Fichier attaché | Taille |
---|---|
![]() | 2.06 Mo |
REUNION OUVERTE DE LA SECTION DE PARIS
Comme chaque mois, la section de Paris de "Révolution Internationale" a organisé le 10 janvier 1976 une réunion publique sur le thème de "Organisation et regroupement des révolutionnaires". Cette réunion a mis en relief, par l'affluence qu'elle a connue et l'animation des débats, l'intérêt provoqué par ce sujet parmi les éléments proches des positions révolutionnaires. Elle a mis également en évidence la confusion qui persiste encore en ce qui concerne tant la fonction des révolutionnaires qui sont souvent vus comme des "confectionneurs de feuilles de boites” ou comme des individualités allant de cercle d'étude en revue éclectique peur s'adresser "personnellement" à la classe, qu'en ce qui concerne la nécessité de regrouper ceux-ci dans un corps organisé autour d'un programme clair et cohérent. En particulier, la notion fondamentale de frontière de classe sur laquelle l'histoire a tranché de façon définitive et qui établit la distinction entre les organisations de la classe ouvrière et celles de la bourgeoisie est malheureusement trop souvent méconnue ou interprétée comme un artifice sectaire.
Mais le point particulier sur lequel a porté notre insistance a été celui de l'absolue nécessité du regroupement des forces révolutionnaires à l'échelle mondiale avant même que la classe ne s'engage dans ses combats décisifs. En effet, à côté des conceptions qui nient toute nécessité pour la classe de se donner une organisation de ses éléments les plus conscients, à côté de celles qui sont d'accord avec une organisation des révolutionnaires mais à condition qu'elle ne joue aucun rôle, on en trouve de plus subtiles encore, qui veulent bien que les révolutionnaires s'organisent à l'échelle mondiale dans le but d'influencer la lutte de classe mais qui considèrent que "ce n'est pas encore le moment". Souvent ces conceptions considèrent que c'est dans les affrontements révolutionnaires eux-mêmes que se constitue cette organisation et que vouloir regrouper les forces révolutionnaires avant que la classe ne soit confrontée au problème de la prise du pouvoir n'est rien d'autre que du "volontarisme organisationnel". Les expériences sanglantes de la classe et particulièrement celles du prolétariat allemand en 1919 qui se soulève alors que les révolutionnaires viennent juste de se regrouper et qui, faute d'une vision d'ensemble de sa lutte, est écrasé par la bourgeoisie ville après ville, montrent à quel point une telle vision est irresponsable. Une des grandes carences de la grande vague révolutionnaire qui suit la première guerre mondiale est le retard avec lequel se constitue l'organisation mondiale de son avant-garde. Quand l'Internationale Communiste est fondée en mars 1919, les plus grands combats de la classe ont déjà eu lieu et la classe a déjà subi les défaites qui s'avéreront décisives. S'il est une leçon que les révolutionnaires se doivent de méditer, c'est bien celle-ci, afin de s'atteler, dès maintenant, à la tâche du regroupement mondial de leurs forces. Les révolutionnaires ne devront pas s'unifier "le plus tard possible" mais au contraire le plus tôt possible, afin que leur organisation ait eu le temps de se renforcer le plus possible avant d'affronter l'épreuve du feu des combats révolutionnaires.
L'effort actuel vers l'unification mondiale des révolutionnaires affronte toute une série d'entraves qui ont principalement pour origines la rupture organique survenue comme conséquence d'un demi-siècle de contre révolution dans les fractions communistes du passé, et le poids idéologique de la petite bourgeoisie, particulièrement intellectuelle, en pleine décomposition sous les coups de boutoir de la décadence et de la crise aigüe du capitalisme.
Le premier de ces deux phénomènes a eu pour effet de priver les courants révolutionnaires que la reprise présente de la classe a fait surgir, d'une somme d'expériences pratiques que les fractions du passé avaient capitalisé et qui s'est perdue, pour une part importante, avec elles. C'est justement sur la question d'organisation que ces expériences étaient le plus précieuses et que c'est en grande partie à travers leur propre pratique que les révolutionnaires d'aujourd'hui ont été amenés à comprendre ce qui dans le passé avait été acquis depuis longtemps.
Le deuxième de ces phénomènes est un boulet que le mouvement ouvrier traîne à son pied depuis ses débuts dans la mesure où les rangs prolétariens ont reçu à toute époque des éléments venant de la petite bourgeoisie et transmettant avec eux leurs préjugés de classe. Ce phénomène se poursuit aujourd'hui de façon intense, mais c'est surtout de la part des couches de la petite bourgeoisie intellectuelle que le prolétariat subit les assauts idéologiques les plus importants.
Manifestation la plus spectaculaire de la crise de cette couche sociale, le "mouvement étudiant" connaît son apogée au moment du début de la reprise prolétarienne et, de ce fait, ses scories viennent encombrer fortement la conscience des groupes que celle-ci a fait surgir. Ces scories se manifestent essentiellement sous forme des cultes à la "nouveauté", de la "singularité", de la phrase, de l'individu, etc. qui réussissent souvent à transformer ces groupes en de simples sectes plus préoccupées de mettre en relief ce qui les distingue des autres afin de justifier leur existence séparée que d'œuvrer dans le sens d'un rapprochement.
L'ATTITUDE DU PIC
Une illustration éclatante de cet esprit de secte nous a été fournie par l'attitude du PIC par rapport à cette réunion ouverte. Dans la lettre que nous publions à la suite, nous invitions les camarades de cette organisation à venir débattre publiquement de la question inscrite à l'ordre du jour et qui constitue justement la divergence essentielle entre nos deux organisations. Nous pensons en effet que c'est par une confrontation publique que les positions en discussion ont le plus de possibilité de s'éclaircir face aux éléments qui s'approchent d'une orientation révolutionnaire et qui sont désemparés par l'existence de deux organisations se réclamant d'un même programme fondamental. Malheureusement, le PIC n'a pas jugé nécessaire de venir à notre réunion, ni même de donner une réponse à notre lettre d'invitation. Cette réponse, se trouvait en fait, de façon implicite, dans le n° 8 de "Jeune Taupe", l'organe du PIC, qui consacrait deux pages pour signifier à ses lecteurs deux choses fondamentales:
Pour justifier cette rupture, le PIC donne les arguments suivants:
Nous ne suivrons pas le PIC sur son terrain: à l'accusation de mensonge pour motiver une rupture, nous dirons que c'est là la seule chose qu'aient été capable de faire tous les groupes qui ont refusé le débat politique avec nous (à commencer par l'Internationale Situationniste).
