de la monnaie chinoise afin de faire monter le coût des importations
européennes. L'économie de l'Empire du Milieu affiche
une croissance de 9,1% pour 2003 et fait figure de future deuxième
puissance mondiale dans tous les médias. Et en effet, l'augmentation
de 122% de ses exportations depuis quatre ans et les excédents
commerciaux qui en découlent lui ont donc permis d'acheter massivement
des bons du trésor américains comme devises de réserve,
soutenant de ce fait le déficit de l'Amérique. Mais une
telle situation a mis en même temps la monnaie américaine
en état de dépendance aiguë à l'égard
de la Chine et donc de la capacité de cette dernière à
exporter. Si l'Etat chinois n'est brutalement plus en mesure, ou cesse,
d'accumuler des dollars, celui-ci risque un effondrement avec une hausse
brutale des taux d'intérêt, mettant en danger les perspectives
de reprise économique.
Le nouveau "miracle" chinois est du même tonneau que
le miracle des Tigres et des Dragons des années 1990, miracle
fondé sur l'endettement phénoménal d'entreprises
qui ont inondé le marché mondial grâce à
des coûts de production particulièrement bas et sur une
spéculation effrénée en attente de profits qui
ne sont pas réalisés. On a vu ce qu'il en est résulté
: faillites en chaîne avec des répercussions sur l'économie
mondiale, chômage massif, pauvreté aggravée, etc.
C'est la même perspective, mais encore plus brutale, qui est ouverte
devant nous.
L'augmentation des budgets militaires
Un leitmotiv de la propagande bourgeoise est de faire croire que l'augmentation
des dépenses d'armement est un bienfait pour l'économie
et que la guerre en Irak a été du pain béni pour
l'économie américaine. On nous parlait aussi des profits
juteux qu'allaient encaisser les puissances participant à la
reconstruction de l'Irak. La Maison Blanche s'est même efforcé
de fermer la porte de l'Irak à tous les détracteurs de
son intervention militaire. Pas besoin d'avoir fait de hautes études
économiques pour compter les bénéfices au vu de
la situation de chaos sans fin qui s'offre en Irak.
Depuis le 11 septembre 2001, le budget de la défense d'outre-Atlantique
est passé de 306 milliards de dollars à 429 milliards.
L'administration Bush prévoit de l'augmenter par ailleurs de
7% jusqu'en 2005. La guerre en Irak coûte un milliard de dollars
par semaine, celle en Afghanistan un milliard par mois. A ce poids financier
des guerres doit être ajouté le budget de la sécurité
intérieure, les deux représentant 3,6% du PIB. Outre toutes
les horreurs qu'elles prévoient pour l'humanité, toutes
ces dépenses ne sont en rien significatives d'un mieux à
venir pour l'économie et pour la classe ouvrière. Derrière
les Etats-Unis, toutes les grandes puissances ont profité de
la "guerre contre le terrorisme" pour programmer des augmentations
de budgets militaires et de police.
Contrairement à ce que nous raconte la bourgeoisie, ce qui est
injecté dans la sphère militaire et le flicage de la population
n'est pas destiné à la reproduction de capital productif
mais à la destruction pure et simple du capital investi. Cela
signifie que le développement du militarisme et l'augmentation
des dépenses qui lui sont liées sont un poids supplémentaire
ne pouvant qu'accentuer la marasme économique.
Aussi, en guise de croissance, la situation économique du capitalisme
mondial ne peut aller qu'en s'aggravant. La bourgeoisie peut nous faire
miroiter des lendemains qui chantent, implacablement, la classe ouvrière
va connaître de nouvelles attaques sur ses conditions de vie et
de travail. Certains "analystes" bourgeois sont d'ailleurs
bien obligés de s'interroger sur cette "reprise sans emplois".
Ainsi, alors que l'Etat américain continue d'afficher les projections
les plus optimistes, le début de l'année n'a pas vu de
création d'emplois aux Etats-Unis, ni d'augmentation de l'activité
économique dans les entreprises, même quand elles ne licencient
pas.
De même, le chômage, pourtant masqué par de nombreuses
mesures destinées dramatiquement à faire disparaître
les chômeurs des statistiques, augmente dans tous les pays, développés
ou soi-disant "émergents".
La poursuite du démantèlement du Welfare State qui est
à l'ordre du jour pour toutes les bourgeoisies du monde va entraîner
une aggravation formidable de la baisse du niveau de vie et la mise
à la rue d'un nombre incalculable de prolétaires, en particulier
sur le sol européen.
Pas d'illusions. Les mensonges sur la reprise ont pour objectif de cacher
à la classe ouvrière que ce n'est pas une question de
mauvaise gestion ou de bénéfices mal ou frauduleusement
détournés dans les poches de patrons, mais que le capitalisme
est en totale faillite. Précarisation, paupérisation,
coupes drastiques dans les budgets sociaux, licenciements et baisses
des salaires sont les maîtres mots de la perspective qui attend
les ouvriers du monde entier, sans possibilité d'une quelconque
amélioration de leur sort dans le capitalisme.