Vercesi fait prendre à Rosa la position de Riazanov selon laquelle l'internationalisme ne signifie pas souhaiter la victoire du capitalisme étranger sur le capitalisme national car on n'affaiblira pas le capitalisme mais on livrera le prolétariat à un impérialisme étranger.
De sorte que la position de Lénine, toujours d'après Vercesi, n'était valable que pour la Russie et ce que disait Lénine, concevable en raison des éléments historiques où il agit entre 1914 et 1918, n'avait pour lui qu'une application en Russie seulement. Rapprochons le premier passage de cette réponse de Lénine aux Riazanov et autres internationalistes honteux : "La classe ouvrière, dans la guerre réactionnaire, ne peut pas ne pas désirer la défaite de son propre gouvernement. C'est un axiome. Seuls les discutent les partisans conscients ou les domestiques sans caractère des social-chauvins."
Et la résolution de Berne (Le Social-démocrate N° 40) : "Dans tous les pays capitalistes le prolétariat doit maintenant désirer la défaite de son gouvernement."
Quant à la position de Rosa, elle s'est exprimée au Congrès de Stuttgart (1907) par l'amendement qu'elle fit ajouter, qui soulignait que le problème consistait non seulement à lutter contre l'éventualité de guerre, ou de la faire cesser le plus rapidement possible, mais aussi et surtout à utiliser la crise causée par la guerre pour accélérer la chute de la bourgeoisie, à tirer de toute façon partie de la crise économique et politique pour soulever le peuple et précipiter, par là même, la chute de la domination capitaliste.
On est loin de l'interprétation de Vercesi sur la transformation de la guerre impérialiste en guerre civile.
A quoi veut en venir Vercesi ? Car plutôt que de faire mentir Lénine et Rosa, il eut été préférable qu'il endosse pleinement la responsabilité se ce qu'il écrit.
Le défaitisme n'est un moyen que pour le prolétariat des pays dont le capitalisme n'est pas au pouvoir, ce qui amène forcément, pour cette guerre, le rejet du mot d'ordre de Lénine de transformation de la guerre impérialiste en guerre civile.
Allant plus loin, le caractère d'économie de guerre de 1914-18 enlève à la révolution de 1918 en Allemagne le caractère de facteur ayant déterminé la fin de la guerre impérialiste en la transformant en guerre civile.
La révolution de 1918 résultait-elle de la crise de l'économie de guerre ? Oui doit répondre Vercesi. Et toute cette monstrueuse théorie pour arriver à ce résultat. Pas de guerre civile, d'où pas de prolétariat pendant la guerre, d'où pas d'action de la fraction.
Vouloir ramener l'enseignement de Lénine et de Rosa à l'échelle de Vercesi, c'est rendre nul et non avenu tout le travail de la 2ème et de la 3ème Internationale dont chaque parti n'a pu agir, penser qu'en rapport aux seuls éléments historiques de leur secteur sans tenir compte de l'internationalisation du problème. C'est aussi ne pas comprendre la valeur du travail de Marx puisque ce dernier n'a écrit qu'en rapport aux éléments historiques de la révolution bourgeoise allemande avortée. Zimmerwald ne représente pas une plate-forme du prolétariat international mais est un vulgaire mélange de conclusions tirées d'éléments historiques différents et dont chaque prolétariat n'a à prendre que les conclusions présentées par ses représentants. Merheim et Bourderon pour la France, Ledebour pour l'Allemagne, Lénine pour la Russie. Seulement Lénine avait tort de s'en prendre à Ledebour qui continuait à voter les crédits de guerre au Reichstag. Et Liebknecht était un pauvre utopiste dont le geste en 1916 à la Postdamer Platz était contre-révolutionnaire, parce que crier que le premier ennemi à abattre c'est sa propre bourgeoisie dans un pays où la révolution bourgeoise avait déjà été faite (c'est Vercesi qui le dit) c'était faire le jeu de l'impérialisme adverse.
Et voilà à quelle déduction on est obligé d'arriver avec sa façon d'analyser les divergences entre Lénine et Rosa. Par bonheur pour le prolétariat, Lénine et Rosa ne se sont pas confinés à l'étroitesse "des éléments historiques où ils agirent entre 1914 et 1918". Ils ont posé des problèmes et résolu différemment ces problèmes pour la classe ouvrière en général.
La transformation de la guerre impérialiste en guerre civile a bien représenté la lutte du prolétariat allemand en 1918 malgré l'économie de guerre de Vercesi.
Et dans cette guerre-ci ? Voilà les conclusions que tire Vercesi :
Le prolétariat italien a parodié sa manifestation effective en tant que classe en 1943. Nous n'avons assisté qu'à une simple farce dont les acteurs et victimes ont été les ouvriers de Milan et de Turin.
La farce c'est Vercesi qui, maintenant, la joue dans ce Comité antifasciste, résultat de ses études sur la tactique indirecte. Le prolétariat, au prix de "Abas la guerre!", n'a pas voulu amuser la galerie mais se soustraire effectivement, en tant que classe, à la guerre par une lutte violente que seuls les bombardements et la division dans la tâche de répression ont pu maîtriser momentanément sans parvenir à réintroduire le prolétariat dans la guerre.
Et en Allemagne, où ces derniers mois nous avons assisté à une véritable offensive de la classe ouvrière dans divers centres importants contre l'État nazi, c'est de la mascarade pour Vercesi.
Nous sommes heureux de constater au moins que Vercesi ne se prend pas au sérieux et que toute son économie de guerre ne représente aucune fermentation idéologique. Mais l'ignorance n'est pas un argument car le seul fait de la formation de la Gauche Communiste française qui vit et lutte est un contredit à sa réponse. De plus, quand il aura lu tout le travail effectué par la Gauche Communiste italienne et la Gauche Communiste française - en vue de l'élaboration des positions de classe du prolétariat face à toute la démagogie capitaliste et à la grossière erreur du BI de la Gauche Communiste qui ouvrait en 1938 comme perspective la révolution et non la guerre – peut-être se rendra-t-il compte que c'est lui seul qui est en dehors de la fermentation idéologique qui se fait.
Mais voyons comment il explique son erreur dans le BI en 1938 ?
D'une part Vercesi déclare n'avoir pas saisi que l'échange se réalise au moment même de la production, ce qui l'a conduit à cette erreur, d'autre part il constate, d'après les événements, que toute production exige un marché.
Pourquoi faire un marché puisque l'échange s'effectue au moment même de la production ?
A moins que l'échange et le marché aient, pour Vercesi, des secrets que nous ignorons. Car, jusqu'à nouvel ordre, un marché est la condition nécessaire à l'échange (pour nous du moins). Nous croyons saisir le secret si on se reporte aux expériences de brûlage de café et autres produits pendant les années précédant la guerre. La production de guerre a besoin d'un marché où se déverser non économiquement mais matériellement et dont les soldats seront les consommateurs. Drôle de marché !
Ne pouvait-on pas déverser les obus dans l'océan comme on a fait pour le lait en 1930 ? Que Vercesi fasse cette proposition à la conférence de San Francisco et la paix sera éternelle.
Et nous terminerons ce chapitre par une nouvelle contradiction :
Et l'économie de guerre à quoi sert-elle ? Vraiment Vercesi aurait pu s'épargner tous ses efforts précédents ou bien, comme il le pense, l'échange s'effectue au moment même de la production et alors le prolétariat ne pourra jamais réapparaître.
[1] Confrontez ceci avec la réalisation de la PV par la non-utilité du produit
Liens
[1] https://fr.internationalism.org/tag/conscience-et-organisation/gauche-communiste-france
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