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OUI, NOUS DENONÇONS LA GAUCHE, PS, PC ET GAUCHISTES. NOUS LES DENONÇONS POUR LES INNOMBRABLES SERVICES RENDUS AU CAPITAL NATIONAL, POUR LE NOMBRE DE GREVES ET MEME DE REVOLUTIONS, QU' ILS ONT BRISEES. POUR LEUR PATRIOTISME QUI A DEJA COUTE DES MILLIONS DE MORTS DANS UNE GUERRE INUTILE.
NON, DENONCER LA GAUCHE, CE N'EST PAS OBLIGATOIREMENT DEFENDRE LA DROITE. LA FAUSSE ALTERNATIVE AVEC LAQUELLE ON VEUT NOUS BOURRER LE CRANE, NOUS LA REFUSONS.
IL Y A UNE AUTRE ALTERNATIVE QUI SE TROUVE DANS LA DIVISION REELLE DE LA SOCIETE : D’UN COTE LA CLASSE OUVRIERE, LES MILLIONS D'EXPLOITES QUI PEUPLENT LE MONDE ET DE L'AUTRE TOUTES LES FRACTIONS BOURGEOISES, DE DROITE COMME DE GAUCHE, QUI ESSAIENT DE SAUVEGARDER UN SYSTEME ECONOMIQUE POURRI.
LA LUTTE QUI OPPOSE LA CLASSE OUVRIERE A L’ETAT BOURGEOIS N'EST PAS LA LUTTE DROITE- GAUCHE. LA QUERELLE ENTRE LES CLIQUES BOURGEOISES PORTE SUR LE MEILLEUR MOYEN DE SAUVER LE CAPITAL NATIONAL, SUR LE DOS DE LA CLASSE OUVRIERE. LA LUTTE DE LA CLASSE OUVRIERE, ELLE, AVANCE DANS LA VOIE DE DETRUIRE DE FOND EN COMBLE LE CAPITALISME, ET SON APPAREIL POLITIQUE, DE DROITE COMME DE GAUCHE.
Pour les travailleurs ou les chômeurs qui ont pu se laisser duper par des vaines promesses électorales, la joie frelatée d'un soir d'élection ou d'investiture ne tardera pas à faire place à la plus amère désillusion. Pour la "relance de la consommation populaire", la disparition du chômage, la semaine de 35 heures sans diminution de salaire, l'élimination des "inégalités sociales", RIEN ne sera fait. Cela, c'était seulement des fariboles électorales, déversées sans compter durant des semaines pendant lesquelles la gauche s'abritait encore sous le paravent de "l'opposition".
Les mesures annoncées avant les élections d'austérité et de licenciements massifs vont s'avérer aussi inévitables pour la bourgeoisie avec un gouvernement de gauche qu'avec un gouvernement de droite. L'EQUIPE A CHANGE, MAIS CE QUI LUI ECHOIT C'EST LA MEME TACHE : ASSURER LA DEFENSE DU CAPITAL NATIONAL et, COMPTE-TENU DE L'AMPLEUR ET DE LA GRAVITE DE LA CRISE MONDIALE, cela signifie une attaque encore plus vive contre l'ensemble de la classe ouvrière. Ce "nouveau" gouvernement -même affublé d'une étiquette "de gauche"-va devoir pratiquer une politique "impopulaire", une politique "de droite" qui est celle que tout gouvernement est aujourd'hui condamné à pratiquer.
Les illusions sur un "changement de politique" ou sur un "pas positif" pour la classe ouvrière, avec une équipe de gauche au gouvernement ne peuvent résister à l'épreuve des faits. On l'a déjà vu dans le passé : contrairement à ce que veut faire croire la bourgeoisie, les grèves de 1936 n'ont pas été favorisées , ni produites par la victoire électorale de la gauche, type de situation qui encouragerait les travailleurs à imposer leurs revendications. Si des grèves éclatent en 1936, c'est face à une situation de crise économique où le niveau de vie de la classe ouvrière est durement attaqué par la bourgeoisie, et non grâce aux élections. Même si elles ont pu être dévoyées par la bourgeoisie, ces grèves ont lieu sur le terrain de l'auto-défense ouvrière et si un gouvernement de "front populaire" a été mis sur pied, c'est justement pour contrer efficacement le mécontentement social et qu'il représentait la force capable de casser ces grèves.
Quant aux "mesures sociales" qu'on nous cite de ce gouvernement :
Des acquis de cet acabit, des millions d'ouvriers ont dû les payer ensuite au prix de leur sang et de leur vie dans la seconde boucherie mondiale où la gauche avait réussi à les enrôler.
Mais l'œuvre de la gauche française au service du capital national ne s'est pas arrêté là : on lui doit encore le bombardement de Sétif en mai 45; le massacre de la rébellion malgache en 47, la participation au conflit de Suez puis l'intensification de la guerre d'Algérie sous Guy Mollet en 56 (doublement des effectifs du contingent).
On lui doit le "retroussage des manches" entre 45 et 47 pour l'œuvre de reconstruction nationale, le blocage des salaires et l'envoi des premiers CRS pour réprimer les grèves ouvrières en 1947.
C'est pourquoi LA GAUCHE COMME LA DROITE SONT NOS ENNEMIS DE CLASSE.
Mais aujourd'hui la situation est toute différente de 1936 et des lendemains de la guerre mondiale, les quelques maigres "miettes" sociales que pouvait recueillir la classe ouvrière en contrepartie de sa démoralisation et de ses "sacrifices" ont disparu. Aujourd'hui c'est directement un programme draconien d'austérité qu'un gouvernement de gauche -comme l'on fait les travaillistes en Grande-Bretagne- va devoir faire appliquer. Une fois retombé le délire électoral, ce qui restera, c'est comme AVANT et comme PARTOUT, avec de plus en plus de netteté, l'épreuve de force entre la bourgeoisie et la classe ouvrière, c'est les mesures d'expulsion à l'encontre des travailleurs immigrés (la social-démocratie allemande ne s'est pas privée !), c'est la mise au chômage pour des centaines de milliers d'ouvriers dans les principaux secteurs industriels du pays pour "sauvegarder la compétitivité nationale", c'est l'envoi de la police contre les grévistes, c'est faire travailler plus intensivement avec moins de salaires. Aujourd'hui, ils nous parlent encore de "justice sociale", de "réduction des inégalités", d'"imagination au pouvoir", mais sous cet emballage, cet enrobage de circonstance, percent déjà les vrais projets. Dès les premiers discours du nouveau premier ministre Mauroy, lors même de sa prise de fonction, il est question "d'un gouvernement qui sera celui de la rigueur". Nous voici discrètement prévenus : "en ces temps difficiles, rien ne nous sera donné sans effort". Voici un air connu. L'univers à dimension "nationale" qu'on nous promet, c'est bien toujours le même univers d'exploitation, d'austérité, de misère .
