Soumis par Revue Internationale le
1. INTRODUCTION
Personne ne peut nier que la situation actuelle de la lutte de classe est très différente de celle de 1977-78. A cette époque, surtout dans les pays européens, l'apathie et la désorientation régnaient parmi les ouvriers. Des nuages noirs s'amoncelaient à l'horizon : plans d'austérité, licenciements massifs, aggravation dangereuse des guerres impérialistes... Le capitalisme pouvait imposer tout cela sans susciter de riposte particulière de la part de la classe ouvrière. Il n'en est pas de même aujourd'hui : avec l'expérience du mouvement de lutte qui a démarré avec les grèves aux Etats-Unis et en Allemagne au début de 1978, et qui a culminé avec les formidables combats de Longwy et Denain en France au printemps 1979, c'est toute l'Europe qui a été touchée ; on peut affirmer que, face à la crise capitaliste et à sa marche funèbre vers l'holocauste se lève à nouveau le géant prolétarien pour transformer la crise actuelle en une crise révolutionnaire qui ouvre les portes à l'émancipation communiste de toute l'humanité.
Bien sûr, il existe encore beaucoup de doutes, d'hésitations, de méfiance dans les rangs prolétariens ; les ouvriers combatifs eux-mêmes ne sont pas toujours conscients dp l'ampleur et de la portée des luttes qu'ils ont vécues. Les prolétaires n'ont pas encore retrouvé l'enthousiasme et la détermination de la dernière vague révolutionnaire et on peut souvent constater une apathie apparente une certaine désorientation -ce qui est normal aux débuts d'une nouvelle vague révolutionnaire. Comme disait Rosa Luxembourg :
"L'inconscient précède le conscient et la logique du processus historique objectif précède la logique subjective de ses protagonistes"'. ("Marxisme contre Dictature")
Ce rapport, qui exprime la discussion qui a eu lieu dans notre IIIème Congrès International sur l'état actuel de la lutte de classe a un clair objectif pratique et militant : rendre conscients les prolétaires combatifs de la "logique du processus historique", c'est-à-dire, des conditions globales -économiques, politiques, sociales- des luttes vécues, de leur portée et de leurs perspectives. C'est seulement en possédant cette "logique du processus historique" ou, comme disait le "Manifeste Communiste" : "une claire vision des conditions, de la marche et des résultats généraux du mouvement prolétarien", que notre classe pourra renforcer sa confiance en elle-même, renforcer sa détermination et annihiler la puissance de la classe ennemie.
Cependant, il y a encore dans le mouvement révolutionnaire actuel trop d'aveugles qui ne veulent pas ou ne savent pas voir. Tel est le cas du F.O.R. (Ferment Ouvrier Révolutionnaire), P.CI. (Battaglia Comunista) ou PCI (Programa Comunista). Ces groupes s'obstinent à ne pas voir "le pain et le sel" des luttes ouvrières actuelles. Et ce n'est pas de maintenant : ces groupes méprisent les grands combats ouvriers qui ont secoué les cinq continents dans les années 60 et les considèrent comme des escarmouches sans importance.
Précisément, ce rapport nous sert a réaffirmer les axes essentiels qui caractérisent la période historique actuelle face à 1'évidente cécité de ces camarades :
1) Les luttes des années 60 (mai 68, Pologne, Italie) représentent la fin de la période de contre-révolution qu'a subie la classe ouvrière à partir des années 20, ouvrent la perspective d'une nouvelle période révolutionnaire.
2) Le reflux relatif qui a dominé le prolétariat européen à partir de l°73-74 est dû aux faiblesses qui caractérisent la vague des années 60 et à la contre-attaque de la bourgeoisie.
3) Ce reflux n'est en aucune façon une défaite et, par conséquent, il ne remet pas en question le cours révolutionnaire des années 60.
4) Les luttes qui, depuis l'automne 78, se sont succédées dans un grand nombre de pays, et principalement dans les métropoles capitalistes, annoncent la fin du calme précédent et la maturation d'une nouvelle offensive prolétarienne.
Programa Comunista et Battaqlia Comunista commencent à entrevoir quelque chose, tant bien que mal et avec des analyses à contresens, ils commencent à reconnaître l'importance des luttes, mais le FOR continue mordicus dans son aveuglement, dans son mépris olympien des luttes actuelles ; pour lui, ce qui s'est passé en Iran n'est qu'une simple manipulation des Ayatollah et les événements de Longwy et Denain sont complètement récupérés par les syndicats.
Le FOR révèle au grand jour la logique extrême et caricaturale de tous les groupes et militants révolutionnaires qui ne comprennent pas la dynamique les conditions et les caractéristiques de la lutte de classe, qui n'ont pas et n'essaient même pas <' de trouver une perspective concrète du cours historique actuel.
Ne pas voir les perspectives qui se dégagent des "pauvres" et "petites" grèves actuelles, c'est, camarades du FOR, nier "la logique du processus historique", c'est laisser les militants prolétariens au stade inconscient, c'est mettre des obstacles au pas nécessaire vers la conscience. Le FOR défend l'essentiel des positions de classe, mais, à l'heure de la vérité, à l'heure de comprendre la réalité, l'évolution de la lutte de classe, il ne les met pas en pratique. Parce que les positions de classe ne sont pas une bande magnétique qu'on répète comme un perroquet jusqu'à ce qu'elles entrent dans les têtes, parce qu'elles ne sont pas un beau sermon pour convertir les consciences, parce qu'elles ne sont pas un bourrage de crâne pour prosélytes mais sont avant tout et surtout un cadre global pour comprendre la lut-,te de classe, pour voir où on va et comment, par le biais de quel processus et de quelles perspectives ; elles sont 1'instrument pour comprendre la logique du processus historique et agir de façon active et consciente dans sa direction. Défendre de manière générale les positions de classe mais en même temps ne pas voir "le pain et le sel" des luttes actuelles et manquer de toute perspective concrète sur la période présente, comme le font le les camarades du FOR, c'est jeter par dessus bord le précieux trésor qu'elles contiennent pour comprendre la réalité de la lutte de classe et participer en son sein à une direction révolutionnaire, c'est les réduire à une pure idéologie.
Le texte présent, contenant nos conclusions sur :
- les conditions qui ont déterminé le reflux relatif de 1973-78 ;
- les conditions de l'évolution de la crise, de l'approfondissement de la crise politique de la bourgeoisie et de son rapport de force avec lé prolétariat, qui déterminent la fin de ce reflux ;
- le bilan et les perspectives concrètes des luttes vécues depuis novembre 1978, est un appel militant à tout le mouvement révolutionnaire actuel pour un effort pour se donner une compréhension globale du mouvement prolétarien des étapes qu'il a franchies et qu'il devra franchir et être à tout moment conscient d'où nous sommes et vers où nous allons dans le mouvement prolétarien actuel.
2 LE POURQUOI DU REFLUX
Depuis 1973-74, la grande vague de luttes des années 60 a presque disparu des pays du centre du capitalisme, pour laisser la place à un calme social. Pourquoi ce reflux ?
Dans le rapport sur la situation internationale qu'a élaboré notre organisation au début de 1978 (voir R.INT. n°13), il y a une explication générale de pourquoi le mouvement de la classe ouvrière n'a jamais suivi une ligne droite mais une suite de flux et de reflux. Sa caractéristique d'être en dents de scie, d'avancer par à-coups, s'aggrave dans la période de décadence du capitalisme, à cause :
- du totalitarisme étatique qui empêche, soit par la répression, soit par l'intégration -ou souvent la combinaison des deux- l'existence de toute organisation permanente de masse de la classe ouvrière ;
- de l'impossibilité d'obtenir des améliorations et des réformes durables, ce qui empêche toute lutte stable et structurée.
Il faut comprendre le reflux qui a suivi les luttes des années 60 dans le cadre des caractéristiques générales de la lutte prolétarienne, celles-ci étant le produit immédiat :
- des faiblesses de la vague de luttes des années 60,
- de la contre-offensive idéologique et politique de la bourgeoisie.
En ce qui concerne le premier point, on ne va pas faire ici un bilan complet de cette vague de lut tes; il a déjà été fait dans plusieurs textes de notre organisation (voir RI ancienne série, les textes d'AP : "Perspectives mondiales de la lutte de classe" n° 12 et 13 et "Sur l'était actuel de le lutte de classe" n° 18 ; et le texte de la R.INT "Mai 68", n° 14). Ici, nous nous bornerons à :
- rappeler schématiquement les faiblesses essentielles du mouvement des années 60 (illusions sur un économisme radical, rupture fréquente avec la forme syndicale mais pas avec le contenu, relatif isolement des luttes, manque de perspectives) ;
- voir les conditions générales qu'a trouvées cet te vague (niveau encore limité de la crise, rythme lent et inégal de celle-ci, expérience limitée du prolétariat qui part à zéro après cinquante ans d< contre-révolution) pour expliquer à la lumière de celles-ci les racines de ces faiblesses ;
- et, finalement, les comprendre comme partie intégrante de la première étape d'une nouvelle époque révolutionnaire, laquelle, logiquement, à côté d'un formidable potentiel révolutionnaire, traîne beaucoup d'immaturité et de points, faibles.
Il est important de comprendre -et nous abordons par là le second point- que la bourgeoisie a profité consciemment des limitations et des points faibles des luttes de 68 pour passer à une vaste contre-offensive politique et idéologique qui visait à freiner et à tenter de défaire la poussée prolétarienne,
C'est à partir des conditions générales où se trouvent les luttes que la bourgeoisie établit se mystifications et son offensive anti-ouvrière.
