Golfe persique : le capitalisme, c'est la guerre

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Au moment où nous écrivons, les forces armées américaines encerclent et asphyxient l'Irak. De toute évidence, nous allons vers un affrontement meurtrier dont les populations de la région vont faire les frais, victimes des privations, victimes des bombardements, des gaz, de la terreur. Victimes de la guerre. Victimes du capitalisme.

L'invasion du Koweït par l'Irak résulte fondamentalement de la nouvelle situation historique ouverte par l'effondrement du bloc de l'Est. Elle est aussi une manifestation de la décomposition croissante qui touche le système capitaliste. Et le gigantesque déploiement de forces armées des grandes puissances, essentiellement des USA à vrai dire, révèle, pour sa part, la préoccupation croissante de ces dernières à l'égard du désordre qui s'étend de plus en plus. Mais, à terme, les réactions des grandes puissances ne pourront donner que le résultat inverse de celui attendu, se transformant en un facteur supplémentaire de déstabilisation et de désordre. A terme, elles ne peuvent qu'accélérer encore la chute dans le chaos et y entraîner l'humanité entière. Il n'est qu'une seule force qui puisse offrir une alternative, c'est le prolétariat mondial. Et cette alternative a pour nom : le communisme.


Que n'a-t-on entendu depuis la disparition du bloc de l’Est ? Une ère nouvelle de paix et de prospérité s'ouvrait. En collaborant, les USA et PURSS allaient permettre d'en terminer avec les conflits qui n'ont cessé de ravager le monde depuis 1945. Perpétuant le mensonge stalinien sur le caractère socialiste de l'URSS et des pays de l'Est, la bour­geoisie occidentale proclamait la victoire du capitalisme sur "le communisme", sur "le marxisme". Les pays de l'Est allaient connaître les délices du capitalisme sous sa forme occidentale et leur marché relancer l'économie mondiale. Le meilleur des mondes enfin s'offrait à nous. Marx était rangé au rayon des vieilleries, au mieux une curiosité. Lénine était triomphalement sacré "le mort de l'année" dans la presse. Certains idéologues bourgeois, enthousiastes, allaient même jusqu'à proclamer la fin de l'histoire !

Six mois. Six mois auront suffi pour mettre à bas toutes ces chimères, tous ces mensonges. Comme l'affirmaient et continuent d'affirmer les groupes communistes, les organi­sations qui sont réellement fidèles au marxisme, le capita­lisme s'enfonce inexorablement dans la catastrophe écono­mique ([1]). Les pays de la périphérie, dits du "tiers-monde", sont un enfer quotidien pour l'immense majorité de leurs habitants ; un enfer qui ne cesse d'empirer. Les pays de l'ex-bloc de l'Est plongent du marasme économique propre au capitalisme d'Etat stalinien, dans le désastre le plus complet et le plus dramatique pour des millions d'êtres humains. Sans espoir aucun d'amélioration, ni même d'arrêt dans la détérioration. Les USA entrent dans la récession ouverte, et ouvertement reconnue par la bour­geoisie elle-même. C'est la première puissance économique qui chute, entraînant déjà, telle la Grande-Bretagne, les principaux pays industriels du monde.

Six mois plus tard, les grandes proclamations sur la paix sont réduites à néant par le conflit au Moyen-Orient. Et, "le mort de l'année", Lénine, revient affirmer avec force qu"'e/2 régime capitaliste, et particulièrement à son stade impérialiste, les guerres sont inévitables". ([2])

L'illusion n'aura duré que six mois. Les masques tombent et la réalité du capitalisme en décomposition s'impose à tous, barbare, implacable, faite de misère, de faim, de catas­trophes, de chantages et de prises d'otages, d'assassinats et de répressions, de massacres, de guerres, réalité de sang et de boue comme disait déjà K. Marx en son temps à propos d'un capitalisme encore en plein développement, et qui se révèle bien pire dans sa période actuelle de sénilité.