Les boniments ont changé, la camelote non.
Il va s'agir de "travailler dur", de "réalisme", de "sacrifices" et de "solidarité nationale", comme en témoigne déjà le ministère nouvellement institué sous ce nom.
Pendant des mois, le gouvernement va s’employer à invoquer le "danger de la droite". -Elle va lui attribuer l'insuccès des mesures de redressement économique et des soi-disant "tentatives d'amélioration sociale".
Les mesures d'austérité seront mises sous la responsabilité des "patrons traîtres à la nation qui font fuir les capitaux", l'alibi des "manœuvres réactionnaires pour saborder l'œuvre sociale" permettra de repousser " "les mesures de changement de société" aux calendes grecques.
Ce sera la même argumentation qui sera utilisée pour dévier toute volonté d'attaque des prolétaires contre le gouvernement : il faudra laisser "ses chances" au gouvernement du Président Mitterrand (n'a-t-il pas dit que la durée était "un facteur primordial dans la situation actuelle" ?) , il faudra rester "responsables" ; faire grève, ce sera "faire le jeu de la droite".
Mais les illusions là-dessus seront de plus en plus difficiles à entretenir. La bourgeoisie le sait. Elle a pu constater le désintérêt croissant pour le jeu des partis politiques et la désyndicalisation importante de ces dernières années en France. C'est pourquoi CGT et CFDT se sont empressés de proclamer hautement dès le lendemain du 10 mai, leur "pleine indépendance" et leur "autonomie" vis-à-vis du gouvernement et de lancer des appels pour une "syndicalisation massive" .
Au gouvernement comme dans l'opposition, la gauche va continuer de faire écran au profit de l'ensemble de la bourgeoisie.
Pour la classe ouvrière, RIEN N'EST FAIT, TOUT RESTE A FAIRE.
Même avec une de ses fractions au gouvernement, la gauche ne va pas abandonner sa fonction essentielle au sein de la bourgeoisie qui est la nécessité de l'encadrement de la classe ouvrière et le dévoiement de ses luttes. Pour le prolétariat, rien n'a changé. Comme hier, comme aujourd'hui, la tâche va être demain de déjouer les pièges des mystifications de la gauche. La tâche va être d'affirmer à travers le terrain de la lutte de plus en plus nécessaire face aux attaques accrues de la bourgeoisie, une autonomie réelle de classe fondée sur la pratique des assemblées générales et de la solidarité ouvrière dans la lutte.
C'est aussi bien à toute la gauche, que ses fractions soient au pouvoir ou dans l’opposition, qu'à toute la droite que la classe ouvrière va devoir s'affronter. Quelles que soient les manœuvres et le partage des tâches au sein de la bourgeoisie, c'est à tous les défenseurs du capital national, qu’ils soient en face de lui ou se prétendent à ses côtés qu’il lui faudra s'opposer.
Y.D.
"On a gagné !" ont crié des milliers de voix. Toute la nuit, ils ont dansé à la Bastille. Tous, y compris l'extrême-gauche, étaient dans l'euphorie de la défaite de Giscard-les-diamants. Le rêve de toute une génération de gauchistes français et de gens de gauche est exaucé, enfin, la gauche a battu la droite !
Mais, au fait, qui a gagné, et où en est-on ? Certes, le méchant Giscard est viré, les révolutionnaires ne verseront pas une larme pour lui. Malheureusement, il ne s'agit pas de la défaite de "la bourgeoisie"! La bourgeoisie est une classe et une force sociale, force de domination qui ne se reconnaît pas toute entière dans un seul homme ; a fortiori, celui-ci peut remplacer celui-là. On peut même considérer qu'il n'y a pas défaite dans ce cas précis puisque la bourgeoisie tout entière a "gagné" les élections, puisque la participation a été massive, avec un taux d'abstention incomparablement plus faible qu'aux USA, puisque l'illusion qu'on peut changer quelque chose en votant a marché, d'autant plus que le président est "changé". Hélas, en général, sur le plan électoral, la bourgeoisie ne perd jamais rien, même pas son pouvoir, car sa classe ennemie, le prolétariat, est diluée dans les diverses couches sociales, atomisée, isolée dans les isoloirs ; au lieu de menacer comme force collective à l'image des ouvriers polonais, ils sont fractionnés et façonnés comme toute la population par les différentes facettes de l'idéologie bourgeoise : droite, centre, gauche, extrême-gauche.
La bourgeoisie a la vie dure, les illusions qu'elle sème dans la tête des prolétaires pour les maintenir sous le joug aussi. Ces élections viennent confirmer cette vérité qu'il ne faut jamais vendre la peau de l’ours avant de l'avoir tué", le fort taux de participation électoral est là pour le démontrer, même s'il est en baisse par rapport à celui des élections précédentes, même si ne sont pas recensés tous ceux qui ne sont pas inscrits sur les listes électorales (et dont le pourcentage est très fort chez les jeunes).
Et pourtant, qu'on se souvienne du manque général d'intérêt pour les élections il y a à peine six mois. Le mythe électoral s'était usé pour avoir trop servi sans rien changer dans les années 70. La bourgeoisie avait abondamment utilisé cette arme de dilution de la conscience ouvrière, tout y était passé : élections présidentielles, législatives, municipales, cantonales, européennes, sans parler de toutes les élections locales et partielles. Devant cette avalanche, les élections sont apparues de plus en plus pour ce qu'elles étaient, une gigantesque farce.
