Le frontisme honteux du PCI

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Une variante de la gangrène frontiste qui sévit aujourd'hui vient de nous être donnée par le Parti Communiste International, organisation qui se réclame de la continuité de la gauche italienne, celle-là même qui dans une des périodes les plus dures du mouvement ouvrier, dénonçait avec clarté le danger de semer des illusions par les politiques de front unique.

Le 19 novembre dernier, en effet, le PCI a signé un tract commun avec différentes organisations d'extrême-gauche, trotskystes et maoïstes, tract d'appel à la manifestation contre les mesures Stoléru qui ont frappé les travailleurs immigrés.

Dans un premier temps, le PCI s'est défendu d'avoir commis là un front unique politique, arguant qu'il ne s'agissait là que d'un accord pour appuyer des revendications immédiates des travailleurs, et donner toute son importance à la mise en avant de l'unité de la classe ouvrière. L'argument n'est guère convainquant. Qu'est ce qu'un front unique politique, en effet si ce n'est associer son organisation politique à d'autres sur la base d'une action, d'une revendication, d'un accord minimum, en étant par ailleurs en désaccord total avec le programme de ces autres organisations politiques? Si ce n'est, comme l'a fait le PCI, noyer dans la confusion la nécessité de clarifier les objectifs des luttes prolétariennes, en faisant miroiter une possibilité d'accord sur des bases minimales? Le PCI a-t-il oublié les leçons tirées par la gauche italienne sur la nécessité de mettre en avant, sous les luttes immédiates, la seule perspective que peuvent préparer ces luttes, celle de l'affrontement? Ou pense-t-il qu'il est possible de le faire en collaboration avec des organisations qui ont fait la preuve de leurs aspirations à la gestion du système bourgeois?

Il est vrai que le PCI considère l'extrême-gauche comme "centriste". On peut se demander ce qui l'arrêterait s'il avait l'occasion de signer un tract avec cet autre "opportunisme" qu'est le PC stalinien!

Il faut dire que, dans un deuxième temps, le PCI, peu fier de son aventure, a juré, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus. Reprenant la plume pour dénoncer l'extrême-gauche et le "rôle de sabotage qu'ils sont destinés à jouer de plus en plus activement auprès des travailleurs" ("Le Prolétaire" N°255), le PCI affirme : "cet épisode confirme A CONTRARIO le caractère néfaste du frontisme et des cartels hétérogènes d'organisations politiques". Le PCI découvre. Une si grande naïveté n'est pas permise d'un groupe qui se réclame d'une, filiation qui, elle, a tiré cette leçon depuis plus de 50 ans. D'autant que ce n'est pas le premier front que le PCI fait avec des organisations d'extrême-gauche sur d'autres objectifs partiels. Combien de fois réitérera-t-il l'expérience pour mieux faire l'étonné?

Par delà ces tentatives de justification, il faut réaffirmer que si ce qu'on dit est important, ce qu'on fait l'est encore plus. En cédant à la facilité, à la tentation d'une plus grande audience par ce genre de compromis, le PCI s'est engagé sur une pente savonneuse. On ne s'allie pas impunément avec des forces de la bourgeoisie. Le PCI a beau faire de l'équilibre entre les principes et la tactique, ce sont les principes qui seront de plus en plus touchés,et ces principes sont le seul rempart qui protège les organisations révolutionnaires de la force d'aspiration du gouffre de la domination bourgeoise.

DT


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