En Irak, un massacre en prépare un autre. Depuis début novembre, 1 200 insurgés de la guérilla irakienne et 51 soldats américains ont été tués, 400 autres blessés, au cours de l'offensive américaine d'envergure sur Fallouja mettant en oeuvre les chars, les canons et l'aviation. Dans le même temps, attentats et répression aveugles continuent de semer la mort et la désolation dans le pays mis à feu et à sang. Si la guerre en Irak constitue actuellement un concentré de la barbarie guerrière du capitalisme, celle-ci est encore illustrée par tous les conflits qui ensanglantent la planète.
Aucun de ces conflits ne trouve de solution durable, comme le révèle, par exemple, la situation dans le Caucase ou encore dans les Balkans (dont on ne parle plus guère), une zone en grande partie ravagée et détruite qui connaît chaque jour des affrontements inter-ethniques directement attisés par la présence sur place des grandes puissances impérialistes. En revanche, il ne manque pas de facteurs d'aggravation du chaos. Ainsi la mort d'Arafat ouvre une période de guerre civile en Palestine qui, de surcroît, ne va en rien atténuer les antagonismes et les rivalités avec Israël (voir article page 8). Un nouveau foyer de tensions guerrières va probablement embraser la Côte d'Ivoire avec cette fois, en première ligne, la France, ce champion de la paix en Irak … pour contrer les ambitions américaines (voir l'article ci-dessous).
C'est un fait indéniable, Fallouja va nécessairement être conquise par l’armée américaine. Dans un premier temps la ville a été prise sous un déluge de bombes et d’obus. Puis l’assaut a été donné. C’est le 8 novembre dernier que cette opération dénommé "Phantom fury" pour investir Fallouja a été déclenchée. Cette offensive contre la ville rebelle a commencé après le feu vert donné par le Premier ministre irakien lui- même, Iyad Allaoui, premier ministre d’un gouvernement intérimaire installé et maintenu au pouvoir par les Etats-Unis. De massacre dans la population civile, il n’en est pas question. La ville de Fallouja est aujourd’hui réduite à un tas de ruines, mais la population civile semble être (selon les medias bourgeois) totalement sortie indemne de tous les bombardements intensifs et de l’assaut progressant de maison en maison. Il est vrai que la plus grande partie de la population, terrifiée à juste titre par les annonces de l’offensive de l’armée américaine sur la ville, avait fui massivement en direction des campagnes alentour. Au retour de son exode, lorsque l’offensive sera terminée, cette population civile ne retrouvera qu’une ville totalement détruite, où le chaos et la guerre continueront à se développer. Cet assaut de l’armée américaine, cautionné idéologiquement par la participation de quelques milliers de soldats irakiens engagés à coups de dollars, a nécessité le bouclage des frontières avec la Syrie et la Jordanie, l’état-major américain craignant un afflux de combattants venant prêter main forte à la résistance sunnite à Fallouja. Le Los Angeles Times dans un éditorial affirme que " le pire aurait été de ne rien faire, et de céder la ville à la guérilla qui l’aurait érigé en exemple pour les autres villes irakiennes." Ainsi l’état-major de l’armée américaine aurait fait le choix le moins mauvais en attaquant la ville tout en sachant que "cette opération ferait des victimes, tout autant parmi les civils que chez les combattants, et pourrait soulever des réactions passionnées et enflammées chez les arabes bien loin de Fallouja et de l’Irak" (Ibid).
Les raisons profondes de cette offensive apparaissent clairement au grand jour dans la lettre du premier ministre irakien envoyé à Kofi Annan, secrétaire général des Nations Unies, dans laquelle il affirme que : "Son gouvernement n’a pas d’autre choix que celui de prendre des mesures fermes et radicales pour venir à bout des violences qui risquaient de mener le pays vers des confrontations compromettant la tenue des élections." Il est en effet d’une extrême importance pour l’impérialisme américain que les élections devant se tenir dans quelques semaines puissent se dérouler dans une apparente sérénité et sécurité, permettant de les faire apparaître, de même que le gouvernement qui en sera issu, comme légitimes. Ce qui pourrait permettre aux Etats-Unis de tenter de crédibiliser idéologiquement un tant soit peu leur intervention militaire. De fait, la perspective de l’évolution de la situation dans ce pays est à l’exact opposé d’une pacification et d’une stabilisation impossibles. La guerre civile permanente qui règne dans le triangle sunnite, la répétition des offensives militaires dont il a été le théâtre ces derniers mois, l’offensive sur Samara au mois d’octobre, n’ont apporté aucune accalmie durable. L’invasion de Fallouja a d’ailleurs provoqué immédiatement une reprise de la violence et des accrochages militaires à Mossoul ainsi que des attentats terroristes et des prises d’otages dans l’ensemble du pays, y compris dans la région habitée majoritairement par les Chiites. Le Herald Tribune ne cache d’ailleurs pas la réalité : "La tenue d’élections est de moins en moins certaine…Les insurgés deviennent de plus en plus forts et audacieux. Si cette dynamique ne peut être renversée, Washington devra faire marche arrière et revoir ses objectifs de fond en comble."
Contrairement à ce qu’affirme la presse bourgeoise, il est plus que probable que l’enfoncement de l’impérialisme américain dans le bourbier irakien et son affaiblissement irréversible en tant que première puissance mondiale le poussent vers une fuite en avant militaire toujours plus incontrôlable. Il est à prévoir que la conférence internationale sur l’Irak en Egypte, qui doit se tenir le 25 novembre prochain et rassemblera tous les acteurs régionaux, les représentants de l’organisation de la conférence islamique, la Russie, les Etats européens ainsi que les Etats-Unis, ne sera qu’un marché de dupes où, derrière les discours diplomatiques officiels, s’exprimeront les appétits féroces et divergents de chacun des participants. L'Etat irakien est entrée dans un processus de décomposition irréversible, reflet du chaos qui gagne l’ensemble de la région y compris le Moyen-Orient. L’exécution macabre de 49 recrues de la pseudo- "nouvelle armée irakienne" le 29 octobre dernier en est une dramatique concrétisation. C’est le capitalisme comme un tout, en Côte d’Ivoire, en Irak et dans un nombre croissant de régions du monde qui est le seul responsable de cet effondrement de pans entiers de la planète dans un chaos de plus en plus sanglant.
La faillite historique de ce système moribond ne peut que produire des situations comme en Irak, en Côte d’Ivoire, au Moyen-Orient ou au Darfour. Ce processus laissé à sa seule dynamique ne peut que se poursuive en submergeant d'autres pays de la région, tels que la Syrie ou l’Iran. La classe ouvrière et l'ensemble de l’humanité n’ont rien à espérer de la part de ce système en pleine putréfaction. Le seul avenir qu'il nous réserve, c'est une barbarie croissante.
Il n'existe qu'une seule perspective qui puisse mettre définitivement un terme à la folie meurtrière du capitalisme : le renversement de ce système décadent et la construction d'une autre société, sans classes et sans exploitation. Une société qui, en abolissant les frontières nationales, mettra fin à la guerre et aux massacres. Une société que seul le prolétariat mondial est à même d'édifier. Parce qu'il est une classe exploitée et internationale, une classe qui n'a pas de patrie et qui subit partout les effets de la crise insoluble du capitalisme, le prolétariat détient entre ses mains l'avenir de l'humanité. Ce n'est qu'en unifiant ses luttes, en développant sa solidarité sur son propre terrain de classe que le prolétariat pourra remplir sa tâche historique de fossoyeur du capitalisme.