Nous avons déjà maintes fois affirmé que les élections sont étrangères à l'expression 'du prolétariat, qu'elles ne sont qu'une noix vide, foire d'empoigne de personnes, qui cache l'appareillage des partis et la bureaucratie étatique. Cette fois-ci encore, nous pouvons constater que ce spectacle navrant du choc des ambitions personnelles ne serait qu'une vulgaire enceinte de cirque si des millions de prolétaires n'étaient pas illusionnés par les promesses fallacieuses des uns et des autres, délaissant momentanément le seul terrain où ils s'expriment en tant que classe pour une société totalement différente : celui de la lutte collective et sans cachotteries sur leur opinion, la lutte pour la destruction du capitalisme.
En six mois, la bourgeoisie est parvenue à repolariser toute l'attention sur les élections, à transformer les prolétaires en électeurs-citoyens, comme tous les Français, par-delà les classes. Comment y est-elle parvenue si on se souvient du dégoût de la politique bourgeoise qui marquait la vie politique en France il y a six mois ?
Sous la IVème République, pour la bourgeoisie, les choses paraissaient simples, le président était directement désigné par les partis. Le référendum de 1961, en instituant le suffrage universel pour l'élection présidentielle, renforçait le pouvoir présidentiel exécutif mais aussi son poids mystificateur en faisant croire que le choix d'un président était une responsabilité de tous les citoyens. Partant de ce point de vue, rien n'est fondamentalement changé, les élections sont toujours une gigantesque entreprise de manipulation où le choix final ne dépend pas tant des votes que du jeu des partis (multiplicité des candidatures et des désistements).
Ce que le suffrage universel introduit, c'est la nécessité pour la bourgeoisie d'une manipulation des médias de masse (radio, télévision, presse, etc.…) où les techniques utilisées sont celles qui ont été rodées dans la publicité et le show-business pour aboutir à ce que la bourgeoisie appelle pudiquement des élections "à l'américaine".
L'essentiel pour la bourgeoisie est de ramener le plus de prolétaires possible sur le terrain électoral; là-dessus, toutes les forces bourgeoises sont d'accord, de l'extrême-droite aux gauchistes, qui, toutes, appellent à voter, le tout renforcé par des campagnes intensives de culpabilisation des abstentionnistes par les mass-médias du style "ne tournez pas le dos à la France" (spot publicitaire qui est passé à la télé et qui ressemble à n'importe quel spot publicitaire pour une lessive ou une couche-bébé).
Mais, cela est classique et pas nouveau, il fallait encore plus pour ramener les prolétaires dans l'isoloir, les techniques du show business sont venues épauler celles de la publicité avec Coluche.
Sans que cela soit forcément volontaire, la candidature Coluche est venue, en créant l'événement, fixer l'attention de tous ceux qui étaient dégoûtés de la politique bourgeoise, sur les élections, la dérision du clown est devenue, malgré son acteur, une arme électorale. Une fois cette fonction remplie, Coluche a été jeté comme une vieille guenille usée, éliminé de tous les médias contrôlés par l'Etat ; interdit d'antenne, Coluche a sombré dans l'oubli, ce qui prouve bien que la bourgeoisie n'autorise les candidatures que tant qu'elles la servent (qu'on réfléchisse à ce que cela signifie pour les soi-disant candidatures révolutionnaires style Laguiller).
Tout l'art électoral de la bourgeoisie consiste à faire croire qu'au travers des élections peuvent se réaliser les aspirations de la population : la démagogie électorale n'a pas d'autre but. Pourtant, ce ne sont même pas toutes les promesses des candidats qui ont fait voter, c’est avant tout un désir de "changement". Le "changement”, l'"alternance" ont été les maîtres-mots de cette campagne électorale : même la droite a voulu se montrer comme l'expression de ce changement : Chirac "le changement dans la sécurité" et sans ironie, Giscard, qui prétend avoir "changé".
La bourgeoisie gagne toujours les élections puisque c'est elle qui les a instituées et que, de toutes façons, elle a le monopole des candidats ; on vote toujours pour la bourgeoisie. Cependant, sa victoire, c'est avant tout la forte participation, c'est d'avoir fait croire que le "changement" peut être électoral.
Pourtant, cette victoire est fragile. La gauche au pouvoir n'est pas plus capable de réaliser un quelconque changement réel que la droite. L'austérité, la misère croissante des ouvriers sont toujours à l'ordre du jour, la réalité de la crise mondiale du capitalisme est là. Le seul "changement" que la bourgeoisie pouvait offrir par les élections a eu lieu, ce n'est pas lui qui peut réellement satisfaire les prolétaires.
La gauche au pouvoir ne fera pas mieux que la droite. Du même coup, les illusions sur l'"alternance", le "changement" par les élections, risquent de fondre avec la crédibilité du parti socialiste au pouvoir. Avec l’arrivée de Mitterrand au pouvoir, la bourgeoisie use de manière accélérée ses cartes mystificatrices. Il est des victoires qui annoncent la défaite. Le désir de "changement" des prolétaires aujourd'hui, même s'il s'est traduit par la victoire électorale de la bourgeoisie maintenant annonce la révolution de demain.
J.J.L.
Nous avons fréquemment analysé dans notre presse les armes actuellement utilisées par la bourgeoisie dans son offensive contre la classe ouvrière. Depuis plus de deux ans, nous avons mis en évidence le fait que :
"...après avoir eu pendant des années comme principal ennemi la gauche au pouvoir ou en marche vers le pouvoir, la classe ouvrière, dans la période qui vient, retrouvera de façon quasi générale le même ennemi dans l'opposition n'hésitant pas à radicaliser son langage pour pouvoir mieux saboter ses luttes". Résolution sur la situation internationale du 3ème Congrès du C.C.I -Revue Internationale n°18)
Aujourd'hui, l'élection du socialiste François Mitterrand à la tête de l'Etat français et la constitution du 1er gouvernement de gauche depuis des décennies semble contredire complètement cette analyse.
Faut-il en conclure que cette analyse était fausse ? Faut-il penser que c'en est fini pour la bourgeoisie de la carte de "la gauche dans l'opposition" contre la classe ouvrière ? Le cas de la France constitue-t -il une exception ? Et, dans ce cas, comment peut-on l'expliquer ?
