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Ceci est une déclaration de solidarité de la part des militants prolétariens des pays hispanophones, parce que la classe ouvrière est une classe internationale et une classe d’immigrés. Votre lutte est notre lutte, car ce n’est pas une lutte pour les retraites des ouvriers français, bien que cela ait été l’élément déclencheur de votre indignation, c’est une lutte de la classe ouvrière pour défendre nos conditions de vie et notre organisation en tant que classe.
Dans cet esprit de solidarité, nous autres, un groupe de camarades de différents pays du monde réuni suite à une réunion de contacts et de sympathisants du Courant Communiste International, voulons contribuer à donner une perspective à la lutte.
Quelles sont les tâches du moment ? Comment lutter aujourd’hui ?
Il est nécessaire de se battre en tant que classe ouvrière. C’est-à-dire, non pas en tant qu’individus ou secteurs isolés ou agglomérés dans des manifestations syndicales, mais en tant que classe, en tant que classe ouvrière exploitée, partageant les mêmes nécessités que les travailleurs du monde entier, quels que soient les secteurs, n’ayant pas d’intérêts particuliers par rapport aux autres travailleurs, en dépit des pièges que nous tend la bourgeoisie pour nous faire entrer en concurrence les uns avec les autres, ou lutter en tant que secteurs isolés qui auraient des intérêts particuliers.
Il est nécessaire de retrouver la continuité avec notre lutte historique. Notre classe a une histoire et une expérience. La perspective demeure la grève de masse (qui est apparue en 1905 comme la méthode moderne de lutte de notre classe) et les conseils ouvriers dont le prélude sont les assemblées générales ouvertes à tous les prolétaires. Des assemblées dans lesquelles nous discutons collectivement de nos besoins et de nos perspectives, à l’image de l’expérience récente des grèves anti-CPE (2006) et des Indignés (2011). (1) Des assemblées contrôlées par la classe ouvrière et animées par des principes de camaraderie, pas en suivant [les directives des organes bourgeois d’encadrement que sont les syndicats] (NdT), où tout le monde peut prendre la parole et s’exprimer en tant qu’ouvriers, avec des délégués révocables à tout moment afin de centraliser la lutte.
La grève de type syndical est un piège ! Vous n’êtes pas dans la rue grâce à eux. Ils n’ont pour fonction que de prendre la direction du mouvement pour mieux le contrôler et le diviser. L’organisation de type syndical n’est en aucun cas une méthode de lutte mais un facteur d’isolement et de démoralisation. (2)
Que font les médias étrangers de notre lutte commune en France ? Ils la réduisent au silence, la banalisent, ne montrent que la perspective syndicale et surtout la rendent impopulaire en mentionnant surtout les problèmes qu’elle cause. Mais les problèmes qu’elle cause ne sont pas à mettre sur le compte des travailleurs en lutte mais bien sur celui de la bourgeoisie qui fait tout pour éviter que les ouvriers puissent se coordonner ! Les travailleurs du monde entier partagent vos inquiétudes et votre indignation. Mais ils sont isolés et enfermés dans le cadre de la nation et de problèmes spécifiques. Quand elle ne se tait pas, la bourgeoisie nous assène que vous êtes des privilégiés qui se plaignent de tout ou vous assimilent aux “gilets jaunes”, afin qu’à l’étranger nous ne puissions faire la distinction. Vous devez nous demander ouvertement de l’aide. Prolétaires du monde entier, unissons-nous ! Là est la perspective. C’est une perspective difficile mais en même temps la seule voie, dont la dynamique même fait progresser la conscience de classe, tout en étant parsemée de défaites sur le plan le plus tangible, le plus matériel. C’est pourquoi, tout en prolongeant la lutte dans tous les sens du terme, nous devons, dans cette dynamique, créer les meilleures conditions pour faire face à la défaite qui se profile.
Nous pouvons soit battre en retraite consciemment, soit tomber dans les pièges et les provocations démoralisantes des syndicats et du gouvernement. Toutes les mobilisations ne sont pas positives, car elles peuvent aussi nous épuiser. La question de comment se battre nécessite une réponse sur le long terme, autrement dit ce n’est pas seulement “comment se battre maintenant, en ce moment même”, bien que cela soit très important comme nous avons essayé de l’expliquer plus haut. La perspective de la lutte d’aujourd’hui et de l’avenir doit être un tout cohérent et unifié. Nous devons savoir quand et comment battre en retraite et quoi faire dans notre retraite, pour garder à l’esprit la perspective et la continuité de la lutte afin que les futures luttes soient plus fortes.
Il est nécessaire que les camarades qui veulent continuer à prendre part à la lutte n’insistent pas pour la suivre à tout prix, alors qu’une défaite partielle est déjà en vue. Il existe une alternative à cette lutte “sans issue”, à cette impasse dans laquelle mènent les syndicats : c’est de se regrouper en comités de lutte qui en tireront les leçons, uniront les forces et prépareront ainsi les luttes futures.
Ce n’est pas une lutte limitée a la question des retraites, c’est une lutte avant tout pour défendre nos conditions de vie en tant que classe ouvrière et plus généralement, une lutte pour défendre la perspective de la révolution prolétarienne, la révolution communiste mondiale. Il est essentiel de trouver cette continuité avec l’expérience historique accumulée par la classe ouvrière à travers ses organisations révolutionnaires.
Adopté lors d’une réunion de contacts du CCI avec des camarades de France, d’Espagne, du Mexique, du Chili, de Colombie, du Costa Rica et du Brésil, le 13 janvier 2020.
1Voir respectivement : Les “Thèses sur le mouvement des étudiants du printemps 2006 en France”, Revue Internationale n° 125 (2e trimestre 2006) et “2011 : de la indignación a la esperanza”, (sur le site web du CCI, avril 2012). (NdR)
2Sur la nature et la fonction des syndicats, voir notre brochure : Les syndicats contre la classe ouvrière et l’article : “Apuntes sobre la cuestión sindical”, (sur le site web du CCI, 2011). (NdR)