L'enfer quotidien dans lequel sont plongées les populations en Irak comme au Moyen-Orient constitue un appel aux ouvriers des pays d'Europe occidentale. C'est du développement de leurs combats, dans ces pays situés au coeur du capitalisme, que peut surgit une dynamique de luttes révolutionnaires vers le renversement du capitalisme. En ce sens, la seule solidarité que les prolétaires du monde entier peuvent apporter à leurs frères de classe des pays ravagés par la guerre, c'est de mener le combat contre les attaques que leur inflige "leur" propre bourgeoisie nationale, contre l'exploitation, le chômage et la misère.
Face à la guerre et à la crise du capitalisme, plus que jamais, la classe ouvrière doit faire vivre son mot d'ordre : "Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !"
Tino (19 novembre)Les 4 et 5 novembre, impatient de rompre le statu
quo imposé par la France qui limite son autorité sur
le Sud du pays depuis janvier 2003 à travers les accords de
Marcoussis, le président ivoirien Gbagbo a fait bombarder
les deux villes du Nord (Bouaké et Korhogo) contrôlées
par les forces rebelles. Le président ivoirien pensait
bénéficier de la complicité du gouvernement
français qui avait pendant des mois délibérément
fermé les yeux sur l’accélération de ses
préparatifs guerriers. Puis, voyant que Paris hésitait
à le suivre, le pouvoir ivoirien a voulu lui forcer la main
en bombardant la position des forces françaises à
Bouaké, faisant neuf morts (plus un civil américain)
et 22 blessés dans ses rangs. La réplique de Chirac
a été immédiate : il a ordonné
aussitôt en représailles la destruction au sol de
« l’aviation ivoirienne » composée
en tout et pour tout ... de deux avions et de cinq hélicoptères
de combat.
Gbagbo a alors déchaîné une vaste « chasse
aux Blancs », de véritables pogroms
anti-français en poussant une masse surexcitée de
miséreux lumpénisés, les « patriotes »,
à assiéger les maisons, les écoles, les
bâtiments abritant des ressortissants français et à
se livrer à des viols, des pillages, des saccages et des
incendies, tandis que des témoins ont rapporté que
l’armée française n’a pas hésité,
elle, à tirer sur la foule hostile. Tout cela est venu
renforcer encore le climat de chaos, de violence et de terreur qui
a régné plusieurs jours sur la capitale, Abidjan. Le
bilan actuel mais encore très flou de ces tueries se
solderait par des centaines d’autres victimes civiles
ivoiriennes.
La France se retrouve désormais ouvertement en première
ligne dans le bourbier ivoirien.
Avec plus de 5200 hommes de troupe du dispositif Licorne et
avec le renfort depuis juillet 2004 de 6200 « casques
bleus » dépêchés par l’ONU, la
France contrôlait déjà militairement le pays
comme force d’interposition et « de maintien de la
paix » entre les forces gouvernementales du Sud et les
troupes rebelles au Nord. Alors que jusqu’ici, la France
prétendait être sur le terrain pour «instaurer
la paix» sous mandat de la légalité onusienne,
ce masque est en train de tomber, révélant que son
seul objectif réel, c’est le maintien stratégique
de sa présence militaire en Côte d’Ivoire, c’est
la sauvegarde de ses sordides intérêts impérialistes
en Afrique. Comme il a déjà été
évoqué, un fort contingent de « casques
bleus » était présent en Côte
d’Ivoire, censé assurer la protection des populations.
Qu’a-t-il fait ? Rien. Il n’est nullement intervenu. Cela
montre que le véritable rôle de l’ONU, ce n’est
pas d’assurer la « protection des populations
civiles » comme elle le proclame, mais bien de servir
en toute hypocrisie de couverture légale aux crimes et aux
agissements des grandes puissances impérialistes. Cela
n’est pas nouveau. Les « forces de l’ONU »
étaient présentes pour les mêmes raisons lors
des tueries du Rwanda en 1994, encore au profit de la France.
C’était toujours la même fonction qu’assumait
l’ONU plus récemment, en mai 2003, lorsque 60 000
personnes ont été massacrées dans la province
d’Ituri, au Nord-Est de la République Démocratique
de Congo. Les 5000 « casques bleus »
présents en RDC s’étaient tenus à l’écart
des lieux de ces massacres interethniques téléguidés
par plusieurs grandes puissances alors que l’ONU était
parfaitement au courant de leurs préparatifs.
Depuis l’ère gaullienne, la France avait maintenu sa domination impérialiste héritée de son empire colonial en apportant un appui indéfectible au dictateur Houphouët Boigny de 1960 jusqu’à sa mort en 1993. Enfin, face aux nouvelles luttes de cliques et de factions au sein de l’armée, elle a fini par s’appuyer sur une couverture électorale et démocratique, portant Gbagbo à la tête de l’Etat après une série de règlements de compte sanglants entre plusieurs factions. Depuis son investiture, ce dernier a jalonné son pouvoir de campagnes xénophobes en faveur de « l’ivoirité », pour éliminer ses principaux rivaux. Il l’a surtout ponctué de plusieurs charniers et de massacres faisant plusieurs centaines des morts dont le plus connu s’est déroulé en mars 2004 où, sous prétexte de repousser de manifestation de l’opposition qu’il avait interdite, Gbagbo a envoyé ses chars et ses « escadrons de la mort » dans les quartiers d’Abidjan pour assassiner une partie de la population supposées appartenir aux forces rebelles. Ces tueries se sont déroulées avec la complicité directe de la France et sous les yeux de plus de 4000 militaires français qui n’ont pas levé le petit doigt pour venir porter secours aux victimes essentiellement civiles.
Depuis 1999, la Côte d’Ivoire, jadis présentée comme « vitrine » de la stabilité économique et politique de l’Afrique francophone se retrouve au cœur des turbulences et de la décomposition sociale qui secouent le continent africain depuis la disparition des blocs. En fait, depuis 15 ans, la France a perdu beaucoup de son influence, de son prestige et de ses positions stratégiques essuyant d’importants revers notamment à travers la mise en évidence de sa responsabilité et de ses crimes dans les massacres au Burundi et au Rwanda en 1993/1994 et la perte du Zaïre en 1997. Elle se heurte d’ailleurs à la rivalité croissante de l’impérialisme américain, malgré les difficultés de ce dernier à opérer des percées significatives et durables.
Malgré l’implosion de son pré carré ivoirien en décembre 1999 et surtout depuis la réorganisation stratégique de ses bases militaires en Afrique, la France avait décidé de renforcer son dispositif militaire en Côte d’Ivoire et de s’y maintenir coûte que coûte. Avec le Sénégal, la Côte d’Ivoire est l’un des deux pays clés de son dispositif militaire qui permet de maintenir sa présence sur le sol africain. Les affrontements entre forces rebelles et gouvernementales et la tentative de coup d’État de 2002 lui ont fourni l’occasion pour justifier sa présence militaire massive et de tenter de reprendre les choses en mains au niveau diplomatique avec les accords de Marcoussis en janvier 2003. Depuis lors, la France a tenté de jouer sur la division et les rivalités entre les forces gouvernementales et les forces rebelles pour jouer les arbitres en se posant comme garant de la paix. Cela l’arrangeait de ne pas choisir et de ne pas favoriser trop un camp contre l’autre. Mais aujourd’hui le climat d’instabilité est tel que cette stratégie qui tendait à la faire apparaître dans un rôle « pacificateur » au dessus de la mêlée s’est avérée intenable et qu’elle a constitué au contraire un puissant facteur de perte de contrôle. Sur ces deux plans, militaire et diplomatique, l’impérialisme français n’a jamais pu imposer ses orientations. Au contraire, il n’a aucun allié déclaré parmi les forces qui s’affrontent sur le terrain ivoirien. Son attitude qui consiste à prétendre être «neutre» par rapport aux divers belligérants, ne l’a d’ailleurs pas empêché de soutenir en sous-main alternativement telle ou telle clique et d’être impliquée à plusieurs reprises dans des tueries, sans jamais l’assumer publiquement. C’est dans ce cadre que les « accords de Marcoussis » ont été réactualisés à plusieurs reprises sans aucun succès et sans aucun effet sur le terrain à Accra au Ghana (baptisées accords Accra I, II et III) afin de relancer le « processus de paix » en passant par la réforme des institutions politiques, parallèlement au désarmement des forces rebelles. Mais en réalité toute cette période a été mise à profit par tout le monde pour s’armer massivement en vue d’en découdre pour de bon dès que possible. C’est cette ligne politique totalement incohérente et intenable qui a plongé la France dans l’impasse dans laquelle elle se trouve aujourd’hui, où elle est acculée à la fuite en avant dans la confrontation militaire directe pour défendre ses intérêts.
