La guerre en Irak est finie, pas les rivalités entre grandes puissances ! Pas les massacres !

Afficher une version adaptée à l'édition sur imprimante

Les partisans de la guerre nous avaient raconté que l'Irak de Saddam Hussein détenait un stock d'armes de destruction massive et en particulier des armes chimiques qu'il fallait trouver et détruire pour sauver la "paix du monde".

 

Le cynisme et les mensonges de toutes les grandes puissances

Intox ! Mensonges ! Ce qui est vrai, c'est que le sol irakien se retrouve maintenant jonché et infesté de ces fameuses armes de destruction massive par les tenants de cette propagande, notamment les bombes à fragmentation, largement utilisées au cours des 20 000 raids aériens des forces américano-britanniques qui ont largué à jets quasi-continus pendant 21 jours d'affilée 33 000 bombes (sans compter des dizaines de missiles Tomahawk et des dizaines de milliers d'autres obus déversés dans les combats terrestres). Celles qui sont tombées sans éclater menacent encore pour des années à tout moment la vie des populations. Ils avaient également promis "la liberté pour le peuple irakien", débarrassé du joug de l'odieux dictateur Saddam Hussein.
Intox ! Mensonges encore ! Certes aujourd'hui, ils sont parvenus à renverser l'affreux tyran sanguinaire mais la "libération" du pays se traduit par de véritables troupes d'occupation qui se sont empressées de réinstaller les anciens responsables des forces de police et de répression de l'ancien régime pour rétablir l'ordre. De l'autre côté, la seule "libération" effective, c'est celle des appétits et des rivalités de tous les nouveaux prétendants au pouvoir en Irak, factions rivales au sein de chaque communauté, chefs de tribus ou chefs religieux, leaders d'opposition ramenés dans les valises des Etats-Unis, tous cherchant à imposer leur autorité, qui sur une ville, qui sur une région, avec le soutien de tel ou tel Etat voisin, ou de telle ou telle grande puissance. Pour la population, cela ne peut lui apporter qu'un avenir fait d'insécurité, d'instabilité, de chaos et de nouveaux massacres. C'est une véritable boîte de Pandore qui s'est ouverte pour ce pays avec les futurs affrontements politiques, interethniques, religieux qui se dessinent déjà aujourd'hui, au lendemain de la guerre.
Ainsi, aucun de ces deux si nobles principaux objectifs proclamés en faveur de cette guerre n'a été réalisé, pas même sur le plan de la croisade anti-terroriste (à part la capture d'un terroriste palestinien retiré de toute activité depuis des années) puisque les preuves du lien entre le pouvoir irakien et Al Qaïda que la coalition anglo-américaine prétendait aussi détenir étaient des faux fabriqués de toutes pièces. Il est clair que ces arguments étaient en réalité de vulgaires prétextes idéologiques, des moyens de propagande auprès des populations pour déclencher une guerre dont le seul résultat aura été d'ajouter de nouvelles nombreuses victimes à la longue liste des massacres de population perpétrées par le capitalisme et une nouvelle manifestation édifiante du déchaînement d'horreurs et de barbarie par ce système.
Mais le même cynisme et la même hypocrisie se retrouvent étalés au sein des principales puissances qui ont animé un front anti-guerre. Dès que l'issue rapide de la guerre n'a plus fait aucun doute, les grands principes et les idéaux dont ils se réclamaient ont été aussi prestement abandonnés, en particulier le fameux "respect du droit international" devant "permettre de préserver la paix". Celui qu'on a fait passer pour le chef de file mondial de la cause anti-guerre, Chirac, déclarait "il faut savoir être pragmatique" en se félicitant publiquement de la chute de Saddam. La France prouve qu'il ne s'agissait que d'un sordide prétexte idéologique quand elle prétendait vouloir agir dans le strict respect du cadre des résolutions de l'ONU et des missions de ses inspecteurs. C'était en fait pour pouvoir prendre la tête d'une campagne dirigée directement contre les Etats-Unis. Le véritable objectif de ce vernis anti-guerre, c'était de pouvoir affirmer ses propres ambitions impérialistes en cherchant à contrecarrer la domination de l'impérialisme américain sur la région.
La surenchère à laquelle on assiste aujourd'hui, dans laquelle chaque grande puissance démocratique fait assaut de "projets humanitaires" rivaux, est le vecteur d'un âpre combat où l'enjeu réel pour chacun est de maintenir et de justifier sa présence impérialiste dans la région. Le même Chirac a poussé cette écoeurante démagogie jusqu'à proposer la construction d'un pont aérien pour sauver les enfants irakiens victimes de la guerre alors qu'en Irak, il n'existe même plus d'infrastructure pour rétablir l'eau et de voie praticable pour acheminer les ressources vitales élémentaires. Ce n'est pas nouveau. Mitterrand était le premier à proposer au milieu des années 1990 une aide humanitaire à la Bosnie alors que la France venait de se faire sur le terrain la complice des massacres des populations bosniaques à Srebrenica. D'ailleurs, si la fonction idéologique de l'humanitaire fait de moins en moins illusion pour voiler les pires massacres et aventures guerrières ou pour réparer les crimes les plus odieux que les grandes puissances ont elles-mêmes commis, les missions humanitaires sont devenues, comme en Bosnie pour les Etats-Unis ou en Somalie pour la France, des moyens indispensables pour assurer une présence impérialiste et font partie intégrante de la machine de guerre des grandes puissances.
Dans le même registre du cynisme, les puissances européennes ont du mal à masquer leur dépit devant le fait que les troupes américaines n'aient pas rencontré davantage de difficultés en Irak car elles avaient misé sur une guerre plus longue et meurtrière, sur davantage de résistance dans les populations ou l'armée de Saddam, sur un exode massif des populations et un grand nombre de réfugiés, espérant ainsi que les méthodes et le manque d'efficacité des Etats-Unis seraient discrédités.

