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VI - Depuis 1968 : La bourgeoisie agite le danger fasciste pour affaiblir la classe ouvrière

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La terrible contre-révolution qui a écrasé la classe ouvrière après ses combats glorieux du premier après-guerre s'est prolongée pendant près de quarante ans.
Les partis communistes ayant trahi, ils sont devenus le fer de lance de la contre-révolution. Grâce au prestige de la révolution russe et au nom de la défense de la "patrie socialiste", ils ont saboté les luttes ouvrières provoquées par la crise de 1929 et ont embrigadé les ouvriers dans la Seconde guerre mondiale. La défaite ouvrière était si profonde que le prolétariat n'a pas réussi à réagir contre la guerre impérialiste comme il l'avait fait en 1917-18 notamment en Russie et en Allemagne. A la fin de la guerre, le PCF, par exemple, avait réussi à entraîner les ouvriers derrière les drapeaux tricolores avec des slogans comme : "A chacun son boche". L'Humanité titrait : "Vive la France éternelle !". Par la suite, il y avait eu des luttes ouvrières importantes, mais les partis de gauche et les syndicats avaient réussi à les contrôler et à les canaliser sur des mots d'ordre bourgeois. Et puis le "boom économique" d'après-guerre a endormi pendant un certain temps la combativité ouvrière.

Mai 68 ouvre un cours nouveau aux affrontements de classe

Mais lorsque les derniers feux de la reconstruction du second après guerre se sont éteints et que le capitalisme a de nouveau été confronté à la crise ouverte de son économie, à la fin des années 1960, le prolétariat a redressé la tête. "Mai 1968" en France, le "mai rampant" de 1969 en Italie, les combats de l'hiver 1970 en Pologne et toute une série de luttes ouvrières en Europe et sur d'autres continents : c'en était fini de la contre-révolution.

C'est ainsi que s'est ouvert un cours nouveau avec en perspective, non pas la guerre impérialiste, mais des affrontements décisifs entre prolétariat et bourgeoisie, dont l'issue déterminera la marche de la société vers la révolution ou une troisième guerre mondiale.

En conformité avec cette perspective on a assisté depuis 68, et particulièrement au cours des années 80, au développement de la combativité et de la conscience de la classe ouvrière, cette dernière se manifestant particulièrement à travers une méfiance grandissante envers la gauche et les syndicats et plus généralement les institutions démocratiques. Ce fait est très important puisque ces organisations, qui avaient été les principaux instruments de la bourgeoisie pour maintenir la chape de la contre-révolution sur la classe ouvrière, se trouvent encore être depuis 68 le premier obstacle au développement des luttes ouvrières. Ce sont donc elles qui constituent le principal danger contre la classe ouvrière et non pas le fascisme qui n'est plus à l'ordre du jour.

Les campagnes démocratiques contre la lutte de classe

Pour faire face à cette situation, la bourgeoisie a développé depuis 68 des campagnes idéologiques destinées à faire diversion et à affaiblir la conscience de la classe ouvrière. Parmi celles-ci, les campagnes démocratiques agitant un danger fasciste occupent une place de choix. Présentant l'extrême-droite comme l'ennemi principal, elles ont pour but de rabattre les prolétaires vers la démocratie qui n'est autre que le visage que se donne la dictature du capital pour mystifier la classe ouvrière, et dissimuler ainsi le rôle de premier ordre joué par la gauche dans la défense de l'ordre capitaliste.

Le premier texte que nous publions dans cette partie, "Quand la démocratie prend la relève de la dictature franquiste pour affaiblir la lutte de classe" illustre justement, comme l'indique son titre, que l'arme dont la bourgeoisie a besoin pour affronter le cours montant de la lutte de classe, c'est la démocratie et non pas une dictature.

Le second texte, "l'antifascisme radical de l'extrême-gauche", s'emploie à réfuter tous les arguments que l'extrême-gauche du capital utilisait dans les années 70 pour tenter de faire adhérer les prolétaires aux campagnes antifascistes, en particulier en quoi le cadre démocratique constituerait un atout pour la lutte de classe, méritant en conséquence que la classe ouvrière mobilise ses forces pour le défendre.

La montée de l'extrême-droite dans un certain nombre de pays d'Europe, depuis la fin des années 80, a en effet donné un semblant de vraisemblance aux cris d'alerte de la bourgeoisie contre un danger fasciste et a constitué un facteur de relance des campagnes démocratiques et antifascistes. Là encore il y a utilisation par la bourgeoisie d'une situation qui n'est pas celle des années trente.

La montée de l'extrême-droite n'est pas celle du fascisme

Ce n'est qu'une apparence et il convient de faire la différence entre les circonstances de la montée du fascisme dans les années 30 et celles de l'extrême-droite dans la période actuelle.

L’actuelle plongée de la société capitaliste dans la décomposition nourrit le développement de toutes sortes d’idéologies cherchant des boucs émissaires à la faillite générale de la société et compensant l’absence de perspectives par des programmes populistes et ouvertement xénophobes et racistes. A ce niveau, Le Pen ou les groupuscules néo-nazis en Allemagne font pleinement partie de ces autres manifestations de la décomposition que sont la drogue ou les sectes, expressions d’une société capitaliste qui pourrit littéralement sur pied, privée de perspective, de vision d’avenir et d’espoir.

Mais surtout, même avec son succès populaire et la publicité médiatique qui lui est faite, ce n’est pas cela qui fait de Le Pen un nouvel Hitler, pas plus que le "désespoir populaire" n’explique la prise du pouvoir par ce dernier en 1933.

Contrairement au parti nazi à l’époque, le FN, et les autres partis d’extrême-droite existant en Europe, sont loin d’être les représentants d’un quelconque programme de sortie de la crise pour le capital national. Si Hitler et son parti ont pris le pouvoir, c’est bien parce que leur programme de capitalisme d’Etat et de fuite en avant vers la guerre, constituait la seule issue possible pour le capital allemand et qu’il a effectivement résorbé en quelques années le chômage à travers sa politique de grands travaux et d’économie de guerre. Aujourd’hui, outre le fait que la bourgeoisie n’a pas les moyens de s’engager vers une nouvelle guerre mondiale face à une classe ouvrière qui n’est pas défaite, les politiques de grands travaux, de commandes publiques basées sur un endettement gigantesque des finances publiques sont déjà derrière nous. S'il y a quelque chose d’utilisable dans le programme de Le Pen, c’est la politique de limitation de l’immigration et d’utilisation des travailleurs immigrés comme boucs émissaires, et cela, la bourgeoisie française, de droite comme de gauche, n’a pas eu besoin de nommer un ministre FN pour le mettre en place.

Mais, surtout, la bourgeoisie a bien trop besoin aujourd’hui de son paravent démocratique pour affronter la classe ouvrière. Nous ne sommes pas dans les années 30, années où le prolifératrice payait le prix de la terrible défaite de la vague révolutionnaire. Quelles que soient les difficultés actuelles de la classe ouvrière, c’est une classe qui n’a pas connu la défaite et dont la capacité de résistance sur son terrain de classe aux attaques du capital n’est nullement entamée. Un Le Pen au pouvoir serait bien incapable de contrôler la situation sociale, alors que le mode "démocratique" de domination du capital, avec ses syndicats divers et variés, son parlement, son jeu opposition-gouvernement et ses médias "libres" est d’une bien plus terrible efficacité pour conserver le contrôle social, pour assurer un encadrement serré des luttes ouvrières et pour mener à bien les manipulations idéologiques. Et c’est bien là la seule raison pour laquelle Le Pen existe et qui fait que la bourgeoisie a besoin de lui : il sert de faire valoir à l’Etat démocratique.

Les deux articles suivants, "La gauche utilise l'épouvantail Le Pen pour tenter d'affaiblir la classe ouvrière" et "campagnes antiracistes : la bourgeoisie cherche à ramener les ouvriers derrière l'Etat démocratique" s'attaquent à l'utilisation par la bourgeoisie du phénomène Le Pen en France et de la décomposition en Allemagne pour relancer les campagnes antifascistes.

Par ailleurs, les éléments que nous avons donnés ne suffisent encore pas à expliquer le fameux "phénomène Le Pen". En effet, il est désormais admis, y compris dans les discours bourgeois, que le FN ne serait jamais arrivé là sans la volonté délibérée de la bourgeoisie française qui, de scrutins proportionnels en coups de pouce répétés dans les médias, a fait de lui une véritable vedette nationale. L'importance du Front National en France a servi de faire valoir à la gauche au gouvernement, défenseur des libertés démocratiques, alors que les attaques qu'elle portait sur la classe ouvrière faisaient apparaître de plus en plus ouvertement ses composantes, le PC et surtout le PS, pour ce qu'ils sont réellement à savoir des partis bourgeois comme les autres. La meilleure preuve de cela est la manière dont la bourgeoisie en France a organisé le sabordage du FN, après l'avoir dopé, pour le ramener à une importance politique beaucoup plus modeste, parce que son poids électoral constituait par ailleurs un facteur aggravant de la déroute de la droite. Nous mettons à nu les ficelles de ce coup de la bourgeoisie contre l'extrême-droite dans l'article "Front National : gonflé hier, éclaté aujourd'hui, manipulé toujours".

Une seule voie pour la classe ouvrière : la lutte de classe

Dire que le fascisme n’est pas à l’ordre du jour et que la bourgeoisie lui préfère aujourd’hui la méthode "démocratique", ne veut pas pour autant dire que cette bourgeoisie pétrie de "démocratie" serait incapable de mener à bien, quand nécessaire, la répression des luttes de la classe ouvrière et celle de son avant-garde politique, ni qu’elle ne se servira pas de quelques bandes et milices d’extrême-droite, comme forces d’appoint, l’heure venue. L’histoire est pleine de preuves du contraire, à commencer par la répression de janvier 1919 en Allemagne. Mais au grand jamais, la mobilisation sur le terrain de l’antifascisme n’est une quelconque garantie contre cela. Au contraire, y céder, accepter de faire front derrière une fraction de la bourgeoisie contre une autre, c’est quitter son terrain de classe pour se livrer pieds et poings liés à la classe dominante et subir, à coups sûrs, demain la répression sanglante. De la même façon, c'est seulement en répondant sur son terrain de classe, en tant que classe, et non derrière une de ces mobilisations "citoyennes" orchestrées aujourd’hui par la bourgeoisie, que le prolétariat peut apporter une réponse aux miasmes de la décomposition et au développement des idéologies racistes et xénophobes, qu’elles soient véhiculées par l’extrême-droite, par les staliniens ou, dans sa version "douce" mais tout aussi anti-ouvrière, par la gauche démocratique.