Le PIC se plaint de l'acharnement de R.I. contre lui. Que devrions-nous dire pour notre part puisque pratiquement tous les numéros de "Jeune Taupe" contiennent des attaques contre R.I. ou le C.C.I. Le numéro un de cette publication donnait d'ailleurs le ton dans son article : "L'affaire Puig Antich: Certains se démasquent" (page 8):
Loin de prendre la mouche, R.I. n'a pas tiré argument de ces termes (que les lecteurs pourront comparer avec ceux incriminés dans le n° 20 de RI) pour rompre toute relation avec le P.I.C. Au contraire, les camarades de ce groupe ont été invités à la même époque à la réunion nationale de R.I., le P.I.C. a été invité à s'associer et signer le tract "Au Portugal, le capital affronte le prolétariat mondial" de juin 74, de même qu'il a été invité, en Janvier-75, à la conférence de notre courant international.
Notre attitude fraternelle à l'égard du P.I.C. est même allée jusqu'à la mise à la disposition de ce groupe, qui ne s'était même pas donné les moyens de sa volonté "d'intervention", de notre propre matériel pour la confection de sa publication. Mais il a bien fallu se rendre à l'évidence: le maintien et même l'accentuation de l'hostilité du P.I.C. à l'égard de R.I. est devenue la preuve que le P.I.C. existait essentiellement contre R.I. A partir de ce moment, il devenait également évident que le P.I.C. n'apportait pas une contribution positive à l'effort des révolutionnaires vers leur regroupement mais constituait un obstacle à cet effort, ce que depuis lors nous avons dénoncé comme tel. La décision du P.I.C. de rompre tout contact avec nous constitue une illustration éclatante de l'esprit de secte qui anime cette organisation. Elle est à rapprocher de celle du "Communist Workers' Organization".
Au même titre que le "Communist Workers’ Organisation" qui, en inventant de nouvelles frontières de classe a placé d'autorité le C.C.I. dans le camp capitaliste, le P.I.C. est donc en train de faire la preuve de l'irresponsabilité de ces groupes qui n'ont entre eux de commun que de cultiver leur singularité. Faudra-t-il que la classe connaisse un autre échec sanglant, bien plus terrible encore que les précédents pour que ces courants comprennent que les intérêts historiques du prolétariat se placent infiniment au-dessus de leurs petits intérêts mesquins.
CG.
"La Secte cherche la justification de son existence et son point d'honneur, non pas dans ce qu'elle a de commun avec le mouvement de la classe, mais dans la silhouette particulière qui l'en distingue".
Marx (Lettre à Weydemeyer)
Paris, 12/12/75
Chers Camarades,
Le samedi 10 janvier 1976, la section de Paris de "Révolution Internationale" organise une réunion ouverte sur le thème du "Regroupement des révolutionnaires" à laquelle nous convions cordialement le PIC à participer et à y défendre publiquement ses positions.
Les réunions de ce type organisées par notre groupe sont en principe ouvertes à toute personne intéressée par les positions révolutionnaires et, les membres du PIC peuvent donc venir à chacune d'elles, mais la raison pour laquelle nous vous transmettons une invitation spéciale à celle du 10 janvier réside dans la nature du sujet traité ce jour-là.
En effet, le problème du regroupement des révolutionnaires autour d'une cohérence principielle fondamentale a toujours été crucial dans le développement pratique et théorique de la lutte de classe. Dès le "Manifeste Communiste", l'unité internationale du prolétariat et de son avant-garde était posée comme une nécessité de la lutte de celui-ci. La fonction essentielle de l'AIT, quant à elle, était, de l'avis même de ses fondateurs, de réaliser l'unification des forces vives du prolétariat mondial, en particulier par le dépassement des sectes de la période antérieure. Par la suite, cette question s'est reposée avec insistance à chaque moment décisif de la lutte de classe, quelque fois de façon tragique si on songe, par exemple, au poids énorme qui a pesé dans l'échec de la Révolution en Allemagne en 1919, l'incapacité des révolutionnaires de ce pays à se regrouper à temps.
Aujourd'hui, au moment où l'effondrement croissant de l'économie capitaliste pousse la classe ouvrière dans la voie d'une reprise de la lutte révolutionnaire, les communistes sont de nouveau placés devant leurs responsabilités historiques dont celle de leur indispensable unité, d'autant plus difficile à assumer que pèse sur eux le poids de la rupture organisationnelle avec les fractions communistes du passé, provoquée par un demi-siècle de contre-révolution.
C'est parce que le PIC et RI défendent les mêmes principes fondamentaux et que leur divergence essentielle porte justement sur ce problème du regroupement, que nous jugeons très importante votre participation à notre réunion ouverte. Nous pensons effectivement que c'est publiquement, face à ceux qui s'intéressent à nos positions communes, et qui bien souvent n'arrivent pas à bien comprendre où se situent nos divergences, que doit se poursuivre le débat existant entre nos deux organisations. Nous sommes sincèrement convaincus qu'un tel débat public, au cours duquel vous disposerez évidemment des mêmes moyens que nous pour défendre votre point de vue, devrait permettre tant à ces éléments proches qu'à nos deux organisations de faire un pas de plus dans la compréhension de ce problème crucial.
En espérant que vous donnerez une suite positive à notre proposition, nous vous transmettons, chers camarades, nos salutations communistes.
Révolution Internationale.
Récemment, "Le Prolétaire", organe du Parti communiste international a publié deux articles (n° 203-204) sous le titre de "la légende d'une gauche européenne" consacrés à la "critique" de "Révolution Internationale et ses amis".
Nous aurons l'occasion de faire à notre tour une critique plus approfondie de ce courant politique dans la "Revue Internationale", non pour offrir au PCI une réponse en bonne et due forme mais pour montrer par le négatif du PCI ce qu'est le marxisme -comme acquis fondamental de la lutte de classe du prolétariat- et comment l'héritage des fractions communistes (de Bilan en particulier), loin d'être l'expression d'un prétendu marxisme "occidental" ou "européen" est l'héritage vivant et fondamental de la dernière vague révolutionnaire, lequel est la source authentique du programme communiste aujourd'hui.
Pour nos lecteurs qui seraient peu au courant des positions de ce "parti", voire de son existence, il est bon d'apporter quelques précisions. Le Parti communiste international se réclame de la Troisième Internationale et se proclame le plus fidèle continuateur de Lénine et "marxiste invariant", se dit le continuateur de la Gauche italienne née en 1919 comme "Fraction communiste abstentionniste" et dont le représentant le plus important fut Amadeo Bordiga. C'est autour de Bilan, dans les années trente et jusqu'à la fin du second conflit impérialiste, que devaient se regrouper les éléments révolutionnaires issus de la Gauche communiste italienne. Né en 1943 sous le nom de Parti communiste internationaliste en Italie, mais existant sous sa forme actuelle depuis 1952 - date de la scission d'avec le groupe Damen, fondateur réel de ce parti, qui continue son activité autour du journal Battaglia comunista, le parti bordiguiste regroupé en France et en Italie autour de "Programma comunista" et du "Prolétaire" n'a en fait plus rien à voir avec le glorieux passé de la Gauche italienne.