 

Quel bilan de la guerre en Irak ?

Ce fut pourtant un enfer et un nouveau témoignage accablant de la barbarie du capitalisme. D'innombrables images de tanks calcinés et de ruines fumantes ont souligné l'ampleur de la désinformation dans chacun des deux camps pour minimiser les pertes en vies humaines. Un officier a pourtant parlé de "carnage" dans les rangs de l'armée irakienne tandis que les ONG n'ont évoqué qu'un nombre manifestement sous-évalué de victimes civiles.
Pendant trois semaines, des images terrifiantes se sont succédées, des énormes cratères creusés en pleines zones d'habitation, des hôpitaux débordés, dépourvus de moyens matériels et sanitaires, regorgeant de blessés ensanglantés, manquant de moyens au point de pratiquer des opérations sans la moindre anesthésie, populations du Sud du pays privées d'eau buvant à même le sol le contenu de flaques non potables, au risque des pires épidémies.
Quant au coût économique et financier de la guerre, il est à peine moins évasif. Le coût brut officiel de l'opération militaire pour les Etats-Unis déjà imprécis, au moins autour de 60 milliards de dollars (ou d'euros) ne tient pas compte de l'entretien d'une armée d'occupation ni du coût des investissements pour reconstruire le pays (qui, selon la Maison Blanche, va être une mise à fonds perdus pendant au moins deux ans pour l'économie américaine). Mais si les Etats qui n'ont pas pris part à la guerre ont aussi refusé de la financer, la mesure de rétorsion immédiate de la bourgeoisie américaine a été la menace d'annuler les dettes anciennes de l'Irak, ce qui va pénaliser les adversaires des Etats-Unis créanciers de Saddam depuis des années, et notamment la France. Qui va payer la note ? Bien entendu, la classe ouvrière à qui dans chaque pays on va demander des sacrifices en fonction de cette "conjoncture défavorable".

 

Quel avenir ?

La guerre en Irak faisait partie depuis des années des plans de la bourgeoisie américaine. Les attentats du 11 septembre lui ont permis d'en accélérer la programmation au nom de la "guerre contre le terrorisme". Après l'Afghanistan, l'Irak était en tête de liste des pays désignés comme porteurs de "l'axe du mal". Au lendemain de cette guerre, ce qui ressort de la situation, c'est une escalade des périls, des risques accrus d'instabilité, d'affrontements et de chaos. Comme en Afghanistan où la guerre n'a rien réglé, où, en dehors de Kaboul, le pays reste aux prises aux luttes des fractions qui cherchent à établir leur contrôle, l'Irak et la région restent un baril de poudre. La Syrie, l'Iran, allié des Chiites, la Turquie avec l'épineuse question kurde, les différentes fractions en Irak même, tous vont chercher à défendre leurs intérêts contradictoires. Les Etats Unis vont poursuivre leur croisade sanglante pour maintenir leur place prépondérante. Et les Etats européens, vont leur mettre de plus belle des bâtons dans les roues en attisant de nouvelles tensions, en défendant chacun leurs propres intérêts. La guerre en Irak ne fait ainsi que marquer une étape dans la spirale guerrière où s'enfonce le capitalisme et va, à son tour, engendrer d'autres conflits meurtriers. Le monde capitaliste réserve partout le même avenir à l'humanité : la guerre et la barbarie, la misère et l'exploitation. Seule la destruction de ce système par la lutte internationale de la classe ouvrière pourra y mettre fin.

Wim (26 avril)

Récent et en cours: