Guerre en Irak : l'enlisement des Etats-Unis dans le bourbier irakien

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Pour la population vivant en Irak, la vie quotidienne est devenue insupportable. Chaque jour apporte son lot nouveau d’attentats, de destructions et de morts. La soif de destruction ne semble plus avoir de limites. Le jeudi 23 novembre, Bagdad a connu son attentat le plus meurtrier, et de loin, depuis 2003 et le déclenchement de la guerre. La cible principale était Sadr City, l’immense quartier populaire chiite de la capitale irakienne. Voitures en flammes, cadavres calcinés, échoppes ravagées, tout le quartier offrait un air de désolation. Cet attentat, dans lequel au moins quatre véhicules bourrés d’explosifs ont été détruits, aurait fait plus de 152 morts et 236 blessés. Au même moment, une centaine d’hommes armés attaquaient le ministère de la santé, contrôlé par Ali al Chémari, partisan de Moqtada Sadr, l’imam radical chiite et chef d’une milice puissamment armée. L’Irak est en plein chaos. La guerre fait rage entre Chiites et Sunnites. Le gouvernement ne contrôle plus rien. Quant à l’armée américaine, elle est stationnée dans des camps retranchés, dont elle ne sort plus que pour mener des opérations coup de poing, qui se soldent à chaque fois par des morts supplémentaires, dans la population civile et au sein de l’armée elle-même. Pour les Etats-Unis, cette guerre est un échec cuisant. Rien ne semble pouvoir empêcher l’enlisement définitif des Etats-Unis dans ce bourbier Irakien.

Il n’ y a pas d’alternative à la politique impérialiste actuelle des Etats-Unis.

Les élections qui viennent de se dérouler dans ce pays ont donné pour la première fois depuis douze ans le contrôle des deux chambres du Congrès américain au parti démocrate. Il faut remonter à 1974 pour voir ce dernier gagner autant de sièges en une seule élection. Le président Bush lui-même a parlé d’une "raclée" infligée à son parti. Mais toute la presse bourgeoise américaine est unanime, ce rejet de Bush et du parti conservateur est avant tout : "une réaction à la guerre en Irak…" (Washington Post cité par Le Monde du 9 novembre 2006) La guerre en Irak et en Afghanistan est en train de devenir plus onéreuse que la tristement célèbre guerre du Vietnam. Depuis 2001, 502 milliards de dollars ont déjà été dépensés pour la "guerre contre le terrorisme." Sans cesse, la population américaine apprend que de tout jeunes soldats y perdent presque chaque jour leur vie. Et tout cela pourquoi ? En Irak tout le monde sait maintenant que la paix ou la stabilité sont devenues des mirages. Quant au terrorisme, il ne cesse de s’y développer. Avec cette guerre, l’affaiblissement accéléré de la première puissance mondiale s’étale au grand jour. La très grande majorité de la bourgeoisie américaine, y compris au sein du parti conservateur de George Bush, cherche à tout prix les moyens de se sortir de cette impasse. Déjà, depuis quelques mois, la bourgeoisie américaine avait tenté de réagir. Elle a créé à cet effet une commission formée de personnalités républicaines et démocrates, intitulée : "Groupe d’étude sur l’Irak". Ce groupe, co-présidé par James Baker, vieux routier de la politique internationale des Etats–Unis, réfléchissait sur les moyens de sortir le pays de cette crise. Cette éminence grise de la bourgeoisie américaine a sans contestation aucune pris de plus en plus de poids auprès de George Bush au détriment de ses conseillers habituels. Robert Gates, ami de James Baker et membre du même groupe de travail sur la question irakienne a été nommé à la place de Donald Rumsfeld, au sein de l’administration Bush. En public, James Baker a dévoilé les différentes options qui sont actuellement discutées au sein de son groupe d’étude et de l’administration américaine. Il aurait été envisagé de découper l’Irak en trois régions autonomes. Cette option surréaliste proposée par le démocrate Joe Biden, conduirait tout droit à une guerre civile permanente, totale et incontrôlable, qui serait un facteur de premier ordre pour accélérer la déstabilisation de l’ensemble de la région. La deuxième option proposée par Lawrence Korb, du "Tink tank Center for Americain Progress", consisterait à déplacer les troupes américaines vers des pays voisins, d’où ils ne se rendraient plus en Irak que pour des actions coups de poing. Cette option, en plus de la généralisation totale du chaos en Irak, se traduirait inévitablement par une accélération du discrédit du leadership des Etats-Unis dans le monde. Un tel camouflet pour une première puissance mondiale déjà mal en point, serait tout à fait insupportable. L’impasse des Etats-Unis en Irak est telle que cette même commission, par l’entremise de James Baker, affirme en accord avec une grande partie de la classe politique américaine sa volonté d’ouvrir le dialogue avec la Syrie et l’Iran. Il propose tout simplement que la diplomatie américaine s’oriente vers de nouvelles négociations régionales. Au moment-même où la Syrie et l’Iran affichent toujours plus fortement leurs propres appétits impérialistes en défiant ouvertement les Etats-Unis, cette nouvelle orientation diplomatique se révèle au niveau international comme un véritable aveu d’impuissance.

Républicains ou démocrates au pouvoir :
la politique impérialiste des Etats-Unis restera dans l’impasse

Les résultats des élections aux Etats-Unis ont été salués avec enthousiasme par la presque totalité de la classe politique américaine, démocrates et républicains confondus. Tout au long de la campagne électorale, les démocrates n’ont cessé de critiquer la politique extérieure de l’administration Bush, répétant qu’il faudrait une nouvelle orientation de la politique en Irak, sans pour cela pouvoir préciser celle qui avait leur approbation. En réalité, les Etats-Unis ne peuvent pas quitter l’Irak sous peine de perdre toute crédibilité internationale. La bourgeoisie américaine ne se fait d’ailleurs plus aucune illusion sur ce sujet : "Ce n’est pas tant que les Etats-Unis et le Royaume-Uni ne disposent plus d’options sur le terrain. L’ennui, c’est qu’aucune n’est bien reluisante." (The Observer cité par Courrier International le 16 novembre 2006). Quelle que soit la politique suivie dans les mois à venir, l’affaiblissement des Etats-Unis va continuer de s’étaler au grand jour, favorisant la montée des appétits impérialistes de toutes les autres puissances et la fuite en avant dans le chaos.

Rossi (26 novembre)


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