La bourgeoisie française est dans l’impasse. Elle est isolée, encerclée par une multitude d’ennemis en Côte d’Ivoire, sans compter la menace de pogrom qui pèse sur ses ressortissants (otages potentiels des «forces patriotes» des partisans de Gbagbo).
Ce qui est clair, c’est que sa présence militaire ne saurait, elle, être mise en question. Si la situation a contraint la France à évacuer en toute hâte une bonne partie de ses ressortissants civils vivant dans le pays, elle lui a aussi permis de renforcer ses effectifs militaires. Alors que le masque humanitaire de la France est déjà mis à mal en Afrique depuis sa responsabilité avérée dans les massacres et le génocide rwandais en 1994, l’évacuation de ses ressortissants civils va pousser l’impérialisme français à s’enfoncer dans une nouvelle escalade militaire avec son armée de professionnels. Celui-ci va se donner les coudées plus franches pour des opérations de « nettoyage » et pour se livrer à de nouveaux massacres guerriers. Toutes proportions gardées, la France est condamnée à la même fuite en avant que les États-Unis, à se dépouiller de plus en plus de ses hypocrites alibis de force de maintien de la paix pour se montrer sous son vrai jour impérialiste en imposant brutalement un rapport de forces sur le terrain militaire. La bourgeoisie française ne peut pas se permettre d’abandonner la Côte d’Ivoire à ses adversaires impérialistes sous peine de se retrouver rapidement éjectée du continent africain tout entier.
La situation tend désormais à s’enfoncer dans une spirale meurtrière de plus en plus irrationnelle et de plus en plus difficilement contrôlable.
Cette perspective, avec tous les dangers de dérapage qu’elle comporte, est d’autant plus ouverte que la situation évolue au milieu d’un véritable panier de crabes impérialistes.
La rupture est désormais profonde entre Gbagbo et la France, symbolisée par la destruction de l’aviation ivoirienne par l’armée française. Plus généralement, depuis le début des hostilités, on entend nombre de dirigeants proches du pouvoir ivoirien, comme le président de l’Assemblée nationale, Koulibaly prononcer ouvertement des déclarations de guerre incendiaires contre la France.
Depuis 2002 Gbagbo n’a cessé d’entraîner une partie de la population vers de pires déchaînements de l’hystérie nationaliste et xénophobe armant des milices de « patriotes » au nom de « l’ivoirité » contre l’occupant français comme contre les autres ethnies africaines « étrangères » comme les Burkinabe.
La bourgeoisie française a entrepris de se serrer les coudes pour défendre ses intérêts. C’est dans ce cadre qu’il faut comprendre le soutien sans réserve que le PS a apporté à la «fermeté» de Chirac et du gouvernement français dans la crise ivoirienne actuelle en allant jusqu’à décider de rompre publiquement avec leur «camarade» de l’Internationale socialiste, Laurent Gbagbo.
Ce dernier a cependant d’autres alliés de circonstance dans la région à travers sa récente alliance avec la Mauritanie, la Guinée et le Togo, pays qui cherchent en découdre avec le Burkina, accusé de déstabiliser leurs régimes.
Le président ivoirien peut compter sur d’autres soutiens plus discrets comme le Ghana, mais aussi il dispose d’un fort capital financier qui lui permet de se payer un très grand nombre de tueurs professionnels, comme les mercenaires qui pilotaient ses avions.
De leur côté, bien qu’affaiblis par des luttes intestines et de règlements de comptes sanglants, les groupes rebelles multiplient les manœuvres et les déclarations va-t-en guerre d’où leur refus d’être désarmés comme le préconisait l’ONU.
Par ailleurs, les rebelles peuvent compter sur le Burkina-Faso réputé être leur soutien le plus sûr dans la région, sans compter la Libye.
Certains secteurs de la bourgeoisie française ne se sont pas privés de souligner que l’offensive de Gbagbo au lendemain de la réélection de Bush, n’était pas un simple hasard en soulignant l’attirance qu’a Gbagbo pour les États-Unis et la volonté de Washington de renforcer son influence en Afrique alors que l’Oncle Sam a beaucoup de mal à s’y implanter.
En fait, les États-Unis se sont ménagés plusieurs fers au feu puisque, tout en se laissant courtiser par Gbagbo, ils ont armé les rebelles en 2002 et ont continué à les aider discrètement depuis plusieurs mois. Tout en saluant officiellement la réaction de la France, plusieurs journaux américains proches du gouvernement Bush ont redoublé leurs charges anti-française en pointant du doigt les incohérences de la politique française et son incapacité à gérer les « affaires africaines ». Ils ont beau jeu de voir la France s’enliser et attendent de pouvoir lui mettre plus activement d’autres bâtons dans les roues.
Toutes les conditions sont réunies pour que le chaos devienne plus sanglant encore avec la forte probabilité de l’implication militaire plus directe de l’impérialisme français. Cette implication criminelle de l’impérialisme français en Afrique ne peut que mettre à mal le mensonge activement répandu ces derniers temps, en particulier par la bourgeoisie française, qui désigne les États-Unis comme seuls fauteurs de guerre dans le monde.
C’est une dimension encore plus large du conflit ivoirien qui se prépare non seulement avec un risque d’"irakisation" de la Côte d’Ivoire mais aussi avec un danger d’extension du conflit aux États voisins, d’un embrasement généralisé de la guerre civile dans la région et de déstabilisation en Afrique occidentale.
L’enlisement, le pourrissement du conflit est inévitable pour l’impérialisme français comme pour cette partie de l’Afrique dans le contexte du chacun pour soi et de la guerre de tous contre tous.
La Côte d’Ivoire est un nouvelle illustration du sort effroyable que le capitalisme réserve pour le présent et pour l’avenir à tout le continent africain. La population de ce pays est désormais exposée en permanence à la misère et à la guerre, à la famine et aux massacres, subissant en première ligne les effets de la décomposition sur le plan social comme sur le plan économique, au milieu d’une prolifération des charognards impérialistes et d’une multiplicité de cliques bourgeoises locales rivales, défendant chacune ses propres intérêts.
Elle est ainsi l’illustration de la barbarie guerrière dans laquelle le système capitaliste enfonce de plus en plus l’humanité.