Les luttes de mai 68 s'inscrivent dans les premiers stades d'approfondissement de la crise capitaliste (récession de 66-67 et 70-71) qui ne permettent pas encore de deviner la profondeur de l'écroulement du capitalisme sénile et qui, y coït pris lors du mini-boom de 72 (de nombreux pays battirent les records de production d'après-guerre) sont pour ainsi dire le "chant du cygne" de la fameuse "prospérité'.'.
C'est ce contexte de :
- développement lent de la crise,
- rythme différent de ce développement selon les pays, régions et entreprises,
- une tendance générale aiguë au capitalisme d'Etat qui permet, dans un premier temps et pour éviter tout choc frontal avec les ouvriers, de dévie partiellement les effets de la crise vers des secteurs non-prolétariens ou des fractions faibles de celui-ci. Ceci a entravé le développement des lui tes, a constitué le bouillon de culture à la formation de toutes sortes d'illusions dans les rangs ouvriers et a permis la contre-offensive bourgeoise. En effet, le rythme lent de la crise a pour conséquence dans la conscience du prolétariat :
- la difficulté à comprendre la crise du capita1isme,
- les illusions sur les garanties légales, syndicales ou réformistes contre la dégradation des conditions de vie. L'autogestion et le-"pouvoir ouvrier" sont l'expression la plus radicale de c illusions,
- l'illusion selon laquelle, grâce à des pactes sociaux de négociation, la participation à l'administration de la société, on peut pallier à la situation et trouver une issue favorable aux travailleurs,
- une surestimation de la stabilité et de la cohérence du capitalisme. Idée entretenue selon la- quelle la classe dominante peut gouverner éternellement.
Le rythme inégal selon les entreprises, les régions ou les pays a facilité :
- l'illusion d'une solution nationale a la crise, entraînant l'idée de collaboration décelasse et de "sacrifice pour tous",
- la confiance dans des revendications d’entreprises, de secteurs ou de catégories, et la croyance dans des solutions d'entreprises, secteurs, régions...
Enfin, l'accentuation de la tendance au capitalisme d'Etat qui se renforce dès les premiers signes de la crise entretient diverses illusions :
- identifier capitalisme d'Etat et socialisme et présenter les interventions de l'Etat et les nationalisations comme autant de pas vers le socialisme,
- faire passer les mesures indirectes de concentration du capital et de répercussion de la crise sur les couches moyennes et les secteurs anachroniques comme la preuve du caractère "justicier , "social" et "progressiste" de l'Etat,
- donner aux principaux représentants de ces mesures -la gauche et son appareil syndical- une image "ouvrière", et "combative", en présentant les mythes d'un "gouvernement ouvrier" et de 1 union de la gauche" comme "une solution à la crise favorable aux travailleurs".
Cet ensemble de bases matérielles donnent le cadre général du renforcement politique et idéologique de la bourgeoisie gui lui permet de passer à la contre-offensive.
Les faits principaux de cette contre-attaque destinée â freiner les luttes et démobiliser les ouvriers sont :
1) la mystification démocratique qui se présente dans les moments d'agitation sociale à travers "la démocratie directe" et le "pouvoir populaire" et qui redeviennent, lorsque les luttes commencent à diminuer, la "démocratie classique" ;
2) la montée de la gauche au pouvoir présentée comme le "grand changement" pacifique, légal, quoique radical, qui doit solutionner tous les problèmes,
3) la solution nationale à la crise qui exige, au travers de pactes, plans de restructurations, etc. "la solidarité nationale des classes", ce qui justifie le sacrifice des ouvriers.
Facteur actif de ce réarmement idéologique et politique de la bourgeoisie, on a vu la réadaptation de ses appareils syndicaux et de gauche qui, à partir des années 60 (vers la fin des années 60) :
- se "démocratisent" et se "débureaucratisent",
- se "radicalisent" dans leur attitude et intègrent toute la "lutte moderne" : autogestion, "changer la vie",
- proposent de "nouveaux programmes de "changement social" qui associent lutte avec "légalité".
Les gauchistes furent précisément les anticorps sécrétés par la société bourgeoise, chargés dans un premier temps d'immobiliser les luttes et de crédibiliser cette "rénovation" des syndicats et des partis de gauche.
L'Etat bourgeois sclérosé par des années de calme social et trop préoccupé par tous les problèmes de la période de reconstruction dut subir une rapide réadaptation qui lui permit de renforcer son image "d'organe neutre" entre les classes, instrument démocratique pour la participation de tous les citoyens, bref, tout un arsenal qui devait permettre à la bourgeoisie de faire face au renouveau prolétarien.
On vérifie le processus de cette offensive idéologique et politique contre le prolétariat à travers plusieurs faits :
"Dans un grand nombre de pays, particulièrement là où la classe ouvrière a manifesté le plus de combativité est mise en place toute une mystification tendant à démontrer :
- que la lutte ne paie pas,
- qu'il faut un "changement pour faire face à la crise,
- suivant les pays, ce changement prend la forme :
. en Grande-Bretagne, de l'accession des travaillistes au pouvoir à la suite des grandes grèves de l'hiver 1972-73,
. en Italie, "du compromis historique", destiné avec la venue du PCI au gouvernement à "moraliser" la vie politique,
. en Espagne, de la "rupture démocratique" avec le régime franquiste,
. au Portugal, de la "démocratie" d'abord, du "pouvoir populaire" ensuite,
. en France, du "programme commun" et de l'union de la gauche" qui doivent mettre fin à 20 ans de politique de "grand capital". (R.INT. n° 13, "Rapport sur la situation mondiale").
Ce processus de réarmement permit dans un premier temps â l'Etat bourgeois d'isoler les luttes les plus dangereuses pour ensuite liquider l'agitation générale. L'étape suivante devait conduire les luttes dans des impasses, sur des faux terrains, et aboutir à la démoralisation des ouvriers. Ceci a permis aux syndicats de devancer et reprendre en main les luttes en avançant des "simulacres" de luttes pour finir de démobiliser les ouvriers.
A la confiance dans leur force s'est substituée la confiance dans toutes sortes d'actions légales, d'union interclassiste, de programme de gouvernement, etc.
Ceci s'est confirmé en France. Parvenue à dépasser le moment difficile de mai 68, la bourgeoisie a isolé les luttes les plus fortes -par exemple, la grève SNCF de 69- et a laissé pourrir les grèves radicales et isolées de 71 et 72, pour lancer, en 72, 73, 74 -via les syndicats- les fameux "nouveaux mai", moyen de conjuration pour empêcher qu'une telle situation ne se reproduise.
Depuis 75, on a vu une période de calme maximum, durant laquelle toute perspective fut ramenée au sinistre programme commun de la gauche. Les mystifications syndicales et démocratiques ont affaibli et épuisé momentanément le premier cycle de luttes ouvert dans les années 60. Le grave approfondissement de la crise en 74-75, premier signe clair du caractère décisif et mortel de 1'actuelle dépression économique a trompe complètement les ouvriers démobilisés en produisant une phénomène d'aggravation du reflux de la lutte de classe. "La forte aggravation de la crise à partir de 74 essentiellement marquée par l'explosion du chômage, n'a pas provoqué immédiatement une réponse de la classe. Au contraire, dans la mesure où elle a frappé celle-ci au moment du ressac de la vague précédente, elle a plutôt une tendance à engendrer momentanément un plus grand désarroi et une plus grande apathie". (R.INT. n°13, "Rapport sur la situation mondiale").
L'année 77 a marqué un moment des plus durs du prolétariat. Cette offensive capitaliste a eu d'importantes conséquences anti-ouvrières tant sur le terrain économique que sur le terrain répressif.
1)-Sur le terrain économique, si, jusqu'à 75-76, la bourgeoisie fut extrêmement prudente, lente et progressive dans son attaque économique contre la classe ouvrière, une fois celle-ci relativement démobilisée, la bourgeoisie est passée à une offensive brutale, surtout depuis 77 et 78. Aujourd'hui, on peut faire un bilan qui nous montre une chute significative de la situation de la classe ouvrière :
- les salaires qui, jusqu'à 74, avaient, non sans peine, rattrapé l'inflation, ont brutalement chuté et le phénomène d'une diminution absolue s'est généralisé ;
- le chômage a non seulement pris des proportions quantitativement monstrueuses, mais qualitativement, il touche de plus en plus les grandes concentrations de la production,;
- les cadences qui avaient augmenté d'une manière ininterrompue depuis les années 50 se sont subitement accélérées depuis 3 ans ;
- la journée de travail a augmenté de façon constante sous différentes formes : suppression de certaines fêtes, augmentation des horaires. Les revendications syndicales des "35 heures" sont une manœuvre tactique et temporaire qui n'entrave pas ce processus.;
- une diminution sensible des services de la Sécurité Sociale au niveau qualitatif et quantitatif (augmentation des versements, réduction des remboursements) ;
- les pensions de retraite sont diminuées ;
- les fameuses promesses à propos de l'enseignement gratuit, des logements sociaux, etc. ont disparu.
2) Sur le terrain répressif, la sinistre idéologie "anti-terroriste" déployée jusqu'au paroxysme par la bourgeoisie allemande à propos de la "bande à Baader", par la bourgeoisie italienne à propos du cas "Moro" et espagnole à propos de 1"'ETA", a servi pour :
- renforcer l'appareil de répression policier et juridique,
- créer un climat de terreur et d'insécurité.
Le premier a été destiné à prévenir les affrontements de classe inévitables en dotant l'Etat d'un arsenal gigantesque de répression physique et militaire.
Le deuxième cherchait la terreur et la paralysie au sein des ouvriers.