Aujourd'hui les "programmistes" ne se distinguent plus qu'à grand peine des trotskystes. Faisant depuis plus de 25 ans l'apologie des mouvements nationalistes du tiers monde ("peuples de couleur"), se faisant depuis quelques années les donneurs de conseils aux groupes gauchistes, auxquels ils reprochent leur "opportunisme", il ne manquait plus à leur brillant tableau que de se faire les propagandistes de l'urne démocratique à l'occasion de référendums en Italie et en Suisse, ce qui est un comblé pour des gens se réclamant de la "Fraction communiste abstentionniste" et qui il y a dix ans proclamaient que "le prolétariat naissait antiparlementaire".
Depuis deux ans, la pénétration des idées trotskystes s'est faite toujours plus profonde au sein du PCI. Si le parti "bordiguiste" ne préconise pas encore le "Front unique"-"tactique" préconisée par le troisième Congrès de l'IC pour "gagner les masses" avec "l'opportunisme" que sous sa forme syndicale, et non sous sa forme politique comme le font les trotskystes, il préconise aujourd'hui ouvertement, tout comme ces derniers, le programme minimum des réformistes du siècle dernier qu'il n'ose encore baptiser "programme de transition". Le programme communiste "intégral" de la révolution est devenu un livre de recettes (35 heures, travail pour tous, chômage payé à 90%, etc.) s'adressant à chaque catégorie particulière du prolétariat qu'on divise en femmes, jeunes, etc., recettes qu'on, jette en pâture aux ouvriers à qui on laisse espérer que leur seule action économique pour des réformes impossibles pourrait remplir leurs ventres affamés par la crise. Misérables recettes de charlatans qui proposent aux ouvriers d'accommoder avec le vide de phrase creuses les restes putréfiés d'un capitalisme sénile.
Une telle continuité dans la prostitution des acquis de la «Gauche Communiste» n'a d'égale, dans la série d'articles mentionnés que leur impudence à falsifier le passé. Selon eux, "Bilan a fait des erreurs politiques, c'étaient justement des erreurs, des concessions à des courants de type "gauche européenne" mais ceci dans une attitude oscillante qui interdit de prétendre que Bilan avait une théorie particulière qui aurait révisé les positions originelles de l'Internationale et de la Gauche".
Voyons un peu ce que le PCI appelle les "erreurs" de Bilan:
Ce sont tous ces acquis immenses du prolétariat, les principaux des années trente, que le PCI veut ensevelir dans l'oubli, ne voulant y voir que des errements infantiles,-sous l'influence ... d’une prétendue "Gauche européenne". II est vrai que les éléments qui furent expulsés de "Bilan" pour leur participation à la guerre d'Espagne dans le camp impérialiste républicain et ressurgirent à la fin de la guerre à la tête du PCI sont peu enclins à voir dans les positions de "Bilan" les vrais positions internationalistes défendues par la petite, poignée de révolutionnaires de l'époque.
Voyons maintenant ce que le PCI entend par "gauche européenne" ou "marxisme occidental". Selon lui, il y aurait eu après 14 deux sortes de gauche: une gauche européenne incarnée par la gauche allemande et la gauche russe "léniniste", véritablement internationale. C'est une pure mystification digne de tous les mensonges bourgeois de l'époque et d'aujourd'hui que de présenter la révolution qui a suivi le premier après-guerre comme purement russe, les fractions communistes des pays industrialisés en sorte comme une réaction "occidentale" menchevik, aux excès des Russes, contre "la barbarie et l'arriération russe, la magnifique révolution occidentale et civilisée" (Le Prolétaire n° 204). Ce que le PCI appelle "gauche occidentale" était :
Comment expliquer une telle attitude? On se tromperait en voulant voir dans leur apologie inconditionnelle du parti bolchevik l'origine de leur dégénérescence. Des bolcheviks, ils ont oublié tout l'enseignement révolutionnaire; à l'inverse, des mencheviks ils reprennent de plus en plus les positions, authentiquement contre-révolutionnaires Toute la politique des "programmistes" qui se font de plus en plus les idéologues des "révolutions nationales", "bourgeoises", "des insurrections des peuples opprimés" n'est que la continuation de toute la politique mencheviste. Ces "défenseurs" de la Révolution "russe", "léniniste" contre les partis "infantiles", "extrémistes" de l'"Occident" ne font que reprendre, bien après les Dan et Tsérétéli la théorie des staliniens et des gauchistes d'aujourd'hui "de la voie nationale au socialisme". En niant le caractère international de la révolution, qui dans le passé s'est manifestée par l'apparition simultanée en Europe des fractions communistes -apparition qui débordait largement le cadre européen-, ils ne peuvent qu'être amenés à cracher sur tout ce qui incarne mondialement le communisme. Il est logique qu'après avoir fait si longtemps silence sur Bilan, ils ne voient plus dans les positions de la Gauche italienne des années trente que des "Bourdes" (sic).
Les "programmistes" devraient être plus logiques: la "Fraction communiste abstentionniste" qui rejeta la conception du parlementarisme révolutionnaire a fait des "bourdes" de type "infantile" et "occidental"; la lutte contre les Serrati, réintégrés dans l'Internationale sur l'ordre de Lénine, a été non moins une "bourde", de même que le refus de cautionner la politique zinoviéviste des "gouvernements ouvriers".
Quant" à permettre la publication dans «Il Soviet», le journal fondé à Naples par Bordiga, de textes de Pannekoek, Gorter, Pankhurst en 1919-20, il a fallu que la "Fraction abstentionniste" soit déjà terriblement gangrenée par "des concessions à des courants de type "gauche européenne".
Pour le PCI la résurgence du courant de la gauche communiste à travers "RI et ses amis"'(entendez par là le Courant communiste international) correspond au fait que : "la victoire théorique du marxisme sur le bakouninisme a eu son revers de la médaille; en fait, l'anarchisme aujourd'hui se voit dans l'obligation de "couvrir d'un voile marxiste le vieux fond idéaliste, stirnérien et pré-marxiste". Il est vrai que le PCI croit bon de nous assimiler, nous les bakouninistes, à des "professeurs de marxisme" (n° 204). En sorte, aujourd'hui, les "anarchistes" se doivent de donner des leçons de marxisme pour donner le chancre.
0k ne pourrait que s'esclaffer à la lecture de telles niaiseries, si le PCI ne cherchait -avec une mauvaise foi aussi voyante que-grossière- à présenter le KAPD comme "une école méprisable" et à faire apparaître: calomnieusement notre Courant comme "ultragauche en paroles, ultraconservateur dans les faits". Depuis plus de cinquante ans, la calomnie portée sur la théorie révolutionnaire est la seule invariance que connaissant soit les opportunistes soit les ennemis déclarés de la révolution prolétarienne et cela ne saurait étonner les révolutionnaires.
Mais voyons ce qu'il en est exactement de l'anarchisme de "RI et de ses amis". Examinons les points les plus importants et les plus significatifs qui sont censés définir les anarchistes:
Mais, peut-être que nous, ''anarchistes", donnons une fois de plus des leçons de marxisme...