Les campagnes anti-négationnistes : une arme pour discréditer le camp révolutionnaire

"La dénonciation de l’anti-fascisme comme instrument de l’embrigadement du prolétariat dans le pire carnage inter-impérialiste de l’histoire et comme moyen de dissimuler quel est le vrai responsable de toutes ces horreurs, à savoir le capitalisme comme un tout, n’a jamais signifié la moindre complaisance dans la dénonciation du camp fasciste dont les premières victimes furent les militants prolétariens" (Cf. Infra Campagnes anti-négationnistes, une attaque contre la Gauche communiste). C'est cette réalité, que nous rétablissons dans  l'article cité, que les campagnes anti-négationnistes, animées par les secteurs de gauche ou d'extrême-gauche de la bourgeoisie (Le Monde et la LCR étaient en pointe de ces campagnes),  ont tenté de dissimuler, de manière à discréditer le seul courant véritablement internationaliste dans la seconde guerre mondiale, celui de la Gauche communiste, et dont est issu l'actuel milieu révolutionnaire. Après l'effondrement du bloc de l'Est, il s'est agi pour la bourgeoisie de tenter d'éradiquer de la mémoire de la classe ouvrière l'histoire de ses combats révolutionnaires. De telles campagnes qui s'insèrent dans les campagnes démocratiques en général ont pour but d'établir un solide cordon sanitaire entre les minorités révolutionnaires et des éléments que la situation pousse à se poser des questions. On ne peut que déplorer que de telles campagnes aient pu prendre appui sur les divagations d'éléments dit d'ultra-gauche ayant montré quelque complaisance avec le négationnisme. La Gauche communiste n’a aucune espèce de parenté, même lointaine, avec la mouvance "négationniste" rassemblant l’extrême-droite traditionnelle et certains éléments de"l’ultra-gauche". Elle n'a pas d'avantage de parenté avec cette ultra-gauche quel que soit son positionnement dans le débat négationnisme/anti-négationnisme.


Dans ce chapitre

  • Espagne : Quand la démocratie prend la relève de la dictature franquiste pour désamorcer la lutte de classe ; extrait de Révolution Internationale n° 14 ; mars 1975.
  • L'antifascisme radical de l'extrême-gauche de la bourgeoisie ; d’après Révolution Internationale n°21; janvier 1976.
  • Présidentielles de 88 : La gauche utilise l'épouvantail Le Pen pour tenter d'affaiblir la classe ouvrière ;  Révolution Internationale n° 168, mai 1988.
  • Campagnes anti-racistes : la bourgeoisie cherche à ramener les ouvriers derrière l'Etat démocratique, Révolution Internationale n° 219, janvier 1993.
  • Front National : gonflé hier, éclaté aujourd'hui, manipulé toujours. Révolution Internationale n° 287, février 1999.
  • Campagnes anti-négationnistes : une attaque contre la Gauche communiste.
  • Le marais de "l'ultra-gauche" au service des campagnes de la bourgeoisie. D'après Révolution Internationale n° 263 ; décembre 1996.

Vie du CCI: 

  • Prises de position du CCI [1]

Espagne : quand la démocratie prend la relève de la dictature franquiste pour désamorcer la lutte de classe

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Actuellement l’Espagne nous offre un exemple particulièrement parlant de la forme dont la bourgeoisie parvient à prendre conscience de la nécessité de mettre sur pied une mascarade de gauche, antifasciste, sans que pourtant on ait vu surgir un "machiavel" méphistophélique de derrière la banque de Bilbao. L’année dernière, l’Espagne fut le pays d’Europe qui connut le plus grand nombre d’heures de grève. Ces grèves ont parfois pris des formes quasi insurrectionnelles, du fait de l’affrontement immédiat avec la police. Dans des régions comme Barcelone et le pays basque, il y a des zones industrielles qui sont en lutte presque permanente. A force d’affronter la police pour la moindre grève, à force de lutter en permanence, la classe ouvrière espagnole a acquis une redoutable confiance en elle-même, et une puissante conscience de ce que classe et solidarité veulent dire. Dans certaines usines les ouvriers font des assemblées générales tous les jours pour s’informer des luttes existantes et préparer de nouveaux combats. Les menaces patronales, les licenciements n’y peuvent rien. Ils servent plutôt de nouveau stimulant à la lutte.

Que peuvent faire les patrons devant une telle situation ? Augmenter la répression ? C’est ce qu’ils ont fait jusqu’à présent. Mais, accompagnée devant les effets de plus en plus violents de la crise sur la condition ouvrière, elle n’a servi qu’à intensifier les luttes de solidarité. La seule solution, les libéraux ont commencé depuis un bon moment à la défendre : il faut créer des syndicats qui ont la confiance des travailleurs, il faut créer une structure "démocratique" à l’européenne, pour que se forge un véritable appareil d’encadrement économique et politique de la classe ouvrière. Devant l’échec répété du gouvernement franquiste pour rétablir l’ordre, les plus grands capitalistes espagnols tels les Barreiros, les plus grands défenseurs de l’exploitation capitaliste, tels le chef d’Etat-major de l’armée franquiste (démis depuis de ses fonctions) ou le cardinal de Madrid lui même, sont devenus des partisans de la "démocratie" et des antifascistes véhéments. Est-ce parce qu’ils seraient devenus fous et auraient décidé du jour au lendemain de se transformer en défenseurs de ceux qu’ils exploitent et oppriment tous les jours ? Non ! Ils comprennent simplement et empiriquement qu’il est de plus en plus difficile de maintenir l’ordre, le leur, que l’ancienne équipe à la tête de l’Etat n’est plus efficace et qu’il faut la changer (...)

A ce niveau la gauche est évidemment en tête de la course. Le parti communiste espagnol, qui a créé avec les monarchistes et autres bourgeois, reconvertis récemment à "l’antifascisme", une "junte démocratique" pour gouverner le pays, ne fait que répéter à tous les partis de la classe dominante qu’il est le seul capable de rétablir l’ordre car il est le seul à disposer déjà sur tout le territoire d’un réseau de concessionnaires du pouvoir : les syndicats illégaux, les "Commissiones Obreras" inféodés au P.C. ; qu’il est le plus antifasciste de tous, puisque le plus réprimé par Franco et que, comme le montre le Portugal actuellement, c’est un argument utile lorsqu’il s’agit de faire terminer une grève. Le Portugal, cette vitrine d’exposition des staliniens, est d’ailleurs la meilleure publicité pour la marchandise "antifasciste" en milieu bourgeois. Regardez, peut dire Carillo, chef du P.C.E aux bourgeois, qui d’autre que nous a permis de remettre au travail les grévistes des postes, des chantiers navals ou des lignes aériennes ? Qui d’autre que nous peut se donner le luxe de publier en pleine grève de la TAP un tract (_)disant :

  • "Que les travailleurs discutent et décident de terminer cette grève ! (...)"
  • "En conduisant à un affrontement avec les forces armées, qui risqueraient de compromettre leur alliance avec les masses travailleuses, en sabotant l’économie nationale, les éléments aventuristes responsables du déclenchement de la grève étaient objectivement en train de faire le jeu des forces les plus réactionnaires." (tract de la cellule du P.C.P à la TAP du 28/8/74).

 L’ordre, pourrait conclure aujourd’hui Carillo, "c’est nous !"

Ce sont des arguments, concrets, précis et simples comme ceux-là que comprend la bourgeoisie. Si elle ne les comprend pas, ce qui arrive parfois, les nécessités de la survie du capital lui-même s’imposent à elle, sous la forme d’une action de l’armée par exemple.

En effet, l’armée cet organe essentiel de l’Etat, est une des institutions de la bourgeoisie qui est le plus apte à comprendre et à ressentir les intérêts généraux, globaux du capital national. Ses organes supérieurs, les gradés, sont simultanément bénéficiaires du système et défenseurs de celui-ci. Chargés de maintenir l’ordre et adorateurs passionnés de celui-ci, ils éprouvent souvent un mépris aussi grand pour les politiciens parlementaires que pour les bourgeois incapables de dépasser les intérêts de leur entreprise ou ceux qui les lient au capital étranger, et de réfléchir et agir en patriotes, c’est-à-dire en hommes du capital national. C’est pourquoi dans les pays à capitalisme faiblement développé, ils apparaissent si fréquemment comme la seule incarnation cohérente des intérêts du capital national.
 

Géographique: 

  • Espagne [2]

Heritage de la Gauche Communiste: 

  • Les soi-disant partis "ouvriers" [3]

L'antifascisme radical de l'extrême-gauche de la bourgeoisie

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Nous dénonçons ici la vacuité des principaux arguments qui sont à la base de l’"antifascisme" version gauchiste et prétendent démontrer que l’opposition fascisme-antifascisme peut, ne fût-ce que momentanément, traduire l’opposition : bourgeoisie-prolétariat.

L’"antifascisme gauchiste" se veut une lutte contre les forces "fascistes" de la bourgeoisie, prises comme ennemi spécifique, distinct, du moins momentanément, des autres forces de la bourgeoisie. Cette tactique a comme fondement principal l’alliance explicite ou implicite du prolétariat avec les forces "antifascistes", "démocratiques" de la bourgeoisie. L"’antifascisme" gauchiste se distinguerait de l’"antifascisme bourgeois" :

  • 1) du fait qu’il ne considère pas la lutte contre le fascisme et pour la démocratie comme le but final, mais uniquement comme une étape nécessaire, un moyen provisoire, pour atteindre le but révolutionnaire ;
  • 2) du fait qu’il ne se cantonne pas aux méthodes légalistes, électoralistes, chères aux démocrates bourgeois.

Cependant, c’est sous cette écoeurante forme "radicale" que l’"antifascisme" est le plus dangereux au sein du prolétariat car la phraséologie révolutionnaire dont il se recouvre rend moins apparente sa nature bourgeoise.

Alors que "l’antifascisme bourgeois" classique, tel celui d’un Churchill ou d’un De Gaulle, fonde sa propagande sur la défense du libéralisme capitaliste et de la démocratie parlementaire "garantie de liberté", "l’antifascisme révolutionnaire" prétend, lui, se fonder sur la défense des intérêts de la classe révolutionnaire. Toute sa mythologie s’appuie sur un mensonge, pourtant démenti des dizaines de fois par l’histoire, à savoir : l’opposition fascistes et fractions démocrates de l’appareil politique de la bourgeoisie peut, à certains moments, recouvrir, traduire, l’antagonisme qui oppose la bourgeoisie au prolétariat. Si les "antifascistes révolutionnaires" appuient momentanément les fractions antifascistes de la bourgeoisie, ce ne serait donc pas pour défendre une partie de la bourgeoisie contre une autre, mais pour défendre le prolétariat, dont les intérêts seraient momentanément portés par une fraction de la bourgeoisie. Ce ne serait qu’une question de tactique momentanée.

