Soumis par Révolution Inte... le
L’extrême gravité de la situation au Moyen-Orient constitue aujourd’hui un concentré de la barbarie meurtrière que porte en lui le capitalisme. Elle nous montre quel avenir nous réserve ce système dont le seul mode de vie réside dans le développement croissant du militarisme et de la guerre. A l’heure où les principales puissances mondiales se préparent, sous le houlette des USA, à déchaîner dans le Golfe la plus monstrueuse opération militaire jamais mise en place depuis la fin de la seconde guerre mondiale, toutes les forces de la bourgeoisie s’évertuent, à travers un judicieux partage des tâches entre elles, à nous faire accepter la logique meurtrière de ce monde en pleine décomposition. Ainsi, du côté des cliques dirigeantes et autres jusqu’au-boutistes de droite comme de gauche, on nous parle de la nécessité d’un "règlement global" de tous les conflits au Moyen-Orient, on nous présente l’intervention musclée des USA et de leurs acolytes comme un "moindre mal", comme la seule solution possible au chaos croissant, comme l’unique réponse capable de garantir la stabilité et la paix dans le monde. Et pour mieux justifier leurs menées impérialistes, les grandes puissances ne ratent aucune occasion de mettre en exergue le machiavélisme et l’esprit bassement calculateur d’un Saddam Hussein, cherchant à semer la zizanie dans le camp adverse comme on l’a vu encore avec la décision irakienne de libérer les otages français.
Pendant les premières semaines de la crise du Golfe, l’hystérie médiatique qui se déchaînait dans les principaux pays occidentaux cherchait à nous faire adhérer à cette croisade du monde civilisé contre le "boucher de Bagdad". Aujourd’hui, alors que dans tous les pays l’accélération de la crise économique contraint la bourgeoisie à imposer partout et immédiatement des plans d’austérités draconiennes à la classe ouvrière (cf. p.4), toute cette campagne belliciste commence à s’émousser. Face à la brutalité des attaques frontales, massives, contre toutes les conditions de vie du prolétariat, il est maintenant bien plus difficile pour la bourgeoisie d’amener les masses ouvrières à resserrer les rangs derrière l’union sacrée de tous les massacreurs, à faire cause commune avec leurs propres exploiteurs.
Les campagnes pacifistes : un piège tendu au prolétariat
C’est bien pour cela que depuis le début du mois d’octobre, en France comme aux USA comme dans tous les pays, on a vu toutes les fractions de gauche et d’extrême- gauche du capital, prendre le relai de ces campagnes en déversant le mensonge de l’idéologie pacifiste qui ne vise qu’à mystifier la classe ouvrière afin de 1’ enchaîner & la logique capitaliste (cf. article ci-dessous). Partout, on a vu se déployer des mobilisations "contre la guerre", des manifestations "pacifistes" orchestrées par toutes Les forces d’encadrement bourgeoises regroupées en fronts uniques soi-disant "anti-impérialistes". Du PCF aux anarchistes en passant par les trotskistes, tous nous ont appelés à descendre dans la rue “pour le retrait des troupes occidentales" au "pour l’ouverture d’une logique de paix*, ou encore pour "la recherche d’une solution négociée" dans la crise du Golfe.
Le roucoulement unanime de toutes ces colombes n’est en réalité qu’un piège pernicieux tendu à la classe ouvrière. D’abord parce que tous ces gens-là, qui prétendent défendre ses intérêts avec leur phraséologie radicale, ont toujours été, dans toutes les guerres, les pires sergents recruteurs ne visant rien d’autre qu’ à enchaîner les ouvriers derrière une fraction bourgeoise contre une autre (comme en témoigne encore aujourd’hui l’ignoble hypocrisie des trotskystes dont la participation aux campagnes "pacifistes" ne sert qu’à masquer leur soutien à l’impérialisme irakien) (et RI n°194). Ensuite parce que l’idéologie "pacifiste" qu’on nous ressert aujourd’hui comme seule alternative à la guerre est un mensonge qui ne vise qu’à semer l’illusion suivant laquelle la paix serait possible dans le capitalisme. Enfin et surtout, toute cette agitation “contre la guerre" est un moyen pour les forces d’encadrement capitalistes de récupérer la préoccupation des ouvriers face à la barbarie guerrière afin de les dévoyer sur un terrain pourri, les détourner de la seule perspective capable de mettre réellement un terme à la guerre et aux massacres : la destruction de fond en comble du capitalisme par le prolétariat mondial. Ainsi, si toutes les forces de gauche et d’extrême gauche dans l’opposition nous appelle aujourd’hui à nous mobiliser derrière leurs bannières "pacifistes", c’est pour nous empêcher de prendre conscience des véritables causes de la guerre, pour nous empêcher de comprendre que c’est la même logique barbare du capitalisme qui engendre la misère et le chômage croissants dans les pays les plus industrialisés, les famines, le chaos, les bains de sang dans les pays sous-développés.