Les mensonges s'effondrent et la nouvelle situation histo­rique, ouverte par l'effondrement des pays capitalistes d'Etat staliniens et la disparition des deux blocs impéria­listes Ouest et Est, loin d'ouvrir une période de paix, nous apparaît dans toute son horreur. La fin de la "Guerre froide" ne signifie pas la fin des conflits impérialistes.

"Dans la période de décadence du capitalisme, TOUS les Etats sont impérialistes et prennent les dispositions pour assumer cette réalité: économie de guerre, armements, etc. C'est pour cela que l’aggravation des convulsions de l’économie mondiale ne pourra qu'attiser les déchirements entre ces différents Etats, y compris, et de plus en plus, sur le plan militaire. La différence avec la période qui vient de se terminer, c'est que ces déchirements et antagonismes, qui auparavant étaient contenus et utilisés par les deux grands blocs impérialistes, vont maintenant passer au premier plan. La disparition du gendarme impérialiste russe, et celle qui va en découler pour le gendarme américain vis-à-vis de ses prin­cipaux 'partenaires' d'hier, ouvrent la porte au déchaînement de toute une série de rivalités plus locales. Ces rivalités et affrontements ne peuvent pas, à l'heure actuelle, dégénérer en un conflit mondial (même en supposant que le prolétariat ne soit plus en mesure de s'y opposer). En revanche, du fait de la disparition de la discipline imposée par la présence des blocs, ces conflits risquent d'être plus violents et plus nom­breux, en particulier, évidemment, dans les zones où le prolétariat est le plus faible." {Revue Internationale n°61, 10 février 1990).

Six mois plus tard, la réalité de la société capitaliste, réalité d'un système pourrissant, se décomposant et s'enfonçant chaque jour plus dans le chaos, est venue avec éclat confir­mer nos propos d'alors.

L’invasion du Koweït par l'Irak est un moment de la chute dans le chaos.

La prospérité et la paix, nous disait-on après la chute du mur de Berlin. La crise et la guerre, oui ! Voilà ce que signifie le conflit au Moyen-Orient. La guerre avec l'Irak n'est pas simplement le fait d'un nouvel "Hitler". Après les événements d'Europe de l'Est, elle est une autre manifes­tation d'ampleur de la période de décomposition que vit le capitalisme. Elle est le produit de la nouvelle situation his­torique ouverte avec l'effondrement du bloc de l'Est, le produit de la tendance croissante à la perte de contrôle de la situation par la bourgeoisie mondiale, du développement du chacun pour soi, de la guerre de tous contre tous, de l'instabilité et de l'anarchie croissante du monde capitaliste.

Contrairement à ce qu'on nous rabâche, l'aspect marquant dans la crise du Golfe n'est pas tant l'unanimité des grandes puissances pour condamner et contrer l'Irak - nous y reviendrons - mais bel et bien, le fait nouveau qu'un pays comme l'Irak s'aventure à défier l'ordre établi dans la région par la première puissance mondiale, sans l'assentiment, le soutien, d'une autre grande puissance. Hier, c'est-à-dire il y a encore un an, Saddam Hussein eut été vite ramené à la raison par la logique supérieure de l'opposition des deux blocs impérialistes. Aujourd'hui, son aventure a déjà irrémédiablement changé et déstabilisé tout le Moyen-Orient. Ce sont maintenant tous les pays de la région, ceux de la péninsule arabe, la Jordanie, la Syrie même, qui entrent dans une ère d'instabilité. C'est toute la région qui tend à se "libaniser" à son tour.

Inévitablement, les conflits de ce type, de plus en plus nom­breux, de plus en plus incontrôlés par les grandes puis­sances, vont se multiplier dans le monde à cause de la catastrophe économique qui touche tous les pays, petits ou grands et d'une situation mondiale où a cessé d'exister la discipline de chacun des deux blocs. De ce fait, les petits Etats dans l'impasse sont de plus en plus poussés dans des aventures militaires.