L'analyse du CCI s'est basée sur le constat de faits objectifs. En effet, ces dernières années, un mouvement de passage de la gauche de sa position gouvernementale vers l'opposition s'était manifestée en de nombreux pays : Pays-Bas, Suède, Grande-Bretagne, Portugal, Israël, Vénézuéla, Italie (fin du "compromis historique"), USA (où les démocrates font figure de "gauche") alors que dans d'autres tels l'Espagne ou la France, la gauche qui était restée en dehors du gouvernement, abandonnait une politique de coopération avec celui-ci (pacte de la Moncloa) ou d'accession au pouvoir (Programme Commun de gouvernement en France liquidé en 77). Le nombre de pays où la gauche continuait de participer au gouvernement se restreignait finalement à ceux que la crise avait relativement épargnés (RFA, Autriche) ou pour lesquels c'était indispensable pour assurer une représentation équitable des diverses fractions régionales de la bourgeoisie (Belgique : cf. analyses publiées dans "Internationalisme").
Le CCI avait donc analysé ce phénomène non comme une succession de cas d'espèce mais bien comme une tendance générale qui s'expliquait à la fois par l'aggravation de la crise du capitalisme et par la reprise des luttes prolétariennes après une accalmie au milieu des années 70.
En effet, notre organisation a mis en évidence la différence existant entre la première période de développement de la crise mondiale, celle qui couvre en gros les années 70, et celle qui lui succède au moment d'entrer dans les années 80. Malgré la gravité de la crise (avec notamment la brutale chute de 74-75) les années 70 peuvent être considérées comme les années "d'illusion". Illusions pour la classe dominante qui s'imaginait que les difficultés de son économie étaient temporaires (c'était l'époque où le premier ministre Chirac annonçait "la fin du tunnel”). Illusions pour la classe ouvrière qui se laissait encore persuader par les campagnes idéologiques des partis de gauche que la crise résultait d'une "mauvaise gestion de l'économie" par les partis de droite et par les "grands monopoles avides de profits". Dans ce contexte, la politique de "gauche au pouvoir" ou " "en marche vers le pouvoir", mise en place par la bourgeoisie, répondait au besoin de faire accepter passivement l'austérité aux travailleurs en leur faisant croire "qu'après" les choses "iraient beaucoup mieux".
Mais tout a une fin ; y compris les illusions sur la nature de la crise. La persistance de celle-ci, l'échec de tous les "plans de relance" destinés à "en sortir", son aggravation irrémédiable sont progressivement venus à bout des croyances dans "les lendemains qui chantent". Comme toujours, la crise économique tend à mettre à nu les contradictions fondamentales de la société capitaliste. Son aggravation ouvre la porte "aux années de vérité", celles où il devient impossible aux gouvernements de masquer le caractère général et insoluble de la crise, celles où les discours sur "ça ira mieux demain" ne prennent plus. Pour la classe ouvrière, il n'apparait d'autre alternative que de reprendre le combat.
Et quant aux partis de gauche, ils servent bien plus efficacement les intérêts du capitalisme en tenant un langage radical qui leur permet de contrôler et de saboter les luttes, qui sont de toutes façons inévitables, qu'en conservant celui du passé sur le thème de "la lutte ne paie pas", il s'agit de "bien voter", qui risque d'être de moins en moins entendu par les travailleurs.
C'est dans ce contexte que la classe dominante se partage aujourd'hui le travail entre d'une part ses secteurs qui ont le moins d'emprise sur la classe ouvrière, en général les partis de "droite" et du "centre", auxquels revient la charge de "parler clair" (Barre en était l'exemple typique) depuis le gouvernement et, d'autre part, ses secteurs qui ont une influence sur les travailleurs, les partis de gauche et les syndicats, qui se doivent de conserver ou renforcer cette influence en faisant des discours "radicaux" depuis l'opposition.
Cette situation reste valable pour l'ensemble des pays d'Europe et on peut même voir le parti social-démocrate encore au pouvoir en Allemagne se reconvertir peu à peu en parti d'opposition.
Et l'élection de Mitterrand là-dedans ?
Eh bien, il faut la voir comme une anomalie, un événement qui a échappé à la volonté et au contrôle des secteurs politiques dominants de la bourgeoisie française, y compris le parti socialiste.
Contre toute attente sérieuse, il s’est passé en effet quelque chose de très important le 10 mai ; mais pas ce qu'on veut nous faire avaler pourtant : de "victoire des travailleurs", il n'y en a eu que dans les discours des démagogues de gauche et d'extrême- gauche. Il s'est passé quelque chose MAIS dans les sphères de la bourgeoisie : une sorte de coup d'Etat d'opérette involontaire.
Certes, contrairement à 1851 ou 1958, tout s'est passé dans la légalité. Le juriste Mitterrand a respecté scrupuleusement la loi.
Mais il n'empêche que son accession à la tête de l'Etat fait violence à la bourgeoisie (celle de Washington, de Moscou et de la Bourse de Paris) comme elle fait violence d'ailleurs à lui-même (ses déclarations au moment de son élection sont significatives : "Quelle histoire!" "c'est maintenant que les ennuis commencent"). Ici, ce qui a surpris la bourgeoisie et l'a mise dans l’embarras ce ne sont pas les baïonnettes mais un instrument dont elle tire habituellement efficacité et tranquillité : l'institution électorale. Est-ce à dire que celle-ci pourrait redevenir un terrain de combat pour la classe ouvrière ? Nullement ! La classe ouvrière n'a rien à gagner sur ce terrain qui reste exclusivement celui de la bourgeoisie, n'en déplaise aux rabatteurs gauchistes.