W. (14 novembre 2004)Jamais une élection
présidentielle américaine n’aura été autant mise en scène par les
médias bourgeois français que celle qui vient de se dérouler aux Etats-Unis
entre le candidat démocrate J. Kerry et celui du parti républicain
G. W. Bush.
Tous les jours, nos journaux, nos écrans de télévision ont été envahi de reportages et de commentaires destinés à nous persuader de l’importance vitale de cette élection, pour notre avenir et celui du monde. Tout cela, cette propagande mensongère et éhontée n’était pas le fruit du hasard ou de la simple motivation de quelques directeurs de l’information trop zélés. Cette campagne idéologique a été le produit d’une orchestration, organisée et dirigée par l’Etat français. Le contenu du message à faire passer à la classe ouvrière était parfaitement clair. Toutes les émissions, tous les articles mettaient en avant un J. Kerry, certes un peu terne et manquant d’envergure, mais plus honnête et surtout moins belliciste et guerrier que G. Bush. Cette propagande avait pour but, à partir des élections aux Etats-Unis, de poursuivre implacablement la propagande anti-américaine nécessaire à l’impérialisme français. Dans l’affrontement permanent et toujours plus féroce de toutes les forces impérialistes de la planète, l’affrontement entre la France et les Etats-Unis est, sans aucun doute, un des plus importants de cette période de décomposition et de faillite du capitalisme mondial que nous vivons actuellement. Au contraire de ce qui était affirmé par les médias bourgeois tout au long de la campagne et une fois les résultats connus, la bourgeoisie française ne pouvait être que totalement satisfaite de la réélection de G. Bush à la présidence américaine. Depuis l’invasion américaine de l’Irak, la propagande idéologique de l’Etat français n’a jamais cessé de rendre responsable G. Bush et les faucons de l’administration américaine de l’état de guerre en Irak, ainsi que du développement du terrorisme en direction des pays occidentaux. G. Bush a été présenté comme irresponsable, extrémiste et dangereux. Tout était bon pour mettre en avant l’irrationalité de la politique de l’administration Bush. Ainsi ce n’était plus le capitalisme en faillite qui était devenu irrationnel et radicalement mortel pour la survie de l’humanité, mais seulement l’actuelle administration Bush. La réélection de G. Bush, le maintien au pouvoir des secteurs les plus archaïques du parti républicain vont permettre d’autant mieux à la bourgeoisie française de continuer à orchestrer avec encore plus d’ampleur sa campagne anti-américaine. Campagnes idéologiques de mystification nationaliste contre la classe ouvrière en France qui ne pourront qu’être renforcées par l’utilisation de plus en plus importante de la force militaire de la part des Etats-Unis, englués dans le bourbier irakien et confrontés au processus irréversible d’affaiblissement de leur leadership mondial. Ces campagnes idéologiques, tout en étant le produit des tensions inter-impérialistes entre la France et les Etats-Unis, permettent en même temps à l’Etat français de camoufler ses propres visées guerrières dans le monde.
L’ensemble des commentateurs et autres politologues bourgeois américains avaient tous analysé que, par-delà l’absence totale d’envergure des deux candidats, et le peu de différenciation de leur programme respectif, y compris sur les plans économiques et sociaux, J. Kerry aurait gagné les élections présidentielles s’il avait remporté la victoire dans l’Etat de l’Ohio. Il y a peu de temps encore, cet Etat américain possédait la plus grande concentration d’activité industrielle par habitant de tous les Etats-Unis, pour connaître, au cours des dernières années, une désindustrialisation de plus en plus rapide et brutale laissant sans ressource et sans emploi une grande partie de la population. Malgré une très importante mobilisation de l'électorat démocrate, l’Ohio a finalement voté majoritairement conservateur, véritable microcosme électoral de ce qui s’est passé au niveau national. La carte électorale de ces élections aux Etats-Unis montre une vaste étendue dominée par le vote républicain, et quelques zones démocrates regroupées sur les franges littorales de l’Atlantique et du Pacifique, dans des grandes villes portuaires telles que New York, Boston, Baltimore ou San Francisco. Dans ce qu’il est convenu d’appeler "l'Amérique profonde", les appels de J.Kerry à voter démocrate n’ont guère rencontré d’écho favorable. Comme l’affirment les commentateurs bourgeois eux-mêmes, les deux candidats ont menti dans leurs campagnes, d’une manière plus caricaturale que jamais sans que cela n’ait d’incidence sur une mobilisation électorale relativement plus forte que lors du précédent scrutin présidentiel, pas plus que sur le choix des votes. Les motivations électorales d’une majorité d’électeurs américains se sont trouvées déterminées par des facteurs faisant appel à tout, sauf à la raison et à la lucidité. G. Bush s’est présenté comme le défenseur intransigeant de la morale chrétienne, de la force et de la grandeur du peuple américain. Le New York Times relève que "de nombreux Américains affirment ne pas avoir voté en fonction des questions politiques, mais en fonction des valeurs. Ils ont voté pour celui qui partageait leur croyance et leur mode de vie. Les mots qui reviennent régulièrement lors des enquêtes réalisées dans tout le pays auprès des électeurs sont ainsi : foi, famille, intégrité et confiance." L’Amérique profonde, les secteurs ruraux, soumis par les effets de la crise à une misère croissante, à la démoralisation et à l’absence totale de perspectives ont été particulièrement perméables à ces thèmes mystiques, permettant de diaboliser l’étranger (le musulman fanatique !) comme le responsable de tous les maux. Par-delà la médiocrité d’ensemble de la campagne électorale, en l’absence de luttes d’envergures du prolétariat, et à défaut d’une alternative visible face à la décomposition de la société, c’est le repli sur soi ou sur sa communauté, qui l’a emporté. L’irrationalité, produit de la peur et de l’impuissance, a dominé ces élections.
L’affaiblissement de la cohérence d’ensemble de la bourgeoisie américaine afin de défendre au mieux l’intérêt national américain s’est également exprimé dans le contenu programmatique électoral du candidat démocrate : "Tout au long de la campagne, les électeurs n’ont pas su pourquoi se présentait J.Kerry. Ils voulaient connaître la façon dont il voyait le monde. Et il ne leur a jamais dit." (Le New York Times). "Les républicains ont utilisé l’argument que Kerry ferait un président trop indécis pour protéger le pays.", estime le Los Angeles Times. Si J. Kerry n’a pas exprimé une vision du monde différente de celle tristement attachée à la personne de G. Bush, c’est que tout simplement J. Kerry et les démocrates ne pouvaient pas en avoir. Sur la question irakienne, qui en est l’actualisation présente la plus dramatiquement spectaculaire, l’enfoncement inéluctable de l’impérialisme américain dans le bourbier irakien, l’absence de toute solution alternative à la fuite en avant guerrière, ont nécessairement rendu impossible au candidat démocrate de proposer une autre politique que celle de Bush. Il lui était en effet aussi impossible d'envisager un retrait des forces armées américaines en Irak, que d'entraîner, les puissances rivales, telles la France ou l’Allemagne, dans ce bourbier, même à travers l’ONU. Même si une majorité de la bourgeoisie américaine avait choisi de soutenir le candidat Kerry, ce qui s'était entre autres traduit par des attaques contre Bush provenant parti républicain lui-même, une telle totale absence de réelle politique alternative ne pouvait que laisser le chemin libre à la montée des plus vieux réflexes archaïques et ouvrir ainsi la voie à la victoire de G. Bush.
Comme nous l'avons déjà développé (voir en particulier RI n° 351), l'élection de l'un ou l'autre de deux candidats ne constituait pas un enjeu majeur pour la bourgeoisie américaine. Néanmoins, le fait que le candidat de son choix n'ait pas été élu à cause d'une difficulté à canaliser cette partie de l'électorat particulièrement perméable aux thèmes les plus archaïques et obscurantistes, constitue une expression de l'affaiblissement la puissance américaine. En effet, l'impasse face à laquelle est confronté le leadership américain sur la scène mondiale rejaillit dans une certaine difficulté de la bourgeoisie américaine à contrôler son jeu politique.
Face à la politique impérialiste des Etats-Unis qui ne peut de toutes manières s’exprimer et se développer autrement que dans une direction militaire et guerrière, le resserrement de l’équipe Bush pour les quatre ans à venir dessine une évolution de la situation mondiale toujours plus dramatique et barbare. Au regard d’une telle réalité, l’impérialisme français, lui-même enlisé dans le conflit en Côte d'Ivoire, ne manquera pas de se réfugier derrière une campagne anti-américaine qui sera orchestré avec toujours plus d’ampleur. La classe ouvrière n’a rien à attendre des élections bourgeoises aux Etats-Unis comme dans n’importe quel pays du monde. Elle a par contre tout à craindre de l’enfoncement du capitalisme dans le chaos et la barbarie.