On peut se demander pourquoi le PCI mène une telle polémique contre RI, après avoir soigneusement évité pendant longtemps toute allusion à notre existence. L'apparition du Courant communiste international, qui contredit la théorie "programmiste" que seul le PCI peut se manifester internationalement, à la différence de la gauche "infantile" marquée par sa nature "occidentale", porte un rude coup au même PCI. Depuis 64, tant en Italie qu'en France, le PCI ne cesse de se décomposer; la soudaine disparition de ses sections Scandinave et allemande (Internationale Revolution. Kommunismen) lui a fait perdre toute prétention' internationale. On comprend que le PCI veuille taire l'existence gênante du Courant en parlant de "RI et ses amis", ou bien, de "RI avec des cousins en perpétuelle dispute", manière perfide de nous présenter à ses lecteurs non comme une organisation centralisée internationalement -dans laquelle la discussion ne peut que se développer pour affermir une réflexion jamais achevée- mais comme une fédération de clubs de discussion.
Nous avons déjà eu l'occasion d'expliquer que c'est l'incompréhension de la période ouverte par le premier conflit impérialiste (voir RI et bulletin de discussion) qui amenait le PCI dans de telles aberrations théoriques.
Et même, à une pure falsification des positions de la Gauche communiste. Réfugiés derrière leur paravent de l'invariance du marxisme depuis 1848, ils pratiquent la même politique des sociaux-démocrates qui consistait à se réfugier derrière l'apparente orthodoxie d'idées dépassées par la lutte de classe pour mieux trahir la méthode marxiste d'analyse et d'action. Aujourd'hui, le PCI prend le chemin qui l'amène à quitter sans espoir de retour le camp prolétarien pour celui de la bourgeoisie.
Pour une fois, nous serrons d'accord avec le PCI, lorsqu'il affirme que le passé fait tomber des groupes "dans les déchets que l'histoire vivante laisse inévitablement à chaque cycle de son métabolisme incessant et riche de lendemains exaltants". Le PCI, lui, appartient plutôt à la catégorie des déchets -de l'histoire morte, à celle qui corrompt et entrave le "métabolisme incessant" de la lutte de classe.
CHARDIN
Fichier attaché | Taille |
---|---|
![]() | 1.88 Mo |
Nous n'avons pas de chroniques régulières sur l'écologie, l’avortement, les minorités culturelles opprimées, etc... et certains lecteurs nous reprochent d'être des "économistes", de ne jamais parler des multiples facettes de l'exploitation et de l'oppression. Il n'est pas question pour nous, à l'instar des gauchistes, d'avoir chaque mois un article pour faire plaisir aux écologistes, un pour les féministes, un pour les régionalistes... Car, si elles ne sont pas ouvertement bourgeoises ou interclassistes, ces tendances sont des freins à la prise de conscience par les prolétaires de leurs intérêts historiques. Depuis quelques années, l’intelligentsia gauchiste et marginale fait beaucoup de bruit autour de ces mouvements. Les révolutionnaires se doivent donc de les dénoncer ; pour cela, il faut en voir le fond et la forme, le contenu et l'emballage. Commençons par le fond.
Le point commun de tous ces groupes est d'attaquer le système sur un point spécifique et de s'adresser à telle ou telle catégorie d'individus (habitants d'une région, femmes, usagers des transports, de la médecine, de la psychiatrie, consommateurs, pollués, etc...) Ils réduisent donc le capitalisme à une somme d'aspects reliés entre eux par on ne sait quelle logique et proposent de l'attaquer sur cet aspect particulier, deviennent des spécialistes et s'enferment dans une lutte stérile. Face à ces critiques sur son mode de fonctionnement, le capitalisme peut, soit rectifier le tir (par exemple sur le gaspillage des emballages plastiques dont la fabrication nécessitait d'importer plus de pétrole ou sur des moyens de répression idéologique dépassés comme pour l’avortement) et donc tirer tous les bénéfices de ces "réformettes". Ou alors, tout retour en arrière mettant en cause la survie même de son économie, il est dans l'impossibilité de céder -comme sur la politique de développement des centrales nucléaires-, et ce n'est pas une poignée d'écologistes, de marins ou d'agriculteurs qui peut le faire reculer. La bourgeoisie trouve même une justification à sa politique d'austérité et de réduction de la consommation avec les campagnes menées pour une croissance zéro (les écologistes doivent être tout à fait satisfaits : les cheminées ne fument plus car les usines sont fermées) contre les voitures ou contre la "société de consommation". Toutes ces manifestations de la domination totale du capitalisme dans le monde entier sont comme l'arbre qui cache la forêt ; et cette forêt, ce sont les rapports de production, base même du système. A la limite, le capital serait aussi prospère avec l'égalité des sexes (les femmes ministres ou PDG sont aussi efficaces que les hommes), avec des transports en commun plus rapides et confortables (les ouvriers seraient moins fatigués en entrant à l'usine le matin), avec un relais important du pouvoir au niveau de la région (il y a 50 Etats aux USA). Le capital est même capable d'instituer l'autogestion pour que les travailleurs produisent avec encore plus d'abnégation pour l'économie planifiée. Mais il est une chose que l'on ne peut toucher sans que le château de cartes ne s'écroule, c'est le fait qu'il y ait des producteurs n'ayant aucun moyen de contrôle sur leur vie, et d'autres qui vivent du travail des premiers, comme patrons ou hauts fonctionnaires de l'Etat. Peu importe les apparences, ce qui compte, c'est le maintien d'une société de classes. Cette société, seule la classe ouvrière peut l'abattre. Elle est au cœur du système dans les usines, les chantiers et les bureaux, elle y est concentrée, elle y voit la faillite d'un système décadent incapable d'améliorer ses conditions d'existence, c'est là qu'elle doit s'imprégner de la nécessité de renverser la base môme du système : le salariat. Et là, il n'est pas question de la diluer dans la masse invertébrée du "peuple", des citoyens, des usagers ; elle est seule, elle ne peut compter que sur elle-même, elle doit s'attaquer clairement à son ennemi central. Dès sa naissance, le capital a créé la force qui le détruira; en étant obligé de mettre des hommes derrière ses machines, il introduisait le ver dans la pomme.
Que font donc tous ces mouvements : ils tentent de sortir la classe ouvrière de son terrain de lutte, pour lui faire enfourcher des chevaux de bataille qui ne sont pas les siens. Ils reculent donc d'autant le moment où les camps en présence devront se livrer l'assaut final, l'un ayant épuisé toutes les mystifications et l'autre surmonté toutes les déviations menant à des impasses. Ils participent à ces mystifications de manière plus ou moins efficace, donc plus ou moins dangereuse.