Après la guerre contre l'Iran, horrible boucherie qui a fait un million de morts, l'Irak s'est retrouvé avec une dette de plus de 70 milliards de dollars pour une population de 17 millions d'habitants (4 000 dollars de dette par personne, femmes, enfants et vieillards compris !) et une armée... d'un million de soldats.

Le pays est incapable de rembourser quoi que ce soit. Complètement asphyxié, il n'avait pas d'autre alternative que de jouer son va-tout avec la seule carte à sa disposi­tion : la plus grande armée de la région. Non seulement, il a essayé de réaliser un hold-up sur le trésor du Koweït, mais aussi de s'affirmer comme la puissance dominante de toute cette partie du monde, si importante du point de vue éco­nomique et stratégique. C'est là l'inéluctable voie, impéria­liste, que la situation de crise économique croissante et la décadence de la société capitaliste imposent de suivre à tous les Etats. Et qui, de manière encore plus exacerbée dans la période de décomposition, mènent de la guerre commerciale à la guerre impérialiste.

Hussein n'est pas qu'un fou. Il est aussi l'homme de la situation, le produit du capitalisme, du capitalisme actuel. Il est la créature même de ceux qui le combattent aujourd'hui. Hier, les grandes puissances occidentales n'avaient pas assez de mots pour louer sa clairvoyance, son courage, son mérite, sa grandeur, quand l'Irak se faisait l'instrument de leur politique visant à remettre au pas l'Iran de Khomeiny. Hier, les grandes démocraties occidentales ont elles-mêmes armé l'Irak des engins de morts les plus modernes. Et elles ont continué à le faire sans retenue, ni le moindre état d'âme, alors même qu'il utilisait ces moyens pour bombarder et terroriser les populations civiles des grandes villes d'Iran, et gazer, en Irak même, des villes kurdes.

Elles n'ont arrêté, ou limité les livraisons militaires, que lorsque l'Irak n'a pu payer plus longtemps, et les fournitures, et ses dettes. Voilà ce qu'entend la bourgeoisie mondiale par la défense du "droit international" et des "Droits de l'homme".

Particulièrement répugnante est l'utilisation cynique des milliers d'otages par l'Irak et par... les puissances occidentales. Il est vrai que la prise d'otages par Saddam Hussein   est particulièrement odieuse. Elle est le fait d'une bête traquée, encerclée, qui ne sait comment se sortir d'affaire.

 

Mais elle est surtout utilisée sciemment par la bourgeoisie occidentale pour développer une campagne propagandiste       terrible afin de justifier et d'essayer d'enrôler les populations derrière ses objectifs guerriers. Si nécessaire, elle    n'hésitera pas à sacrifier les otages, reportant sur le "boucher de Bagdad", comme on le présente aujourd'hui dans la     presse bourgeoise, ses propres responsabilités. Est-il besoin de rappeler l'utilisation éhontée des otages de l'ambassade  américaine en Iran en 1979 dont on vient de révéler qu'elle 1a permise à la CIA - dont le directeur à l'époque était G.           Bush ! - de faire élire Reagan et d'augmenter les crédits militaires. ([3])

N'ayons aucune illusion : tous les moyens, et les plus ignobles, et les plus barbares, la terreur et le terrorisme tout particulièrement, vont être de plus en plus utilisés dans les conflits à venir par les différents Etats. Car, inévitable­ment d'autres conflits vont surgir, d'autres Hussein armés par les grandes puissances, soutenus par elles, produits par le capitalisme, vont se lancer dans des guerres du même type. Les conflits impérialistes locaux, produits du chaos croissant dans lequel s'enfonce le capitalisme mondial, vont          devenir facteur aggravant et accélérateur de ce chaos.