Tino (18 novembre)
Quel est le moyen de lutte le plus efficace quand son "propre" travail ou "son" usine ne sont plus considérés comme rentables ? L’arme de la grève ne perd-elle pas de son efficacité quand, de toutes façons, le capitaliste a l'intention de fermer l’usine ou quand des entreprises entières sont au bord de la faillite ? Aujourd'hui, ces questions se posent tout à fait concrètement, pas seulement chez Opel, Karstadt ou Volkswagen, mais partout où il faut "sauver" ou fermer des usines et des compagnies à cause de la crise économique du capitalisme. Et de nos jours, cela se produit partout. Pas seulement en Allemagne, mais en Amérique et aussi en Chine. Pas seulement dans l’industrie, mais aussi dans les hôpitaux ou les services publics.
Au milieu des années 1980 déjà, de grandes luttes ont eu lieu contre des licenciements massifs. Par exemple, à Krupp Rheinhausen ou dans les mines en Grande-Bretagne. A l'époque, des branches industrielles entières comme les mines, les aciéries, les chantiers navals, ont quasiment été fermées.
Mais aujourd’hui, le chômage et les fermetures d’usine sont devenus omniprésents. Au départ, cela a provoqué un vaste sentiment d'impuissance. Pour la plupart, les licenciements ont été acceptés sans résistance. Cependant, la lutte de cet été chez Daimler-Chrysler a été un signe de quelque chose de nouveau. Là, les employés ont réagi de façon spectaculaire aux tentatives de chantage des patrons. Les actions de solidarité, des employés de Brême en particulier, avec leurs collègues des usines de Stuttgart-Sindelfingen qui subissaient l'attaque, ont montré que les ouvriers combattent les tentatives de les monter les uns contre les autres.
Et aujourd'hui, les grèves d'Opel, surtout dans l'usine de Bochum, en réponse aux annonces de licenciements massifs, montrent à nouveau la détermination de ne pas accepter passivement les réductions massives d’emplois.
Néanmoins, dans ces circonstances, il faut poser la question de la possibilité et des buts de la lutte. Nous savons que les luttes chez Daimler-Chrysler, comme celles, dans les années 1980, chez Krupp-Rheinhausen ou des mineurs anglais, se sont terminées par des défaites. On a fait l’expérience répétée – aujourd’hui encore – de la façon dont les syndicats et les conseils d’usine sont capables d'adopter le langage de la lutte dès que les ouvriers résistent, tout en déclarant qu’il n’y a aucune alternative sinon celle de se soumettre à la logique du capitalisme. Ce qui est en jeu, disent-ils, c’est d’éviter le pire. Ils veulent "sauver" l'entreprise, disent-ils, et donc faire passer les licenciements nécessaires de la manière la plus "sociale" possible. Ainsi, l'accord adopté par la chaîne de magasins de Karstadt-Quelle, qui comprenait la suppression de 5 500 emplois, la vente de 77 magasins et une énorme réduction de salaire ("économisant" 760 millions d’Euros jusqu’en 2007), a été présenté par le syndicat Verdi comme une victoire pour les travailleurs. (…)
Les employeurs, les politiciens mais aussi les syndicats et les conseils d’usine – tous ceux qui sont impliqués dans la gestion de l’usine, de l'entreprise ou de l’Etat – considèrent que les ouvriers et les employés appartiennent à l'entreprise dans laquelle ils travaillent et que leur bien-être dépend de manière inséparable des intérêts de l’employeur. (…) Suivant cette logique, le président du conseil général d’usine d’Opel, Klaus Franz, a déclaré catégoriquement, dès le début, "nous savons que les licenciements ne peuvent être évités". C’est la logique du capitalisme. Mais ce n’est pas le seul point de vue duquel on peut considérer la situation. Si on aborde les choses, non comme le problème d’Opel ou de Karstadt, ou de l’Allemagne, mais comme un problème de la société dans son ensemble, il en ressort une toute autre perspective. (…) Vu sous cet angle, il est clair que la vendeuse de Karstadt à Herne, l' ouvrier à la chaîne chez Opel à Bochum, mais aussi les chômeurs d’Allemagne de l’Est ou les ouvriers du bâtiment venus de l’Ukraine qui, et en travaillant au noir, sont presque réduits à l'esclavage, partagent un destin et des intérêts communs – non pas avec leurs exploiteurs, mais les uns avec les autres.
Du côté du capital, on sait que cet autre point de vue existe. Et c’est justement celui-ci que craint la bourgeoisie. La classe dominante le sait. Tant que les ouvriers d'Opel ou de Volkswagen ne voient le problème que du point de vue d’Opel ou de Volkswagen, ils finissent par "revenir à la raison".
C’est pourquoi les représentants du capital tentent sans cesse de nous persuader que les catastrophes causées par leur système économique sont le résultat des "inadaptations" et des "spécificités" de chaque entreprise ou de chaque pays. Ainsi, ils disent que les problèmes chez Karstadt sont le résultat d’une mauvaise stratégie de vente. Opel, pour sa part, est supposé avoir échoué en ne suivant pas l’exemple de Daimler-Chrysler ou de Toyota qui ont connu des succès avec le développement d'une nouvelle gamme attrayante et souvent diesel. On prétend aussi que si 10 000 suppressions d'emplois sur les 12 000 que General Motors a prévues en Europe, ont lieu en Allemagne, c'est que la bourgeoisie américaine cherche en quelque sorte à se venger de la politique de ce pays vis-à-vis de l’Irak ! Comme si Daimler-Chrysler n’avait pas exercé un même chantage sur ses employés il y a quelques mois seulement ! Comme si les compagnies allemandes, par exemple Karstadt-Quelle, ne licencient pas aussi impitoyablement leurs ouvriers ! La réalité elle-même s’inscrit en faux contre de tels arguments. Le 14 octobre, non seulement la suppression de milliers d’emplois chez Karstadt était décidée et la même chose annoncée chez Opel, mais était révélée également la perspective de réduction d’emplois dans la chaîne de supermarchés Spar. Le même jour, filtrait l’annonce d’un nouveau plan de "sauvetage" du consortium hollandais Phillips.
Quand, le "jeudi noir" du 14 octobre, il a été annoncé qu’au total, 15 500 emplois seraient supprimés chez Karstadt-Quelle et chez Opel dans les trois prochaines années, les "partenaires qui négocient", les politiciens et les "commentateurs" se sont dépêchés de distinger soigneusement les deux cas. Dès que le négociateur en chef pour le syndicat Verdi, Wiethold, eut annoncé, le jeudi après-midi, presque joyeusement, le "sauvetage" de Karstadt, les media ont immédiatement fait passer le message : maintenant que le futur de Karstadt est assuré, Opel reste le seul souci. Alors que la main-d’œuvre du département des chaînes de magasins est ainsi supposée retourner au travail avec "soulagement", il n’y aurait que la force de travail d’Opel qui, paraît-il, devrait se faire du souci pour son avenir.
Mais la seule différence entre les situations des employés des deux entreprises, c’est que les attaques terribles qui ont déjà été décidées chez Karstadt-Quelle –licenciements massifs, fermetures partielles, chantage massif sur les ouvriers – sont encore en prévision chez Opel (…)
L’affirmation selon laquelle la situation des employés de Karstadt est fondamentalement différente de celle de ceux d’Opel est complètement sans fondement. Pour les ouvriers de Karstadt, de toutes façons, rien n'a été "sauvé". Verdi parle "d’un sauvetage de l’emploi qui mérite son nom" et d’un "succès pour les employés" parce que des "garanties d’emplois" ont été données et la convention collective sauvée. En réalité, les victimes du "sauvetage" de Karstadt sont toujours exactement dans la même situation que les ouvriers de chez Opel, mais aussi ceux de Volkswagen, Daimler-Chrysler, Siemens ou du secteur public.