Comment ces gens parviennent-ils à expliquer qu’en une période historique où la révolution prolétarienne est à l’ordre du jour, il puisse exister une fraction de la bourgeoisie qui défende, ne fût-ce que partiellement, les intérêts objectifs de son fossoyeur immédiat : le prolétariat ?

Les antifascistes "radicaux", qui prétendent parler au nom du prolétariat, répondent, sans crainte du ridicule :

  • 1) les régimes de droite sont le moyen spécifique dont se sert la bourgeoisie pour écraser les luttes prolétariennes. Il faut donc en combattre les représentants en premier lieu ;
  • 2) le prolétariat ne peut pas être indifférent à l’existence ou non des libertés démocratiques bourgeoises, car elles lui sont nécessaires pour forger les armes de son combat révolutionnaire. Il faut donc, en premier lieu, lutter pour contraindre la bourgeoisie à les accorder.

Si l’on se réfère à l’histoire des luttes ouvrières écrasées par le capital, de telles assertions apparaissent immédiatement comme de vulgaires et ignobles mensonges historiques. Si l’on se réfère à la défense des intérêts historiques du prolétariat, il apparaît tout aussi nettement que de tels arguments ne peuvent provenir que d’un camp totalement étranger aux luttes révolutionnaires du prolétariat.

La droite n’a jamais été l’outil spécifique pour l’écrasement des luttes prolétariennes

Par son nombre, par sa place au centre du processus de production, par sa capacité d’unification mondiale, par le fait qu’il est le porteur de la seule forme de société capable de sortir l’humanité de l’impasse dans laquelle le plonge le capitalisme décadent, le prolétariat possède potentiellement une force gigantesque.

Dans un véritable processus de montée des luttes ouvrières, cette force est telle qu’il est impossible au capital de l’affronter directement. L’histoire l’a démontré des dizaines de fois. Les tentatives de répression brutale dans des périodes de montée des luttes se transforment trop souvent en stimulants unificateurs pour le développement d’un processus révolutionnaire.

Dans la presque totalité des exemples de défaite sanglante du prolétariat, on ne retrouve pas le schéma infantile inventé de toutes pièces par les "antifascistes" : les ouvriers se soulèvent, la droite les écrase. Pour que cet écrasement ait été possible il n’a jamais suffi à la bourgeoisie une force pour frapper brutalement. La répression des grands mouvements prolétariens a toujours nécessité la collaboration d’une deuxième force, chargée, elle, non de réprimer directement mais de désarmer, puis d’immobiliser la classe, avant et au cours de la répression.

Les "gauches démocrates", que les "antifascistes" -version "révolutionnaire"- voudraient ranger dans le camp des non répressifs ont en fait rempli aussi bien une fonction que l’autre. Tantôt elles ont joué le rôle de désarmeur-immobilisateur du prolétariat, tantôt -généralement dans les cas les plus difficiles- elles se sont chargées directement de l’ignoble besogne sanglante, après avoir elle-même désarmé le prolétariat.

Affirmer que la droite est l’organe spécifique de la répression des luttes prolétariennes et présenter les régimes "démocratiques" comme une sauvegarde, une aide, même provisoire, contre celle-ci, c’est se moquer grossièrement de toute l’expérience tragique du prolétariat.

La "gauche démocrate" a joué directement le rôle de "chien sanglant" ; parmi d’autres exemples :

  • contre l’insurrection ouvrière de Berlin en 1919 (c’est le gouvernement social-démocrate d’Ebert-Scheidemann, avec l’ouvrier "socialiste" Noske, qui a fait couler le sang ouvrier dans les rigoles des rues de Berlin).
  • contre les premières révoltes de la classe ouvrière espagnole rapidement déçue par la "démocratie" de 1931 (c’est le gouvernement "social" d’Azana qui a assumé la responsabilité de les réprimer violemment : en juillet 1931 à Séville, en janvier 1932 en Catalogne, en janvier 1933 contre les ouvriers agricoles de Casas Viejas - le gouvernement avait donné l’ordre de raser le village si nécessaire).
  • contre l’insurrection des ouvriers polonais de décembre 1970 (c’est le très "antifasciste" parti ouvrier polonais qui a commandé aux milices et aux blindés de tirer sur les foules de manifestants).

Ce ne sont là que quelques-uns des cas les plus nets car comme nous le verrons, c’est surtout en collaboration avec la droite que la gauche a joué son rôle de répression du prolétariat.

Curieuse "ignorance" que celle des trotskistes, des maoïstes et autres anarchistes, tous ces antifascistes "radicaux" qui "oublient" si facilement que dans tant de cas, et pas des moindres, ce n’est ni la "droite" ni "le fascisme" qui ont constitué l’organe spécifique de la répression bourgeoise contre la classe ouvrière mais bel et bien la très "démocratique" et très "antifasciste" gauche du capital.

Un "oubli" dont le résultat politique est de présenter au prolétariat son bourreau comme un "allié tactique". Un "oubli" qui n’aboutit qu’à jeter les travailleurs entre les mains de leur étrangleur. Un "oubli" qui place d’emblée ses auteurs dans le camp des plus efficaces fusilleurs du prolétariat. (...)

Les antifascistes version "gauchiste", ceux qui critiquent les socialistes et les staliniens, ceux qui sont prêts à rejeter les méthodes légalistes sur lesquelles "ils n’auraient aucune illusion", sont bien placés pour connaître l’histoire de l’éternelle collaboration de la droite et de la gauche du capital contre le prolétariat, puisqu’ils ont à chaque occasion offert leurs bons offices de "supporters critiques" à la fraction démocratique de la bourgeoisie. Ils savent de combien de massacres la classe ouvrière a dû payer ses illusions sur les "forces démocratiques" et "antifascistes" du capital. (...)

Qu’il puisse y avoir une troisième alternative qui renvoie dos à dos ces deux formes du pouvoir politique de la bourgeoisie, voilà qui dépasse totalement l’entendement de ces gens. Et c’est normal. C’est uniquement dans le camp du prolétariat et de son point de vue qu’une telle alternative peut avoir un sens. Or, quand on est incapable de concevoir la classe ouvrière autrement que comme une masse de manoeuvre, quand on ne peut se faire à l’idée que la classe ouvrière puisse avoir une vision propre du monde, qu’elle soit une force révolutionnaire autonome avec son expérience et son programme historique. (...) Ce n’est pas un hasard si pour eux, tout comme pour les fascistes, toute organisation "implantée" dans la classe ouvrière est par définition "une organisation ouvrière" ; que cette organisation sabote systématiquement les luttes, qu’elle participe, armes à la main au massacre d’insurrections prolétariennes, ne change rien pour eux. De toutes façons "les masses ouvrières" ne peuvent exister qu’à travers leurs partis officiels et leurs syndicats. "Par elle-même", la classe ouvrière n’existe politiquement pas. (...)

Si malgré 50 ans de massacres du prolétariat par la gauche ces gens continuent à défendre la nécessité de faire des choix entre les fractions de l’appareil politique de la bourgeoisie[1],si pour eux "l’alternative réaliste" est toujours un choix entre une partie de la bourgeoisie et une autre, et jamais entre le camp de la bourgeoisie comme un tout et celui du prolétariat, c’est tout simplement parce qu’ils ne sont jamais sortis du terrain de la bourgeoisie ; c’est parce qu’ils n’ont jamais du prolétariat d’autre vision que celle de la bourgeoisie, à savoir : une masse impuissante, incapable de savoir ce qu’elle veut, toujours vaincue, toujours manœuvrée.

Les libertés démocratiques bourgeoises ne sont pas des armes pour le prolétariat

Le deuxième argument qui sert de clé de voûte au mensonge antifasciste lorsqu’on prétend le justifier "au nom des intérêts de la révolution", c’est que les libertés démocratiques bourgeoisies seraient des moyens, des conditions nécessaires pour le développement de la lutte révolutionnaire du prolétariat. La liberté de presse et d’organisation, le droit de grève, le droit de vote, la liberté syndicale, tous ces piliers de la démocratie bourgeoise, seraient d’après l’antifascisme gauchiste, des armes fondamentales, indispensables pour la lutte... C’est pourquoi elles doivent, dans un premier temps, constituer un objectif immédiat de la lutte ouvrière.

Ces gens veulent vraiment présenter la bourgeoisie comme une classe stupide ou suicidaire. Si les libertés démocratiques bourgeoises sont des armes pour le prolétariat, comment faut-il comprendre cette curieuse manie de la bourgeoisie de les accorder précisément lorsque le prolétariat la menace ? Comment expliquer que dans beaucoup de pays elle aille même jusqu’à faire de leur utilisation une OBLIGATION ? Nombreux sont les Etats où le vote n’est pas uniquement "un droit", mais une contrainte, l’abstention électorale étant sévèrement punie par la loi. Quant aux syndicats, le système du "close shop", obligation d’être syndiqué pour pouvoir travailler, est de plus en plus généralisé dans le monde. Et dans des pays où l’utilisation de ces "libertés" n’est pas rendue obligatoire par l’Etat, en France par exemple, c’est un éternel concert qu’on entend de la part de toutes les forces politiques de la bourgeoisie pour en recommander l’utilisation. Aux dernières élections législatives[2], le président de la république ne répétait-il pas systématiquement, après avoir fait la propagande de son parti, "ce qui importe le plus ce n’est pas que vous votiez à droite ou à gauche, mais que vous accomplissiez votre devoir civique : voter". Quant aux syndicats, grassement subventionnés par l’Etat, c’est tout aussi régulièrement que gouvernement et patronat (par la bouche de leurs principaux représentants du CNPF) insistent sur "la nécessité d’une plus grande syndicalisation des masses ouvrières".

Quand au Portugal et en Espagne les luttes ouvrières deviennent la préoccupation numéro un de l’Etat, ne voit-on pas une unanimité internationale pour obliger - par des pressions diplomatiques - les bourgeoisies locales à "rétablir les droits de l’Homme" et à accorder les "libertés démocratiques" ?