D'une manière générale, ce renforcement de l'Etat par le biais de 1'"anti-terrorisme" a servi à ce que :
"Avant même que la classe ouvrière, à l'exception d'une toute petite minorité, ait compris l'inéluctabilité de l'affrontement de classes violent avec la bourgeoisie, celle-ci a déjà mis en branle tout un dispo&itif pour y faire face". (Revue Internationale N°13. Page 5)
3-CONDITIONS DE LA REPRISE PROLETARIENNE
Les luttes en Allemagne et aux USA au début de 78, la courte mais néanmoins violente succession de luttes de mai-juin en France, le grand mouvement de classe en Iran, la grève des hôpitaux en Italie la lutte dans la sidérurgie en Allemagne, les grèves en Espagne depuis 79 et les grandes luttes de Longwy-Denain en France, la grève du téléphone au Portugal, tout cet ensemble de mouvements de classe peut-il être interprété comme une éprise effective de la lutte de classe ? Peut-on le voir comme un nouveau jalon dans l'époque révolutionnaire ouverte par les grèves de 68 ?
La prudence est nécessaire. On ne peut se lancer dans une évaluation prématurée. Mais il serait équivoque de se laisser paralyser dans l'indéfini et le possibilisme. Il est nécessaire de prendre position et dire avec clarté dans quel contexte s'inscrivent ces luttes et quelles perspectives elles ouvrent. Mieux vaut une position erronée que la sécurité de positions vagues, éclectiques et attentistes-.
La prise de position claire et décidée comporte des risques mais elle est obligatoire afin que les révolutionnaires accomplissent leurs tâches de facteur actif dans la lutte de classe.
La grande crainte qui peut nous assaillir est : ces mouvements de grève ne sont-ils pas les dernières flammes de la résistance prolétarienne ?
Ce serait du pessimisme que de s'incliner devant cette théorie. La faiblesse qu'ont manifesté ces luttes -leur difficulté très grande encore à s'étendre (sauf la Grande-Bretagne, l'Iran et la France), l'apparent contrôle syndical, le manque, en général, d'apparition de formes d'auto-organisation ... tout cela est utilisé par les pessimistes de tout bord pour nous dire "il n'y a pas de reprise, ce sont simplement les derniers soubresauts".
Pour répondre à cette question, il est nécessaire de rappeler clairement un point théorique général la direction que prend la lutte du prolétariat ne peut se mesurer à travers ses formes de combats e d'organisation en soi.
Le critère est erroné qui dit : pour leur extension, les grèves actuelles présentent des formes d'organisation et de combat d'un niveau plus bas que celles de 68 ; donc, nous assistons à un recul.
C'est certain qu'au niveau tant qualitatif que quantitatif, les grèves actuelles sont plus faibles que celles de 68, mais il est faux d'en conclure à un recul. L'expérience montre que, quand surgit une avalanche de luttes prolétariennes, elles mettent un certain temps à renouer avec les formes de combat, le contenu et l'organisation maximum des luttes antérieures.
Pour cela, le plus important à voir est le contexte général et social des luttes qui comprend l'évolution de la crise et l'évolution du rapport de forces entre les classes.
L'erreur des autonomes et autres courants qui considèrent les luttes ouvrières en elles-mêmes comme si elles étaient indépendantes de la réalité sociale, oublient que le prolétariat n'est pas dans le capitalisme un être en soi, mais que son action naît d'un ensemble de conditions engendrées par le mouvement général du capitalisme. Son autonomie de classe ne réside pas dans le fait qu'elle serait une classe indépendante des conditions imposées par le capitalisme, mais qu'à l'intérieur de celui-ci, elle s'oppose et se constitue en une force révolutionnaire pour le détruire.
C'est pour cela que nous ne pouvons répondre à la question que nous nous sommes posés dans ce chapitre.que de la façon suivante :
1) en considérant que le reflux de 1973-78 a été un reflux relatif qui n'a pas signifié une défaite décisive du prolétariat mais une phase de calme et de repli laissant présager de nouveaux assauts prolétariens ;
2) en analysant les conditions globales qu'affrontent les luttes (développement de la crise, impact des armes politiques et idéologiques de la bourgeoisie) ;
3) en dressant un bilan des luttes vécues depuis novembre 1978 dans toute l'Europe qui marquent de façon de plus en plus claire la reprise du prolétariat.
Nous allons développer ici le premier et le deuxième point, le troisième fera l'objet du prochain chapitre.
1) Dans AP n° 18, nous expliquions pourquoi le calme social ne pouvait être identifié à une défaite du mouvement :
"Que signifie ce repli? Marque-t-il une défaite définitive du prolétariat ? Y a-t-il changement du cours qui élimine tout espoir de révolution? Une analyse globale et mondiale de la lutte de classe nous permet d’affirmer que nous nous trouvons dans une phase de repli temporaire du prolétariat, mais non face à une défaite décisive qui mettrait fin à la perspective révolutionnaire ouverte dans les années 60 :
1) Le prolétariat n'a subi aucune défaite décisive dans aucun pays. Y compris les défaites partielles les plus importantes comme celles du Chili, de l'Argentine ou du Portugal n'ont pas écrasé les luttes qui devaient ré émerger avec force en 77, surtout en Argentine.
2) La bourgeoisie ne peut se lancer dans une attaque totale et définitive contre le prolétariat, en premier lieu parce que la crise économique n'a pas atteint le niveau extrême qui l'obligerait à imposer une économie de guerre basée sur une austérité draconienne. En second lieu parce que la bourgeoisie s’est davantage efforcée ces dernières années à préparer son attaque, plutôt qu'à la lancer de manière définitive. Pour cela, il n'a toujours pas été livré de bataille décisive entre bourgeoisie et prolétariat.
3) Malgré le reflux dans les pays du centre du capitalisme, la lutte prolétarienne s'est développée avec force dans les pays périphériques. Malgré leurs faiblesses, ces luttes sont d'une grande importance pour le prolétariat mondial :
- en démontrant que, dans les pays où l'exploitation a atteint des limites extrêmes, le prolétariat est loin de tout accepter et de se sacrifier ;
- en Algérie, au Maroc, Egypte ou Israël, les grèves ont momentanément freiné la guerre impérialiste ;
- enfin, elles ont contribué à la prise de conscience des bases objectives de l'unité mondiale de la classe ;
4) Même en Europe, malgré le contexte général de calme, de fortes luttes ont surgi "quoique isolées" et sporadiques, chacune est importante comme celles d'Espagne et de Pologne 76... Les grèves qui ont commencé en Allemagne et celles des USA (mineurs) ont également une valeur". (Accion Proletaria N°18)
Un des signes qui montre de manière concluante le caractère relatif du reflux prolétarien est le résultat limité et les faibles impacts qu'ont eu les forces de gauche au sein du prolétariat. Si 1 'on compare avec les années 30, on ne peut que constater des différences absidales. A cette époque, et de manière pratiquement majoritaire, la gauche et les syndicats sont parvenus à mobiliser l'enthousiasme et l'adhésion volontaire des ouvriers derrière la politique criminelle de l'an-ti-fascisme, le front populaire, la défense de la démocratie, etc.
Aujourd'hui, de tels cauchemars paraissent être exclus de l'histoire. La gauche et les syndicats se sont imposés non avec l'enthousiasme et l'adhésion consciente des prolétaires, mais par manque de perspectives et parce qu'ils n'ont rien d'autre en vue. Cela signifie deux choses :
a) une base très précaire pour le contrôle de la gauche et des syndicats sur le prolétariat,
b) que nous sommes loin d'une période de défaite du prolétariat qui est la base matérielle de l'atomisation et de la "débandade" dont la conséquence est l'adhésion désespérée au programme de la bourgeoisie.
D'une manière générale, on peut dire que la classe suit les propositions syndicales et de gauche sans grande confiance, sans trop se faire d'illusions et comme un moindre mal.
Ceci est positif à condition de se transformer ensuite en un progrès de la lutte et de la prise de conscience. A ce propos, on peut voir que le grand "lavage de cerveau" qu'ont constitué les élections en France en mars 78, loin d'avoir intimidé, a impulsé les explosions de luttes de mai-juin 78. Avec la prudence nécessaire, on peut dire que le grand mythe de l'union de la gauche et du programme commun est mort plus vite que prévu.
Parallèlement à ce qui précède, il faut noter que, dans une période de reflux, la lente maturation de la conscience de classe se poursuit. On n'a pas vu disparaître les noyaux ouvriers, les cercles de discussions, les groupes d'action; quoique dispersés et très confus, ils ont exprimé un effort de conscience du prolétariat. De la même manière, les relativement fréquentes "crises des militants à la base" de plusieurs groupes gauchistes et même des centrales syndicales ont révélé une tendance contradictoire mais réelle à 1'éloignement de fractions du prolétariat du contrôle idéologique de la bourgeoisie. Y compris dans certains groupes gauchistes s'est développée une crise idéologique à l'issue de laquelle de petites fractions sont sorties, avec plus ou moins de résultats pour tenter de rejoindre des positions révolutionnaires.
Enfin, les groupes révolutionnaires, expression la plus avancée de la conscience de classe, se sont développés, ont retrouvé leurs forces, ont fortifié leurs positions programmatiques et ont étendu le terrain et l'impact de leur intervention. Quoiqu'ils manifestent encore de grandes faiblesses et quoiqu'ils soient encore ultra-minoritaires, leur progression est un témoignage clair des progrès de la conscience de classe.
Comme Marx l'a dit, la conscience de classe est comme une taupe qui, lentement, dans le sous-sol de la société, ronge les fondements politiques et idéologiques de la bourgeoisie, on perçoit son souffle mais elle tarde à sortir en plein jour. Son existence n'en est pas moins indiscutable. Dans les périodes de calme social, il y a une sombre apparence de passivité, d'apathie, d'hésitation dans les rangs ouvriers. La bourgeoisie, classe basée sur l'échange, et, par conséquent, spectatrice et active par nature, donne une impression de domination, de contrôle de la société, ce qui ne correspond pas à la réalité. A la base, chez les exploités, les doutes, le manque de confiance et les intuitions sont toujours présents.
