Face à la misère capitaliste, solidarité de tous les ouvriers

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La classe dominante et ses médias sont désormais contraints de reconnaître que "le pouvoir d'achat est devenu la première des préoccupations dans toutes les enquêtes d'opinion publique." Ça, c'est sûr ! Face à la hausse vertigineuse de tous les produits alimentaires de base, le gouvernement français a dû réviser ses chiffres officiels (de 2 % d'inflation avouée, on est passé à 4,9 % en un an) mais en réalité, c'est entre 20 et 50 % que les prix des principales denrées alimentaires ont augmenté en moins de 4 mois (pain, pâtes et céréales, produits laitiers, fruits, légumes, viande...). Acheter du poisson est devenu un luxe que la plupart des familles ouvrières ne peuvent plus se permettre.

 

La paupérisation croissante touche toute la classe ouvrière

Les soupes populaires (à commencer par les "Restos du Cœur") sont de plus en plus fréquentés par des salariés. Les prix des loyers, du gaz, des transports en commun, de l'essence ne cessent de grimper. Dans les villes, de plus en plus de familles de travailleurs sont réduites à s'entasser dans des taudis plus ou moins insalubres. Outre les fameuses cités de banlieue dont l'état ne cesse de se dégrader, à la périphérie, en lisière des aires d'autoroute ou en pleine forêt, des bidonvilles (que les pouvoirs publics avaient prétendu avoir éradiqués au début des années 1980), des abris de fortune ou de véritables "favelas" comme dans le "tiers-monde" sont en train de refleurir. Le problème du logement est devenu central aux Etats-Unis où chaque mois depuis l'été dernier, 200 000 personnes en moyenne sont jetées à la rue. Et cette déferlante gagne aujourd'hui l'Europe.

En France, les dispensaires et centres médicaux gratuits jusque-là réservés aux SDF ou aux "RMIstes" voient affluer chaque jour davantage de travailleurs qui sont incapables de payer les nouvelles franchises médicales appliquées depuis le début de l'année (en particulier la taxation de 50 centimes sur chaque boîte de médicaments). Et les retraités sont souvent les premiers à plonger dans cette misère accrue.

Plus de 6 millions de personnes vivent déjà officiellement en dessous du seuil de pauvreté et 40 % de la population a des revenus inférieurs au SMIC. La paupérisation des prolétaires s'est encore accrue avec la généralisation de la précarité de l'emploi (multiplication des temps partiels, des CDD, de l'intérim, des "stages de formation ou de recyclage") qui masque les vrais chiffres du chômage alors que les annonces de plans de licenciements, de suppressions d'emploi, de fermetures d'usine dans les grandes entreprises comme dans les PME ne cessent de tomber tous azimuts. Moins de la moitié des chômeurs officiellement décomptés sont indemnisés par l'Unedic. Pour les jeunes générations, c'est encore pire. Ceux, entre 18 et 25 ans, à la recherche d'un emploi ont rarement accès à l'assurance chômage et, sauf exception, ils sont exclus du RMI. Et cette réalité n'est ni "nationale" ni conjoncturelle. C'est le produit d'une aggravation de la crise mondiale.

Quel avenir nous réserve le capitalisme ?

Et en plus, qu'est-ce qu'on nous promet pour l'avenir ? L'attitude de la bourgeoisie française est édifiante. Au soir du second tour des élections municipales, le premier ministre Fillon avait le culot de déclarer que la défaite cuisante de son camp traduisait "l'impatience des Français à voir se mettre en place les réformes annoncées par Sarkozy lors de sa campagne présidentielle (...) La politique de la France, les électeurs l'ont majoritairement choisie à l'occasion des élections présidentielles et législative (...) et nous allons poursuivre cette politique."

Outre l'arrogant auto-aveuglement des dirigeants bourgeois, cela démontre clairement que les élections ne peuvent rien changer1. Au contraire, passées ses échéances électorales, la classe dominante peut donner libre cours au déchaînement de ses attaques.

La généralisation du passage de 40 à 41 ans de cotisations pour pouvoir bénéficier d'une retraite à taux plein déjà promise depuis la loi Fillon2 de 2004 dans la fonction publique est la prochaine étape d'une attaque qui nous réserve de passer bientôt à 65 ans pour l'âge légal du droit à la retraite, voire davantage comme en Allemagne (67 ans) ou en Grande-Bretagne (68 ans).

Le nouveau "contrat de travail" (contresigné le 11 janvier dernier par la majorité des syndicats) accouplé à la réforme du code du travail de fin 2007 assure une "flexibilité" et une précarité accrues dans le privé. Sous couvert de "séparation à l'amiable" entre employeur et salarié, il facilite le licenciement ; il allonge également considérablement la période d'essai, comme il assure la mise en place d'un nouveau CDD appelé "contrat de mission" pour les ingénieurs et les cadres. Il met l'accent sur "des devoirs renforcés" ouvrant la porte à l'acceptation de n'importe quel emploi. De plus, cet accord prépare la négociation de l'assurance chômage qui s'ouvre prochainement, annonçant une forte dégradation supplémentaire des droits des chômeurs indemnisés ainsi qu'une nouvelle augmentation des contrôles et des radiations, par ailleurs déjà accéléré par la récente fusion entre ANPE et l'UNEDIC.

Sous l'impact de l'aggravation de la crise, des plans de licenciements massifs s'apprêtent à toucher des secteurs comme l'automobile, les banques et les assurances. Et face à une concurrence internationale effrénée, les grands groupes ont de plus en plus recours à des licenciements pour embaucher à la place des intérimaires à des salaires nettement inférieurs comme chez Michelin, Bosch, Siemens.