Dans les pays de l’Est où les libertés démocratiques ne sont que des phrases inscrites sur le poussiéreux livre de la constitution, ne voit-on pas les bourgeoisies locales commencer à réagir de façon analogue face à la montée croissante des luttes ouvrières ? (...) Lors de l’insurrection généralisée des ouvriers polonais en décembre 1970 (c’est la brutalité de la répression des premières luttes qui a provoqué la réaction insurrectionnelle des ouvriers et l’extension de leur lutte à tous les secteurs industrialisés de toute la Pologne), les bourgeoisie de l’Est commencent à parler de mettre en place - de "ranimer" comme ils disent - des structures démocratiques : reconnaissance du droit de grève, appels aux bureaucrates syndicaux pour qu’ils essaient de prêter l’oreille aux revendications ouvrières (Cf. le dernier congrès du P.C. hongrois - en 1974), déclaration en vue de la "ranimation des conseils ouvriers" (Gierek au lendemain de l’écrasement des luttes de 1970 en Pologne) ; et, de façon générale, développement dans tous les pays de l’Est de l’influence des tendances "démocratiques" de la bureaucratie, souvent en conflit violent avec la "vieille garde" attachée aux méthodes dictatoriales de l’époque où le développement des luttes ouvrières ne constituait pas un problème majeur.

Si comme le prétendent les gauchistes, les libertés démocratiques bourgeoisies sont des armes pour le prolétariat, il faut conclure immédiatement que la bourgeoisie mondiale est en train de perdre la raison, car c’est dans tous les pays, et d’abord dans ceux où le prolétariat est le plus fort ou dans ceux où il se bat le plus, que la classe dominante est en train de les accorder généreusement, sous la bienveillante protection du sabre des plus hautes hiérarchies militaires et la bénédiction du Pape et des évêques !

Mais la bourgeoisie est loin d’être folle. Les libertés démocratiques bourgeoises ne sont pas des armes pour le prolétariat, mais contre lui. En ranimant les libertés démocratiques, la bourgeoisie est en train de se préparer à faire face au prolétariat dans une période de montée générale de luttes ouvrières. (...)

Dans le capitalisme décadent, les armes du prolétariat n’ont rien à voir avec les soi-disant "libertés" instaurées par la bourgeoisie. Au 19e siècle, lorsque le prolétariat pouvait réellement combattre pour des réformes au sein du système et que la bourgeoisie, à l’apogée de sa richesse, pouvait objectivement les accorder, les "libertés démocratiques bourgeoises" étaient une condition nécessaire au bon déroulement de l’activité syndicale et parlementaire de la classe ouvrière. Mais dans le capitalisme décadent, lorsque toute réforme réellement en faveur de la classe ouvrière est devenue utopique, lorsque toute lutte ouvrière est contrainte, pour être conséquente, de s’attaquer directement à l’Etat bourgeois lui-même sans qu’il puisse exister de moyen terme, les vieilles libertés démocratiques pour lesquelles la classe ouvrière s’était battue, il y a 100 ans, se sont transformées en simples organes de domination du prolétariat par le capital. Dans cette période historique où seul ce qui est révolutionnaire peut être prolétarien, où la seule alternative qui puisse représenter une amélioration de la condition ouvrière c’est la révolution prolétarienne elle-même, les seules armes ouvrières sont celles de sa révolution.

Il suffit d’envisager le contenu de chacune des libertés bourgeoises pour qu’apparaisse leur nature parfaitement contre révolutionnaire.

La liberté de presse et d’organisation politique ?

A première vue, il paraîtrait logique de dire : c’est tout de même plus simple de développer la presse et les organisations révolutionnaires lorsqu’on ne va pas en prison pour le simple fait d’avoir prononcé les mots de "révolution prolétarienne". En conséquence, pour que les idées révolutionnaires puissent se développer, il serait nécessaire d’"arracher" à la bourgeoisie la liberté de presse et d’organisation. Triste illusion et écœurant mensonge !

Ce n’est pas parce que la bourgeoisie accorde ses libertés démocratiques que se développent les idées révolutionnaires. C’est au contraire parce que les idées révolutionnaires se développent dans la classe que la bourgeoisie a recours aux libertés démocratiques pour avoir les moyens d’en entraver le développement. L’antidote aux idées révolutionnaires, ce ne sont pas les grossières imbécillités idéologiques de la droite et du fascisme prétendant que la lutte de classe n’existe pas et toute lutte ouvrière est l’oeuvre du malin, des juifs ou d’une puissance étrangère. Au contraire. Les véritables "contrepoisons" qui aient quelques chances d’être efficaces contre les idées révolutionnaires ce sont toutes les idéologies et toutes les organisations qui commencent à s’affirmer résolument "prolétariennes", "populaires", "révolutionnaires", tout en affirmant que le prolétariat ne peut pas tout faire SEUL ; qu’il doit tenir compte de.. ici la liste serait trop longue, nommons en passant : l’opinion publique, la nécessité de garder de son côté les secteurs libéraux de la bourgeoisie, la défense des libertés démocratiques, l’incompréhension des paysans, le désaccord des commerçants, le faible niveau culturel des ouvriers, la force des ennemis, la nécessité d’avoir les cadres avec nous, et surtout, surtout... la nécessité de sauvegarder "NOTRE" économie nationale. (...) Les libertés de presse et d’organisation de la bourgeoisie, c’est la liberté pour ses chiens de garde de pénétrer en milieu ouvrier et de remplir leur fonction.

Peut-être, disent les gauchistes, mais les révolutionnaires peuvent tirer profit ! Toujours imbus d’amour pour l’Etat bourgeois, à condition qu’il soit "démocratique", toujours incapables d’envisager les problèmes de la classe ouvrière autrement qu’à travers ceux du développement de leur propre petite organisation, ces antifascistes "radicaux" prétendent nous faire oublier que l’Etat bourgeois, pour être "démocratique" n’en a pas moins des prisons politiques, et qu’en période de montée des luttes prolétariennes, il sait parfaitement les remplir d’"extrémistes", de "partisans de la violence", de "saboteurs de l’économie nationale", de "diviseurs du peuple", de "terroristes", bref, de révolutionnaires. Et généralement la gauche du capital sait mieux reconnaître que quiconque quels sont les vrais ennemis de l’Etat dont elle assume la gestion. Quant à la "liberté de la presse", la démocratie bourgeoise n’a pas plus de ménagements envers la presse des révolutionnaires qu’elle n’en a envers leurs organisations. Lorsqu’envahir la classe ouvrière d’un océan de presse de "gauche" pour noyer toute tentative de clarification révolutionnaire, ne suffit plus pour enrayer le développement des idées révolutionnaires, la démocratie n’hésite jamais à avoir recours à la répression et à l’interdiction.

L’expérience de toutes les organisations révolutionnaires le montre clairement : ce n’est pas sur les libertés bourgeoises qu’elles peuvent compter pour le développement objectif du besoin de leur intervention au sein du prolétariat et la compréhension croissante par celui-ci du caractère historique et mondial de sa lutte.

Le droit de grève ?

Lorsque la bourgeoisie affronte une période de multiplication des grèves, la reconnaissance du "droit de grève", outre qu’il ne fait que reconnaître un état de fait - continuer à proclamer interdites les grèves alors que celles-ci se développent partout, ne peut que ridiculiser l’autorité de l’Etat - n’a évidemment jamais comme but de permettre leur libre épanouissement, mais, au contraire, de créer "démocratiquement", "légalement" toutes les limites possibles, toutes les entraves capables d’empêcher leur transformation en un mouvement susceptible de mettre en question les fondements du système et l’autorité de l’Etat. Le "droit de grève", c’est d’abord le droit pour l’Etat bourgeois de réprimer "démocratiquement" toute grève "illégale", toute forme de lutte qui sort du cadre de la "légalité démocratique" : grèves antisyndicales, invasion d’usine par les ouvriers d’autres usines venant exiger la solidarité de classe, grèves mettant réellement en danger l’économie nationale...

Il est ensuite un puissant moyen pour briser de l’intérieur la force révolutionnaire des grèves, c’est-à-dire leur force réelle. En effet, la grève "démocratique" ne doit pas dépasser les limites au-delà desquelles elle pourrait constituer :

  • 1) un véritable coup de boutoir contre le capital national,
  • 2) une expérience capable de constituer un pas important dans le processus de formation de l’armée prolétarienne. Mais une grève qui attend l’autorisation du patron pour éclater et accepte ensuite de se tenir dans le cadre de la légalité imposée par le capital, est un pétard mouillé d’avance. Une source de démoralisation certaine pour la classe. La gauche du capital le sait bien qui a pour tâche dans la démocratie bourgeoise d’assurer l’encadrement légal de toute tentative de lutte ouvrière.

Dans le capitalisme décadent, la classe ouvrière n’a jamais eu besoin du démocratique "droit de grève" pour se battre. Ses armes, ce ne sont pas les soi-disant "autorisations" de son exploiteur pour se battre contre lui, mais au contraire sa résolution à affronter la légalité des patrons quelque soit le vernis "démocratique", "populaire" dont elle puisse se recouvrir. Moyen pour "légaliser" la répression "démocratique" des grèves, instrument du sabotage de la combativité ouvrière savamment utilisée par la gauche du capital, le "droit de grève" n’est pas une arme du prolétariat mais de la bourgeoisie.

La liberté syndicale ?

Les syndicats ne sont plus, dans le capitalisme décadent, la forme que se donne la classe ouvrière pour combattre le capital, mais l’appareil d’encadrement dont se sert l’Etat capitaliste pour encadrer la classe ouvrière. Plus de cinquante ans d’expérience l’ont montré clairement, les luttes ouvrières de notre époque ce sont les assemblées ouvrières, unitaires et souveraines, se coordonnant entre elles par des conseils de délégués élus et révocables à tout instant. La "liberté syndicale", c’est la lutte du capital contre ces assemblées, c’est la possibilité pour la bourgeoisie de se doter de cet indispensable appareil d’encadrement des travailleurs que sont les syndicats. Ce n’est pas par hasard si les premiers prisonniers politiques libérés par les franquistes "démocrates" au lendemain de la mort de leur fétiche, ce sont justement les responsables des "syndicats démocratiques", les "Commissionnes Obreras".

Le droit de vote ?

Le droit d’élire démocratiquement son bourreau, d’octroyer aux chefs de la "police démocratique" un label de "représentants du peuple".. La "liberté électorale" n’est que le moyen de légaliser par une mascarade vide, la dictature du capital sur la société.

C’est une des principales armes du capital pour briser dans la classe la volonté de s’assumer comme corps distinct dans la société, comme force autonome capable de prendre le pouvoir. Elle s’inscrit directement contre toute organisation de pouvoir de la classe ouvrière : d’une part, en l’atomisant en une poussière de millions d’"individus", de "citoyens" impuissants, isolés les uns des autres devant les urnes ; d’autres part, développant jusqu’à l’extrême au sein de la classe l’idée qu’elle ne pourra jamais rien faire par elle même, qu’elle devra toujours déléguer la défense de ses intérêts à des corps totalement étrangers à elle, "ses partis officiels".

Loin de constituer une arme pour le prolétariat, la "liberté électorale" constitue le fondement même du désarmement de la classe ouvrière. (...)