Des événements plus significatifs, des luttes ouvrières plus décidées et l'activité des révolutionnaires vont transformer ces entraves en certitudes, conclusions, programmes d'action. Tôt ou tard, l'édifice monolithique de l'ordre bourgeois vacillera sous une nouvelle avalanche de luttes prolétariennes.
Voilà un début de réponse à la première question que nous nous posions. Une conclusion se dessine : le reflux est momentané. Les embryons de lutte et de conscience qui lui ont répondu permettent de supposer sa disparition et un nouvel assaut prolétarien.
2) Répondons maintenant à la deuxième question.
Nous avons assisté depuis 1974-75 à une aggravation importante de la crise capitaliste. Les illusions de la soi-disant reprise de 75 ont donné lieu à une augmentation explosive du chômage et à une dégradation générale du niveau de vie des ouvriers, le chômage a atteint des branches clés de la production, la sidérurgie, les arsenaux, le textile, la métallurgie... et a entraîné les pays principaux Allemagne, France, USA. Il a cessé d'être réservé à des secteurs marginaux ou périphériques de la classe ouvrière -ce qui empêchait celle-ci de prendre conscience de sa gravité- pour attaquer les grandes concentrations du prolétariat, les centres vitaux de la classe.
Cette avance de la crise est un des facteurs fondamentaux de la lutte de classe. Elle ouvre les yeux à la nécessité de se défendre, et mine le fondement des promesses, programmes et solutions que nous assène continuellement la classe dominante
Mais, est-ce la crise, en elle-même, qui est la condition suffisante pour 1 'explosion de la lutte de classe ?
Non ! La crise détermine un ensemble de convulsions de tout l'ordre bourgeois et la révolte de la classe ouvrière, mais il est nécessaire de savoir à quel niveau est arrivée cette convulsion de l'ordre social et quel est le degré d'autonomie du prolétariat.
Une deuxième condition pour la lutte de classe est la crise politique de la classe dominante. Par principe général, la bourgeoisie n'est pas et ne sera jamais une classe avec des intérêts unitaires ; son intérêt d'ensemble -l'exploitation de l'ouvrier- engendre une lutte constante pour la répartition de la plus-value : la bourgeoisie est divisée en mille intérêts particuliers, déchirée par des heurts entre ses diverses fractions. La tendance générale vers le capitalisme d'Etat propre à la période décadente du système n'a pas unifié, ni homogénéisé la bourgeoisie, éliminé ses conflits internes, au contraire, elle les a amplifiés, elle leur a donné une caisse de résonance plus vaste avec des implications dans tous les domaines de l'activité sociale de l'Etat.
En réalité, les conflits internes, du capital pouvaient être atténués et limités pendant que le système était en expansion vers des aires non capitalistes, développant ses tendances innées vers la socialisation, et l'universalisation des marchandises. Mais, quand ce processus atteint les limites objectives -début du 20ème siècle, décadence- et quand les conflits internes de la bourgeoisie se multiplient et se radicalisent, le capitalisme d'Etat apparaît dans ce contexte comme une tentative désespérée pour les limiter, à travers une concentration nationale forcée du capital, qui, loin d'y arriver, même s'il y arrive momentanément- les amplifie, ou les retarde uniquement pour les aggraver.
Le développement accentué des conflits internes de la bourgeoisie s'exprime dans ses constantes crises politiques qui convulsionnent son appareil gouvernemental, ce qui signifie :
1) l'affaiblissement de la force et de la cohésion de l'Etat qui voit diminuer son autorité, surtout sur les exploités;
2) la désunion et la dispersion de la bourgeoisie, mettant en évidence les divisions et contradictions qui la désagrègent;
3) la viabilité et la cohérence des programmes et alternatives du gouvernement de la bourgeoisie restent enfermées dans des compromis et arrangements visant la conciliation de divergences de plus en plus insurmontables ;
4) l'impact des mystifications anti-prolétariennes est ébranlé à sa base par les intérêts en conflit, les manœuvres, les sales combines qui annulent leur crédibilité. La crise politique de la bourgeoisie, conséquence générale de la crise historique du capital, facilite le surgissement de la lutte de classe, étant donné qu'elle :
- démontre l'incapacité de la bourgeoisie de "gouverner comme avant",
- rompt la peur et la passivité des ouvriers,
- prouve la faiblesse et le manque d'autorité de la bourgeoisie, et anime, pour autant, la lutte contre elle.
La deuxième condition de la lutte de classe, la crise politique du capital, est un facteur nécessaire mais non suffisant, il manque la troisième condition : le propre développement préalable de la lutte prolétarienne, son rapport de force avec la bourgeoisie.
Si le prolétariat est préalablement défait et est complètement atomisé et aplati, ni le développement de la crise économique, ni la crise politique de la bourgeoisie ne peuvent aider à la lutte de classe ; au contraire, ils se convertissent en un moyen de dévoiement et d'annihilation de la lutte.
Un prolétariat écrasé et atomisé reçoit la crise économique comme un mobile de plus de démoralisation et de déroute. La crise se convertit en un facteur aggravant de sa dégradation et de sa désagrégation comme cela s'est passé pendant la crise de 29.
Par contre, un prolétariat en développement, qui n'a pas été défait, et dont les expériences sont récentes, reçoit la crise comme un élément d'indignation et de compréhension de la misère de l'ordre bourgeois, de détermination à la lutte. La crise se transforme en un facteur de mobilisation et de combat, comme cela s'est passé, jusqu'à un certain point, dans la crise révolutionnaire de 17. De la même façon, si le prolétariat se présente défait et atomisé, les crises politiques du capital, loin de réveiller sa conscience, sont utilisées par la classe dominante pour 1'encadrer et le mystifier par une des fractions du capital en conflit. Les années 30 ont vu comment le prolétariat était transformé en chair à canon dans les luttes internes de la bourgeoisie a travers les "fronts populaires", le "socialisme dans un seul pays" ou la "défense de la démocratie contre le fascisme". C'est précisément cet encadrement complet du prolétariat qui a permis la limitation des conflits entre les diverses fractions bourgeoises. Mais, au contraire, les tendances non écrasées du prolétariat vers son indépendance politique et son unité de classe qui peuvent être en recul, et pouvaient donner l'impression d'avoir disparu, s'accentuent devant la crise politique de la bourgeoisie, se transformant en un facteur de révolte et de désobéissance, d'absence de prestige de la classe dominante, d'animation de la lutte et de recherche des alternatives prolétariennes.
Nous disions que trois grandes mystifications ont réussi à immobiliser le prolétariat et à freiner son offensive de lutte dans les années 68. Ces mystifications sont :
- la gauche au pouvoir,
- la solution nationale à la crise,
- l'idéologie démocratique et anti-terroriste.
Aujourd'hui, nous pouvons voir que tous les aspects combinés de la crise, des convulsions politiques de la bourgeoisie et la non-défaite du prolétariat, font que le poids de ces mystifications va en se réduisant, et lentement apparaissent les conditions pour que le prolétariat s'en 1ibère.
Dans toute une série de pays, la solution "gouvernement de gauche", comme formule d'encadrement et de mystifications du prolétariat est, au moins, momentanément très usée. Nous ne doutons pas que. la bourgeoisie peut la revivifier sous de nouveaux habits, et dans les pays où il y avait peu d'expérience d'une telle solution (en Espagne par ex.) où ceux où la gauche réalise une ample "cure d'opposition" (au Portugal par ex.), elle peut encore être ressortie avec un certain succès. Mais ce qui est hors de doute, est que "l'union de la gauche" a perdu beaucoup de crédibilité à travers toute une série d'échecs :
- En France : l'échec du programme, commun a porté un très fort coup aux illusions sur 1'électoralisme, et sur son caractère "ouvrier" et "progressiste" qui se maintenait dans la classe. Nous ne croyons pas que, au moins immédiatement, la cure d'opposition du PCF sur des bases ultranationalistes puisse avoir une force de mobilisation.
- En Angleterre : deux gouvernements travaillistes en douze ans liés à de durs blocages de salaire et à des mesures anti-ouvrières de tous types, commencent à détériorer la confiance dans le travaillisme. La solution de rechange -la gauche travailliste- n'offre pas, au moins pour le moment, une perspective claire.
" En Allemagne : dix ans de social-démocratie ont déprécié, lentement mais effectivement, les alternatives de gauche ; ses mesures "anti-terroristes" ses attaques de la condition ouvrière et l'impact des luttes ouvrières de 1^78 et 79, sont allées en affaiblissant son influence sociale.
De façon globale, deux grands faits minent la crédibilité des alternatives de gauche vis-à-vis de la classe ouvrière :
a) le discrédit progressif des cirques électoraux,
b) les besoins qu'impose à la gauche la crise politique générale de la bourgeoisie.
Le parlement et les élections ont récupéré leur attraction de façon relative entre 72 et 78. Devant un développement non encore décisif de la crise, devant la nécessité d'alternatives globales et politiques, il y eut une certaine renaissance de la confiance dans 1'électoralisme chez les ouvriers. L'expression la plus claire de cela était le programme commun de la gauche française. Son écroulement rapide et son échec ultérieur sont précisément les signes d'un changement de tendance et du développement au sein de la classe ouvrière de la compréhension du caractère mystificateur et anti prolétarien du parlementarisme et de l'électoralisme. Nous pouvons voir une certaine confirmation encore non absolue, de cette tendance dans le développement des abstentions enregistrées dans les élections espagnoles.