Voyons comment : Ces groupes ont pris de la vigueur avec le début de la crise à la fin des années 60. Les premières manifestations de la crise ont été appelées "crise de civilisation", liée en grande partie au problème étudiant : mai 68 a montré à ces révoltés leur force, mais aussi la force de la classe ouvrière ; ainsi, un une partie d'entre eux a essayé, au niveau des mots, de concilier sa propre révolte avec les intérêts historiques du prolétariat, en adoptant un langage "de classe", "anticapitaliste". Le gros des forces provient des déçus de mai 68, ceux qui ont cru que c'était la Révolution et qui, ne voyant pas le prolétariat refaire mai 68 tous les six mois, en ont conclu qu'il était décidemment incapable de se libérer de ses aliénations. On assiste alors à un éparpillement politique et géographique en une multitude de petites sectes incapables de dépasser leurs intérêts de boutique. L'exemple le plus frappant est l'écologie : outre les petits groupes locaux, on a vu naître plusieurs groupes à vocation nationale, certains avec des positions identiques, le tout allant d'un pacifisme chrétien à un militantisme léniniste. Toutes ces tendances sont parfois antagonistes mais se retrouvent pour des alliances éphémères sur le point précis qui les a vu naître. De même, le mouvement régionaliste, qui va des anarchistes à l'extrême droite, en passant par des groupes léninistes, des groupes proches du PC ou du PS, ou même des groupes "apolitiques". Dans cet extrême morcellement, les groupes les plus dangereux sont les groupes les plus à gauche, car ils essaient d'entraîner et de se servir du prolétariat.
Pour mieux utiliser le prolétariat, il faut lui faire perdre son identité ; ces groupes sont des experts pour trouver un problème spécifique pour chacun: les femmes sont exploitées par les patrons bien sûr, mais aussi par une société mâle, les bretons et les occitans sont exploités par des patrons mais ce sont des patrons parisiens... Quand on a trouvé le problème qui n'est plus spécifiquement prolétarien, il faut trouver la catégorie sociale qui en souffre le plus, et donner une identité à cette somme d'individus disparates : les jeunes, au moment du journal "Tout", les homosexuels avec le FHAR ou l'IHR, les femmes avec le MLF, les basques ou les portoricains, les noirs aux USA avec le Black Power, les usagers de la psychiatrie, etc. Il ne reste plus qu'à relier avec des mots comme libération, classe ouvrière, capitalisme, et le tour est joué. Un trait significatif de ces groupes est l'obligation qu'ils ont, quand ils veulent se manifester au niveau régional ou national, de se mettre pieds et poings liés entre les mains des organisations gauchistes. Eux seuls possèdent les moyens nécessaires pour organiser une telle manifestation. Aubaine pour les gauchistes qui peuvent alors se livrer à leur sport favori : la pêche à la ligne.
La période de reconstruction a permis la naissance de ces mouvements. Le prolétariat alors pansait ses plaies de la .seconde guerre mondiale et profitait de la relative amélioration de ses conditions de vie. Devant ce vide, les théories subtitutionnistes à la lutte de classe se sont développées avec le même point commun : le combat principal n'est pas celui qui oppose le prolétariat à la bourgeoisie. Depuis 1973, la crise du capitalisme, bien plus que des dizaines d'articles, a remis chacun à sa place. La marche sur Bugey ou la manifestation à vélo à Paris, qui avaient rassemblé des milliers de personnes, sont maintenant improbables. Les dernières manifestations publiques de toutes ces tendances se sont soldées par des échecs, L'utopie du développement éternel du capitalisme vole en éclats : avec la crise, le prolétariat ressurgit et les adversaires se montrent au grand jour, d'un côté, la bourgeoisie et ses oripeaux, de l'autre, la classe ouvrière seule avec ses mains et sa conscience II faut choisir entre le les deux camps en présence; pour notre part, ce choix est fait.
Ed. SELKIRK
En dehors du marxisme, aucune théorie ne peut donner de réponse valable aux questions gigantesques posées à l'humanité avec l'entrée du capitalisme dans sa phase de décadence.
Il ne suffit pas de se tenir jalousement à l'écart de la politique pourrie de la fédération anarchiste où crypto-staliniens font bon ménage avec des maçons entichés de morale humaniste pour évoluer vers des positions révolutionnaires. A jamais est révolu le temps où quelques petits groupes anarchistes pouvaient, tant bien que mal, fournir un effort de réflexion théorique et une défense conséquente des frontières de classe. La mort de l'anarchisme date du 4 août 1914 : ralliement des mandarins anarchistes -et tout d'abord du vénérable Kropotkine- à l'effort de guerre impérialiste.
Quant à la partie saine du mouvement libertaire, elle ne pouvait que se joindre à la formidable vague des années héroïques marquées par la constitution de l'Internationale Communiste Ce que fit le petit noyau des anarchistes internationalistes regroupés autour de Guilbeaux et de Rosmer, ce que fit ensuite Serge, compagnons de Trotsky au plus haut moment de la lutte mondiale pour le pouvoir des Soviets, mais aussi après l'échec, lorsque la terre entière ne fut plus qu'une "planète sans visa" pour tous les survivants des purges et procès de Moscou, quand il était "minuit dans le siècle".
S'il est vrai que l'histoire juge les idées et les hommes, alors, nous pouvons dire que, passé au crible de la critique des faits, il n'est rien resté debout de l'édifice de belles théories anarchistes. Sur l'autel de l'Ordre bourgeois, l'anarchisme, durant ces 3/4 de siècle dut sacrifier tous ses principes : "anti-militariste", il exigea des armes pour combattre l'ennemi "fasciste" mais fit une guerre d'extermination aux seuls internationalistes : ceux qui prônaient le "défaitisme révolutionnaire" ; "anti-politicien", il entra au gouvernement républicain de Madrid et à la Généralité de Catalogne ; partisan de 1'"action directe", il appela le prolétariat espagnol à "savoir arrêter une grève" et à reprendre le travail ; "émeutier", il se fit démolisseur des barricades du Mai 37 à Barcelone ; "anti-étatiste", il développa dans les usines le capitalisme d'Etat.
A la Libération, il poursuivit l'épopée "anti-fasciste" dans les rangs de la résistance gaulliste ; "internationalistes" soi-disant dans la tradition et l'esprit de l'AIT, ses rejetons du "Mouvement du 22 Mars" crient victoire pour 1'"oncle" Hô.
Le cas qui nous intéresse ici est celui de la "Lanterne Noire". Evidemment, rien de comparable à la CNT/FAI, mais quand même une publication qui se présente : revue de critique anarchiste dans laquelle, nous dit-on, s'expriment des anciens de "Noir et Rouge" et d'ICO. Au quatrième numéro, la "Lanterne Noire'', sans se déclarer POUR, donne l'hospitalité cependant aux communiqués de groupes qui, de l'Irlande au Japon, ont fait de la propagande par le fait (on dit "guérilla urbaine") leur credo intangible. Pour présenter l'action des GARI dans l'enlèvement d'un sous-fifre du capitalisme espagnol ou les exploits de la bande à Baader et autres assoiffés de sang de l'Armée Rouge Japonaise (sic) elle n'a pas lésiné sur la dépense : 28 pages.