LES USA S'IMPOSENT COMME SEULS CAPABLES DE JOUER LE ROLE DE GENDARME AU NIVEAU MONDIAL

Face à cette tendance irréversible au chaos, les grandes puissances mondiales essayent de réagir. Tout comme les pays occidentaux continuent d'apporter leur soutien à Gorbatchev face à l'explosion et à l'anarchie en URSS, de         1 même, face à l'aventure irakienne, aux dangers de déstabilisations qu'elle contient, ils ne pouvaient rester  passifs.     L'unanimité des grandes puissances pour condamner l'Irak exprime la conscience du danger et la volonté de limiter et     de s'opposer à l'éclatement de ce type de conflits. Non pour la paix universelle évidemment, ni même pour le bien-être des populations, mais pour assurer leur puissance et leur main-mise sur le monde. Ce qu'elles appellent la "paix" et la "civilisation", et qui n'est que l'impérialisme brutal et barbare, le pouvoir du plus fort sur le plus faible. Bien sûr, ce sont les Etats-Unis, la première puissance mondiale, qui ont réagi avec le plus de détermination et d'ampleur. Les mesures de blocus adoptées à PONU ont été imposées avant tout par les USA. L'intervention des forces militaires occidentales s'est faite sous le leadership inflexible de cette puissance.

Ces derniers ne pouvaient laisser, sans réaction, la pénin­sule arabe plonger dans la guerre, et laisser à l'Irak d'Hussein le contrôle des principales réserves mondiales de pétrole. Surtout, ils veulent mettre le holà aux aspirations impérialistes, aventuristes et guerrières de tous ceux, de plus en plus nombreux de par le monde, qui seraient tentés d'imiter Saddam Hussein.

Le parrain de la mafia toute puissante n'aime pas que des petits truands de quartier se croient tout permis, et gênent la bonne marche des affaires en provoquant des braquages intempestifs qu'il n'a pas autorisés. De plus, il ne peut accepter que son autorité, et la peur qu'il inspire, soient mises en question. De là vient le formidable déploiement militaire américain, non seulement pour laver l'affront dans le sang, pour punir l'Irak, et probablement même se débar­rasser d'Hussein, mais aussi pour faire un exemple aux yeux du monde et tenter de porter un coup d'arrêt au développe­ment du chaos.

L'engagement américain est le plus important depuis la guerre du Vietnam et s'appuie sur la plus grosse opération logistique depuis la seconde Guerre mondiale, selon les généraux US. Plus de 100 000 hommes se trouvent déjà sur le terrain en Arabie Saoudite. Deux porte-avions dans la mer d'Oman, et deux autres en Méditerranée. Les bombar­diers les plus sophistiqués, les F-lll et les F-117, dits "furtifs" car indétectables, sont basés en Turquie et en Arabie. Jusqu'à 700 avions, dont 500 de chasse, sont présents du côté américain. D'innombrables missiles sont braqués sur l'Irak. Bien que cette information soit supposée secrète, les journalistes bourgeois admiratifs et va-t-en guerre, tout excités à l'approche de la guerre franche et joyeuse, nous révèlent que des sous-marins nucléaires d'attaque sont pré­sents autour des porte-avions. De la mer d'Oman, ou de l'Ouest de Chypre, ils pourraient bombarder Bagdad avec une précision de 500 mètres nous dit-on. Mais, ce n'est rien à côté des missiles de croisière que peuvent lancer les cui­rassés américains également présents qui peuvent, eux, frapper une cible à Bagdad à quelques mètres près. Fantas­tique, non ? Pour les journalistes : une merveille d'efficacité. A vrai dire, un cauchemar.