Il y a un deuxième facteur qui a miné le prestige de la gauche dans les rangs ouvriers : c'est la politique qu'elle s'est vue obligée de mener devant le développement des conflits internes de la bourgeoisie, tant /au niveau mondial qu'à l'intérieur de chaque pays.
Au niveau mondial, l'alignement inévitable des pays centraux du capitalisme à l'intérieur du bloc occidental a privé les PC d'un puissant mobile de mystification de la classe ouvrière : le mythe de "pays socialistes" et son corollaire, le "socialisme dans un seul pays" qui a fait tant de mal à la classe ouvrière.
Le fameux "eurocommunisme" qui s'était cristallisé dans l'abandon de la "dictature du prolétariat", de "1’internationalisme prolétarien" et autres paravents idéologiques, s'est retrouvé, comme nous l'avons montré dans d1autres textes du CCI, par le fait que les PC sont les représentants les plus fidèles du capital national comme un tout, devant la nécessité -l'unique option possible à moyen terme étant, dans la majorité des pays du centre, le bloc américain- de prendre plus ou moins fortement leurs distances avec le bloc russe. Tout cela les a obligés à un changement de langage! Mais ce changement de langage avait des conséquences de plus en plus importantes en ce qui concerne l'encadrement du prolétariat, vu que les nouveaux thèmes qui remplacent les anciens manque de force combative et de contenu concret. "Socialisme dans la liberté", "consolidation et approfondissement de la démocratie", "union nationale" ont un poids mystificateur très inférieur à "socialisme dans un seul pays", "dictature du prolétariat" ou "internationalisme prolétarien", face à l'avance de la crise et au développement de la lutte de classe.
Au niveau des conflits internes de la bourgeoisie de chaque pays, les obligations de maintenir à tout prix la cohésion du capital national ont contrainte la gauche à faire des "concessions" aux secteurs plus retardés ou plus liés aux intérêts particuliers du capital national. Ces concessions ont impliqué dans la gauche un langage plus "conciliateur" et moins de "luttes de classe", et a débilité ses vieux slogans mystificateurs ("capitalisme d'Etat = socialisme", "droite = capitalisme") et a amené, de plus, la gauche à améliorer ses relations avec l'Eglise, l'armée, les "fascistes" et toutes sortes de fractions et institutions du capitalisme plus ouvertement contre-révolutionnaires. Tout cela prive la gauche de son langage "retentissant" et de "dénonciation", perdant lentement la cohérence et la solidité de ses vieux engrenages mystificateurs.
On commence à observer un changement, avant tout au niveau des positions qui lui permet de se donner un langage "ouvrier combatif", essentiellement destiné à encadrer et mobiliser idéologiquement le prolétariat. Cependant, il n'y a pas lieu d'exagérer les possibilités de succès de ce mouvement/ malgré l'énorme "enthousiasme" avec lequel le reçoivent les gauchistes. La gauche se voit déchirée entre :
- d'un côté, son poids, chaque fois plus important au sein du capital national, dû essentiellement au développement de la crise, et la tendance au capitalisme d'Etat, ce qui l'oblige à de plus grands compromis, directs ou non, avec le gouvernement du capital national qui, nécessairement, la pousse à une politique "modérée", "conciliatrice", "eurocommuniste" ou. de "solidarité nationale" ;
- mais, d'un autre côté, la nécessité d'encadrer et de mystifier le prolétariat les oblige à une cure d'opposition et à un langage combatif, tout cela dans le contexte général d'une très forte usure de tous ces vieux thèmes de mystifications des années 30.
Les équilibres et les virages auxquels se voient contraints les partis de gauche rendent de plus en plus difficile leur impact mystificateur dans la classe, et plus encore, si la lutte de classe tend à se développer.
Il est démontré que toute mystification ne se fait pas dans le vide, n'est pas comme une drogue qui s'administre à volonté ; au contraire, pour s'imposer dans la classe ouvrière, la mystification doit se fonder sur des nécessités et des problèmes réels auxquels elle donne une interprétation, une version, une alternative totalement idéaliste, dans le cadre du camp bourgeois. Ce sont précisément toutes les analyses faites précédemment qui nous permettent de voir que peu à peu vont s'écroulant les bases matérielles des mythes "gouvernements de gauche", "union des partis ouvriers" qui sont d'importantes colonnes de l'ordre bourgeois contre la classe ouvrière.
Le grand mythe de la possibilité d'une solution nationale à la crise a été l'arme la plus forte pour :
- empêcher la lutte indépendante du prolétariat,
- inculquer dans ses rangs la nécessité du sacrifice et de l'austérité.
La base matérielle d'une telle mystification, nous l'avons vue dans le chapitre antérieur : le rythme lent et inégal de la crise selon les pays. Cependant, ce rythme lent et inégal de la crise est en train de disparaître. L'importante accélération de 74/75 a cédé le pas à un effondrement pur et simple sans perspective visible de récupération alors même que se développent les conditions de nouvelle aggravation de la crise.
En premier lieu, ces accélérations et cet effondrement pur et simple effacent les illusions et les espoirs potentiels que beaucoup d'ouvriers peuvent avoir ; devant eux, l'horizon est toujours plus noir, et ils comprennent de plus en plus que l'unique perspective qu'offre le capitalisme est une réédition, en pire, des temps de la 2ème guerre mondiale et de 1'après-guerre de nos aines, à qui on avait justement dit que ces maux étaient la promesse d'une éternelle prospérité.
En deuxième lieu, les ouvriers des pays, régions ou entreprises les plus prospères voient tomber leur niveau de vie au même niveau, ou presque, que celui de leurs camarades moins fortunés. Nous avançons vers une égalisation de la misère des ouvriers de tous les pays, entreprises et régions. C'est une tendance qui s'affirme de plus en plus et qui enlève toute base réelle aux mystifications de solutions nationales, régionales, techniques, d'étatisation, etc. Au contraire, se développent les conditions générales pour l'unification et l'internationalisation des luttes.
L'internationalisation effective des luttes est un des faits les plus marquants de la vague de combativité ouvrière dans les pays du centre -vague encore faible et limitée- que nous analyserons dans le chapitre IV.
Troisième grand axe de l'offensive idéologique du capital contre le prolétariat, la mystification démocratique et anti-terroriste perd lentement de son impact anti-prolétarien. C'est en Allemagne, en 77, que se sont produits les moments les plus historiques de la campagne anti-terroriste du capital, et où celle-ci est passée de l'intoxication idéologique à la mobilisation politique concrète des ouvriers. Il y a eu des grèves en signal de deuil pour la mort du patron Schleyer. Les grèves devaient être réduites à des actions symboliques d'une à cinq minutes par les ouvriers; comme l'ont signalé nos camarades allemands, les ouvriers en ont profité pour bavarder ou fumer une cigarette. Quelques mois plus tard, se sont produites les grèves de janvier-avril 78 qui ont révélé que les "poisons" anti-terroristes avaient eu un impact bien moindre que ce qu'on attendait. En Italie, les moments les plus intenses de la campagne anti-terroriste ; se situent pendant la séquestration d'Aldo Moro en avril 78. Les camarades italiens ont signalé le même phénomène : passivité des ouvriers devant les appels à la grève et aux manifestations, développement de la conscience de classe, sous la forme de cercles ouvriers qui prennent leurs distances aussi bien vis-à-vis de l'idéologie anti-terroriste que du mythe "ouvrier combatif" = "ouvrier armé", etc. La grande grève des hôpitaux d'octobre 78 a justement été un signe prometteur de reprise prolétarienne en Italie. En Espagne, la gigantesque campagne anti-terroriste déployée par tout l'Etat bourgeois, racine des prouesses de l'ETA, a enregistré une retentissante banqueroute politique, annoncé la faillite du référendum constitutionnel et des élections législatives. Ainsi, la manifestation convoquée après une campagne hystérique par les CO, 1'UGT, etc. eut une faible participation, et il n'y eut pas moyen d'organiser des grèves, des assemblées... L'échec relatif, au moins momentanément, de l'idéologie démocratique et anti-terroriste n'est rien d'autre que le fruit de l'évidente décomposition de l'idéologie bourgeoise et, par suite, du caractère gangster et de racket que prennent tous les affrontements internes à la bourgeoisie. Les luttes intestines ne peuvent plus, ainsi, se présenter aussi facilement qu'avant sous les habits d'un grand idéal moral capable de mobiliser le prolétariat et l'ensemble de la population.
En ce qui concerne ce troisième point, l'emploi de nouvelles mystifications partielles aura une importance capitale comme nous venons de le voir, en combinant mystification et répression. Un des plus importants problèmes qu'affronte la bourgeoisie est la recrudescence du choc prolétariat-syndicats.
Après avoir récupéré l'initiative entre 1972-78, le bastion syndical de la bourgeoisie parait entrer de nouveau dans une période d'usure et d'affrontement violent avec les ouvriers. Les indices visibles dans la grève des hôpitaux en Italie, commencent à se retrouver, encore très partiellement et très faiblement en France, en Angleterre, en Espagne, etc. Les syndicats ont-ils des bases nouvelles pour s'affronter idéologiquement au prolétariat ?
Comme en général ses mères-partis, les syndicats réalisent des cures d'opposition dans un grand nombre de pays. De telles cures d'opposition leur permettent de récupérer leur image de marque "combative" et "ouvrière", laquelle va leur donner durant un certain temps une capacité pour prendre la tête des mouvements de grèves et les utiliser, avec plus ou moins de succès. Même s'ils ne peuvent rompre les mouvements les plus radicaux, ils tenteront, au moins, et par tous les moyens, de maintenir l'idée que les syndicats sont à la queue des luttes, mais qu'ils sont avec elles. Un mythe oui peut, prendre force est que syndicats et assemblées ou conseils ouvriers ne sont pas incompatibles.