Les jeteurs de machines infernales dans les usines japonaises de Mitsui, Teijin, Tsaei ont causé la mort d'au moins huit travailleurs et la mutilation de dizaines d'autres Les mitrailleurs de l'IRA ont fauché des dizaines de travailleurs à Londonderry et à Belfast, parce qu'ils n'étaient pas de l'Eglise catholique et romaine. Parler de ces carnages en chroniqueurs, présenter leurs auteurs comme des victimes de la répression revient à introduire en contrebande une camelote criminelle.
Les idées et les méthodes du terrorisme individuel contre laquelle le mouvement organisé de la classe a lutté sans relâche pour lui opposer l'action consciente du prolétariat ont trouvé dans ce numéro leur expression pudique, sous le couvert d'"informer" les bonnes gens.
Mais la "Lanterne Noire" précise qu'elle est séparée de ces groupes "et d'abord de leur avant-gardisme". Eternel équivoque : le programme bourgeois, oui, les méthodes, non ! Là est la nature profonde de tous ceux pour qui principes et tactique se séparent. Et voilà un autre trait de ressemblance frappante avec le trotskysme en compagnie de qui on va retrouver la "Lanterne Noire". Qu'une même poule puisse couver indistinctement ses propres œufs et ceux de la mère-cane n'est pas un vulgaire phénomène de basse-cour. On le rencontre dans la vie politique bourgeoise et la démocratie y arrive très bien avec ses anarchistes et ses trotskystes.
A l'époque de la décadence, l'antagonisme entre la bourgeoisie et le prolétariat devient l'axe essentiel de la vie sociale C'est ou l'ouverture d'un cours général vers la guerre impérialiste, ou d'un cours vers la révolution prolétarienne. Et la victoire de la classe montante repose sur des principes, ceux que la "Lanterne Noire" rejette pour ne pas faire dans le dogmatisme... genre RI.
Ce que ces fossiles rajeunis du fard moderniste appellent de façon idiote "dogmatisme" n'est en fait que la continuation de la théorie communiste qui se fait chair et os dans les organisations et les militants qui appartiennent à la classe révolutionnaire. De la vieille souche libérale ou qu'ils se targuent d'être de pénétrants sociologues d'université, les anarchistes seront toujours les contempteurs du marxisme parce que celui-ci est la doctrine de la lutte de classe.
De quoi se démarque vraiment la "Lanterne Noire" ? Que des éléments de ce groupe (chez eux, on n'agit pas comme un corps organisé collectivement, mais selon des déterminations passionnelles où la "raison du cœur" tient lieu de programme) aient participé, en novembre 75, au Comité de Jussieu préparatif à la marche sur Hendaye est là pour montrer quel triste rôle de flanc-garde du trotskysme joue l'anarchisme Pour ces éternels partisans du moindre mal, de la troisième voie entre le capitalisme inhumain et le communisme totalitaire, une bourgeoisie sans Franco et ses affidés de la Phalange est préférable à tout prendre.
Du temps de l'ancien régime portugais, la LUAR s'activait par des coups de mains contre le salazarisme. Depuis l'éclosion des œillets, elle joue la mouche du coche du MFA entrelaçant "dialectiquement" le soutien aux organismes d'autogestion, la défense d'un syndicalisme de "base" et l'appui aux luttes anti-coloniales. C'était suffisamment éloquent à la "Lanterne Noire" pour tresser une couronne de lauriers révolutionnaires à une organisation qui fut le factotum de Carvalho.
Toute cette gymnastique n'a pas empêché la rédaction de la "Lanterne Noire" d'écrire qu'elle était d'accord avec nos camarades belges d'"Internationalisme" sur les points de la plateforme du CCI : fronts populaires, "frontisme", "luttes anti-fascistes" comme mystifications ; "luttes de libération nationale" comme moment de lutte impérialistes pour le contrôle des "nouvelles bourgeoisies''.
La mise en accord des actes avec la pensée leur est chose inconnue. En paroles, mais en paroles seulement, la "Lanterne Noire" reconnaît des vérités essentielles mais, en fait, aide la IVème Internationale trotskyste à mener ses grandes campagnes démocratiques Personne n'est obligé d'être révolutionnaire et n'importe quel élément peut défendre l'équivoque. Mais c'est le travail des révolutionnaires de dénoncer le charlatanisme du demi-anarchisme justement parce qu'il se manifeste sous le masque d'un marxisme de carnaval.
Se déclarer d'accord avec la moitié des positions de classe et rejeter l'autre moitié, se nourrir pour moitié de théorie des Gauches Communistes et pour l'autre moitié des miettes du trotskysme, marcher moitié d'accord, moitié critique avec le trotskysme, bref tout faire et tout penser à moitié, voilà l'anarchisme.
Dans la dure bataille qui se prépare, le prolétariat devra se libérer de ses faux amis qui prétendent parler et agir de façon révolutionnaire et qui, chaque jour, ont une activité foncièrement contraire à tous les enseignements de la lutte de classe
N'ayant pas d'armes propres, pas de principes, pas de programme, refusant la conception marxiste de l'histoire, contestant le rôle révolutionnaire du prolétariat, la "Lanterne Noire" prend des armes et des principes malpropres.
Il appartient aux camarades de la "Lanterne Noire" qui sont encore capables de pensée politique, qui sont vraiment d'accord avec notre lutte principielle, de quitter le plus rapidement possible un groupe qui offre pour toute alternative, ou ne rien faire, ou emboîter le pas aux trotskystes pour former des fronts unis.
Ainsi que Marx le disait de Proudhon, "charlatanisme scientifique et accommodements politiques sont inséparables d'un pareil point de vue". Cent ans plus tard, nous pouvons ajouter : l'anarchisme ne peut plus rien refléter que l'idéologie dominante.
R.C.
Fichier attaché | Taille |
---|---|
![]() | 1.81 Mo |
Aujourd'hui et depuis quelques années, on nous rabat les oreilles avec "les femmes", la "condition féminine", l'"année de la femme", l'"oppression de la femme", "MLF vaincra", etc. Au point qu'il n'est plus aucun gouvernement "démocratique", aucun syndicat et aucun parti politique qui se respectent qui n'aient leur secrétariat d'Etat, leur organe ou leur section "spécial femmes". De la droite à la gauche -et surtout les gauchistes- tous veulent se mettre au goût du jour en apportant "la solution" aux problèmes, à la condition des femmes. Dire qu'il existe un problème "des femmes" aujourd'hui, c'est participer de l'éternelle vision sociologique, bourgeoise de la société : la société n'est qu'une juxtaposition de couches sociales (qui existeront éternellement) plus ou moins opprimées par d'autres "couches sociales": le but devenant alors de trouver le moyen de faire cohabiter ces couches dans la "meilleure harmonie possible", à travers des réformes sociales. Mais, dans la réalité de la lutte de classe, le but réel de tous ces mouvements qui tendent à aménager la condition de telle ou telle couche, revient, dans la réalité, à laisser intacte la société d'exploitation capitaliste en mettant en avant de fausses analyses, et donc des fausses solutions, des voies sans issue.