Un cauchemar parce que nous savons très bien que la bourgeoisie, quelle que soit sa nationalité, est tout à fait capable de bombardements massifs de civils. Parce que nous savons très bien que la bourgeoisie américaine, saluée par ses alliées de l'époque, n'avait pas hésité à balancer des bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki en août 1945 alors que le Japon demandait l'armistice depuis un mois, simplement # pour arrêter l'avancée de... l'URSS en Extrême-Orient ([4]). Parce que l'aviation US a montré son savoir-faire sur cible réelle et humaine en bombardant Panama (décembre 1989), les quartiers pauvres de préfé­rence, faisant 10 000 morts, tout comme Tripoli (mars 1986). Parce que nous savons très bien que Bush et ses alliés peuvent décider de raser Bagdad - avec ou sans otages - pour faire un exemple, tout comme Saddam Hus­sein avait gazé la population kurde. C'est le capitalisme, le meilleur des mondes, qui prend des millions d'êtres humains en otages et n’hésite pas à les sacrifier quand nécessaire.

 

Les armes déployées sont en quantités énormes et incroya­blement meurtrières. Bush a menacé de riposter à l'utilisation de gaz par l'Irak par d'autres gaz, et même par des moyens atomiques. L'horreur se banalise et la menace de l'emploi de l'arme nucléaire devient naturelle, dans l'ordre des choses. Plus personne ne s'en offusque. Pas même les pacifistes bourgeois qui ne sont pacifistes en général qu'en temps de paix, et d'autant plus violemment bellicistes lorsque éclatent les conflits.

Mais l'hypocrisie et le cynisme ne s'arrêtent pas là. Certes, discrètement, il apparaît que les USA auraient délibéré­ment laissé l'Irak s'engager dans l'aventure guerrière. La presse bourgeoise internationale a fait part d'informations dans ce sens. Par exemple, les services de renseignement français "ne s'interdisent pas dépenser que les services améri­cains disposaient d'informations précises tendant à prouver les préparatifs irakiens d'invasion du Koweït (...) Auraient-ils profité de cette 'circonstance attendue', selon le mot d'un haut fonctionnaire, pour justifier un face à face militaire depuis plusieurs mois ? Les arrière-pensées américaines n'auraient-elles pas consisté à attendre que M. Saddam Hussein aille 'à la faute', provoquant de lui-même l'occasion pour les Etats-Unis sinon de le renverser, du moins de détruire, 'en toute légitimité', des infrastructures militaires irakiennes straté­giques susceptibles de doter le régime de Bagdad de l'arme nucléaire ?" ([5]). Vrai ou faux, et c'est sans doute vrai ([6]), cela nous éclaire sur les moeurs et les pratiques de la bourgeoisie, sur ses mensonges, ses manipulations, sur l'utilisation qu'elle fait des événements. Si c'est vrai, et c'est sans doute vrai, on mesure encore mieux l'utilisation cynique qu'elle fait des milliers d'otages retenus par l'Irak pour préparer les "opinions publiques" à l'intervention militaire directe.

Mais vrai ou faux, il n'empêche que l'Irak n'avait pas le choix comme nous l'avons vu précédemment. Ce pays était acculé à une telle politique. Et les USA ont laissé faire, favorisé et exploité l'aventure guerrière de Saddam Hus­sein, conscients qu'ils étaient de la situation de chaos crois­sant, conscients de la nécessité de faire un exemple.

L'URSS : une puissance impérialiste de second ordre

Chaque jour il se confirme que l'URSS est tombée au niveau d'une puissance de deuxième ordre. Dans ce conflit, en dépit de la perte du marché irakien pour ses armements, elle n'avait pas d'autre issue que de se ranger derrière la politique et la puissance américaines. C'est ce qu'elle a fait depuis le début, tout particulièrement à l'ONU. De ce point de vue, l'attitude des Etats-Unis envers Gorbatchev est significative : Bush n'hésite pas à le convoquer quand il l'estime nécessaire. Certes à Helsinki, il y met des formes. Mais celles-ci doivent être comprises comme une aide visant à renforcer le pouvoir fragile de Gorbatchev en URSS même, en échange, évidemment, de son soutien dans le conflit avec l'Irak.