Une autre tendance qui commence à se dégager est la distance qu'ils prennent par rapport aux partis et à la politique. Les courants du syndicalisme "révolutionnaire" et de 1'"anarcho-syndicalisme" peuvent reprendre une certaine splendeur, comme dernier effort de l'appareil syndical, pour récupérer son ancienne force. La renaissance de la CNT ou de la USI en Italie n'est nullement un mouvement vers des positions prolétariennes du syndicalisme, mais un replâtrage de l'édifice syndical du capital pour mieux affronter le prolétariat.
Finalement, les tendances vers un syndicat unique sont aujourd'hui un autre élément qui, bien que très usé, commencent à se présenter comme "garantie" d'un syndicalisme "efficace" et "combatif".
Aussi pouvons-nous dire que nous assistons non seulement à la déroute des mystifications bourgeoises qui ont coupé momentanément la renaissance prolétarienne de 1965-72, mais encore, à un niveau historique, que nous assistons à un début d'effondrement de tous les mythes de 50 années de contre-révolution ; nous ne pouvons pas dire que le poids de tant de campagnes de tromperies peut disparaître sans laisser de traces du jour au lendemain. Au contraire, leurs effets pernicieux vont se maintenir encore au sein du prolétariat. Les idéologies et les mystifications naissent de relations capitalistes de production, aussi, -provenant de ces dernières-, elles se convertissent en un facteur actif de conservation et de défense du régime de telle sorte qu'elles acquièrent un certain degré d'autonomie relative, laquelle leur permet de survivre durant un certain temps et à des niveaux déterminés, à l'ébranlement des conditions sociales qui les ont engendrées et les ont rendues possibles.
De là le poids de l'intense "lavage de cerveau" de ces dernières années d'offensive idéologique de la bourgeoisie et tous les reflets théoriques et idéologiques liés aux 50 années de contre-révolutions qui vont être encore très forts et mineront la base, la puissance de beaucoup de luttes ouvrières:
"Les hommes font leur propre histoire mais ils ne la font pas arbitrairement dans les conditions choisies par eux, mais dans les conditions directement données et héritées du passé. La tradition de toutes les générations mortes pèse d'un poids très lourd sur les cerveaux des vivants. Et même quand ils semblent occupés à se transformer, eux et les choses, à créer quelque-chose de tout-à-fait nouveau, c'est précisément à ces époques de crise révolutionnaire qu'ils évoquent craintivement les esprits du passé, qu'ils leur empruntent leurs noms, leurs mots d'ordre, leur contenu, pour apparaître sur la nouvelle scène de l'histoire sous ce déguisement respectable et avec ce langage emprunté". (Marx, "Le 18 Brumaire")
Les effets de ces "générations mortes" vont être considérables et vont peser très lourdement dans le renouvellement prolétarien, effets qui s'usent aujourd'hui très lentement :
- pendant un certain temps, le décalage entre la gravité de la crise et la force de la réponse prolétarienne continuera,
- il y aura encore un puissant décalage entre la force objective du 'mouvement et la conscience de cette force,
- le décalage plus grand que par le passé entre les dimensions et la force des organisations révolutionnaires et la maturation des conditions pour la révolution continuera également.
Mais nous ne devons pas perdre de vue que toutes les contre-tendances que nous venons de signaler n'annulent pas le cours général vers une nouvelle tentative de révolution prolétarienne mondiale ouverte dans les années 60. Plus encore, la reconnaissance consciente et globale de tous les dangers, risques et faiblesses, qu'affronte notre classe doit être la base matérielle pour les affronter et les éliminer.
Une autre conséquence à tirer du constat du poids des "générations mortes" est que, non seulement nous le souffrirons jusqu'au bout dans les tentatives du renouement prolétarien qui mûrit aujourd'hui mais surtout qu'il sera un facteur puissant et négatif dans une période d'insurrection et de révolution. Ce poids des "générations du passé" fondera la base matérielle de toutes les forces qui tenteront de dévier, diviser, miner et affaiblir la révolution prolétarienne. Ces forces constitueront la 5ême colonne du capital contre le prolétariat révolutionnaire.
De là, la chute lente que nous voyons aujourd'hui de l'idéologie et des mystifications bourgeoises, ne rend pas inutile et superflu sa dénonciation la plus intransigeante, patiente, tenace et détaillée ; aujourd'hui, comme hier, 1'arme de la critique continue d'être la préparation nécessaire pour la critique par les armes du criminel ordre capitaliste.
4-BILAN DES DERNIERES LUTTES
Avant de définir les perspectives qui ressortent de l'ensemble des conditions analysées, il serait nécessaire de faire un bilan des vagues prolétariennes d'Octobre-Novembre 1978 et de Janvier-Mars 1979 qui motivent sa considération comme indices d'un renouement général de la lutte de classe. Ce bilan ne peut-être que provisoire et limité étant donné qu'il nous manque un recul suffisant et que beaucoup de ces luttes ne sont pas encore terminées. Les leçons les plus importantes à tirer sont :
1) La première et principale : 1'internationalisation objective des luttes.
Grèves d'importance relative, bien sûr, mais dont certaines, comme celle d'Angleterre, ont secoué simultanément les pays centraux du capitalisme : Angleterre, France, Allemagne, Espagne, Italie, USA. D'autre part, la réémergence du prolétariat des pays centraux s'est vue accompagnée par la continuation des luttes dans des pays périphériques : Iran, Maroc, Mexique, Arabie Saoudite, Zaïre, Polynésie, Jamaïque... qui sont les exemples les plus récents. Cristallisant la reconnaissance de cette internationalisation par la classe, nous voyons comment en Belgique et au Luxembourg, eurent lieu des grèves de solidarité avec les sidérurgistes en Lorraine. Sans être la manifestation la plus adéquate de la solidarité internationale du prolétariat, elle en est pour le moins une tentative très importante. Il y a une leçon générale .de cette internationalisation : l'agitation internationaliste, la défense de l'internationalisme vont reposer chaque fois plus sur des expériences et des faits concrets relativement immédiats, cessant d'être des questions "théoriques" ou lointaines comme elles apparaissaient jusqu'à présent.
Nous disions dans le rapport sur la situation mondiale de Janvier 1978 qu'une des manifestations du prochain resurgissement prolétarien devrait être : "Une plus ample conscience du caractère international de la lutte qui pourrait se traduire dans la pratique par des mouvements de solidarité internationale, de l'envoi de délégations d'ouvriers en lutte d'un pays à un autre (et non des délégations syndicales)".(Revue Internationale N°13.) Jusqu'à un certain point et encore avec beaucoup de limites, cette tendance commence à se dessiner à l'horizon.
2) Reprise de l'affrontement ouvert prolétariat-syndicats
L'appareil syndical très fustigé par les coups de la première vague prolétarienne des années 60, a pu refaire son image de marque, profitant avec adresse des faiblesses de cette vague prolétarienne et restaurer un contrôle assez fort sur les ouvriers à partir de 1972.
Des dernières luttes, nous pouvons dire : petites mais pleines de promesses.
- des luttes extra-syndicales apparaissent.
- l'initiative autonome des ouvriers réapparaît sans attendre l'invitation syndicale.
- des chocs frontaux commencent à apparaître entre prolétariat et syndicats.
Ces trois tendances, évidemment liées entre elles, sont minoritaires dans l'ensemble des luttes, mais /par l'exemple qu'elles supposent, par la force ; qu'elles ont prises et par la dynamique qu'elles M paraissent ouvrir, leur poids qualitatif est très supérieur à leur faible poids numérique, La rupture et l'affrontement du prolétariat avec les syndicats vont être un processus très pénible et, jusqu'à un certain point et durant toute une période vont se convertir en l'axe central de la bataille de classe.
Nous disions que ce processus va être pénible parce que les syndicats sont, comme on le sait, le principal bastion de l'ordre bourgeois contre la classe ouvrière, et leurs armes de tromperie et contrôle tendent à être des plus raffinées, de telle sorte que les syndicats qu'affronte aujourd'hui la classe ouvrière ne sont pas les mêmes que ceux des années 50. Leur arsenal de mystifications et leur machinerie de contrôle sont de loin supérieurs et beaucoup plus rôdas. Pour cela, la rupture sera beaucoup plus difficile et pénible mais aussi beaucoup plus décisive parce qu'elle aura un caractère complètement politique et révolutionnaire sans les ambiguïtés et paliers du passé. Si dans les luttes des années 60, le potentiel politique de la rupture avec le syndicalisme a pu être camouflé et dévié par les mythes de la "dé bureaucratisation" ou de "l'unité syndicale", aujourd'hui ces mythes commencent à se rompre et il devient beaucoup plus difficile d'enrober le choc frontal de la classe. Si dans les luttes les plus radicales et avancées, la rupture totale, absolue et sans ambiguïtés entre les grévistes et les syndicats est vitale, il ne faut pas prendre seulement le fait formel de cette rupture comme thermomètre pour mesurer la force et la répercussion de chaque lutte concrète.
Dans la majorité des cas, la rupture tendra à se donner une corrélation des forces prolétariat-syndicats qui se cristallisant de diverses manières au niveau formel, représentera le devenir et les 1imites de la lutte. Dans le pire des cas, ce sera les organismes syndicaux qui s'imposeront, ce qui signifierait l'effondrement de toute perspective immédiate de la lutte; dans le meilleur des cas, ce sera le triomphe des Comités de grèves ouvriers, ce qui ouvrira une dynamique de la radicalisation de la lutte.