Qu'il existe une différence entre les hommes et les femmes, c'est une évidence : tant que l'homme n'enfantera pas, le rôle de reproduction de l'espèce humaine reviendra à la femme. Depuis que l'humanité existe, la femme a donc toujours assumé cette fonction sociale : le cadre social, dans lequel cette fonction de reproduction s'est accomplie a évolué dans l'histoire en fonction du degré de développement atteint par les forces productives et, donc, des rapports de production existants. La "condition féminine" a donc toujours été directement déterminée par les liens juridiques et sociaux que les hommes ont noués entre eux dans chaque système social déterminé. Cette "division du travail" dans la fonction de la reproduction de l'espèce humaine a donc toujours accompagné l'évolution de l'humanité à travers les divers types de société qu'elle a traversés. Dès le départ, nous pouvons donc déjà dire que d'un point de vue matérialiste, il est aberrant de vouloir inventer une vision du monde d'après les intérêts propres des femmes comme si celles-ci pouvaient exister indépendamment des rapports de classe existants dans une société. Pour comprendre la position qu'occupe "la femme" dans la société actuelle, et pourquoi il est aberrant d'en faire un cas particulier, ayant des problèmes particuliers et des solutions propres il n'est pas inutile de faire un très bref rappel de comment la femme a été intégrée au mode de production capitaliste. C'est avec la dissolution de l'économie agricole et le passage à la prépondérance au mode de production capitaliste -en d'autres termes, avec le développement du machinisme et du travail salarié* que la femme a commencé à être, peu à peu, intégrée directement à la 'production capitaliste. Cette intégration a été facilitée par plusieurs facteurs : - avec le développement et la généralisation des machines, il s'est avéré que la force de travail féminine était aussi utilisable que celle de l'homme ; - l'exploitation forcenée de la classe ouvrière, sur laquelle s'est accomplie l'accumulation primitive du capital (journées de travail de 11, 12, 13 heures pour des salaires permettant tout juste de se reproduire -des salaires de misère) a poussé à la dissolution de fait de la famille (comme dit Marx dans le Manifeste Communiste) en faisant aller à l'usine hommes, femmes, et enfants pour pouvoir survivre ; - dès le départ, la force de travail féminine a été moins rémunérée que celle des hommes. Du point de vue du capitaliste, celle-ci est en effet moins sûre : chaque fois qu'une femme doit mettre au monde un enfant, cela lui fait autant de journées de travail perdues (d'où la "faiblesse" des femmes et le prétexte pour les payer moins). Mais si, dans la période d'accumulation primitive du capital la surexploitation des hommes, femmes et enfants est manifeste, dans la phase ascendante du capitalisme, dans son véritable apogée l'idéal social bourgeois a toujours été que la femme reste à la maison -pour procréer et s'occuper de la survie-matérielle de l'ouvrier et des futurs petits ouvriers -tout simplement parce que, dans ces conditions, la production capitaliste était mieux assurée et l'exploitation était mieux supportée, ti en a découlé que, autant la femme de l'ouvrier que l'ouvrière elle-même se sont vues impartir le rôle de ménagères : pour les femmes des ouvriers cela veut dire : rester à la maison, s'occuper du ménage et élever les enfants (d'où la fameuse "soumission" des femmes), pour les femmes ouvrières cela implique d'avoir à accomplir non seulement ses heures de travail à l'usine, mais, en plus le travail de ménage habituel (la "double journée de travail"). Ce sont donc les conditions matérielles que le capitalisme a imposées aux femmes qui leur ont conféré ces particularités (un certain "conservatisme" parce que subissant plus fortement la domination du capital, une position d'infériorité dans la société) que les féministes voudraient aujourd'hui abolir en luttant "contre les hommes". les femmes dans la lutte de classe Dans le contexte des 18e, 19e et dt but du 20e siècles, à l'époque où les organisations révolutionnaires de la classe ouvrière avaient comme but de gagner autant de réformes que possible du capitalisme en faveur de la condition ouvrière, et donc, d'affirmer la classe ouvrière comme force au sein de la société capitaliste, il n'est ni étonnant ni contradictoire avec les nécessités de l'époque de voir que les partis ouvriers (la social-démocratie en particulier) consacraient, au sein de leur organisation, des sections spéciales pour les femmes. Même si cette division qui était faite entre les hommes et les femmes était un reflet du poids de l'idéologie bourgeoise au sein même du parti, elle reflétait en même temps une réalité sociale de cette époque : la soumission de la femme par l'homme était plus marquée qu'aujourd'hui. Mais leur but était quand même de faire participer les femmes à la lutte de toute la classe ouvrière pour le socialisme. L'influence de cette période a pesé même sur la 3ème Internationale où les Bolcheviks ont préconisé, en 21, des tactiques de propagande spécialement dédiées aux femmes. Mais il faut signaler que cela a été fait dans le but de renforcer les partis communistes par n'importe quel moyen, alors que la lutte de la classe était en reflux. En fait, dans les périodes de luttes révolutionnaires de la classe, le problème "des femmes" ne s'est jamais posé. Les femmes y ont, non seulement participé, mais elles en ont souvent été le détonateur- ; parce que, quand "même les femmes" descendent dans la rue, "au risque de laisser des orphelins", c'est que la crise du système et l'impossibilité de continuer à vivre en son sein, sont une évidence. Avec l'entrée en décadence du système capitaliste et l'impossibilité, au niveau mondial, d'améliorer le sort de l'humanité autrement que par la révolution communiste, tout mouvement parcellaire qui a comme but de s'affirmer en tant que tel au sein de la société, toute lutte pour des réformes pour l'amélioration de son sort, non seulement est vouée à la défaite, mais participe au renforcement de la société capitaliste, en créant des illusions sur ses capacités de "changement".