Est-ce à dire que, désormais, et en tous lieux, les élections ne servent plus les intérêts de la bourgeoisie ? Qu'il en sort des résultats contraires à ses intérêts ? Ce n'est pas le cas non plus. En général, les résultats électoraux sont conformes aux nécessités du moment du capitalisme. Non pas qu'on bourre les urnes : là où cela arrive, les élections perdent leur crédibilité et donc leur efficacité comme instrument de mystification des masses. En réalité, ce que l'on bourre, c'est les crânes : à travers toutes sortes de manœuvres préalables, et à grand renfort de mass-médias, les divers partis bourgeois s'arrangent en général pour que les électeurs votent "comme' il faut". C'est ainsi qu'en 1977, l’union de la gauche fut rompue fort à propos pour lui faire perdre les élections législatives de 1978. De même, pour empêcher une réélection du démocrate Carter, dont elle n'avait plus besoin, la bourgeoisie américaine a suscité la candidature Anderson destinée à lui retirer des voix. Plus récemment, face à une menace de raz-de-marée du parti travailliste aux prochaines élections en Grande-Bretagne, la bourgeoisie de ce pays s'est arrangée pour que se crée une scission dans ce parti et qu'apparaisse sur la scène politique un parti concurrent, capable de lui faire perdre les élections, le Parti Social-Démocrate.
Pour les présidentielles françaises, le PS avait tout fait pour que son candidat soit battu : il avait choisi Mitterrand alors que Rocard paraissait à l'époque le mieux placé pour battre Giscard ; sitôt désigné, le candidat Mitterrand était parti en voyage en Afrique et en Chine, comme si l'élection présidentielle ne l’intéressait pas...
De son côté, le PCF, jusqu'au 1er tour, avait également fait tout son possible pour que Giscard rempile.
La gauche dans son ensemble, avait donc, comme en 1978, "joué le jeu", celui qui devait lui permettre de rester dans l'opposition. En l'occurrence, c'est la droite qui n'a pas joué le sien. .
En effet, une utilisation efficace du dispositif électoral suppose qu'il existe une lucidité et un consensus suffisants au sein de la classe dominante, que les divers partis soient capables de se hisser au-dessus de leurs querelles particulières, de faire prévaloir, par-delà leurs intérêts de boutique, les intérêts d'ensemble du capital national.
C'est cette lucidité et ce consensus qui ont fait défaut à la droite qui, confiante dans une réélection facile de Giscard, telle que l'annonçaient les sondages il y a six mois, a donné libre cours à ses règlements de compte internes entre le clan giscardien et le clan chiraquien. A priori, la bourgeoisie n'était pas hostile à un rééquilibrage des forces au sein de l'ancienne majorité : bien de ses secteurs se réjouissaient de "l'effet Chirac" qui aurait permis à celle-ci de donner une plus grande pugnacité, un ton plus combatif (à l'exemple de celui de Reagan) à son offensive anti-ouvrière. Mais, "l'effet Chirac" est allé au-delà des espérances : le mécontentement des couches petites-bourgeoises capitalisé et amplifié par le chef du RPR a finalement privé au second tour Giscard d'une partie de son électorat habituel, ce qui a suffi pour lui faire perdre son poste.
Ce ne sont donc pas Mitterrand et la gauche qui ont gagné l'élection, mais bien Giscard et la droite qui l'ont perdue.
Ce faux-pas de la bourgeoisie française ne veut pas dire que désormais cette classe sera incapable au niveau international de se donner les moyens politiques les plus appropriés pour affronter la classe ouvrière. Ce faux-pas doit être mis au compte d'un certain nombre de faiblesses spécifiques à la bourgeoisie française qui concernent non pas tellement son économie (laquelle a résisté mieux que bien d'autres à la crise du capitalisme) mais sa sphère politique. Cette faiblesse politique s'est illustrée par sa longue paralysie face au problème de la décolonisation (elle n'a été dépassée dans ce domaine que par la bourgeoisie portugaise), de même que par le coup d'Etat du 13 mai 58 et l'appel à un "homme providentiel” De Gaulle. Elle s'est illustrée également par la mise en place d'institutions qui étaient à la mesure de cet "homme providentiel" et ont garanti une bonne stabilité politique pendant toute une période, mais qui ne convenaient plus à ses successeurs (les chaussures de De Gaulle, notamment le mandat présidentiel de 7 ans, étaient trop grandes pour un Giscard) de même qu'elles étaient trop rigides face à un surgissement de la lutte de classe (comme cela s'était déjà révélé en mai 68).
Une autre faiblesse enfin, consiste dans la place trop réduite occupée par le PS dans la vie politique depuis 58, ce qui n'a pas permis de réelle alternance (notamment lorsqu'elle aurait été "positive" au milieu des années 70) et a conduit à une certaine usure des partis de droite au pouvoir depuis 23 années.
Si elle résulte donc d'une faiblesse politique de la bourgeoisie française, l'élection "malencontreuse" de Mitterrand va encore renforcer cette faiblesse. D'une part, Mitterrand aura les plus grandes difficultés à trouver une majorité au Parlement, et cela même si la "gauche" l'emporte car le PC est appelé, à terme, à poursuivre son rôle d'opposition capable de contrôler la classe ouvrière. D’autre part, contraint par la crise économique à mener une politique d'austérité, de chômage et de répression, en complète contradiction avec les promesses électorales de Mitterrand, le PS, une fois éteints les lampions de la fête, va perdre en peu de temps une crédibilité qu'il avait conquise péniblement et patiemment auprès des travailleurs. Face à l'intensification de l'exploitation de la classe ouvrière qui se prépare, le PC et le PS et leurs syndicats respectifs, n'auraient pas été de trop pour se partager le travail pour encadrer les travailleurs et dévoyer leurs luttes.
On peut faire confiance au PCF pour faire un maximum de zèle dans cette sale besogne, mais c'est une faiblesse pour la bourgeoisie nationale que de confier une responsabilité aussi importante à un parti qui n’est pas "sûr" en politique internationale. En fin de compte, le bilan de l'élection de Mitterrand se présente pour la bourgeoisie par un petit plus (les illusions présentes : "on a gagné!") et un grand moins : le sacrifice prématuré d'une carte importante dans l'encadrement du prolétariat. Cependant, cet affaiblissement de la bourgeoisie n'en sera vraiment un que si la classe ouvrière engage le combat. Il revient donc aux révolutionnaires non seulement de dénoncer toutes les illusions sur la prétendue "victoire des travailleurs" que représenterait l'élection du bourgeois de gauche Mitterrand, mais également d'affirmer clairement que tous les avatars, toutes les crises politiques que peut subir la classe dominante n'apportent rien au prolétariat.
Les prolétaires ne peuvent compter que sur leurs propres forces, que sur leurs propres luttes.