Le renforcement de la puissance de la classe ouvrière n’a rien à voir avec la "générosité" des fractions les plus intelligentes de la bourgeoisie. Les véritables instruments de son combat : sa conscience, sa capacité à s’organiser et à agir de façon indépendante par rapport à tous les autres secteurs de la société, le prolétariat ne peut les forger qu’en se débarrassant de toute illusion à l’égard de la "démocratie bourgeoise" ; en s’attaquant à la bourgeoisie, dans sa globalité, à ses partis et à ses syndicats c’est-à-dire sans tomber dans l’immonde piège du "choix" entre les différentes formes d’oppression de la bourgeoisie.

La classe ouvrière a payé de dizaines d’échecs sanglants le fait de ne pas avoir compris à temps qu’elle ne pouvait compter que sur elle-même, sur ses propres assemblées et son programme historique propre. L’antifascisme, ce bavardage qui prétend présenter la gauche du capital comme moins répressive que la droite, amenant par là la classe ouvrière à lier son sort à celui de ses bourreaux ; cette tromperie qui présente les armes de la bourgeoisie comme des armes prolétariennes, poussant ce dernier à faire confiance à l’Etat bourgeois "démocratisé", ce mensonge qui unit aujourd’hui toutes les forces de la bourgeoisie, du Pape jusqu’aux gauchistes, n’a pas d’autre but que de tenter de le lui faire oublier encore une fois.


[1] La collaboration des socialistes italiens avec les fascistes ? L’appel de Togliatti (secrétaire général du P.C. d’Italie) en 1938 aux fascistes italiens ? La collaboration des socialistes et des staliniens à l’armement d’Hitler ? Le pacte Hitler/Staline ? Le désarment du prolétariat espagnol par toute la gauche unie ou celui du prolétariat chilien par l’Unitad Popular. d’Alliende ? Pour l’antifascisme gauchiste, ce ne sont là que des... erreurs ! Curieuse race que celle des démocrates qui se "trompent" toujours dans le même sens et dont on peut prévoir à chaque occasion quand et comment ils vont commettre leur éternelle erreur ! Du point de vue du prolétariat, la seule erreur ici est celle commise par les ouvriers qui, par manque de confiance dans leur propre classe, ont fait confiance à ces organisations bourgeoises travaillant en milieu ouvrier.

[2] celles de 1973

Courants politiques: 

  • Gauchisme [4]
  • Anti-fascisme [5]

Elections présidentielles de 1988 : La gauche utilise l'épouventail Le Pen pour tenter d'affaiblir la classe ouvrière

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Les élections sont terminées. Mitterrand est de nouveau élu pour 7 ans à la tête de l’Etat bourgeois. Mais une chose est sûre : quelles que soient les équipes dirigeantes qui vont être appelées à gouverner, la seule politique qu’elles appliqueront c’est celle de l’austérité renforcée, des attaques toujours plus violentes contre l’ensemble des conditions de vie de toute la classe ouvrière. C’est ce qu’annonçait déjà un économiste bourgeois, à la veille du 1er tour, dans L’Usine Nouvelle du 21/4/88 : "Le réveil sera rude... Des mesures à court terme s’avèrent inéluctables, même si les candidats à l’élection présidentielle gardent un silence prudent".

Aujourd’hui, moins que jamais, la classe ouvrière n’a d’autre choix que de continuer à se défendre, avec encore plus de détermination, en développant ses luttes de façon massive et unie.

Cette riposte d’ensemble de la classe ouvrière, la bourgeoisie la sait inévitable. C’est pour cela qu’elle s’acharne aujourd’hui à tenter d’en reculer l’échéance. C’est pour cela qu’elle se prépare à la miner de l’intérieur.

Une campagne pour diviser, déboussoler, démoraliser la classe ouvrière

Dès le lendemain du 1er tour, on a vu toutes les forces de la bourgeoisie, relayées par les médias, développer un battage intensif autour du score de Le Pen et de l’effondrement électoral du P.C.F. Tous, de la droite à l’extrême gauche, s’efforcent de nous faire croire que ces résultats expriment une crise profonde de la classe ouvrière en France :

  • "Ce scrutin met en évidence le profond bouleversement que le paysage politique français vient de connaître. A gauche, l’effondrement -confirma dimanche- du communisme en France. A droite, l’apparition d’une force extrémiste. A l’origine des deux phénomènes, on trouve la même racine : l’éclatement brutal de la classe ouvrière française sous l’effet de la chute des industries traditionnelles." (J. Boissonnat, La Tribune de l’Expansion, 25/4/88) ;
  • "L’augmentation du score de Le Pen a de quoi inquiéter tous les travailleurs car elle reflète un recul du poids politique de la classe ouvrière et des travailleurs en général." (A. Laguiller, tract de Lutte Ouvrière du 26/4/88).

Ainsi, aux dires de toutes les fractions de la bourgeoisie, la classe ouvrière serait en crise parce que c’est dans les grandes concentrations ouvrières (Lyon, Marseille, banlieue "rouge" de Paris) que le P.C.F. a perdu le plus de voix et que, par contre, le Front National se serait renforcé.

Pire encore, non seulement on nous parle d’"éclatement de la classe ouvrière" mais on affirme que les 2,5 millions d’ouvriers au chômage seraient "l’humus" (pour reprendre l’expression d’un politicien bourgeois) sur lequel se développeraient les suffrages en faveur de Le Pen.

Toute cette campagne étourdissante ne sert qu’un objectif : diviser, déboussoler, démoraliser la classe ouvrière pour tenter de saper sa confiance grandissante en ses propres forces.

  • LA DIVISER : en cherchant à faire croire qu’il existe une opposition de plus en plus profonde entre ouvriers au chômage et ouvriers "actifs", entre ouvriers "français" et ouvriers "immigrés" alors que depuis des années la réalité de la lutte de classe montre que c’est tout le contraire qui est vrai. Elle montre la tendance croissante de la classe ouvrière à s’affirmer, à développer sa solidarité et son unité de classe au-delà des barrières sectorielles, corporatistes, raciales. Elle montre que la classe ouvrière se situe ainsi de plus en plus sur son propre terrain.
  • LA DEBOUSSOLER : en lui faisant porter la responsabilité de l’avance de Le Pen alors que le terrain des élections n’est pas celui de la classe ouvrière. Ce n’est pas elle, en tant que classe qui s’exprime ainsi mais des ouvriers, des citoyens, atomisés, qui se sont laissés piéger sur ce terrain et qui, de toute façon, sont autant mystifiés en votant pour Le Pen que pour n’importe quel autre candidat de droite ou de gauche. Le piège, c’est le terrain sur lequel ils se situent et non la couleur du bulletin qu’ils déposent dans l’urne. Si un petit nombre d’ouvriers s’est tourné aujourd’hui vers Le Pen, c’est l’ensemble des fractions de la bourgeoisie qui en porte l’entière responsabilité. Toutes, pour les besoins de leur propagande, se sont évertuées pendant des années à le monter de toutes pièces, à l’ériger comme un épouvantail.

Et le P.C.F. porte une part importante de cette responsabilité, lui qui, pendant des décennies, n’a cessé de développer une idéologie patriotarde, nationaliste, avec ses slogans depuis le "Plus forts les coups sur le boche chancelant" de la Libération jusqu’au "Produisons français" d’aujourd’hui, lui qui a fait largement ses preuves contre les ouvriers immigrés avec ses bulldozers à Vitry en 79, lui qui a participé activement à la politique d’expulsion des "étrangers" entre 81 et 84.

  • SAPER SA CONFIANCE EN ELLE-MÊME : en faisant croire à la classe ouvrière que l’affaiblissement du P.C.F. reflète son propre affaiblissement. Rien n’est plus faux. L’effondrement électoral du P.C.F., loin de traduire un quelconque affaiblissement de la classe ouvrière, constitue, au contraire, un signe révélateur de son renforcement, de son dégagement croissant de l’emprise du P.C.F. et de sa courroie de transmission dans les entreprises, la C.G.T. L’effondrement du P.C.F., principale force d’encadrement bourgeoise, est le symptôme d’une crise profonde, non de la classe ouvrière mais de la bourgeoisie. C’est au prix fort que le P.C.F. paie aujourd’hui les manœuvres répétées de sabotage des luttes ouvrières par la C.G.T. C’est au prix fort qu’il paie ses 3 années de participation active à la politique d’austérité menée par le gouvernement P.C./P.S. entre 81 et 84.

Une campagne pour dévoyer la classe ouvrière

Mais, plus encore, à travers cette campagne, la bourgeoisie affûte aujourd’hui ses armes pour se préparer à contrer l’inévitable riposte ouvrière contre les attaques à venir. C’est ainsi qu’elle a su exploiter à fond les résultats électoraux du 1er tour pour tenter, en agitant l'épouvantail Le Pen, de redonner un nouveau souffle à une campagne électorale qui suscitait jusqu’alors trop peu d’intérêt. En relançant ainsi sa campagne, il s’agissait pour la bourgeoisie de re-crédibiliser le jeu de ses partis afin de ramener les ouvriers qui s’en écartaient dans la fausse opposition entre droite et gauche, entre racisme et anti-racisme, entre fascisme et anti-fascisme.

Toute cette propagande tapageuse ne visait qu’un seul but : tenter de dévoyer la classe ouvrière de son propre terrain. Voilà le sens qu’il faut donner à la mascarade du 1er mai telle qu’elle fut organisée par la bourgeoisie. D’un côté, une grande manifestation d’extrême-droite, aux couleurs du nationalisme "réactionnaire", de l’autre -et au même moment- une grande manifestation d’union nationale contre le danger du fascisme, rassemblant les démocrates de tous bords, toutes classes confondues, de la CFDT aux nationalistes kurdes en passant par SOS-racisme et l’UNEF-ID. Union nationale justifiée ainsi par la CFDT : "Face au danger majeur que représente la montée de l’extrême-droite, il était nécessaire de modifier nos habitudes" afin que "soient représentés tous les démocrates sans exception." (E. Maire, Libération du 2/5/88).

La classe ouvrière doit déjouer tous les pièges de la bourgeoisie

La classe ouvrière a toutes les raisons d’avoir confiance en l’avenir. Non seulement elle n’est pas en crise mais c’est quotidiennement qu’elle continue à développer sa propre force, sa propre unité sur son propre terrain, celui du combat implacable contre la misère et l’austérité croissantes que lui inflige le capitalisme en crise.

Même pendant la trêve électorale, période traditionnellement plus favorable à la bourgeoisie, la classe ouvrière a continué à maintenir sa pression contre les attaques incessantes du capital : grèves aux usines Chausson et SNECMA, à Michelin, chez les dockers de Marseille, aux magasins Primistère-Félix Potin, dans les hôpitaux de la région parisienne, dans les mines de Lorraine autant de luttes qui, toutes, malgré leur caractère encore minoritaire, encore éparpillé, ont exprimé à des degrés divers le même besoin d’élargissement, de recherche de la solidarité dans la lutte.