Les négociations chez Karstadt se sont conclues en vitesse parce qu’on savait que General Motors allait annoncer son plan de sauvetage pour l’Europe le 14 octobre. Jusque là, la classe dominante avait toujours comme règle tacite de ne jamais attaquer en même temps plusieurs gros secteurs de la classe ouvrière, de façon à ne pas encourager l’apparition d’un sentiment de solidarité ouvrière. Mais aujourd’hui, l’accentuation de la crise du capitalisme mondial limite la capacité d'étaler les attaques. Dans ces conditions, la bourgeoisie espérait au moins que le jour où arriveraient les mauvaises nouvelles de Detroit, Karstadt puisse être présenté comme un "succès".
Les licenciements massifs, la menace de faillite ne signifient pas que l’arme de la grève est devenue superflue. (…) Les arrêts de travail chez Mercedes ou chez Opel sont un signal important, un appel à la lutte.
Les moyens dont nous avons besoin face au niveau actuel des attaques du capital, c'est la grève de masse de tous les ouvriers. (…)
Bien sûr, de telles actions, massives, communes, ne sont pas encore possibles. Mais en aucun cas cela ne veut dire qu’on ne peut pas lutter et obtenir quelque chose maintenant déjà. Mais il faut reconnaître que la grève n’est pas la seule arme de la lutte de classe. Tout ce qui, aujourd’hui déjà, fait avancer la reconnaissance des intérêts communs de tous les travailleurs et fait revivre la tradition de la solidarité ouvrière, effraie la classe dominante, la rend moins sûre d'elle dans ses attaques, l'oblige à faire plus de concessions, même si c'est de façon temporaire.
En 1987, les ouvriers de chez Krupp-Rheinhausen, menacés par la fermeture de l’usine, ont ouvert leurs assemblées quotidiennes à la population, aux ouvriers des autres usines et aux chômeurs. Aujourd’hui, la gravité de la situation rend encore plus inacceptable le fait que les ouvriers d’Opel, Karstadt, Spar ou Siemens ne se réunissent pas pour discuter de leur situation commune. Pendant la grève de masse en 1980 en Pologne, dans chaque ville, les ouvriers se réunissaient dans la plus grande usine de la ville. Ils établissaient leurs revendications communes et prenaient leur lutte en main.
La lutte chez Mercedes a déjà démontré, ce que les attaques chez Opel ou Karstadt ont confirmé, qu’il y avait un grand sentiment de solidarité dans la population ouvrière avec ceux qui subissaient les attaques. Dans de telles circonstances, les manifestations dans les villes peuvent devenir un moyen de faire sortir les ouvriers des autres usines et de mobiliser les chômeurs, de développer une solidarité entre tous.
(…) La lutte en commun des ouvriers ne peut être menée que par les ouvriers eux-mêmes.
Face à la profondeur de la crise du capitalisme aujourd'hui, les ouvriers doivent aussi dépasser leur manque d'intérêt pour les questions politiques. Nous ne parlons pas ici de la politique bourgeoise, mais du fait que les travailleurs doivent traiter des problèmes de la société dans son ensemble et de la question du pouvoir.
(…) Ces attaques montrent clairement ce que peut signifier le fait que les moyens de production n’appartiennent pas à la société dans son ensemble, et ne servent pas du tout à la satisfaction des besoins de la société. (…) Et surtout, ils sont soumis aux lois aveugles et de plus en plus destructrices de la concurrence et du marché, qui plongent une partie sans cesse croissante de l’humanité dans la paupérisation et une insécurité insupportable. Des lois qui sapent les règles les plus élémentaires de la solidarité humaine sans laquelle, à long terme, aucune société n’est possible. Les ouvriers qui produisent presque tous les biens et les services dont l’humanité a besoin pour vivre, commencent lentement à prendre conscience qu’ils n’ont pas leur mot à dire dans cet ordre social.
La crise chez Karstadt ou chez Opel n’est pas le résultat d’une mauvaise gestion mais l’expression d’une crise de surproduction chronique, destructrice et de longue durée et qui se développe de décennies en décennies. (…) Il n’y aucune façon de sortir de ce cercle vicieux au sein du capitalisme.
(15 octobre 2004)
Récemment, le CCI a envoyé une délégation en Argentine. Celle-ci a été accueillie très chaleureusement par les membres du NCI lesquels nous ont affirmé qu'ils n'avaient qu'une seule crainte : que le CCI change d'avis et les abandonne en renonçant à ce voyage !
Au cours de notre séjour, les camarades du NCI ont pris la décision d'envoyer par courrier postal leur Déclaration du 27 octobre (publiée ci-dessous) à toutes les sections du BIPR et aux autres groupes de la Gauche communiste afin de rétablir la vérité : contrairement aux fausses informations colportées par le BIPR (notamment dans sa presse en italien), le NCI n'a pas rompu avec le CCI !
Les membres du NCI ont demandé, à deux reprises par téléphone, à l'individu B. de venir s'expliquer devant le NCI et la délégation du CCI. Monsieur B. a refusé toute rencontre et toute discussion et nous a raccroché au nez. Ce comportement révèle la lâcheté de cet individu : pris la main dans le sac, il se terre maintenant comme un lapin dans son terrier !
Les camarades du NCI nous ont apporté des éléments supplémentaires sur le comportement de ce petit aventurier de province. Monsieur B. avait un profond mépris pour les autres membres du NCI. Ces derniers sont des ouvriers vivant dans la misère alors que B. exerce une profession libérale et s'était même vanté d'être le seul membre du NCI à "pouvoir se payer un voyage en Europe." Les camarades du NCI nous ont également dévoilé les méthodes de B. : il clivait les militants du NCI en faisant en sorte qu'ils ne puissent jamais se réunir tous ensemble. Il les prenait individuellement ou par petits groupes pour mener des discussions personnelles avec eux. Il ne voulait pas que les membres du NCI approfondissent les questions politiques et passait d'un thème à l'autre à toute vitesse. C'est pour cela que les camarades du NCI avaient estimé qu'ils n'étaient pas prêts à adhérer au CCI lorsque B. avait fait le forcing en août dernier pour que le NCI intègre le CCI de façon prématurée. Enfin les camarades du NCI nous ont dit avoir pris conscience qu’ils avaient jusqu’à présent beaucoup de difficultés à critiquer les méthodes de ce "petit chef" stalinien (du fait sans doute du poids de leur passé dans les organisations gauchistes).
Cet individu avait, par ailleurs, cherché à semer la zizanie au sein du CCI. Début septembre, il nous a envoyé un mail dans lequel il accusait un de nos camarades (qui faisait partie de la délégation qui s'était rendue en Argentine au mois d'août) d'avoir, par son comportement, obligé un membre du NCI à déménager. Au cours de notre dernier voyage, ce militant du NCI nous a certifié que c'était un pur mensonge : s'il a dû déménager, c'est uniquement parce qu'il ne pouvait plus payer son loyer ! Nous avons gardé la trace écrite de ce mensonge répugnant de Monsieur B.
Malgré le choc qu'ils ont reçu (en découvrant les mensonges et les manoeuvres réalisés en leur nom et à leur insu par ce sinistre personnage), les camarades du NCI ont exprimé leur détermination à poursuivre une activité politique à la mesure de leurs faibles forces. C'est grâce à leur accueil très fraternel et à leur implication politique que le CCI a pu tenir une deuxième réunion publique le 5 novembre à Buenos Aires dont le thème a été choisi par le NCI (voir notre site Internet en espagnol).
Pendant toute la durée de son séjour à Buenos Aires, la délégation du CCI a été hébergée chez les camarades du NCI qui nous ont offert chaleureusement l'hospitalité malgré leurs conditions de vie effroyables. La majorité d'entre eux sont au chômage et ne touchent aucun subside de l'État. Un autre camarade (dont la compagne a été licenciée) vient de perdre son logement.