F.M.
Nous publions ci-dessous un tract distribué lors de la kermesse du 1er mai par le "Mouvement de libération des cigales". S'il est toujours bon de trouver une critique du monde actuel au milieu des litanies de la "fête du travail", de la fête de l'esclavage quotidien, les limites de l'idéalisme y apparaissent clairement.
"LE POINT LE PLUS ELEVE AUQUEL ATTEINT LE MATERIALISME INTUITIF C'EST À DIRE LE MATERIALISME QUI NE CONÇOIT PAS LE MONDE MATERIEL COMME ACTIVITE PRATIQUE, EST LA FACON DE VOIR DES INDIVIDUS DE LA "SOCIETE BOURGEOISE" PRIS ISOLEMENT." (Marx : Thèses sur Feuerbach)
"EN MARGE DES LABORIEUX PROGRAMMES ELECTORAUX PRECONISANT "LE DROIT A L'EMPLOI", une nécessité s'impose d'informer la majorité salariale et besogneuse : en ce jour du 1er mai 81, nième Fête du Travail, UNE DECOUVERTE SCIENTIFIQUE RECENTE RISQUE DE SEMER LE TROUBLE DANS LA FRANCE PROFONDE ET TRAVAILLEUSE : pur produit de l'éducation laïque et républicaine. Une information transpire ... Elles ne sont pas à la hauteur de leur réputation :
LES FOURMIS SONT DES FEIGNASSES !
"Lorsque nous nous penchons sur une fourmilière, nous avons 1'impression qu'il y règne une activité fiévreuse, mais c'est seulement parce qu'il y a quantité de fourmis et qu'elles sont toutes semblables. De fait, les fourmis individuelles passent : LE PLUS CLAIR DE LEUR TEMPS A SE PRELASSER ! et plus choquant encore : LES OUVRIERES (toutes FEMELLES) CONSACRENT BEAUCOUP DE TEMPS À LEUR TOILETTE ! (J. et C. Wheeler, éthologistes.)
Le M.L.C. (Mouvement de Libération de la Cigale) se fait un devoir de révéler ce jour cette conséquente information étouffée par les Phallos du Patronat, les Héros de la Production, les Zorros de la "Relance", les Zéros Économistes, créateurs de Pénurie.
Le M.L.C. profite de ce jour de congé pour questionner l’Homo-ça-Pionce, dans le débat à résonance ethnologique qui agite les milieux pensants de la planète...Louis le Prince-Ringuard s'offusque que l'on puisse comparer l'Homo-Sapiens de nos prospères banlieues H.L.M- isées à des insectes ordinaires : "Nous avons le progrès, la science, la technique qui nous font prospérer et allègent la peine productive ... ".
CET HOMME-LA NOUS RACONTE DES FABLES ! La Fontaine des inepties économiques n'est point tarie pour les tarés et les tartares de la Science Conquérante ! Qui n'utilisent la technique que pour faire de l'Homme un appendice de chair dans une Machinerie d'Acier. (Une autre utilisation de la technique est urgente !).
En effet, le M.L.C. s'indigne que de conséquentes informations en provenance de France, de Navarre et de la "Marlboro Country" soient étouffées par le poids des bourses capitalistes, des bouses chimiques, des boues rouges et des hiboux taciturnes du déclin occidental !
Incroyable, MAIS IRREFUTABLEMENT VRAI : LES SAUVAGES DE L'AGE DE PIERRE TRAVAILLAIENT 2 A 3 HEURES PAR JOUR !
C'est une moyenne, conséquence d'UN CHOIX POLITIQUE. N'étant pas intoxiqués par les balivernes scolaires, laïques et judéo-crétinisantes, la transpiration ne leur semblait pas la finalité de l'existence. Les ethnies préservées ne sont pas assez cons pour "gagner leur pain à la sueur de leur front" !
"QUAND ON ME PARLE DU DROIT AU TRAVAIL, JE SORS MON HAMAC !" (Proverbe mélanésien).
L’AMOUR, la sieste, le bavardage, la danse, 1'exploration sociale étaient préférés au sur-travail, AUSSITOT LE NECESSAIRE PRODUIT. Produire pour Vivre et non Vivre pour Produire, telle aurait pu être leur devise.
Lorsqu''à l'aube du deuxième millénaire après J.C., en nos sociétés "d'abondance" TOUJOURS PROVISOIRE et de désespérante servilité salariale, LA SEMAINE DE 40 H ET LA RETRAITE A 60 ANS NE SONT PAS ENCORE EFFECTIVES, on peut donc mesurer tous les "bienfaits du progrès" QUI LAISSENT AFFAMEE LA MOITIE, VOIRE LES 2/3 DE L'HUMANITE !
LA SOCIETE MODERNE EST UNE SOCIETE DE MISERE ! Sans précédent dans l'histoire.
C'est pourquoi à la Misère de la Production, le Mouvement de Libération de la Cigale oppose l'inaction Libératoire et Révolutionnaire.
crise...chômage...récession…ELECTIONS.? SOYONS REALISTES ET EXIGEONS LA FAINEANTISE ! (y'en a pour tout le monde).
La fourmi ayant travaillé toutes ces années se trouva fort dépourvue lorsque la crise fut venue... voilà LA REALITE DE NOTRE GESTION "COURAGEUSE".
En conséquence, LES CIGALES que nous sommes, réfugiées près des excédents à détruire du Marché Commun, des stocks d'invendables, loin des cumuls à neutrons, des cucus à diplômes, des clowns de la démocratie, des concentrations thermo-nucléaires, des gaspillages en institution ... Nous chantons en chœur ;
NOUS NE MANGEONS PAS DE CE PAIN-LA ! Pas davantage, nous nous salirons les mains dans la collaboration. Nous ne sommes pas résignés à avoir une vie de Primate pour acquérir une résidence secondaire dans un monde de robots dévoreurs de temps... Et lorsque la bise sera venue, nous dirons aux accapareurs, philosophes du Droit au Travail : VOUS SPECULIEZ ? FORT BIEN, BOSSEZ MAINTENANT !
