Soumis par Révolution Inte... le
Mercredi 18 avril fut un jour ordinaire à Bagdad. Ce jour-là, comme presque tous les jours de la semaine, des bombes ont explosé en Irak. Ces attentats ont tué plus de 190 personnes, essentiellement des femmes et des enfants. Comme bien souvent auparavant, la cible principale était un marché, celui d'Al-Sadriyah, tout près d'un chantier où travaillaient des ouvriers, venus gagner, au péril de leur vie, le salaire de misère nécessaire à la survie de leur famille. Ces attentats, qui comptent parmi les plus sanglants depuis la chute de Saddam Hussein en 2003, ont été perpétrés sur le même marché qui avait déjà été frappé le 3 février dernier et qui avait fait 130 morts. La volonté de ceux qui perpètrent de tels crimes est de tuer un maximum de personnes. Leur seul objectif est la destruction, l'annihilation d'autres êtres humains, dont l'existence seule est perçue comme celle d'ennemis. C'est le règne de la haine, de la bestialité, d'une société de plus en plus ravagée, dominée par la sauvagerie et la décomposition sociale.
La politique américaine en Irak : un échec sanglant
Au mois de février dernier, l'administration américaine annonçait à grands renforts de déclarations médiatiques un nouveau plan de sécurité pour Bagdad, dénommé Fardh al-Qanoon (Imposer la loi). On allait assister alors à un nouveau déploiement spectaculaire de 85 000 soldats américains et irakiens, dont 30 000 arrivant directement des Etats-Unis. Ce plan avait abouti à l'arrestation de plus de 5000 personnes recherchées par le gouvernement irakien et les Etats-Unis. Pendant quelques semaines, les sanguinaires et tristement célèbres « escadrons de la mort et autres milices lourdement armées » avaient comme par miracle disparu des faubourgs de Bagdad, sans que cela ne ralentisse réellement le rythme des attentats. L'échec de ce dernier plan de sécurité de Bagdad est criant de vérité, à savoir que les assassinats à la chaîne vont pouvoir reprendre leur terrifiant rythme de croisière. Après les attentats au marché d'Al-Sadriyah, lorsque les forces de l'ordre irakiennes ont tenté de se rendre sur place, en principe pour aider la population, elles ont été reçues par des jets de pierre, de la part d'une population totalement désespérée et qui tente, lorsqu'elle le peut, de prendre le chemin de l'exil. Toute la nuit, des affrontements armés ont eu lieu, dans le quartier sunnite d'Al-Adhamiya, sans que personne ne soit en mesure de les interrompre. Le gouvernement américain vient d'annoncer une nouvelle stratégie qui démontre s'il en était encore besoin l'inhumanité et l'impasse totale de la situation. En effet, le 10 avril, l'armée américaine a commencé la construction d'un mur de béton à Bagdad. Les forces américaines érigent depuis de nombreux mois des barrières autour de bastions d'insurgés, comme autour de la ville de Tal Afar, à la frontière avec la Syrie. Mais il s'agit là de la première tentative d'emmurer complètement des quartiers entiers de Bagdad, tels que celui de Dora. Ces murs ne peuvent que nous rappeler ceux qui existent déjà à Gaza ou en Cisjordanie et qui n'ont jamais conduit à un arrêt de la violence et n'ont fait que l'exacerber à une puissance sans cesse renouvelée. Par contre, ils permettent d'y enfermer et d'y laisser crever des populations entières sous le contrôle de la soldatesque de tel ou tel pays ou fraction de la bourgeoisie mondiale.
La bourgeoisie américaine est obligée de reconnaître sa défaite en Irak
Le chef de la majorité démocrate au Congrès américain, Harry Reid, a reconnu pour la première fois officiellement le jeudi 19 avril « [qu'il] croyait que la guerre en Irak était perdue et que l'envoi de renforts décidé en janvier ne parvenait à rien » ( Le Monde du 19 avril 2007). La bourgeoisie américaine est aujourd'hui plus divisée que jamais, devant l'impasse totale de toute politique constructive pour elle-même, en Irak. Le Congrès essentiellement démocrate doit voter la semaine prochaine la loi destinée à financer les opérations militaires en Irak et en Afghanistan pour 2007, texte qui prévoit un retrait programmé dans le temps des troupes américaines d'Irak. Mais, d'ores et déjà, l'administration du président Bush a affirmé qu'elle opposerait à ce vote son droit de veto, réagissant immédiatement à la nouvelle vague d'attentats à Bagdad par l'envoi précipité, le jeudi 19 avril, du secrétaire à la défense américain, Robert Gates. A propos de toutes ces violences, celui-ci a cyniquement déclaré : « Les rebelles vont augmenter la violence pour convaincre le peuple irakien que ce plan est voué à l'échec, mais nous avons l'intention de persister et de prouver que ce ne se sera pas le cas. » (Ibid.) Le message est clair, nous allons poursuivre la même politique en Irak.
Quel avenir pour l'Irak et pour cette région du monde ?
Il y a quelques jours, le chef religieux et militaire chiite Sadr a fait retirer ses six ministres du gouvernement irakien pour appeler, quelques jours après, à des manifestations massives contre la construction de murs à Bagdad. Ces gestes politiques sont autant de gages irréfutables de l'accélération des combats, massacres et attentats que l'Irak va subir dans les semaines à venir. L'unité nationale de l'Irak relève du passé. La confrontation entre les différentes communautés vivant dans ce pays, et notamment sunnites et chiites est appelée à se développer. Il est maintenant bien connu de tous que l'Iran participe activement au développement de la guerre en Irak, et ceci notamment en armant massivement de très nombreuses milices chiites. Et ceci dans le seul but de défendre ses propres intérêts impérialistes dans la région face aux Etats-Unis. L'Iran ne néglige aucun effort pour entretenir la haine entre les communautés chiites et sunnites, dans un Irak déjà complètement ensanglanté. C'est la très grande majorité du monde arabo-musulman qui est ainsi en train de se scinder en deux camps ennemis. La montée accélérée et totalement folle des tensions dans l'ensemble de la région et plus particulièrement entre l'Iran et les Etats-Unis, aux côtés d'Israël, ouvrent la voie à la pire fuite en avant dans la guerre, la barbarie et un chaos généralisé.
Rossi