Toute l'idéologie féministe (de "Psy et-Po" au groupe "Lutte de femmes", en passant par les "Pétroleuses") s'est évertuée à faire des femmes une catégorie spécifique (comme les homosexuels, immigrés, jeunes, handicapés), une sorte d'inter-classe (cf. collectif italien de Milan) qui, de la bourgeoise à l’ouvrière, toutes les deux sœurs, auraient des revendications communes... Ceci n'étonnera personne quand on connaît la vision bourgeoise qu'ont les gauchistes de la classe ouvrière : en effet, ils noient la classe ouvrière dans le "peuple", dans une masse d'opprimés qui doivent se regrouper par catégories (race, sexe) pour une première prise de conscience. C'est aussi de la révolution prolétarienne qu'ils ont une vision contre-révolutionnaire : en effet, s'ils justifient les "groupes femmes", c'est qu'à leur avis, une révolution "économique" (laquelle?) n'entraînerait pas nécessairement un changement des rapports sociaux (hommes, femmes, enfants) et donc qu'il y a nécessité d'un mouvement autonome de femmes qui pousserait à ce changement, qui achèverait la révolution incomplète. Ils t prennent comme exemples tous ces pays qu'ils soutiennent critique-ment et dont ils disent qu'ils sont en voie vers le socialisme (Chine, Cuba, Vietnam, Pays de l'Est). En effet, leur programme économique n'est tout simplement qu'un peu plus "à gauche" que le PC, à savoir : nationalisations + contrôle ouvrier + mouvements de femmes, en l'occurrence. Avec un tel programme, ce qu'on prépare, ce n'est pas la révolution, mais une gestion de la crise, la gestion du capital dans ses aspects les plus totalitaires : le capitalisme d'Etat. Mais les gauchistes ne sont pas les seuls à s'intéresser aux femmes: du secrétariat à la condition féminine aux partis politiques de gauche qui ont chacun leur"8ection femmes", chacun y voit un terrain privilégié pour détourner des problèmes réels. Ils seront les premiers à impulser des groupes de femmes dans les quartiers ou les entreprises où ils assument très bien leur double rôle d'encadrement et de division de la classe ouvrière. Sous prétexte qu'il y a moins de femmes dans les syndicats et que les femmes font moins de politique que leurs maris, on voit arriver les gauchistes se chargeant de faire "l'éducation politique et syndicale des masses" (comme si la conscience de classe était affaire de pédagogie. Dans le fait que les ouvrières sont moins encadrées que les ouvriers par les syndicats, les gauchistes y voient une faiblesse de la conscience de classe et une masse à manœuvrer. Pourtant, dans les luttes importantes, plus enracinées dans la réalité de leur exploitation quotidienne, les ouvrières se trouvent être souvent les plus combatives et les moins soumises aux mystifications syndicales. Mais les gauchistes jouent, là encore, très bien leur rôle de rabatteurs de la gauche : en mettant en avant des revendications "spécifiques" aux femmes, qu'ils veulent faire reprendre en charge par les syndicats, ils s'en font des auxiliaires et des conseillers dévoués, ils redorent leur blason, ils se veulent plus "à gauche" que les syndicats. Mais ces revendications sont de bien faibles choses, elles se résument à: "je veux être exploitée comme les autres, je veux qu'on m'aménagé ma double journée' En fait, ils voient la libération de la femme dans l'aménagement du salariat. Là où le système d'encadrement du capital est insuffisant, les gauchistes sont là pour colmater les brèches. Ils entreprennent aussi des luttes sur la contraception et l'avortement et font apparaître comme des victoires les lois qui sont votées. Alors que c'est au contraire un besoin de plus en plus pressant pour le capital de limiter les naissances, de rationaliser la reproduction de la force de travail... Ce qu'ils montrent comme victoire dans les pays occidentaux, -libération' de la femme, "libre disposition de son corps"- apparaît avec son vrai visage et sa barbarie dans d'autres pays (stérilisation forcée aux Indes, contraception à outrance aux Antilles, etc. Même si elle se cache sous le visage du gauchisme, la mystification féministe contribue d'une part à maintenir le prolétariat sur un terrain bourgeois, en faisant croire qu'il lui est possible d'aménager ses conditions de vie à l'intérieur du capital et, d'autre part, contribue à renforcer les divisions que sécrète le capital dans les rangs du prolétariat. C'est à cela que nous assistons quand nous voyons des "femmes" s'organiser en tant que femmes dans les entreprises et les quartiers. Le seul critère d'adhésion à cette forme d'organisation est d'être "une femme", indépendamment de toute considération de classe. Avec cette vision on arrive à faire une théorie marxisante (mais jamais marxiste), à savoir que les femmes sont une interclasse : les femmes de bourgeois étant des bourgeoises, les femmes d'ouvriers étant des ouvrières, mais toutes les deux ayant des revendications communes. On aboutit ainsi à une dissolution d'une partie du prolétariat : les ouvrières dans une catégorie sociale : les femmes, et d'opposer sous prétexte de revendications spécifiques, la femme au mari, l'ouvrière à l'ouvrier, comme l'attestent certains groupes qui, faisant "du travail de masse", écrivent des tracts sur le "chômage spécifique des femmes". Ces groupes parachutés n'arrivent à se poser les problèmes qu'en termes psychologiques : le "désir" de parler de soi et la "culpabilité" de ne pas agir là où ils sont (groupes de conscience)[1]. Leur "théorie" ne reste qu'une description de l'oppression sociale des femmes: rapports au travail, au mari, aux petits chefs, aux enfants et aboutit le plus souvent à une dénonciation hystérique des rapports qu'impose le capital. Alors que seul le prolétariat est la classe révolutionnaire, les femmes en s'organisant en tant que femmes, ne peuvent que se couper de toute perspective révolutionnaire et, de fait, servir de masse de manœuvre à la gauche de l'appareil politique du capital. Leur activité "politique" se résume à soutenir des fractions de la bourgeoisie contre d'autres: soutien des luttes antifascistes au Chili, en Espagne, au Portugal, etc... Depuis quelques années, on n'entend plus parler du MLF. En effet ce type de mouvement paraît à l'avant-scène quand la classe ouvrière est faible ou qu'elle a subi un reflux de ses luttes comme après 68. Mais aujourd'hui, la crise s'accentue et les luttes ouvrières reprennent à un niveau mondial, renvoyant aux poubelles de l'histoire les déchets qui n'auraient jamais dû les quitter. Dans ses luttes, le prolétariat doit tendre à l'unité la plus complète, tous ceux qui essaient de le diviser s'en font les pires ennemis. Le féminisme comme mystification de la classe ouvrière n'est pas déterminant, il ne prend tout son sens qu'en s'intégrant à tout l'arsenal bourgeois mis en avant par les gauchistes.
J. S. T.
[1] Ces groupes de conscience où l'on vient parler de ses problèmes ne sont en fait rien d'autre que des "courriers du cœur" améliorés au langage plus élaboré.
Fichier attaché | Taille |
---|---|
![]() | 1.7 Mo |
Fichier attaché | Taille |
---|---|
![]() | 1.88 Mo |
Fichier attaché | Taille |
---|---|
![]() | 1.94 Mo |
Liens
[1] https://fr.internationalism.org/files/fr/ri_22_a.pdf
[2] https://fr.internationalism.org/tag/vie-du-cci/reunions-publiques
[3] https://fr.internationalism.org/tag/vie-du-cci/correspondance-dautres-groupes
[4] https://fr.internationalism.org/files/fr/ri_23_a.pdf
[5] https://fr.internationalism.org/files/fr/ri_24_a.pdf
[6] https://fr.internationalism.org/tag/courants-politiques/anarchisme-modernisme
[7] https://fr.internationalism.org/files/fr/ri_25_a.pdf
[8] https://fr.internationalism.org/files/fr/ri_26_a.pdf
[9] https://fr.internationalism.org/files/fr/ri_27_a.pdf
[10] https://fr.internationalism.org/files/fr/ri_28_a.pdf
[11] https://fr.internationalism.org/files/fr/ri_29_a.pdf
[12] https://fr.internationalism.org/files/fr/ri_30_a.pdf
[13] https://fr.internationalism.org/files/fr/ri_31_a.pdf
[14] https://fr.internationalism.org/files/fr/ri_32_a.pdf