Cette logique, c’est celle d’une crise économique mondiale sans issue, qui, en s’aggravant inexorablement, ne peut qu’exacerber la concurrence entre les différentes bourgeoisies nationales sur un marché mondial de plus en plus restreint. C’est cette logique capitaliste qui contraint toujours plus la classe dominante de tous les pays, pour défendre la compétitivité de ses marchandises, à réduire les coûts de production, à travers une attaque toujours plus féroce de toutes les conditions de vie des ouvriers : baisses de salaires, augmentation des cadences de travail, licenciements massifs... Et comme cette crise de surproduction généralisée ne peut être surmontée, la guerre commerciale qu’elle entraîne entre les différentes nations ne peut que déboucher sur la guerre des armes, sur l’exacerbation des affrontements militaires de plus en plus sanglants. Aujourd’hui, alors que c’est tout le capitalisme qui s’enfonce dans le chaos, ces conflits guerriers ne peuvent que se déchaîner à une échelle jamais vue par le passé (cf. RI n°193 et 194).
Alors que le capitalisme montre de plus en plus ouvertement sa faillite, son incapacité à offrir un avenir à l’humanité, alors que se déchaînent simultanément des attaques anti-ouvrières sans précédent et la barbarie guerrière, comme conséquence d’une seule et même logique, celle de la crise insoluble, mortelle du capitalisme, c’est justement cette réalité, ce lien entre la crise économique et la guerre, que les campagnes "pacifistes" visent aujourd’hui à masquer aux yeux des ouvriers.
Seul le prolétariat peut apporter une réponse à la barbarie guerrière
Si aujourd’hui les fractions de gauche et d’"extrême gauche de l’appareil politique du capital utilisent à fond une telle mystification, si dans leurs grandes manifestations "pacifistes” elles appellent les prolétaires à se diluer dans la "population" en général, c’est précisément pour empêcher la classe ouvrière de développer sa propre réponse à la barbarie capitaliste, la seule qui soit en mesure de s’opposer réellement à la logique infernale de ce système de misère et de mort : la lutte autonome de classe du prolétariat mondial.
Cette lutte doit s’attaquer aux racines de toute cette barbarie, c’est-à-dire au capitalisme dans son ensemble. Elle passe par les combats de résistance du prolétariat, comme classe exploitée, aux attaques économiques de la bourgeoisie. Mais les prolétaires ne doivent pas concevoir ces combats comme une simple lutte de défense de leurs intérêts immédiats. Ils doivent aussi et surtout les comprendre comme une étape vers le renversement du capitalisme. Un moment où la classe ouvrière forge ses armes, sa solidarité, son unité et sa conscience, en vue de cet affrontement décisif contre un système qui ne peut apporter que toujours plus de misère, de massacres et, au bout du compte, la destruction de l’humanité.
Dès à présent, les luttes que mènent depuis 20 ans le prolétariat dans les pays centraux du capitalisme, les pays avancés d’Occident, constituent un frein à la barbarie guerrière en empêchant la bourgeoisie de ces pays de mobiliser massivement les ouvriers dans la guerre. En ce sens, la seule et véritable solidarité que puissent exprimer les prolétaires des pays centraux envers leurs frères de classe des pays du tiers- monde consiste dans le développement de leurs combats contre le capitalisme. Seul le développement des luttes ouvrières dans les principales puissances occidentales est en mesure d’empêcher la bourgeoisie de nous envoyer répandre le sang et l’horreur, massacrer nos frères de classes embrigadés sous les drapeaux de "leur" propre bourgeoisie nationale dans les autres pays. Plus les combats du prolétariat des grandes concentrations industrielles d’Occident seront puissants et moins la bourgeoisie aura les mains libres pour s’impliquer massivement dans de nouvelles croisades impérialistes toujours plus meurtrières.
Pour continuer à être frein à la guerre et se préparer à renverser le capitalisme, la classe ouvrière doit se détourner de toutes les sirènes de la bourgeoisie, qu’elles soient bellicistes ou pacifistes, qui tentent de l’entraîner hors de son terrain de classe, à miner sa prise de conscience des véritables enjeux de son combat afin de l’enchaîner à la logique du système. Elle ne doit pas se laisser intimider, démoraliser, paralyser par les bruits de bottes, par le spectacle terrifiant de la barbarie qui se déchaîne aujourd’hui dans le Golfe persique. Elle doit comprendre qu’elle seule détient la clef de toute la situation historique, qu’elle seule est une force porteuse d’avenir pour l’humanité, l’unique espoir de survie pour toute la société dans ce monde en pleine décomposition (cf p.8). Ce n’est qu’en prenant conscience de la gravité de la situation présente et de l’immense responsabilité qui repose sur ses épaules que la classe ouvrière doit développer ja confiance en ses propres forces. Plus que jamais, la barbarie guerrière du capitalisme doit renforcer la détermination du prolétariat à mener jusqu’au bout sa lutte à mort contre ce système avant qu’il ne détruise toute la planète.
Avril (27/10/90)