L'économie de l'URSS, dont le délabrement atteint des niveaux hallucinants, dépend de façon croissante du soutien des pays occidentaux. Les émeutes se multiplient contre les pénuries. L'absence de tabac et de vodka ont donné lieu à des violentes émeutes faisant de nombreux blessés. Même les biens de première nécessité, comme le pain, commen­cent à manquer ! De véritables famines ne sont plus très loin.

La situation de guerre civile dans laquelle se trouve un grand nombre de Républiques - dont presque toutes se sont déclarées souveraines ou indépendantes -, les pogroms et les massacres entre nationalités, les affrontements au sein même des communautés entre milices rivales (Arménie), en disent long sur l'état d'éclatement et de désordre dans lequel se trouve l'URSS. Sa principale préoccupation : que le chaos externe, et particulièrement au Moyen-Orient, si proche de ses frontières et de ses républiques musulmanes, se développe sans retenue et vienne à son tour aggraver encore le chaos, déjà dramatique, interne à l'URSS. Voilà pourquoi, elle se range derrière les USA dans le conflit. On est loin de la situation où l'URSS, à la tête du bloc de l'Est, tentait de verser de l'huile sur le feu du moindre conflit local afin de remettre en cause un statu quo favorable au bloc occidental.

Sa faible participation à l'opération de police du Golfe, dont, pourtant, elle partage pleinement les objectifs, révèle l'état d'affaiblissement de sa puissance militaire, qui ne peut pas se mesurer en nombre de navires, avions, missiles, tanks et soldats, mais en niveau de désagrégation d'une "Armée rouge" déjà incapable de maîtriser la situation interne (comme par exemple de désarmer les milices armé­niennes). Les arguments donnés par un officiel russe pour justifier cette faible participation ("contrairement à Vannée américaine, l’armée rouge n'a pas pour vocation d'intervenir en dehors des frontières et ne Va jamais fait") - quel culot !-en dit long sur l'impuissance de l'URSS.

La guerre au Moyen-Orient confirme que l’URSS ne peut plus jouer le rôle de tête d'un bloc impérialiste, qu'elle ne peut avoir la moindre politique étrangère propre. En moins d'un an, l’ex-deuxième puissance mondiale a été ramenée à un statut inférieur à celui de l'Allemagne, du Japon et même de la Grande-Bretagne ou de la France.

Le nouvel ordre impérialiste : la guerre de tous contre tous

L'ampleur des moyens militaires mis en oeuvre par les USA et l'intransigeance dont ils font preuve, témoignent de leur volonté de mettre à profit la situation créée par l'aventure irakienne pour affirmer clairement leur "leader­ship" sur l'ensemble du monde. Alors que le Japon ou les pays européens (en particulier l'Allemagne) pourraient être tentés, à la faveur de la disparition de toute menace prove­nant de l'URSS, de rompre quelque peu la discipline qu'ils avaient observée jusqu'à présent, et de pousser leurs avan­tages économiques face à une économie américaine de moins en moins compétitive, la démonstration de force des Etats-Unis permet fort opportunément à ce pays de faire la preuve qu'il est le principal "gendarme" du monde.

D'ores et déjà, les USA vont sortir renforcés de cette guerre locale vis-à-vis des autres grands pays avancés qui auront fait la preuve de leur impuissance pour assurer la stabilité du monde par eux-mêmes. Avec la tendance crois­sante à une dislocation de tout le système de relations internationales, il revient bien aux seuls Etats-Unis de ne plus compter sur aucun autre pays pour faire la police dans une zone aussi cruciale, et dont l'instabilité ne disparaîtra pas après la punition infligée à l'Irak. Les Etats-Unis sont décidés à maintenir une présence militaire massive au Moyen-Orient. Les premières déclarations d'officiels par­lent déjà de rester au moins jusqu'en 1992.