Malgré les terribles difficultés matérielles qu'ils rencontrent au quotidien, les membres du NCI ont insisté auprès de notre délégation : ils veulent s'impliquer plus dans une activité militante et notamment poursuivre la discussion avec le CCI. Ceux qui sont au chômage veulent retrouver un emploi non seulement pour pouvoir survivre et nourrir leurs enfants, mais aussi pour sortir du sous-développement politique dans lequel Monsieur B. les a maintenus (ils ont notamment exprimé la volonté de contribuer à l'achat d'un ordinateur).
En rompant avec le citoyen B. et avec ses méthodes bourgeoises, les camarades du NCI se sont comportés comme de vrais militants de la classe ouvrière. Ils ont pu tracer des perspectives de travail avec la délégation du CCI. Ils ont décidé en priorité de se former à l'utilisation de l'outil informatique afin de pouvoir se servir d'Internet et se doter d'une adresse E-mail[1] [11].
Au moment du départ de notre délégation, les camarades du NCI nous ont remercié très chaleureusement pour notre visite. Ils nous ont dit que jamais ils n'avaient rencontré (dans leurs parcours politique passé) une organisation comme le CCI, avec un tel respect des militants. Ils ont insisté à plusieurs reprises pour que le CCI les appelle régulièrement au téléphone. L'un d'entre eux a même regretté auprès d'un de nos camarades que ce dernier, dans la dernière période, ne lui ait pas téléphoné personnellement.
Ainsi, le CCI n'abandonnera pas le NCI. Il ne permettra pas à Monsieur B. (et à son petit "cercle" vicieux) d'exercer le moindre chantage, la moindre pression de quelque nature que ce soit pour détruire ce "petit noyau" dans un pays isolé. C'est pour cela que, à la demande unanime de tous les militants du NCI, le CCI continuera à utiliser sa "méthodologie" (qualifiée de "nauséabonde" par Monsieur B. et ses complices de la FICCI !) consistant à leur passer régulièrement des coups de téléphone[2] [12].
CCI (17 novembre 2004)[1] [13] Pour toute correspondance et tout soutien financier au NCI, écrire à la boîte postale ou à l'adresse E-mail de Accion Proletaria, section du CCI en Espagne.
[2] [14] C'est en ces termes que, dans sa "Déclaration" du 12 octobre, ce mythomane manipulateur avait étalé abondamment ses mensonges nauséabonds en attribuant au CCI ses propres turpitudes (comme ses alliés de la FICCI qui lui ont souhaité la "bienvenue" dans leur Bulletin n°28 !) : "Nous faisons cette déclaration à la suite d'une série de dénonciations effectuées par des militants du Cercle de communistes internationalistes, et sur leur demande, qui rendent compte qu'ils ont été l'objet d'appels téléphoniques de la part du CCI. Cependant, ces appels téléphoniques n'étaient pas innocents. Ils avaient l'intention sournoise de détruire notre petit noyau (...) Sur leur demande unanime, les camarades que le CCI a appelés au téléphone pour semer les germes de la méfiance et de la destruction de notre petit groupe, proposent à l'ensemble des membres du Cercle de communistes internationalistes le rejet total de la méthode politique du CCI qu'ils considèrent comme typiquement stalinienne" ! Voir également notre article sur Internet : "Circulo de Comunistas Internacionalistas" : Imposture ou réalité ?"
Avec la mort d’Arafat,
la bourgeoisie a perdu l’un des siens. Et c’est pour cela que les
médias, les dirigeants non seulement arabes mais aussi occidentaux
se sont mobilisés pour lui rendre un dernier vibrant hommage, que
la cérémonie de ses funérailles au Caire puis surtout à Ramallah a
été retransmise par les chaînes de télévision du monde entier, alors
qu’il n’était même pas un chef d’Etat.
Il avait d’autres titres de "gloire" pour ses pairs. Celui qu’on nous a présenté comme un "grand homme", une grande figure de ces cinquante dernières années, en passe de devenir après sa mort un héros légendaire du monde arabe, était avant tout un grand pourvoyeur de chair à canon, un ennemi féroce du prolétariat.
Derrière le mythe de la création d’un Etat palestinien, il aura entraîné et envoyé pendant trente ans des générations d’ouvriers se faire massacrer fanatiquement dans l’arène des guerres impérialistes, pour la "cause inconditionnelle" la plus typiquement bourgeoise, le nationalisme. Il aura été un des pionniers du recrutement massif de gamins à peine âgés d’une dizaine d’années, ou d’adolescents pour les envoyer au massacre tant dans les rangs des "feddayins" ou des forces armées du Fatah que comme martyrs kamikazes, porteurs de bombes meurtrières. Il a encouragé des enfants encore plus jeunes à participer activement à l’Intifada. La défense de la "cause palestinienne" à laquelle il aura consacré son existence aura permis à Arafat de recevoir le soutien non seulement d’une large partie de la bourgeoisie établie, dans le cadre des affrontements interimpérialistes, symbolisée par l’admission officielle de l’OLP à l’ONU en 1974, sous les applaudissements nourris de l’assistance, alors qu’il était encore sous la protection de l’URSS. Il aura droit de son vivant à une autre salve d’honneurs officiels, cette fois sous le haut patronage direct de la bourgeoisie américaine avec l’attribution du prix Nobel de la Paix en 1994, partagé avec le Premier ministre israélien Izhtak Rabin pour les accords d’Oslo de septembre 1993. Il aura reçu le soutien admiratif d’hommes de droite comme de gauche et surtout de toutes les organisations gauchistes pour avoir été un indéfectible champion de la mystification de la "lutte de libération nationale", au nom de la "défense héroïque du peuple palestinien".
Son passé est celui d’un vulgaire chef de gang qui a accompli la plus grande partie de sa "carrière" à commanditer des attentats terroristes aveugles et particulièrement sanglants contre "l’ennemi israélien". Il s’est imposé comme chef de guerre puis à la tête de l’OLP à coups de flingue, de chantage, de règlements de comptes. Il a acquis son statut d’homme politique de la même façon en éliminant sans pitié et souvent de façon sanglante ses principaux concurrents. Despotique, dévoré d’ambition, imbu de pouvoir, baignant dans un milieu corrompu jusqu’à la moelle, entouré de courtisans qui devenaient très vite des traîtres ou des rivaux potentiels, ses moeurs mafieuses de petit caïd étaient le produit du capitalisme décadent qui l’a engendré. Cumulant les fonctions de leader politique, chef des armées et des forces de répression au sein de l’Autorité palestinienne, il n’a jamais hésité à emprisonner, tuer, faire tirer avant tout sur ce "peuple palestinien", qu’il prétendait "défendre". C’est ainsi qu’il n’a cessé de renforcer tous les moyens d’oppression et d’exploitation des masses palestiniennes. Sa fonction essentielle a aussi été de mâter impitoyablement, au nom du maintien de l’ordre et main dans la main avec l’armée israélienne, toute tentative de rébellion et les protestations désespérées d’une population muselée, rackettée, crevant de faim, s’enfonçant dans une misère toujours plus effroyable alors qu’elle est déjà décimée, endeuillée et terrorisée par les bombardements, par les massacres, par le lourd tribut payé quotidiennement à l’Intifada.
La mort d’Arafat représente également pour la bourgeoisie un véritable séisme non seulement pour la situation de la Palestine, du Proche et du Moyen-Orient, mais elle va modifier la donne pour l’ensemble des Etats arabes et va avoir des répercussions sur l’évolution de l’ensemble des relations internationales.