Nous, démissionnaires en force du productivisme, pensons que c'est la seule façon d’éviter le grand froid de la Déflagration et de dénoncer le danger de cette
"ETRANGE FOLIE QUI POSSEDE LES CLASSES OUVRIERES des nations où règne la civilisation capitaliste. Cette folie traîne à sa suite des misères individuelles et sociales qui, depuis deux siècles, torturent la triste humanité. Cette folie est 1'amour du travail, la PASSION FURIBONDE DU TRAVAIL, poussée jusqu'à l’épuisement des forces vitales de l'individu et de sa progéniture. Au lieu de réagir contre cette aberration mentale, les prêtres, les économistes, les moralistes ont sacro-sanctifié le travail ".
(Paul Lafargue in "Le droit à la paresse"). —
M.L.C. (Mouvement de Libération de la Cigale).
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Cela fait toujours plaisir de trouver, au milieu des lugubres cérémonies du 1er mai, un son de cloche qui ne soit pas empêtré dans la problématique à courte vue de la politicaille, du degré de pourcentage auquel on se fera de toutes façons avoir, du nez collé sur son lopin de terre, comme si la réalité en était fondamentalement différente du reste du monde.
Dans ce tract, passe la vision de l'absurdité du monde actuel, un monde où l'écrasante majorité des hommes crève de faim alors que la technologie ouvre les portes d'une maîtrise des éléments incalculable. Un monde où les hommes s'épuisent dans un travail inutile parce que non orienté vers leurs besoins. Non, ce monde n'est pas réformable ! Il faut casser la logique qui le fait tourner, détruire ses bases, pour pouvoir construire autre chose.
Cependant nous pensons que si nos cigales se sont donné tant de mal pour écrire, taper, tirer et distribuer ce tract, c'est qu'elles pensent qu'il ne suffit pas de se croiser les bras pour changer le monde. Ou il y a une lutte à mener, quelque part. Mais où ?
Pour le moment, nos cigales se bornent à se "réfugier près des excédents à détruire" ... à se mettre en marge de la société en refusant de mener "une vie de primate". Cela rappelle le "on arrête tout et c'est pas triste" d'après mai 68, et qui était si triste !
Un par un, on ne peut avoir la vision du changement de la société. On en a une vision partielle, morcelée, impuissante : "l'amour, la sieste, le bavardage, la danse, l'exploration sociale" de l'âge de pierre... Pourquoi et comment l'humanité serait passée de cette "saine innocence" à l'enfer présent ? Par "amour du travail" ? Ou â cause de la pénurie qui domine la communauté primitive ?
Aujourd'hui, la pénurie est devenue un fait SOCIAL et non plus un fait NATUREL. Pour la première fois dans l'histoire, la possibilité d'une véritable communauté humaine fondée sur l'abondance existe. Et les possibilités qu'elle ouvrira en libérant toutes les facultés humaines, en libérant l'homme de son esclavage salarié, ne sont pas comparable à l'âge de pierre.
Au bas du tract, en gros, est portée une inscription : "seules contre les fourmis du capital, les taupes du gauchisme, les moutons du salariat" signé : "les cigales du mouvement de libération des cigales". Qui sont les moutons du salariat ? Ceux qui restent au boulot ? Si nos cigales se pensent deux pelées, trois tondues face à une horde de moutons passifs qui ont "la passion furibonde du travail", elles peuvent rêver la transformation du monde, elles ne comprendront jamais comment elle peut se réaliser et n'y participeront jamais autrement que dans leur tête. Si elles voient les ouvriers nageant dans la béatitude des bienfaits du travail salarié, il n'y a pas de raison de voir le monde capitaliste s'arrêter de tourner.
Non, les ouvriers ne sont pas des moutons. Les cigales ne voient que la misère dans le monde actuel. Ils ne voient pas ce qui est en germe dans la misère : l'explosion d'une révolte capable de TRANSFORMER LE MONDE : la révolution, dont le protagoniste principal sera justement la classe "travailleuse", la classe ouvrière, le prolétariat.
Seul le soulèvement de ces ouvriers, que bourgeois et petit-bourgeois méprisent tant, a ébranlé le monde du capital dans ses fondements, laissant enfin entrevoir une issue pour l'humanité. Des luttes de 1848 à la Commune, â la révolution de 17 et jusqu'à "l'été polonais" de 1980, en passant par toutes les autres tentatives, L'AFFIRMATION D'UNE COMMUNAUTE HUMAINE QUI SE LIBERE EST TOUJOURS LIEE A LA MISE EN MOUVEMENT DES "PRODUCTEURS" Les révoltes d'étudiants font pâle figure en matière de "créativité" comparées au bouleversement social que peut mettre en mouvement la classe ouvrière. Encore dernièrement en Pologne, les ouvriers n'ont pas fait qu'une démonstration de leur force en faisant reculer momentanément la bourgeoisie, mais aussi ils ont montré qu'on pouvait rompre l'isolement, la solitude, la démerde de chacun pour soi, la monotonie, l'absence d'avenir. "L'ambiance dans les rues en Pologne ne sera plus jamais la même" disait un passant à un journaliste occidental. C'est ce mouvement-là qui contrecarre la perspective du "grand froid de la déflagration mondiale", et pas les "pacifistes", les "objecteurs", les individualistes qui ne voient pas dans quel sens tourne l'histoire.
Quand demain ce formidable mouvement gagnera d'autres parties du monde, espérons que nos cigales ne seront pas trop fatiguées, pas trop écœurées et pas trop plongées dans la préhistoire pour comprendre la signification de la lutte des "moutons".
D.N.
Deux sympathisants du C.C.I., décident de créer, en avril 81, un comité ouvert à tous pour rompre leur isolement et en faire un lieu de discussion et d'intervention. Ils ont pris contact avec l'organisation et nous ont envoyé la lettre suivante : "Comme prévu, nous vous envoyons l'exemplaire du tract que nous voulons diffuser sur "J.". Nous vous demandons si le CCI peut prendre en charge la réalisation technique de ce tract (2 000 tracts). Il est évident que nous participerons aux frais. Nous ne nous étendrons pas sur cette initiative. Nous en avons déjà discuté avec vous. Nous pensons que cette intervention est nécessaire, sans pour autant privilégier celle-ci".
