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Les émeutes qui se sont déroulées dans les banlieues de France ont sans aucun doute inquiété la bourgeoisie qui a vu des bandes incontrôlées mettre des quartiers entiers à feu et à sang. Mais quelle qu'ait pu être cette inquiétude, la classe dominante n'a pour autant pas oublié d'utiliser ces événements contre la classe ouvrière (voir RI 363). Elle s'est en particulier fixée pour objectif, à travers l'assimilation répétée des émeutiers avec la fraction immigrée de la classe ouvrière, d'en profiter pour accentuer sa pression contre les immigrés eux-mêmes.
Une attaque en règle contre les immigrés
Le gouvernement de Villepin, par la voix de Sarkozy qui déclarait fin novembre : "La France ne veut plus de ceux dont on ne veut plus nulle part dans le monde", compte bien "maîtriser l'immigration subie pour développer une immigration choisie".
Il a ainsi relancé à l'occasion de ces émeutes certains dispositifs propres aux populations immigrées, comme la double peine qui permet d'expulser un étranger condamné par la justice à l'expiration de sa peine ou la suppression des allocations familiales pour les parents dont les enfants ne vont plus à l'école ou sont interpellés dans la rue par la police.
Mais le gros de l'attaque, à côté de cette politique menée pour rendre la vie impossible aux immigrés, est d'accélérer les expulsions. 25.000 expulsions sont ainsi prévues pour 2006, après 12.000 en 2003, 15.000 en 2004 et plus de 20.000 en 2005. L'accélération est évidente. Mais à côté de ces mesures d'expulsion directes, le gouvernement prévoit de se doter d'un cadre répressif plus sévère pour contenir l'immigration. Pour "éviter que la scolarisation ne devienne une nouvelle filière de l'immigration illégale", les familles d'immigrants clandestins dont les enfants sont scolarisés pourront être expulsées, année scolaire ou pas.
L'accès aux soins pour les immigrés va également être limité. Il est d'ailleurs intéressant de voir l'utilité de la mise en place de la CMU qui a permis à l'Etat de répertorier de façon beaucoup plus précise le nombre d'immigrés et donc de prendre des mesures contre eux. Il en sera de même pour les hébergements d'urgence, qui ne seront permis que dans les situations d'attente de "retour au pays d'origine". C'est-à-dire dans les camps de rétention d'immigrés !
Le lien "automatique entre le mariage et le titre de séjour" pour les étrangers en situation irrégulière au moment de l'union va être supprimé, à moins de justifier de "conditions de ressources et de logement".
Le contrôle du "travail illégal", sous couvert, et c'est un comble, de lutter contre l'exploitation éhontée dont les immigrés clandestins sont l'objet et contre les "filières criminelles", va s'accentuer.
Droite ou gauche : une même politique anti-immigrée
Face aux organisations de gauche qui critiquent Sarkozy et l'appellent à ne pas y aller "trop fort", ce dernier s'est fait une fierté de répondre : "On va aller encore plus fort." Au-delà de l'aspect délibérément provocateur qui fait son fonds de commerce, les grands effets d'annonce de Sarkozy sont du pain béni pour cette gauche qui peut ainsi se positionner contre autant "d'inhumanité".
Cela lui permet en particulier de tenter de faire oublier que c'est elle, à l'instar de Chirac qui en juillet 1991 déclarait qu'un "travailleur français devient fou s'il a sur le même palier de HLM une famille immigrée, qui touche cinquante mille francs de prestations sociales sans travailler, plus le bruit et l'odeur", qui a mis en œuvre les mesures les plus contraignantes contre les immigrés. Des expulsions de Maliens au bulldozer en 1981 par le PCF à Montreuil-sous-Bois aux charters préconisés par Edith Cresson (PS) en 1991, en passant par "La France ne peut pas héberger toute la misère du monde" de Rocard (PS) fin 1989, de même que, suite aux émeutes de Vénissieux en 1981, Charles Hernu (PS) " demandait-il (…) devant la communauté urbaine de Lyon le "rejet des familles indésirables" des HLM et l'expulsion des "coupables du territoire" (Le Monde du 22 septembre 1981), la gauche s'est particulièrement distinguée dans ce domaine.
Les préoccupations de cette gauche qui a justifié toutes ses attaques répressives contre les immigrés sous le prétexte de s'inquiéter de leur sort et d'améliorer leur condition n'ont jamais été différentes lorsqu'elle était aux affaires de l'Etat de celles de la droite. Le discours unilatéral et musclé de Sarkozy sert en fait de cache-sexe à ses propres crapuleries anti-immigration. Et il sert également à masquer la réalité que ce ne sont pas que les immigrés qui sont visés dans cette attaque, mais bel et bien toute la classe ouvrière.
Car en instituant ces mesures contre les immigrés, non seulement la bourgeoisie accentue le flicage de l'ensemble des ouvriers, mais elle construit une barrière de division entre immigrés et français.
Comme nous le disions dans RI n°206 de novembre 1991 :
"Face à la misère et à la barbarie de ce monde en pleine putréfaction, il n'y a qu"une seule perspective pour la classe ouvrière : rejeter fermement la logique de la concurrence et du "chacun pour soi" de ses propres exploiteurs. Quelles que soient son origine, sa langue, sa couleur de peau, le prolétariat n'a aucun intérêt commun avec le capital national. Ses intérêts, il ne pourra réellement les défendre qu'en développant partout sa solidarité de classe internationale, en refusant de se laisser diviser entre ouvriers immigrés et ouvriers "autochtones". Cette solidarité, il doit l'affirmer en refusant partout d'adhérer aux campagnes bourgeoisies, qu'elles soient xénophobes ou anti-racistes, en développant massivement ses luttes sur son propre terrain de classe, contre toutes les attaques qu'elle subit quotidiennement.
Seule l'affirmation de ses intérêts communs, dans la lutte permettra au prolétariat de rassembler toutes ses forces, de s'affirmer comme classe mondiale solidaire et unie, pour abattre le Moloch capitaliste avant qu'il ne détruise toute la planète."
MUG (17 décembre)