Ainsi, dans ce nid de brigands impérialistes, sous prétexte de défense de la cause palestinienne et du renforcement de l’amitié avec différents Etats arabes, la France a sauté sur l’occasion pour mettre à nouveau "le paquet" afin de s’attirer les faveurs des dirigeants arabes et palestiniens, manière de pointer de plus en plus son nez impérialiste au Moyen-Orient. Elle a réussi un gros coup sur le terrain diplomatique en faisant hospitaliser Arafat dans l’hôpital militaire de la région parisienne où il est mort. Non content de se précipiter à son chevet, Chirac a pu ainsi attirer une nuée de dirigeants de l’OLP et de l’Autorité palestinienne, multipliant les tractations avec eux et d’autres leaders arabes. En exclusivité, le gouvernement français a affrété un avion et lui a rendu les honneurs militaires avec un cérémonial digne des hommages rendus à un véritable chef d’Etat avant le transfert de sa dépouille au Caire puis à Ramallah. En Palestine, lors des funérailles, le monde a pu voir flotter de concert aux fenêtres des drapeaux palestiniens et français, tandis que la foule brandissait des portraits de Chirac à côté de celui du Raïs. La France qui prétend agir au nom de la paix ne peut que jeter de l’huile sur le feu en tentant de faire obstacle aux intérêts des Etats-Unis.
Par ailleurs, cet événement favorise avant tout considérablement le régime de Sharon en Israël dont le principal objectif, proclamé ces derniers mois, était d’éliminer, y compris physiquement, le leader palestinien. Il n’est pas étonnant que des rumeurs d’empoisonnement du Raïs par les services secrets israéliens, le Mossad, aient circulé avec insistance chez de nombreux dirigeants palestiniens et soient partagées par 80% de l’opinion publique de Gaza à Ramallah. L’élimination d’Arafat qui divise et affaiblit le camp palestinien ne peut que conforter l’équipe Sharon dans sa politique d’accélérer le retrait des forces israéliennes de la bande de Gaza pour mieux encercler la Cisjordanie et l’isoler totalement à travers la poursuite de la construction du mur autour d’elle. La bourgeoisie israélienne sait qu’elle se retrouve désormais en situation de force pour imposer ses diktats. C’est en fait un encouragement à une fuite en avant dans la politique du pire, agressive et belliciste de Sharon, qui vise à l’écrasement le plus complet des Palestiniens de la part de l’Etat israélien.
Mais la disparition d’Arafat arrange également les affaires de la bourgeoisie américaine car ces derniers mois, à travers les exigences israéliennes qui réclamaient son départ comme préalable à toute reprise des négociations, le personnage d’Arafat était devenu un obstacle synonyme de blocage de la situation au Proche-Orient. La Maison Blanche mise aussi sur le désarroi, le risque de chaos et les divisions des Palestiniens pour tenter de reprendre la main à son profit.
Mais les déclarations optimistes et rassurantes sur le "déblocage" des négociations, avancées conjointement par Israël et les Etats-Unis comme par une large partie de la presse européenne, ne doivent pas faire illusion. La perspective ouverte par la mort d’Arafat n’est en aucun cas un pas vers la paix mais ne peut que provoquer une nouvelle accentuation des tensions impérialistes. Il ne fait aucun doute qu’Israël et les Etats-Unis vont accentuer les pressions au maximum sur les Palestiniens, désorientés et divisés.
Il s’agit d’un affaiblissement considérable du camp palestinien. Avec l’enterrement d’Arafat, on a assisté en fait à l’enterrement définitif des accords d’Oslo de 1993. C’est la fin de l’espoir de constitution d’un Etat palestinien dans l’avenir que ces accords ont fait miroiter pendant dix ans.
La procession des dirigeants palestiniens au chevet d’Arafat à Paris lors de sa lente agonie n’a pas réglé le problème épineux de sa succession. Il est clair que malgré les divisions et les rivalités du camp palestinien, la corruption, la répression et le discrédit qui pesait sur lui, il était un "chef" historique concentrant toutes les clés du "pouvoir" de ce mini-Etat (de l’Autorité palestinienne, de l’OLP, de la branche armée du Fatah) et un symbole d’unité. Sa disparition ouvre une boîte de Pandore et d’abord une âpre guerre entre les différentes fractions palestiniennes. Parmi tous les multiples clans, aucun ne paraît en mesure de s’imposer. Même si la "vieille garde" a momentanément fait taire ses divisions pour nommer un directoire provisoire et décider d’élections pour se donner un "chef" en janvier, tous ces hommes d’appareils, réduits à l’état de petits bureaucrates arrivistes, sont absents sur le terrain et sont incapables de contrôler aussi bien la population qu'une organisation militaire totalement divisée et morcelée, dont la cohésion ne pouvait être maintenue que par l’autorité et la personnalité d’Arafat. Quant aux petits chefs de guerre mafieux, l’autorité de la plupart ne dépasse pas un quartier ou un village. Trois exemples suffisent à montrer le caractère ingérable de la situation : moins de 48 heures après le décès du Raïs et la nomination de Mahmoud Abbas (connu aussi sous le nom de guerre de Abou Ammar) comme nouveau chef de l’OLP, ce dernier essuyait une tentative d’attentat qui s'est soldée par deux morts lors d’une cérémonie de condoléances à Gaza rassemblant des dirigeants palestiniens. Autre illustration, le premier discours du nouveau président de l’Autorité palestinienne, Rawhi Fattouh, était inaudible, faute d’expérience et la plupart des commentaires étaient "qui c’est et d’où il sort celui-là ?". Enfin et surtout, deux des principales branches militaires les plus influentes, le Hamas et le Djihad islamique, ont d’emblée annoncé qu’elles boycotteraient les élections du chef de l’Autorité palestinienne en janvier. Ces appareils militaires sont totalement éclatés comme en témoignent les luttes et rivalités impérialistes latentes entre le Hamas, le Hezbollah, le Djihad islamique, les Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa (même rebaptisées Brigades Yasser Arafat), le Fatah (soutenus par tel ou tel Etat) de même que les rivalités entre les dirigeants politiques Mahmoud Abbas, l’actuel Premier ministre de l’Autorité, Ahmed Qoreï, contrôlant les forces de sécurité, le plus "populaire" chef du Fatah en Cisjordanie, Marwan Barghouti, le chef du Fatah Farouk Kaddoumi ou encore l’ancien ministre de l’Intérieur Mohammed Dahlan.
Non seulement la situation est porteuse de sanglants règlements de compte pour la succession d’Arafat, mais elle ne peut qu’engendrer une recrudescence d’attentats suicides toujours plus meurtriers dans une population palestinienne réduite au désespoir et fanatisée par la haine et par une hystérie nationaliste dont elle est abreuvée depuis des années. Cette spirale de violence de plus en plus incontrôlable risque de mettre le feu aux poudres dans une partie encore plus large du Moyen-Orient.
Wim (18 novembre)Links
[1] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/59/irak
[2] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/56/moyen-orient
[3] https://fr.internationalism.org/en/tag/recent-et-cours/guerre-irak
[4] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/52/amerique-centrale-et-du-sud
[5] https://fr.internationalism.org/en/tag/questions-theoriques/imperialisme
[6] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/50/etats-unis
[7] https://fr.internationalism.org/en/tag/vie-du-cci/interventions
[8] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/38/allemagne
[9] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/35/europe
[10] https://fr.internationalism.org/en/tag/recent-et-cours/luttes-classe
[11] https://fr.internationalism.org/ri352/NCI_Argentine.htm#_ftn1
[12] https://fr.internationalism.org/ri352/NCI_Argentine.htm#_ftn2
[13] https://fr.internationalism.org/ri352/NCI_Argentine.htm#_ftnref1
[14] https://fr.internationalism.org/ri352/NCI_Argentine.htm#_ftnref2
[15] https://fr.internationalism.org/en/tag/vie-du-cci/defense-lorganisation
[16] https://fr.internationalism.org/en/tag/courants-politiques/influence-gauche-communiste
[17] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/58/palestine