Ainsi, ce que traduisent en réalité ces élections, c’est un affaiblissement considérable de la bourgeoisie. Affaiblissement révèlé une nouvelle fois par l’incapacité de la droite française, déchirée par ses querelles de cliques, à reprendre sa place au gouvernement. Affaiblissement renforcé encore par l’arrivée du 3ème larron, Le Pen, dans l’arène électorale. Affaiblissement sanctionné enfin, et surtout, par l’effondrement magistral de la principale force d’encadrement de la classe ouvrière, le P.C.F. (cf. RI 169).

Une telle situation constitue aujourd’hui un atout supplémentaire pour la classe ouvrière. Voilà pourquoi la bourgeoisie, consciente du pétrin dans lequel elle s’est embourbée, a toutes les raisons d’exprimer ainsi son inquiétude : "Le corps social peut avoir des réactions très violentes, et s’il n’est pas encadré socialement, ni par les syndicats qui sont en état de faiblesse, ni par un P.C. qui a perdu son implantation, et qui ne le sera pas par un Front National dont ce n’est pas profondément la nature, vous pouvez avoir des irruptions sociales complètement imprévues et difficiles. Ceux qui exerceront le pouvoir à partir du 9 mai prochain n’auront pas la tâche facile." (J. Boissonnat, cité par L’Humanité du 26/4/88).

C’est parce qu’elle redoute cette riposte d’ampleur de toute la classe ouvrière que la bourgeoisie se prépare dès à présent à la dévoyer et à la saboter. C’est le sens qu’il faut donner à la radicalisation actuelle du P.C.F. et de la C.G.T. telle qu’elle s’est déjà profilée à l’occasion du 1er mai avec l’appel de la C.G.T. à une manifestation séparée non seulement contre le danger du fascisme mais surtout contre l’austérité et le chômage.

C’est face à la perspective d’explosions sociales de grande ampleur que la bourgeoisie réintroduit ainsi le loup dans la bergerie : "Il existe toujours sur le terrain un Parti communiste qui continuera d’assurer son rôle historique d’entraîner à la lutte, de mener bataille contre les idées de fatalité et de résignation, de s’opposer à toute compromission avec la droite et son extrême Le Pen, en un mot un Parti communiste qui poursuivra, dans les conditions de l’après-élection, son œuvre quotidienne au service des travailleurs." (L’Humanité du 26/4/88).

Dans le développement inévitable de ses combats, la classe ouvrière devra nécessairement déjouer tous les pièges que lui tendra la bourgeoisie. Elle doit savoir que tous ceux qui, des syndicats -C.G.T. en tête- aux gauchistes (tels ceux de LO), prétendent défendre ses intérêts, tous ceux qui se placent sur son terrain se préparent, en réalité, à lui mettre des bâtons dans les roues, en se partageant dès aujourd’hui le travail pour saboter ses luttes de l’intérieur et les dévoyer dans la fausse alternative droite/gauche, fascisme/anti-fascisme.

 

Géographique: 

  • France [6]

Courants politiques: 

  • Anti-fascisme [5]

Heritage de la Gauche Communiste: 

  • La mystification parlementaire [7]

Attentats racistes en Allemagne 1993 - Campagnes anti-racistes : la bourgeoisie cherche à ramener...

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Campagnes anti-racistes : la bourgeoisie cherche à ramener les ouvriers derrière l'Etat démocratique

 

  • "La criminalité raciste a augmenté de 1700 % en deux ans en Allemagne et ce n'est pas sans la complicité tacite de la population".

Au cours de la réunion d'un front européen antiraciste qui s'est tenue le 12 décembre à Nancy, voilà ce qu'a abruptement lâché l'un des participants, la déléguée du PSD (ex-parti communiste de RDA), en mettant aussi en cause le gouvernement pour faire bon poids de radicalisme. Cette manière de rendre fautive de la montée de l'extrémisme xénophobe la population, et donc (surtout) la classe ouvrière, constitue la pointe avancée, spécialement vicieuse, des campagnes démocratiques actuelles de la bourgeoisie. Il s'agit là d'un piège très dangereux pour le prolétariat et nous le dénonçons avec la plus grande énergie.

Il y a des faits irréfutables. Depuis au moins un an, en effet - et cela s'est accéléré au cours des derniers mois -, la chronique de la xénophobie et du racisme s'accroît presque chaque jour d'une nouvelle page de furie imbécile et de crimes sanglants. Le 2 octobre, par exemple, à Nowa Huta, en Pologne, neuf adolescents arborant la croix gammée molestaient des routiers allemands, provoquant la mort de l'un de ceux-ci. A Rome, début novembre, d'autres nazillons en bande s'en prenaient aux commerçants juifs de la Ville éternelle. A la fin du mois dernier, en Alsace, plusieurs tombes musulmanes étaient profanées tandis que le même vandalisme d'inspiration antisémite s'exerçait à l'est du Rhin notamment contre la sépulture du célèbre dramaturge Berthold Brecht. D'autres violences à relents xénophobes se sont produites à Anvers, Madrid, Munich... Entre toutes, celles de Môlln (près de Lübeck, en Allemagne du nord), le 23 novembre, ont particulièrement inspiré l'horreur, deux fillettes et une jeune femme turques périssant au milieu des flammes d'un incendie criminel et revendiqué au cri de "Heil Hitler !".

 

Racisme, xénophobie :
les produits de la décomposition capitaliste

Comment, pourtant, la bourgeoisie en rend-elle compte ? Sa presse ment déjà quand elle focalise les regards sur la situation en Allemagne tout en suggérant sournoisement de nous rappeler que ce pays est la patrie du nazisme. Le triste tableau que nous avons dressé plus haut suffit à révéler ce truquage de la réalité. Laquelle s'étale, à plus ou moins grande échelle, dans tous les Etats européens et ne représente nullement une spécificité allemande. Quand bien même la question de l'unification et la proximité des anciens territoires socialistes placent aujourd'hui ce pays dans une position sociale singulière. Ensuite, les orchestrateurs des campagnes idéologiques de la bourgeoisie manipulent sans vergogne l'opinion quand ils gonflent outrancièrement le regain du fascisme et braquent tous les projecteurs sur les gesticulations meurtrières des "skinheads" et autres paumés.

Tout cela sert à dissimuler la cause foncière et la responsabilité première de cette explosion de haine qui paraît soulever le coeur de nos bons démocrates bourgeois. La xénophobie, le racisme et l'agitation néo-nazie, c'est bel et bien le capitalisme qui les enfante et les active. Oui, le capitalisme, avec sa crise économique sans issue, qui marginalise des couches de plus en plus nombreuses de la population, les éjecte hors de toute vie collective, laisse les jeunes sans futur, oppose les chômeurs aux travailleurs encore nantis d'un emploi, contraint de larges parties des peuples (comme en Albanie, en Roumanie, en Bosnie, etc.) à fuir leur pays et à émigrer. La peur des "étrangers", la recherche absurde parmi ses compagnons d'infortune de boucs émissaires pour les charger de la faute de la misère que le capitalisme fait subir à tous, le chacun-pour-soi érigé en seule règle de la conduite individuelle, la montée des comportements irrationnels, la floraison des actes désespérés autant que criminels, et pas seulement chez les nazillons, voilà autant de traits qui traduisent sur le fond l'impasse d'une société bourgeoise à l'agonie. A côté des conflits ethniques, des querelles religieuses, des famines, des épidémies et de bien d'autres consternants phénomènes.

Voilà le visage d'un monde sans devenir et désormais complètement voué à la désintégration ainsi qu'au pourrissement sur pied, de par sa propre dynamique. En tout état de cause, ledit réveil des démons fascistes n'est qu'un épiphénomène. Il représente un effet et non la raison de la décomposition capitaliste. Aujourd'hui, la vérité terrible de la situation ne réside pas dans le resurgissement de la bête nazie mais dans l'effondrement sous elle-même de la civilisation bourgeoise, pourvoyeur de tous les dérèglements et destructions qui ruinent maintenant la planète.

Cependant, la bourgeoisie, qui n'a plus rien à offrir aux hommes et qui, dans sa course inconsciente, entraîne tout le monde à crever avec elle, n'est pas près, bien loin de là, de renoncer à son autorité sur la société.

C'est ce qu'illustrent clairement, parmi d'autres signes, les tapageuses campagnes antifascistes et antiracistes qui, en Allemagne surtout, se développent à la suite du déferlement des attaques xénophobes. Outre-Rhin, tout se passe comme si les malheureuses victimes de Mölln avaient dû brûler vives pour permettre l'impulsion de manifestations monstres dans toutes les grandes villes de l'Ouest : Francfort (mégaconcert rock), Munich, Duisburg et Hambourg ("chaînes vivantes", défilés à la bougie...), etc., réunissant chaque fois de une à plusieurs centaines de milliers de personnes. A compter de la mi-décembre, on voit l'ensemble des sphères dirigeantes de la république fédérale impliqué à fond dans le battage démocratique et humanitaire. Depuis la chancellerie (qui promet des poursuites contre les auteurs des crimes xénophobes et s'engage à réformer le point de la constitution de 1945 relatif au droit d'asile politique) jusqu'à la plus humble association caritative en passant par les Michel Drucker et autres Jean-Pierre Foucault de la télévision allemande, les partis politiques et les syndicats. Même le patronat se met de la partie : la direction d'Opel, pour ne citer qu'elle, offre une prime de 100 000 DM (340 000 F) à qui faciliterait l'arrestation des assassins des trois jeunes Turques)... Le barouf est proprement assourdissant.

 

Ouvriers, ne tombez pas dans le piège

Ce front uni démocratique a maintenant un impact non négligeable dans la population et les défilés géants semblent faits pour rassurer les nombreuses voix qui, en novembre encore, s'inquiétaient, tel Thomas Schmidt (un proche de Cohn-Bendit), de "la réaction tardive de la société allemande". A côté de quelques autres déclarations qui n'hésitaient pas à rendre carrément responsable de la flambée raciste le manque de réaction des populations laborieuses aux attentats qui frappaient les travailleurs "étrangers" (y compris, dorénavant, dans la partie ouest du pays). Ailleurs en Europe, les bourgeoisies nationales ne manquent pas, en assurant un large écho à la campagne qui se déploie au sein de la république unifiée et en colportant les thèmes de l'"inconscience" ou de la "passivité des citoyens", d'importer au maximum l'effet de ces démonstrations démocratiques dans leur pays. Notamment en France, où le verdict du tribunal de Reims acquittant la boulangère qui a tué un jeune Beur avait donné lieu à l'amorce d'une croisade antiraciste dans la seconde quinzaine du mois dernier.