De plus, le contrôle américain sur cette région du monde, éminemment stratégique, première réserve de pétrole de la planète, va se trouver accentué. Or, ce contrôle va se révé­ler précieux dans le cadre de l'accentuation de la guerre commerciale avec l'Europe et Je Japon.

Et afin de lever tout malentendu éventuel, la presse améri­caine met les points sur les "i", profitant du marchandage sur la participation aux frais de l'opération US "Bouclier du désert" : "ni l'Allemagne, ni le Japon n'ont commencé à contribuer à un niveau équivalent à leur besoin d'un approvi­sionnement sûr en pétrole. Bien sûr, Bonn est occupée par la réunification. Cependant, l'Allemagne aurait tort de sous-estimer sa dette face au sacrifice américain. C'est encore plus vrai pour Tokyo." ([7])

Nous le voyons, l’unanimité des grands pays industrialisés pour condamner et contrer l'Irak n'est pas le produit d'une bonne volonté pacifique, comme l'a présentée la presse bourgeoise, mais le fruit d'un rapport de forces entre elles, dans lequel les USA imposent leur domination militaire, et dans lequel aucune autre puissance ne se dégage pour jouer le rôle, tenu par l'URSS auparavant, de chef d'un bloc impérialiste antagonique. Dans ce sens, l'unanimité entre les grandes puissances pour condamner l'Irak, n'est pas le produit de la paix, ni un facteur de paix, mais le produit des rivalités d'intérêts impérialistes et facteur d'aggravation de celles-ci.

Cette unanimité, imposée, a mis en évidence aux yeux des bourgeoisies allemande et japonaise leur impuissance poli­tique, alors qu'elles sont des "géants économiques". D'où des déclarations croissantes en leur sein, pour changer leurs Constitutions héritées de la défaite de 1945, qui limitent leurs forces armées et leur champ d'intervention. On ne peut être plus clair sur ce que signifie, pour la bourgeoisie, la diplomatie et la politique internationale : c'est la diplo­matie et la politique des armes, de la force militaire. Mais même si des changements sont adoptés dans ces Constitu­tions, il en coûtera de l'argent, et surtout du temps, avant que ces deux pays puissent se doter d'une force militaire adaptée à leurs ambitions impérialistes, c'est-à-dire capable de rivaliser avec les USA sur ce terrain.

Le capitalisme précipite l'humanité dans le gouffre de la barbarie.

Au moment où nous écrivons, depuis le 2 Août, jour de l'invasion du Koweït, aucun élément n'est venu contredire, ou ralentir, la dynamique vers une action militaire US contre l'Irak. Toutes les démarches diplomatiques apparais­sent clairement pour ce qu'elles sont : une préparation à la guerre. D'ailleurs, toutes les offres de négociation propo­sées par Hussein ont été rejetées par Bush qui exige que l'armée irakienne se retire du Koweït. C'est à ce prix, et encore ce n'est même pas sûr, que la guerre pourrait être évitée. Ce retrait constituerait pour Saddam Hussein un suicide politique et, sans doute aussi, un suicide tout court. On le voit mal, maintenant, se plier au diktat des grandes puissances. Il ne peut qu'aller de l'avant dans son aventure.

Dans un premier temps, l'intervention US va marquer un coup d'arrêt à la déstabilisation au Moyen-Orient. Mais juste un coup d'arrêt, et non un renversement de la ten­dance croissante à la "libanisation" de la région. De même, elle va tendre à marquer un coup d'arrêt à l'éclatement de ce genre de conflit dans le monde, mais, là aussi, sans réus­sir à inverser la tendance. Car la remise en ordre, leur ordre, que les USA vont imposer, sera basé sur la force militaire. Et uniquement sur celle-ci. Or un ordre basé sur la terreur n'est jamais tout à fait stable, et encore moins aujourd'hui, dans une période de crise économique mon­diale catastrophique, de tensions locales croissantes. Le futur est à l'explosion des guerres locales et civiles. Et ce futur est proche. A vrai dire, il est même déjà, en grande partie, le présent.