Parallèlement, le gouvernement s'est déjà attelé à "dégraisser le mammouth" de la Fonction publique (selon l'expression de l'ancien ministre socialiste Allègre) : le budget prévoit 23 000 suppressions d'emploi chez les fonctionnaires (dont 11 200 dès le rentrée de septembre dans le seul secteur de l'Education nationale). Mais ce sera pire à partir de 2009 : ce sont 160 000 emplois en 4 ans qui doivent être supprimés dans les 3 fonctions publiques dont la moitié dans l'Education nationale (3).

Dans ce but, une grande "réforme de l'administration" est déjà à l'œuvre. Le gouvernement s'apprête à faire passer d'ici le mois de juin un projet de loi sur "la mobilité dans la fonction publique" qui vise en fait à légaliser le recours au licenciement dans toute la fonction publique : chaque fonctionnaire dont le poste est supprimé se verra proposer au maximum 3 postes de "reclassement fonctionnel ou géographique", en cas de 3 refus, il sera "mis en disponibilité ou en retraite d'office" et donc radié et licencié sans la moindre indemnité. L'administration propose en même temps une extension des temps partiels (y compris un transfert dans le privé) et le recours à des intérimaires sous-payés pour suppléer aux vacances d'emplois. Pour favoriser et accélérer cette "mobilité" et ces suppressions de poste, le gouvernement est en train de mettre en place la fusion de plusieurs corps d'Etat (centres des impôts et services de recouvrement notamment) en structure unique, le concours de recrutement de postes administratifs devenant inter-ministériel.

Vers un développement de la lutte de classe

La classe ouvrière est la première victime de l'aggravation de la crise économique mondiale. Le capitalisme en crise n'a pas d'autre moyen pour tenter de faire face à la concurrence sur le marché mondial que de baisser le coût de la rémunération de la force de travail : économie d'emplois et baisse des salaires ; mais la paupérisation et la précarité croissante qui touchent la classe ouvrière sont aussi le révélateur de la faillite irrémédiable du système capitaliste. Le capitalisme est de plus en plus incapable d'entretenir la force de travail de tous ceux qu'il exploite : l'incapacité d'intégrer une majorité de prolétaires à la production que révèlent le chômage massif et la précarité de l'emploi s'ajoute à l'incapacité de continuer à les nourrir, à les loger, à les soigner décemment.

Mais il ne faut pas "voir dans la misère que la misère". L'accélération actuelle de la crise économique et la vague de paupérisation qui l'accompagne se produisent alors que depuis quelques années maintenant, la classe ouvrière redresse progressivement sa tête et retrouve une combativité grandissante. Ces nouvelles attaques assénées par la bourgeoisie vont donc constituer un terreau fertile sur lequel vont se développer la lutte du prolétariat et son unité. D'ores et déjà, d'ailleurs, monte une colère dont témoignent en France aussi bien la seconde grève en 2 mois dans la grande distribution face à des salaires de misère que la mobilisation périodique d'enseignants exaspérés par les coups qui leur sont portés. Dans pratiquement tous les secteurs, une myriade de grèves ou de réactions ouvrières en ordre dispersé témoignent de l'ampleur du ras-le-bol. Les syndicats ne font que favoriser cet éparpillement des luttes qui les stérilise. Leur fonction d'encadrement repose entièrement sur leur capacité de diviser et d'isoler les luttes afin d'empêcher les prolétaires de prendre conscience de leur capacité collective à s'opposer à ces attaques.

A l'inverse, la lutte des ouvriers porte en elle une dynamique d'unité et de solidarité qui est non seulement le seul moyen de résister à des attaques qui touchent tous les ouvriers, dans tous les secteurs, mais qui débouche sur une perspective de remise en cause de l'impasse où les plonge le capitalisme. L'avenir appartient à la lutte de classe !

W (28 mars)

 

1) Ce récent cirque électoral a donné lieu à un écœurant et indécent étalage de magouilles et de tripatouillages en tous genres pour pouvoir aller à la soupe : multiplication de listes dissidentes dans les grands partis, un maire PC faisant des offres de services aux centristes du Modem pour conserver son poste, ce même Modem faisant la girouette s'alliant tantôt avec des listes de gauche ou des listes de droite tandis que les trotskistes de LO et ceux de la LCR se concurrençaient pour composer des listes communes avec le PS ; par ailleurs, la désillusion vis-à-vis des élections s'est traduite par une forte poussée de l'abstention dans l'électorat ouvrier et dans les quartiers dits "populaires" des grandes villes (souvent plus d'un électeur sur deux ne s'est pas déplacé pour aller voter).

2) Le même Fillon nous a abreuvé tout récemment de son fiel de politicard éprouvé en déclarant pour justifier l'allongement des retraites qu'il fallait "favoriser" l'emploi des "séniors", insistant sur le fait que la France était un des pays les plus en retard en la matière : "Ouvriers, au boulot, jusqu'à en crever !" Tel est le mot d'ordre de la bourgeoisie.

3) Ce qui signifie la suppression de nombreuses classes, en particulier dans le secondaire, une surcharge des effectifs par classe (plus de 35 élèves en moyenne). La suppression de la carte scolaire débouche sur une mise en concurrence des établissements qui va créer sur le même mode que les universités une "sélection" dès le plus jeune âge, quelques écoles réservées à l'élite et les autres.. En même temps, est prévu une suppression des crédits supplémentaires réservés aux établissements classés en "zone d'éducation prioritaire".

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