A n'en pas douter, c'est une opération d'envergure et d'échelle européenne qu'entreprend la classe bourgeoise. La visée en apparaît claire : entraîner les prolétaires sur le terrain de la défense de la démocratie et lui faire abandonner le sien, celui de la résistance aux attaques capitalistes, dans l'heure précise où celles-ci pleuvent comme jamais sur son dos, en même temps que s'accumulent les effets ravageurs de la décomposition de la société bourgeoise. Et c'est pour mieux armer le piège que les démocrates, de Cohn-Bendit à Kouchner, ont le front de chercher à culpabiliser les prolétaires, eux qui subissent à plein - juifs, noirs, "étrangers" et immigrés ou non - la pourriture capitaliste. L'ignominie suprême de tout ce tapage tient dans la volonté de la bourgeoisie de faire sortir de la bouche même des prolétaires ce discours : "Nous voulons un Etat fort, pour que cessent les violences, afin que les nazillons soient muselés !", c'est-à-dire leur faire demander de leur propre chef le renforcement des moyens de répression de l'Etat, lesquelles, évidemment, ne serviront pas tant contre les extrémistes xénophobes que d'abord et surtout contre la classe ouvrière.

Ouvriers, ne cédez surtout pas à ce chantage démocratique scandaleux. Si vous deviez y succomber, en Allemagne ou ailleurs, non seulement vous n'écarteriez pas un instant de vous, au contraire, la menace du chômage et de la misère, mais vous vous précipiteriez encore dans le gouffre de la décomposition que le système capitaliste aux abois ouvre chaque jour davantage sous vos pieds. En vous trompant de combat, en luttant pour la démocratie et non pour la défense de vos intérêts prolétariens distincts, vous vous rendriez incapables de riposter aux agressions économiques du capitalisme et entraîneriez votre propre perte. De même que celle de toute l'humanité, car celle-ci peut seulement compter sur votre classe pour sortir, par la voie de la révolution communiste, le monde de la chausse-trappe mortelle où le jette la bourgeoisie. Voilà votre véritable responsabilité.

Vie du CCI: 

  • Prises de position du CCI [1]

Géographique: 

  • Allemagne [8]

Front National : gonflé hier, éclaté aujourd'hui, manipulé toujours

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C'est parce que le Front National était devenu une lourde entrave qui compromettait systématiquement toute tentative de recomposition des partis de droite, condition indispensable pour le retour de ces fractions au gouvernement, que l'ensemble de la bourgeoisie a concocté une manœuvre provoquant l'éclatement de ce parti d'extrême droite devenu trop encombrant.

Cela n'est pas nouveau : l’utilisation de Le Pen et de son parti, telle une baudruche que l’on gonfle et que l’on agite selon les nécessités du moment de la vie politique, a déjà constitué un des moyens majeurs de la bourgeoisie française pour limiter les conséquences de la venue de la gauche au pouvoir dans les années 80, face à une classe ouvrière qui développait ses luttes et sa conscience et qui apprenait à reconnaître dans les partis de gauche ses pires ennemis.

De fait, le poids pris par l'extrême droite dans la vie politique française a été le produit direct de la situation créée par l'arrivée de la gauche au pouvoir en 1981. Cette dernière, confrontée à un discrédit croissant, va trouver dans le prétendu "danger fasciste" une légitimité nourrie par les succès du FN, qui auront été pleinement favorisés par le pouvoir socialiste en place. Il faut rappeler que la baudruche FN a été fabriquée de toutes pièces par les manœuvres de Mitterrand[1]. C’est l’instauration par Mitterrand d’un mode d'élections à la proportionnelle à un seul tour en 1986 qui aura permis au FN de faire son entrée au parlement. Pendant des années, le parti de Le Pen allait canaliser les votes protestataires de rejet de "la classe politique", tout en servant de faire-valoir à la gauche, auréolée, grâce à lui, du statut de champion de la "défense de la démocratie" et des "Droits de l’Homme".

Depuis lors, régulièrement, les scores électoraux du FN servent à alimenter les campagnes de tous les "démocrates" de gauche et d'extrême gauche sur la prétendue "montée de la menace fasciste" qui invitent les prolétaires à se mobiliser, en premier lieu sur le terrain électoral, à s'en remettre à "la défense de la démocratie" ou à se placer sous la bannière "d'un front républicain".

Or, le danger de "montée du fascisme" n'est qu'un leurre, car contrairement à la situation des années trente, sa condition préalable et indispensable : une classe ouvrière vaincue, n'est pas réalisée.

Par ailleurs, le véritable problème pour la classe dominante, n’est nullement le risque d'arrivée au pouvoir du FN. Il est parfaitement clair pour la bourgeoisie française que le programme du FN est totalement inapplicable et contraire aux besoins actuels du capitalisme. Tant ses orientations anti-européennes et isolationnistes que ses prétentions à interdire l'exploitation de la force de travail "immigrée" vont à contre-courant complet des objectifs du capital national.

La seule réelle préoccupation du reste de la bourgeoisie vis-à-vis d'un FN représentant 20% de l'électorat, c'est qu’aujourd’hui cette baudruche était devenue difficilement gérable. Elle était devenue d'autant plus gênante qu'elle se posait en arbitre obligé des querelles et des divisions des partis de droite, contribuant à favoriser leur concurrence et leur dispersion, au point qu’elle tenait littéralement en otage les secteurs de la droite traditionnelle, faisant et défaisant à sa guise ses déboires comme ses succès électoraux. Elle constituait une véritable entrave à tout projet de recomposition de la droite, contraignant la gauche à assumer, seule au gouvernement et pour une longue période indéterminée, un lourd programme d'attaques anti-ouvrières. L’impact négatif pour l’avenir d’une telle situation quant à la capacité de la gauche à mystifier la classe ouvrière était inacceptable pour la bourgeoisie dans son ensemble. C'est pourquoi la bourgeoisie s'est chargée de "casser" le FN. Voilà comment elle s'y est pris :

  • premier acte : Le Pen, qui, en tant que "chef historique" et "leader naturel" de l'extrême droite, n'a jamais caché ses intentions de conduire la liste du FN aux élections européennes de juin 1999, se retrouve condamné par un tribunal pour "avoir fait le coup de poing" (en présence de caméras de la télévision) contre une candidate du PS aux législatives et ses supporters, lors d’une précédente campagne électorale. Il est alors suspendu de ses "droits civiques" pour deux ans et de ce fait, devient inéligible aux élections européennes ;
  • deuxième acte : pendant que Le Pen prépare le terrain pour imposer son remplacement par sa femme, jusque là absente de la vie politique, ce jugement pousse "le loup à sortir du bois", selon l'expression même d'un journaliste avisé. Ce "loup" aux dents longues n'est autre que le n° 2 du FN, Mégret, qui tissait depuis des mois ses propres réseaux pour devenir "calife à la place du calife" et qui croit le moment venu de révéler ses ambitions. En juin 1998, il affiche publiquement son "désaccord" avec le "vieux menhir" et se porte candidat comme tête de liste le plus "représentatif" ;
  • troisième acte : fin septembre dernier, en appel, un autre tribunal ramène la sanction de Le Pen, et donc son inéligibilité, à un an au lieu de deux. Ce "coup de pouce" permet à Le Pen de redevenir tête de liste et de reprendre l'initiative. A partir de là, pouvait se déclencher la "meurtrière guerre des chefs" dont tous les médias nous ont gavés et la scission qui consacre l'implosion du FN.

En n'ayant pas cessé de manipuler le FN, en le faisant gonfler hier par tous les moyens, en s'employant à le casser en deux aujourd'hui pour l'affaiblir et le contrôler plus aisément, la classe dominante démontre ainsi une fois de plus tout le machiavélisme qu'elle est capable de déployer.

Alors que la gauche continuera demain d'agiter devant elle l'épouvantail du "danger fasciste", la classe ouvrière ne devra pas céder à ces campagnes d'intox. L'ennemi le plus dangereux pour elle, ce n'est pas l'extrême droite, mais bien les partis de gauche et leurs syndicats parce qu’ils sont les plus aptes à tromper les ouvriers. Ce sont ces partis de gauche et les syndicats qui chercheront à les dévoyer de leur terrain de classe pour mieux saboter leurs luttes de résistance aux attaques du capitalisme.



[1] Sur ce sujet, il vaut la peine d'illustrer les connivences entre le FN et le PS par un témoignage venu de l'intérieur du parti de Le Pen, celui de Lorrain de Saint Afrique. Au sein d'un livre intitulé Dans l'ombre de Le Pen, il raconte des épisodes de l'histoire des relations Tapie / Le Pen,  édifiantes quant à la stratégie de la gauche mais aussi des mœurs de la bourgeoisie :

  • A l'occasion de diverses consultations locales en 1989 : "Il y a entre les dirigeants de la fédération départementale des Bouches-du-Rhône du Front et l'entourage de Bernard Tapie des contacts permanents pour examiner ensemble tel ou tel cas, se coordonner, s'épauler. Avec la bénédiction de Le Pen."
  • A l'occasion de l'élection de Tapie aux législatives de 93 à Gardanne : " (…) les militants vivent très mal ce maintien et les conditions dans lesquelles Le Pen a pris sa décision [maintenir le candidat du FN au second tour]. Ils flairent quelque chose. On parle d'un accord, d'un volet financier, d'une rencontre sur le Phocéa, le yacht de Tapie. Au cours d'un week-end à Rueil, chez sa seconde

Courants politiques: 

  • Anti-fascisme [5]

Campagnes anti-négationnistes : une attaque contre la Gauche communiste

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Parmi les armes qu'elle déploie à l'heure actuelle contre le développement des combats et de la conscience de la classe ouvrière, la bourgeoisie de certains pays, notamment en France, utilise le thème du "négationnisme", c'est-à-dire de la remise en cause par un certain nombre de publicistes de la réalité des chambres à gaz dans les camps de concentration nazis.

