Soumis par Révolution Inte... le
Au moment du « passage en force » du gouvernement Macron pour imposer la réforme des retraites, ce dernier promettait cyniquement : « cent jours d’apaisement, d’unité, d’ambitions et d’actions au service de la France ». En guise d’apaisement, nous avons eu le meurtre de Nahel et les émeutes du début juillet, puis la répression policière. La poursuite de l’inflation et les attaques sur les conditions de vie et de travail ont plongé une plus grande partie de la population dans la pauvreté. Même les vendanges en Champagne sont devenues l’expression aiguë de l’esclavage salarié moderne, tuant carrément quatre saisonniers.
Avec la loi « Plein emploi », ce sont deux millions de bénéficiaires du maigre RSA qui devront « mériter » leur aumône et justifier pour cela d’un minimum de quinze heures d’activité hebdomadaire. En d’autres termes : ne pas accepter le chantage destiné à imposer les sales boulots et le travail précaire se payera immédiatement par la misère la plus absolue. Si l’État cherche à mieux encadrer les conditions d’attribution des allocations sociales et du chômage, c’est dans l’optique de l’aggravation sans précédent de la situation. Les entreprises licencient déjà par centaines dans de multiples secteurs : à Carrefour, Euronews, Michelin, BNP Paribas, etc. Et cela ne fait que commencer !
La précarité de la vie étudiante explose également. Il faut faire des choix au quotidien : se nourrir, se soigner, voire devoir coucher sous la tente ou sous des arches du périphérique parisien.
Avec cette dégradation brutale des conditions de vie ouvrières, même les organisations caritatives n’arrivent plus à suivre, à financer la logistique, les achats, les transports des denrées alimentaires. Les « restos du cœur », par exemple, à l’origine sensés répondre « dans l’urgence » à la précarité des plus démunis depuis 1985, n’arrivent plus à joindre les deux bouts aujourd’hui. Et pour cause ! De 8,5 millions de repas servis déjà en 1985/86, ce sont désormais 170 millions de repas qui sont distribués aux chômeurs, aux précaires, aux étudiants, aux retraités, à des familles monoparentales, à des travailleurs pauvres… La misère permanente est maintenant imposée à tous les exploités et le soutien caritatif « urgent » pendant près 40 ans n’apparaît que pour ce qu’il est : un emplâtre sur une jambe de bois.
Dans un contexte de crise, l’économie de guerre se développe très clairement. Nous en faisons déjà les frais avec le délabrement des secteurs de l’Éducation, de la santé, etc., pendant que le budget consacré aux dépenses militaires a vertigineusement augmenté de 46 % depuis 2017 !
La bourgeoisie en France comme ailleurs s’inquiète du climat social de ras le bol et de la maturation de la conscience qui s’opère en profondeur. Elle sait pertinemment que la classe ouvrière ne peut que réagir énergiquement face aux attaques, face à l’inflation, telle qu’elle le fait actuellement aux États-Unis dans un black-out médiatique quasi-total. C’est particulièrement vrai en France où la combativité ouvrière s’est révélée massivement au printemps dernier, avec le sentiment, même si cela reste encore très confus dans les rangs ouvriers, que la confiance dans notre force collective et notre unité offre la possibilité d’aller plus loin dans la lutte.
La bourgeoisie l’a très bien compris et tente de l’anticiper au mieux en organisant ses forces d’encadrement, idéologiques ou répressives, notamment par le biais des organisations syndicales. Face au besoin d’une réponse unitaire de la classe ouvrière, la planification d’une journée d’action intersyndicale le 13 octobre ne sera a priori qu’une journée d’action qui doit donner l’illusion que les syndicats envisagent toujours une mobilisation la plus large au service de la lutte.
Or les syndicats négocient avec le gouvernement la meilleure stratégie à tenir pour dévoyer la combativité et l’unité ouvrières, préparant et orientant les esprits vers la « Conférence sociale » du 16 octobre avec le gouvernement, comme la suite logique de la journée d’action. Cette Conférence, polarisant les esprits sur le terrain de la démocratie bourgeoise ne pourra avoir comme perspective que de mieux torpiller nos luttes. Dès aujourd’hui, les syndicats prennent les devants et sont omniprésents dans les multiples grèves locales ou sectorielles, comme à la SNCF, à Pôle Emploi, en les stérilisant dans le cadre de l’entreprise ou de revendications spécifiques…
Les forces politiques de l’extrême-gauche bourgeoise ne sont pas en reste : pour les organisations trotskistes ou anarchistes les plus radicales, comme Lutte Ouvrière ou Révolution Permanente, la critique des « bureaucraties syndicales » ne sert qu’à mieux faire passer la mystification d’un syndicalisme plus « authentique », à la « base ». Ce sont leurs contributions au dévoiement de l’unité ouvrière et au sabotage des réels moyens de la lutte.
Aujourd’hui, la maturation de la conscience en profondeur est encore à l’œuvre et ne demande qu’à surgir à la lumière. Où, quand, comment ?… Nul ne le sait précisément. Mais une chose est certaine, la bourgeoisie s’y prépare activement. Le prolétariat doit préparer les luttes de demain en tirant les leçons de ses combats du passé.
Stopio, 6 octobre 2023