Voici le contenu du tract :
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"OUVRIERS, CHOMEURS, BRISONS L'ISOLEMENT !"
Notre silence nous rend complices et satisfait l'ordre capitaliste. Nous sonnes tous des chômeurs ou en passe de le devenir. Ne nous laissons pas gagner par la misère morale qui nous conduit tôt ou tard au suicide. Ne nous laissons pas illusionner par des charlatans (UDF, RPR, PS, Syndicat, Gauchistes...) qui n'ont qu'un seul but : maintenir le capital en nous envoyant à la 3ème boucherie mondiale.
NOUS NE POUVONS PLUS ETRE PASSIFS ET SILENCIEUX, ORGANISONS-NOUS !
Seules, l'extension et la généralisation de nos luttes peuvent mettre fin aux funestes projets que nous réserve la bourgeoisie de l'Est contre de l'Ouest.
TRAVAILLEURS ACTIFS, TRAVAILLEURS SANS EMPLOI, TRAVAILLEURS IMMIGRES, NOUS APPARTENONS A IA MEME CLASSE, LA CLASSE OUVRIERE INTERNATIONALE.
Organisons-nous, ne cooptons que sur nous-mêmes, luttons et manifestons notre unité par la lutte contre le capital de droite comme de gauche en reprenant l'exemple de nos frères en Pologne.
Camarades, nous t'invitons à une réunion qui aura lieu le 15 avril afin que nous organisions tous ensemble un comité dont les tâches et les actions seront à définir par nous-mêmes. CAMARADES, DANS L'ISOLEMENT, NOUS NE SOMMES RIEN !
ORGANISONS-NOUS NOUS-MEMES ET SOYONS TOUT !"
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Dans la mesure où ces éléments sympathisants du CCI depuis un certain temps demandaient le soutien du CCI pour ce projet, nous avons engagé la discussion avec eux
Le CCI appuie et participe à toute tentative de la classe de former des lieux de luttes, de discussions servant à tous : comités de chômeurs, cercles de discussions, noyaux ouvriers... etc...
Ces comités sont le produit direct de la vie de la classe, à un moment donné de sa réflexion et de son organisation. Ils surgissent, en général, du besoin créé par la lutte de classe de se regrouper pour lutter -hors du syndicat, de la gauche et des gauchistes, de poursuivre la réflexion engendrée par la lutte.
Cela dit, il serait erroné de croire que l'intervention des révolutionnaires suffit pour faire naître la vie au sein de la classe. L'activité la fébrile et dévouée qui soit ne peut jamais remplacer l'activité de dizaines, centaines ou milliers d'ouvriers agissant et réfléchissant ensemble, créant eux-mêmes leur propres assemblées.
En même temps, que ces éléments formulaient le besoin et le désir de créer ce comité, ils critiquaient le CCI sur son peu d'intervention au sein de la classe.
Mais de quelle intervention s'agit-il ?
La création d'un comité ouvert à tous, lieu de réflexion et de lutte, est un pas positif pour la vie de la classe. Positif, dans la mesure où il matérialise une dynamique, une vie potentielle qui se fait jour au sein d'un groupe d'ouvriers ou de chômeurs. Mais nous pensons qu'il serait erroné de vouloir les créer artificiellement, en utilisant des sympathisants comme moyen d'établir le "contact" avec les ouvriers. Notre tâche n'est pas de travailler à l'aide de nos contacts, de nos sympathisants à la formation de petits groupes ou cercles, "courroies de transmission" entre l'organisation politique -"celle qui a la conscience"- et l'ensemble de la classe, qu'elle soit à l'usine ou au chômage.
Notre tâche pour contribuer à la clarification de toutes les questions posées par la lutte de classe :
est de développer une organisation politique à l'image de sa classe internationale. La création de liens solides et organisés à l'échelle mondiale est la base indispensable pour développer une intervention révolutionnaire internationale et non éphémère. La diffusion des idées révolutionnaires dans tous les pays du monde, tâche fondamentale d'une organisation politique, ne peut être réalisée sans une presse régulière, diffusée dans toutes les langues, reposant sur l'existence d'un pôle solide et uni à l'échelle internationale[1].
L'organisation ne peut, ni créer, ni développer une base d'intervention internationale à partir d'activités locales et ponctuelles.
Seul le développement d'une organisation révolutionnaire internationale permet aux révolutionnaires d'intervenir et de participer activement aux luttes ouvrières et aux manifestations de la vie de la classe, chaque fois que cela est possible.
L'intervention des révolutionnaires, pour être efficace, ne peut se concevoir que comme une activité volontaire et décidée, et de longue haleine, à long terme.
Pour cela, elle doit se garder de deux dangers essentiels :
La lutte en Pologne a marqué un pas important dans le processus de développement de la lutte de classe[2]. Elle a montré la nécessité de l'internationalisation des luttes, de l'unification des luttes prolétariennes â l'Est avec celles des prolétaires â l'Ouest. Elle est venue rappeler la nécessité de l'intervention d'une organisation révolutionnaire internationale.
L.A.
Liens
[1] https://fr.internationalism.org/files/fr/ri_86_i.pdf
[2] https://fr.internationalism.org/tag/5/36/france
[3] https://fr.internationalism.org/tag/personnages/guy-mollet
[4] https://fr.internationalism.org/tag/personnages/pierre-mauroy
[5] https://fr.internationalism.org/tag/personnages/francois-mitterrand
[6] https://fr.internationalism.org/tag/evenements-historiques/election-presidentielle-1981
[7] https://fr.internationalism.org/tag/heritage-gauche-communiste/mystification-parlementaire
[8] https://fr.internationalism.org/tag/personnages/valery-giscard-destaing
[9] https://fr.internationalism.org/tag/personnages/coluche
[10] https://fr.internationalism.org/tag/personnages/arlette-laguiller
[11] https://fr.internationalism.org/tag/4/459/democratie
[12] https://fr.internationalism.org/tag/personnages/gaule
[13] https://fr.internationalism.org/tag/recent-et-cours/crise-politique-bourgeoisie-francaise
[14] https://fr.internationalism.org/tag/vie-du-cci/polemique
[15] https://fr.internationalism.org/tag/vie-du-cci/courrier-des-lecteurs