Les révolutionnaires devront se battre dès le début pour que la grève s'organise dans des Assemblées, pour qu’elles soient réellement souveraines et pour qu'il y ait aucune ambiguïté dans la rupture et l'affrontement avec les syndicats. Cela ne veut pas dire que la dimension, conséquences et perspectives d'une lutte ait à se mesurer exclusivement par la forme concrète dans laquelle elle a cristallisé à un moment donné la relation de force prolétariat-syndicats.
Le danger de la simple revendication des formes, sans se fonder suffisamment avec son lien, du contenu, peut donner une base à une nouvelle tromperie bourgeoise que nous pourrons apercevoir dans le futur :"création de Comités antisyndicaux" basés sur des "Assemblées" mais avec des fonctions identiques aux syndicats. En réalité, avec ces mythes, on essaiera non seulement de s'opposer aux luttes, mais encore et surtout, de limiter leur portée, de bloquer leur développement et de dévier leur contenu en posant des formes extra-syndicales en soi.
Dans le rapport sur la situation mondiale, nous avons vu une deuxième condition de la future reprise prolétarienne en:
"Un débordement des syndicats beaucoup plus clair que dans le passé et son corollaire: la tendance vers une plus ample auto-organisation de la classe ouvrière (Assemblées générales souveraines, instauration de Comités de grève élus et révocables, coordination de ceux-ci entre les entreprises de la même ville, région, etc...)".(Revue Internationale N°13.)Avec cela, nous avons commencé et il reste encore beaucoup de travail sur la planche et beaucoup de mystifications à affronter.
3) Toutes les luttes ont constitué un affrontement du prolétariat au plan d'austérité du capital,-base matérielle de leur internationalisme objectif.
Pour cela ces luttes sont un début prometteur de la résistance prolétarienne contre les tendances à l'austérité et à la guerre impérialiste que porte en lui le capitalisme et posent déjà les bases de la transformation de l'actuelle aggravation de la crise capitaliste en une crise révolutionnaire.
Il reste démontré une chose que les années de calme social ont quelque peu estompé, c'est que la lutte prolétarienne contre l'austérité est possible, qu'elle peut donner des fruits même s'ils sont temporaires et que le remède prolétarien à la crise n'est pas d'accepter des sacrifices ni de limiter les revendications pour "réduire le chômage" sinon la lutte de classe.
4) Certaines luttes vécues ces derniers temps ont posé le fait que le prolétariat est le candidat historique à l'émancipation de toute l'humanité.
L'Iran a démontré que la lutte prolétarienne donne un biais complètement distinct, incontrôlable à la révolte sans perspective des marginaux, paysans pauvres et petite bourgeoisie paupérisés. L'Iran a posé une possibilité, un potentiel qu'enferme le prolétariat, indépendamment du fait qu'en Iran, cela ne pouvait être complètement obtenu. Ce vieux principe du mouvement ouvrier -le prolétariat est l'unique classe capable de s'émanciper et émanciper toute l'humanité- prend une réalité et devient un problème concret maintenant. Après 50 ans de contre-révolution cette fameuse phrase de Lénine redevient réalité :
"La force du prolétariat dans un pays capitaliste est infiniment supérieure à sa valeur numérique dans la population'.' Et c'est ainsi, parce que le prolétariat occupe une position clé dans le cœur de l'économie capitaliste et aussi, parce qu'il exprime dans le domaine économique et politique, les intérêts réels de l'immense majorité de la population laborieuse sous la domination capitaliste. Durant la grève des hôpitaux en Italie, les travailleurs portaient une pancarte qui disait : "Nous n'allons pas contre les malades, nous allons contre les syndicats, le patronat et le gouvernement"(souligné par nous). Cette préoccupation du prolétariat de gagner ou faire valoir sa lutte auprès de l'ensemble des couches opprimées et non exploiteuses est un indice prometteur de la maturation générale de la conscience de la classe. C'est même plus que cela, c'est la prise de conscience d'un problème qui va se poser en se répétant dans le futur. La bourgeoisie est consciente que le mouvement du prolétariat peut, se convertir en un détonateur du mécontentement des diverses couches de la population; elle est consciente que l'intervention du prolétariat peut donner un caractère incontestable aux protestations des couches opprimées; elle est consciente en définitive, que le mécontentement des couche opprimées peut être gagné au bénéfice de la révolution par le prolétariat. Pour tout cela, un des axes essentiels de la bourgeoisie est, et sera de neutraliser ces couches marginales, les isoler, les séparer politiquement du prolétariat et, si c'est possible, les lancer contre lui.
En Angleterre, la bourgeoisie a monté une campagne hystérique autour des grèves des camionneurs et des services publics. Elle a. monté des manifestations de ménagères et a organisé des piquets de "citoyens" contre les piquets de grève des ouvriers, "but l'axe de la campagne a été de réveiller les sentiments petit-bourgeois, les paranoïas de ces couches pour les utiliser contre le prolétariat. Les erreurs qui se sont fait jour, parfois dans les groupes révolutionnaires, de voir ces couches uniquement comme des ennemies du prolétariat, doivent être éliminées. En soi, ces couches sont vacillantes, elles tendent à la décomposition et à la prolétarisation; en soi, ces couches n'ont pas de volonté propre. Si la bourgeoisie parvient à utiliser les caractères réactionnaires et le devenir de leurs conditions derrière des programmes loufoques, de capitalismes "non monopolistes" etc.. alors elles seront canalisées contre le prolétariat. Mais si le prolétariat, sans céder un pouce à des programmes au "bénéfice" de la petite bourgeoisie lutte de façon autonome en leur faisant voir concrètement l'absence d'alternative à leur situation sans devenir et vouée à la décomposition, alors, il pourra les gagner dans une lutte contre le capital.
Cette perspective n'enlève rien à l'autonomie de classe du prolétariat et c'est la solution concrète contre les mystifications que la bourgeoisie lancera très souvent dans le futur :
- le prolétariat ne doit pas dans sa lutte porter "préjudice" au peuple.
- le prolétariat doit lutter pour le triomphe du peuple en général.
- le mouvement du prolétariat et celui du "peuple" sont identiques.
Comprendre la nécessité pour le prolétariat de gagner à lui les couches marginales et opprimées ne signifie pas :
- rabaisser le programme maxima du prolétariat ou quelconque revendication immédiate et historique.
- appuyer les programmes illusoires et réactionnaires qui découlent de la position sociale de la petite bourgeoisie.
- dissoudre le prolétariat comme partie du "mouvement populaire".
5) La violence de classe et la lutte contre la répression.
Comme nous l'avons affirmé auparavant, la répression sera chaque fois plus ouverte, massive et systématique. Le problème de la lutte contre la répression et la violence de classe va se poser d'une façon aiguë. Sur ce point, et partant des expériences vivantes de ces derniers temps, on peut dégager des leçons très claires :
- la fameuse position du "terrorisme ouvrier" que certains camarades a l'intérieur du CCI, le PCI (Programa) et les gens de "1'Autonomia" en Italie, préconisaient comme un moyen efficace pour préparer les luttes ou pour réveiller la conscience ouvrière, s'est dissoute comme le sucre dans l'eau, devant les récentes expériences. En Iran, les grèves et les révoltes ont brisé la répression d'une des plus puissantes armées du monde, elles ont aggravé les convulsions internes et ont permis qu'une partie importante de son armement ultramoderne soit tombée en des "mains incontrôlées". En France, quelle était la meilleure défense des ouvriers d'une usine occupée devant le siège en règle de la police et des milices patronales ? C'était précisément la grande Manifestation des ouvriers des autres usines qui ont entouré les attaquants. Nos théoriciens du "terrorisme ouvrier" ont pu constater que leurs "groupes de combat" ne sont apparus d'aucun côté, et que la violence de classe, ce qu'ils appelaient "une originalité abstraite et mystificatrice" s'est manifestée d'une façon claire et concrète.
- contre les mystifications que sans aucun doute, la bourgeoisie d'opposition lancera, la meilleure défense contre la répression n'est et ne sera jamais les garanties légales et juridiques du "droit de grève" mais la lutte propre du prolétariat. Ce ne sera pas une police "démocratique", "nationale" et "fille du peuple" comme le clame aux quatre vents le PCF, mais les assauts ouvriers de masse contre les commissariats, pour arracher les détenus des griffes policières; ce ne sera pas un gouvernement de gauche qui sera "moins répressif" qu'un gouvernement de droite, mais le débordement dans la lutte de tous les carcans syndicaux légaux et de gauche.
6) Le prolétariat comme frein à la guerre impérialiste.
L'Iran a pu confirmer une tendance qui s'est manifestée encore faible et embryonnaire, dans le prolétariat international, à savoir : IL EST L'UNIQUE FORCE MONDIALE CAPABLE DE S'OPPOSER A LA GUERRE IMPERIALISTE. En Iran, un dispositif ultrasophistiqué et moderne d'armements est resté totalement désorganisé devant l'impact des affrontements de classe. On ne peut pas dire que ce dispositif abandonné par les USA soit passé au bloc russe, étant donné que ce dernier a pris garde, au moins pour le moment, de se mettre dans l'aventure de contrôler une 'ruche’. En Egypte et en Israël, un des facteurs qui les a poussés à rechercher une "paix" à tout prix, était les luttes prolétariennes dans les deux pays. Le contentieux Maroc-Algérie a marqué un temps d'arrêt non seulement par le tour qu'a pris les manœuvres inter-impérialistes, mais aussi' à cause des grèves dures qui ont eu lieu en Algérie en Mai-Juin 1978 et de l'actuelle vague au Maroc. Cuba n'a pas aujourd'hui les mains aussi libres pour faire le pion de l'impérialisme russe à cause des grèves et des convulsions sociales qui se sont produites en avril 1978. La grève dans les arsenaux français en juin 1978 a eu un impact direct sur l'industrie de guerre comme l'ont démontré postérieurement les grèves dans les chantiers navals anglais de sous-marins atomiques. Il reste à voir quelle sera la réponse des prolétaires de Russie, de Chine et du Vietnam contre les préparatifs de guerre. Mais le chemin de la résistance prolétarienne a commencé à se dessiner.