La thèse de la non-existence des chambres à gaz, et donc de la volonté d'extermination par le régime nazi de certaines populations européennes, notamment des populations juives, a été particulièrement diffusée par le groupe de la "Vieille Taupe" qui se réclamait de "l'ultragauche" (qu'il ne faut pas confondre avec la Gauche communiste à laquelle ce courant avait fait un certain nombre d'emprunts). Pour la "Vieille Taupe" et d'autres groupes de la même mouvance, l'existence des chambres à gaz était un pur mensonge des bourgeoisies alliées destiné à renforcer leurs campagnes antifascistes au lendemain de la seconde guerre mondiale. Ces groupes se donnaient comme mission, en dénonçant ce qu'ils considéraient comme un mensonge, de démasquer le rôle anti-ouvrier de l'idéologie antifasciste. Mais entraînés par leur passion "négationniste" (ou par d'autres forces ?) certains éléments, parmi eux, en sont venus à collaborer avec des parties de l'extrême droite antisémite. Celles-ci également considéraient que les chambres à gaz étaient une invention, mais une invention du "lobby juif international". C'était évidemment pain béni pour les secteurs "démocratiques" et "antifasciste" de la bourgeoisie qui ont donné une publicité considérable aux thèses "négationnistes" afin de renforcer leurs propres campagnes en stigmatisant cette tentative de "réhabilitation du régime nazi". Mais ces secteurs ne se sont pas arrêtés là. Les références faites par les "négationnistes de gauche" aux positions de la Gauche communiste dénonçant l'idéologie antifasciste, et particulièrement au texte tout à fait valable publié au début des années 1960 par le "Parti Communiste International", Auschwitz ou le Grand Alibi, ont servi récemment de prétexte aux souteneurs de la "démocratie bourgeoise" (y compris certains trotskistes) pour déclencher une campagne de dénonciation du courant de la Gauche communiste : "Ultra-Gauche et Ultra-Droite, même combat !", "Comme toujours, les extrêmes se rejoignent".

Pour sa part, le CCI, comme tous les véritables groupes de la Gauche communiste, a toujours refusé de marcher dans les élucubrations "négationnistes". Vouloir amoindrir la barbarie du régime nazi, même au nom de la dénonciation de la mystification antifasciste, revient en fin de compte à amoindrir la barbarie du système capitaliste décadent, dont ce régime n'est qu'une des expressions. Cela nous permet de dénoncer d'autant plus fermement les campagnes actuelles visant à discréditer aux yeux de la classe ouvrière la Gauche communiste, le seul courant politique qui défend réellement ses intérêts et sa perspective révolutionnaire. Cela nous permet de mener avec la plus grande énergie le combat contre les mystifications antifascistes qui prennent appui sur la barbarie nazie pour mieux enchaîner les prolétaires au système qui l'a enfantée et qui n'en finira jamais d'engendrer la barbarie : le capitalisme.

Encore une fois, nous voulons réaffirmer avec force que la Gauche communiste n’a aucune espèce de parenté, même lointaine, avec la mouvance "négationniste" rassemblant l’extrême-droite traditionnelle et "l’ultra-gauche", concept étranger à la Gauche communiste. Aussi, la dénonciation de l’antifascisme comme instrument de l’embrigadement du prolétariat dans le pire carnage inter-impérialiste de l’histoire et comme moyen de dissimuler quel est le vrai responsable de toutes ces horreurs, à savoir le capitalisme comme un tout, n’a jamais signifié la moindre complaisance dans la dénonciation du camp fasciste dont les premières victimes furent les militants prolétariens. L’essence de l’internationalisme prolétarien, dont la Gauche communiste s’est toujours faite le défenseur intransigeant –dans la droite ligne de la vraie tradition marxiste et donc à l’encontre de tous ceux qui l’ont bafouée et trahie, trotskistes en tête– a toujours consisté à dénoncer tous les camps en présence et à démontrer qu’ils sont tous également responsables des horreurs et des souffrances indicibles que toutes les guerres inter-impérialistes infligent à l’humanité.

 

Courants politiques: 

  • Anti-fascisme [5]

Le marais de "l'ultra-gauche" au service des campagnes de la bourgeoisie

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La campagne de la bourgeoisie contre la Gauche communiste autour de "l'affaire négationniste" a trouvé dans le milieu informe dénommé "d'ultra-gauche" non seulement de quoi alimenter ses calomnies mais aussi une caution théorique contre la tradition de la Gauche communiste et les organisations qui s'en réclament.

Comme nous l'avons déjà dit[1], le magma informe appelé "l'ultragauche", n'a rien à voir avec les organisations du milieu prolétarien. Rassemblement hétéroclite d'intellectuels divers au radicalisme petit-bourgeois, sans réelle filiation historique et sans tradition organisationnelle, il a toujours été le lieu de passage de toutes sortes de relectures "modernistes"[2] du marxisme, typiques de l'impatience petite bourgeoise déçue par la classe ouvrière. Fait de personnalités intéressées beaucoup plus à faire parler d'elles qu'à défendre des positions de classe, il est aussi le lieu de tous les aventurismes.

Tel fut le cas du libraire P. Guillaume qui, au début des années 80, vit dans les thèses de R. Faurisson l'occasion de s'offrir un coup de pub et qui déjà à cette époque rendit ainsi un fier service à la classe dominante. D'abord parce que les thèses "négationnistes", avec ou sans l'épithète ou "ultragauche", n'ont jamais servi d'autre but que celui d'affaiblir la condamnation du capitalisme, en niant la vérité historique de ses crimes les plus monstrueux. Ensuite parce que, en remettant à la mode les thèses éculées de l'antisémite Faurisson, "l'ultragauche négationniste" a, déjà à l'époque  et au même titre qu'un Le Pen, bien servi la propagande bourgeoise de la gauche visant à entraîner les ouvriers derrière la défense de l'Etat démocratique au nom du "retour du péril fasciste". Enfin en drainant derrière lui un milieu d'intellectuels dont certains prétendaient "sympathiser" avec les positions de la Gauche communiste, pillant dans les principes de celle-ci pour essayer de les mêler aux délires négationnistes, elle oeuvrait déjà à la traîner dans la boue.

Quant à ceux qui, revenus de l'aventure faurissonienne en question, ont commis l'ouvrage collectif "Libertaires et 'ultragauche' contre le négationnisme" autour duquel s'est centrée la récente campagne de presse, ils contribuent encore plus subtilement à l'opération de dénigrement de la Gauche communiste.

Ces gens-là, après avoir largement pataugé dans la fange douteuse du "révisionnisme" aux relents antisémites, vomissent aujourd'hui des mea-culpa et prétendent se blanchir en multipliant les professions de foi antifasciste et démocratique. Qu'ils le fassent devant leurs procureurs démocrates et trotskistes et se fassent préfacer par Gilles Perrault, animateur du groupement anti-lepéniste "Ras-l'front", n'est pas pour nous étonner de la part de "révolutionnaires" en peau de lapin de cet acabit.

 Mais ils ne s'arrêtent pas là. Pour mieux se disculper de leurs errements passés, ils s'empressent d'en faire porter le chapeau... à la Gauche communiste dont les principes et en particulier l'attitude internationaliste devant la seconde guerre mondiale aurait contenu, en germes, les ingrédients fondateurs de leurs dérives négationnistes !

Nos "radicaux" ultragauche ex-révisionnistes s'en prennent ainsi à l'affirmation par la Gauche communiste que la barbarie nazie participait pleinement de la logique aveugle et meurtrière du capital et de la guerre impérialiste, comme y ont participé les massacres de Dresde et d'Hiroshima. Ce point de vue, qualifié aujourd'hui de "schématisme marxeux" par les anciens amis de P.Guillaume, aurait constitué la racine théorique des errances faurissoniennes ultra gauchistes. Insistant à longueur de page sur le caractère "original" et "à part" de la barbarie nazie, l'argumentaire de ces derniers rejoint sans complexe les attaques du Figaro et du Monde pour hurler avec eux : le pire des négationnismes n'est pas de nier les chambres à gaz, mais d'oser dénoncer, derrière le monstrueux instrument nazi, la main du capitalisme.

Mais le summum est atteint lorsque cette bande de repentis s’attaque à la position des communistes face à la seconde guerre mondiale. Le délire négationniste ultra gauchiste descendrait en droite ligne du "dogme" selon lequel "il n'y a pas plus de différences entre le fascisme et les démocraties qu'il n'y en avait en 1914 entre la France de Clémenceau et l'Allemagne du Kaiser" et serait l'héritage des "groupes issus de la gauche italienne et allemande" qui ont défendu, "qu'on se retrouvait (face à la 2è guerre mondiale) devant le même cas de figure que lors de la Première Guerre mondiale"[3]. Sans le dire ouvertement, on suggère lourdement au lecteur que c'est donc le "dogme borné" de l'internationalisme prolétarien, son refus de choisir un camp dans la boucherie impérialiste de 3945, à l'instar de Lénine en 1914, qui aurait empêché la Gauche communiste de "percevoir l'originalité du nazisme" et, ce faisant, qui aurait ouvert grand la porte aux thèses négationnistes ! Au cas où on n'aurait pas compris, la conclusion du bouquin est encore plus explicite lorsqu'elle taxe de "cheval de bataille néonazi", le "renvoi dos à dos les deux belligérants, les Etats totalitaires et les Etats démocratiques"[4] .

Convertis en défenseurs acharnés de la "normalité démocratique" du capitalisme contre "l'aberration" de sa forme fasciste, les repentis ultra-gauchistes ont donc achevé de rejoindre le camp de tous les va-t-en guerre, ceux qui, à toutes les époques, ont toujours trouvé des mots d'ordre "radicaux" pour entraîner les prolétaires derrière les drapeaux nationaux et justifier la boucherie impérialiste[5].

Vu la complaisance avec laquelle ces gens-là apportent de l'eau au moulin de la campagne de dénigrement contre la Gauche communiste, on pourrait se demander pourquoi la presse bourgeoise s'est acharnée sur ces trois pelés d'intellectuels manipulés au lieu de s'en prendre explicitement aux organisations bien réelles qui se réclament de la Gauche communiste. Il n'y a là aucun mystère. Plutôt que de faire une publicité ouverte à ces dernières et citer leur presse, mieux vaut pour la bourgeoisie montrer du doigt des ersatz inoffensifs (contre le capital tout au moins !) et faire vendre un bouquin qui contribuera d'autant mieux à dénaturer les positions de la Gauche communiste.


[1] Voir Révolution Internationale n°258 et 259.

[2] Voir Révolution Internationale n°17 et 18 : Du modernisme au néant.

[3] Libertaires et ultragauche contre le négationnisme, p.29.

[4] (4) Ibid., p.99.

[5] Qu'un Barrot, coauteur d'un ouvrage sur La Gauche Communiste en Allemagne et surtout responsable de la publication de textes de Bilan (principal représentant des positions défendues par la Gauche Communiste dans les années trente) sur la guerre d'Espagne, se retrouve côte à côte et sans les critiquer le moins du monde avec les tenants de cette entreprise crapuleuse, apporte de fait une caution à toute cette campagne dirigée contre la Gauche communiste.

Courants politiques: 

  • Anti-fascisme [5]

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Liens
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