A Continental comme ailleurs, le chantage à l'emploi continue

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Le 13 septembre, la direction française de Continental a appelé les 2500 ouvriers des usines de Boussens, Foix et Toulouse, ainsi que d’une petite unité commerciale de Rambouillet, à participer à un référendum sur son “plan de maintien de l’emploi”, dont l’objectif affiché est la réduction des coûts pour “le maintien de la compétitivité” des sites concernés à l’horizon 2012-2013.

L’organisation de ce scrutin faisait suite à plusieurs mois de propagande en vue de mettre en concurrence, au niveau international, les ouvriers des différents sites du groupe entre eux   ; et elle fut accompagnée de fortes pressions : “J’ai bien été obligé de voter, […] il y avait le chef qui me regardait, qui m’a obligé à le faire…” (1) Parmi les 83 % d’ouvriers ayant participé au scrutin, 52 % acceptèrent le plan de la direction. Malgré cela, les pressions exercées ne cessèrent pas, et dès le lendemain : “A six heures du matin, un “manager” est arrivé. Il nous a dit : “Vous avez compris  ? Ceux qui ont voté non, s’ils veulent, ils peuvent aller à la comptabilité ! Maintenant, il y a ceux qui veulent travailler et les autres !” (2).

Mais au fait, en quoi consiste ce si prometteur “plan de maintien de l’emploi” pour nécessiter le recours au chantage et à la menace  ? Pour les ouvriers, il signifie la perte de 1,4  % du salaire, la suppression de deux jours de RTT par an jusqu’en 2015, ainsi qu’une baisse de la prime d’intéressement. Pour la direction, la totalité de ces mesures signifie une économie d’environ 5000 euros par salarié   ; ceci représente une réduction de 8  % des coûts salariaux de l’entreprise (soit environ 13 millions d’euros), qui viennent s’ajouter aux 150 “départs volontaires” et aux 200 suppressions d’emplois d’intérimaires récemment survenus. En échange, Continental promet le maintien des effectifs pendant cinq ans sur les sites concernés.

Ce n’est pas la première fois que la bourgeoisie utilise la menace du licenciement massif pour pouvoir renforcer l’exploitation du prolétariat   ; ces dernières années fourmillent d’exemples similaires, avec à la clé une issue souvent funeste.

Ainsi, en juillet dernier, la General Motors Company, détenue à 60 % par l’Etat fédéral américain, proposait de reprendre l’activité sur le site de Strasbourg si les ouvriers acceptaient de “réduire de 10  % le coût de la main d’œuvre, sans réduction d’effectifs mais avec un gel des salaires sur deux ans et en renonçant à plus d’un tiers des 17 jours de RTT.” (3)

Au total, 1150 emplois étaient menacés à Strasbourg. S’ils regardent du côté de leurs homologues de Peugeot Motocycles, ils pourront garder espoir. En effet, menacés d’une délocalisation de deux usines à Taïwan, les 1050 employés avaient consenti, en avril 2008, notamment à travailler plus (35h contre 30 à 32 auparavant), à prendre des pauses non payées et à voir diminuer leurs jours de RTT. Cependant, les autres plans similaires recensés ces dernières années ont tenu un certain temps avant d’échouer. Le pire exemple est celui du groupe volailler Doux qui, en 2004, a appliqué la même équation. Quatre ans plus tard, en juillet 2008, l’entreprise a fermé trois sites en Bretagne et dans le Cher, entraînant la suppression de plus de 600 emplois. […] Toujours en 2004, Bosch menaçait de fermer son site de Vénissieux (Rhône) où 300 emplois étaient en jeu. Les salariés ont alors accepté de passer de 35 à 36 h et de renoncer à six jours de RTT sur vingt. Sauf que six ans plus tard, l’activité s’est considérablement réduite à Vénissieux et l’avenir du site est à nouveau compromis. “Si fin 2011 nous n’avons pas de nouveaux contrats, nous n’avons plus de travail”, avait indiqué à 20minutes.fr un employé de l’usine en mai dernier. En 2005, Hewlett-Packard est bénéficiaire, mais annonce des licenciements partout dans le monde, dont plus d’un millier pour la filiale française. Il a fallu un an pour que le plan social s’opère avec au bout du compte 250 emplois sauvés contre une renonciation à douze jours de RTT. Trois ans plus tard, des centaines de suppressions de postes sont annoncées. […] Enfin, chez Continental, seule la durée de travail avait augmenté fin 2007 pour pérenniser le site de Clairoix (Oise) mais, peine perdue, le groupe allemand a annoncé la fermeture du site deux ans plus tard et le licenciement de ses 1120 salariés. Pas vraiment de bonne augure pour leurs homologues de General Motors !» (4)

Face à ce chantage au chômage et à la misère, ce n’est pas en déposant l’un après l’autre leur bulletin dans l’urne, qu’elle soit patronale ou étatique, que les prolétaires pourront faire face à l’intensification de leur exploitation, mais par la lutte massive, solidaire et internationale de la classe ouvrière. Et la bourgeoisie, comme l’illustrent la propagande et les pressions exercées par Continental sur ses ouvriers, en a pleinement conscience.

DM (21 septembre)

 

1) www.ladepeche.fr/article/2010/09/15/907195-baisser-son-salaire-pour-garder-son-emploi.html

2) Idem.

3) www.20minutes.fr/article/585649/Economie-Les-salaries-de-General-Motors-...

4) www.20minutes.fr/article/585711/Economie-Travailler-plus-et-renoncer-a-s...

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