7) Perspectives et intervention des révolutionnaires
La perspective qui surgit est une nouvelle offensive du prolétariat mondial. Comme nous avons pu le voir tout au long de ce rapport, nous sommes en présence de quelques indices puissants mais nous ne pouvons perdre de vue que la perspective n'est pas immédiate, et que le chemin dans cette direction est hérissé de très sérieuses difficultés. Sans oublier la fragilité de cette nouvelle impulsion prolétarienne, nous devons mettre en évidence que cette perspective a des répercussions bien plus grandes que n'importe quelle vision immédiatiste pourrait donner à entendre. Nous sommes dans le début de la fin de l'époque de la contre-révolution. Toutes les conditions historiques qui avaient permis 50 ans de contre-révolution commencent à se défaire effectivement devant les impulsions de la crise capitaliste et la lente reprise des luttes ouvrières. Les combats des années 60 ont été des escarmouches qui avaient ouvert la première brèche dans le monolithe de la contre-révolution et préparèrent sa future dislocation. Ceci exige des révolutionnaires :
1) d'éviter les fausses querelles comme l'avait souligné le premier congrès du CCI et d'approfondir l'effort de discussion et de regroupement dans la perspective de concentrer et donner un cadre le plus unitaire possible aux énergies révolutionnaires qui mûrissent sans cesse dans la classe.
2) de renforcer le cadre programmatique à tous les niveaux et en conséquence, leur intervention.
3) de devenir un facteur actif et positif dans les luttes de classe, dépassant l'étape antérieure de réappropriation des positions de classe et la reconstruction programmatique et organique.
5- PERSPECTIVES
Les luttes que nous venons de mentionner prépareront, mûriront une nouvelle offensive du prolétariat mondial pour laquelle nous pouvons dresser les perspectives suivantes :
1) Généralisation internationale de la lutte prolétarienne
Nous voulons insister sur ce point que nous avons clairement dégagé dans le chapitre antérieur, mettant en évidence que, si le centre des luttes s'est déplacé de nouveau vers les grandes concentrations ouvrières d'Europe et des Etats-Unis, ceci ne veut pas dire qu'il y ait un repli de la lutte prolétarienne dans le Tiers-Monde, mais au contraire, un renforcement de celle-ci.
Le Brésil, importante concentration prolétarienne de la périphérie, a été bouleversé par les importantes grèves de mai 1978 et, surtout, de mars 79, où la grève générale par solidarité s'est imposée dans la région de Sao Paulo, avec des assemblées générales massives de 50.000 et 70.000 ouvriers contre la répression policière. En Iran, la grève des dockers de Korramanshar-Abadan ainsi que les mouvements de chômeurs démontrent que les tentatives de Khomeiny et sa clique n'ont pas réussi à mettre fin à la lutte prolétarienne. En Amérique du Sud, des grèves combatives ont eu lieu au Mexique, au Pérou, au Salvador, en Bolivie, en Argentine, en Colombie et en Jamaïque. En Afrique, le prolétariat marocain a mené une grande vague de grèves en dehors des syndicats et de l'Union Nationale de la bourgeoisie. Il faut également souligner les combats et révoltes ouvrières au Libéria, au Zaïre, dans l'Empire Centrafricain et en Ouganda avant et après la chute d'Amin Dada. En Asie, il faut souligner les grèves en Inde, la grande grève dans les champs pétroliers de Dehrram en Arabie Saoudite et les révoltes en Chine. Dans les pays de l'Est, malgré le rideau de fer qui bloque l'information, des nouvelles de grèves en RDA, en Pologne, en Roumanie, en Yougoslavie ont filtré l'année dernière.
La réponse simultanée du prolétariat dans les cinq continents est la meilleure condition pour l'affirmation de son unité internationale et la maturation de son alternative révolutionnaire.
2) Développement lent du mouvement de classe
On peut se sentir déçu à cause de la lenteur et la difficulté avec laquelle s'avance l'offensive prolétarienne. Mais cette lenteur n'est pas nécessairement un signe de faiblesse mais 1'évidence de la profondeur et de l'ampleur des affrontements de classe qui se préparent. On n'est plus, comme dans les luttes des années 60, face à un ennemi relativement surpris par le réveil subi du prolétariat après des années de contre-révolution mais face à un capitalisme armé jusqu'aux dents et qui met en place contre les luttes ouvrières toute sa machine idéologique, politique et répressive. Du côté prolétaire, les flambées spectaculaires mais courtes des années 60 ont ouvert le chemin -comme l'ont montré récemment les combats de Longwy et Denain-à un combat tenace où les constantes tentatives des syndicats, de la police et du gouvernement pour enterrer les luttes échouent les unes près les autres, en laissant la voie libre à une agitation intermittente et très difficile à décourager. Il est important que reste clair que la lenteur du mouvement de la classe ne favorise nullement une voie gradualiste ou de "petits pas". On assiste à une infatigable accumulation de luttes, à des ripostes coup-pour-coup, ce qui prépare les conditions à de grandes explosions prolétariennes sur des bases profondes et radicales.
3) La réponse capitaliste contre les luttes
Elle va s'accentuer de plus en plus sur l'axe de la répression. L'Italie reflète cela : arrestations massives de militants ouvriers antisyndicaux dans les usines organisées par toutes les forces du "compromis historique" : patrons, police, syndicats, Parti Communiste et Démocratie Chrétienne. En France, on a pu voir non seulement la répression brutale des luttes avec le déploiement des armées de CRS, mais également les procès contre les combattants ouvriers arrêtés lors de la Marche du 23 mars sur Paris ou après les combats de Longwy-Denain. Mais il ne faut pas oublier que la répression ira main dans la main avec un renforcement de la mystification représentée par la "cure d'opposition" que vont faire la gauche et les syndicats, ce qui tendra à leur redonner une nouvelle image de "combativité ouvrière" et "d'ouvriérisme" afin de mieux détruire les luttes ouvrières de l'intérieur, en essayant non pas de freiner ou de dévier le train prolétarien vers une voie morte, mais de le faire dérailler en pleine action. Cependant, il ne faut pas oublier les limites objectives de cette tendance, limites imposées par l'approfondissement des conflits internes de la bourgeoisie et par le rythme effréné de la crise, auxquels la gauche doit aussi faire face, ce qui rendra beaucoup plus difficile sa tâche de mystification. Dans le camp de la bourgeoisie, minée par ses contradictions qui, avec la montée de la crise, éclatent à tous les niveaux de la vie sociale, la tendance va être vers un dépouillement progressif des vêtements idéologiques de l'Etat, et à un durcissement de la répression qui sera soutenue par sa "cinquième colonne" dans le mouvement ouvrier : la gauche, les gauchistes et les syndicats.
4) L'affirmation de plus en plus cl aire de l'alternative prolétarienne contre la crise historique du capital :
Si 1979 a montré quelque chose, c'est bien le spectacle sans fards de la barbarie inexorable du capital : les centrales nucléaires, les réfugiés indochinois, le Skylab, les horribles massacres au Nicaragua, le spectacle "instructif" de la "révolution islamique" en Iran...Tout cela a mis en évidence l'irrémédiable décadence du système, l'effondrement dans des bains de sang de sa civilisation. Et face à cela, les cache-sexe que la bourgeoisie a utilisé pendant des années pour cacher sa barbarie et les utiliser politiquement contre le prolétariat, éclatent irréversiblement en mille morceaux : le "socialisme dans un seul pays", la "libération nationale", la "démocratie", les "droits de l'homme"... Dans cette atmosphère pourrie qui étouffe et empoisonne toute l'humanité, face à tous les déshérités de la terre, des paysans pauvres, des marginalisés, le prolétariat tend à s'affirmer comme la seule force révolutionnaire, comme la seule alternative de libération contre la barbarie du capital:
- parce que ses "modestes" et "humbles" luttes revendicatives, si méprisées par tous, y compris par beaucoup de groupes révolutionnaires, démontrent qu'il est possible de faire reculer le capital, qu'il est possible de riposter coup-pour-coup aux attaques du capital, et minent de façon définitive les lois aveugles du capital.
- parce que, avec ses luttes pratiques, avec ses formidables exemples de solidarité et de violence de classe, le prolétariat apparaît, dans les faits, comme la seule réponse à la répression, les guerres et tous les phénomènes concentrés dans la barbarie capitaliste qui affectent toute l'humanité.
CONCLUSION
Toutes les forces idéologiques et politiques de la bourgeoisie (mass-média, partis de gauche et de droite, syndicats...) nous matraquent le cerveau avec l'image du prolétariat comme une masse de citoyens amorphes et définitivement passifs. Mais la force de la crise, l'effort de conscience réveillée de nouveau à partir des luttes des années 60, la position même de notre classe au centre de toute la société, le poids de deux siècles de luttes prolétariennes héroïques, tout cela pousse les prolétaires à réagir contre ce tissu de passivité et d'impuissance et à ouvrir clairement la brèche vers la révolution mondiale.
Le chemin va être plus difficile que jamais; on va trouver des moments amers d'hésitation et de défaite momentanée, mais il faut le: parcourir, parce que c'est une question de vie ou de mort, parce que c'est la seule voie pour sortir du cauchemar capitaliste.
COMMUNISME OU BARBARIE ! PROLETAIRES, VOUS AVEZ L A PAROLE !