Tant de conflits existent. Les affrontements militaires sont réguliers à la frontière entre le Pakistan et l'Inde. Et ces deux pays, eux, sont déjà dotés de la bombe atomique... La guerre en Afghanistan se poursuit sans discontinuer, meur­trière. Au Cambodge. Au Liban. La liste est longue. C'est ça, le capitalisme.

Au Libéria, la population est livrée à la terreur depuis des mois (2 000 Ghanéens pris en otages), aux viols, aux exac­tions et massacres de bandes armées, essentiellement tri­bales, ivres de sang et de tueries. Et cela, d'ailleurs, sous l'oeil impavide des médias occidentaux et d'une flottille militaire US ancrée au large de Monrovia. Mais le Libéria ne présente pas d'intérêts économiques et stratégiques comme le Moyen-Orient.

En fait, c'est une grande partie de l'Afrique que les bour­geoisies occidentales abandonnent à sa détresse. Le désin­térêt croissant des grandes puissances pour la situation de chaos qui prévaut en Afrique en dit long, à la fois sur leur cynisme et leur impuissance à contrecarrer la chute dans la décomposition.

Car l'Afrique est particulièrement exemplaire de ce que nous prépare le capitalisme pourrissant sur pied. Les émeutes, les massacres, les guerres, de plus en plus nom­breuses, et de plus en plus meurtrières, presque toujours d'ordre tribal, se multiplient : au Libéria, nous l'avons vu, mais aussi au Soudan, en Ethiopie, dans les anciennes colo­nies françaises, en Afrique du Sud même, opposant les par­tisans de Mandela aux partisans de Buthelezi, etc. Est-il besoin de rappeler ici les famines, les épidémies de mala­dies qui avaient pratiquement disparu (comme le palu­disme), du Sida, etc., tout cela au milieu d'une corruption effrénée. Mais n'est-ce pas là ce qui se passe aussi déjà dans nombre de pays d'Asie, voire en URSS ? Et c'est la seule perspective que peut nous offrir aujourd'hui le capitalisme.

Cette plongée dans le gouffre de la misère la plus noire s'accompagne d'une décomposition de toutes les valeurs d'ordre moral que pouvait avoir le capitalisme. On le voit très bien avec le conflit au Moyen-Orient. L'impudence, l'hypocrisie, le mensonge et la corruption à tous les niveaux, le gangstérisme et le chantage à échelle planétaire sur la vie de millions d'êtres humains, le terrorisme aveugle, le meurtre et l'assassinat, sont érigés en principes de gouver­nement. Ils sont même la marque de l'homme d'Etat accompli : est un grand stratège celui qui prend eh otage des milliers d'hommes. Est encore plus grand et respecté celui qui n'hésitera pas à sacrifier ces mêmes otages sur l'autel des principes et du droit bourgeois.

Que ce soit au niveau économique, social, politique, idéolo­gique, au niveau même de sa morale et de ses principes, ce système a fait faillite et entraîne de plus en plus vite l'humanité entière dans la catastrophe économique et guerrière.

La classe ouvrière mondiale est la seule force qui puisse présenter une autre perspective

"Historiquement, le dilemme devant lequel se trouve l'humanité d'aujourd'hui se pose de la façon suivante : chute dans la barbarie, ou salut par le socialisme. (...) Ainsi nous vivons aujourd'hui la vérité que justement Marx et Engels ont formulée pour la première fois, comme base scientifique du socialisme dans le grand document qu'est le Manifeste Communiste : le socialisme est devenu une nécessité histo­rique (...) non seulement parce que le prolétariat ne veut plus vivre dans les conditions matérielles que lui préparent les classes capitalistes, mais aussi parce que, si le prolétariat ne remplit pas son devoir de classe en réalisant le socialisme, l'abîme nous attend tous, tant que nous sommes. " ([8])

Soixante-douze ans plus tard, ces paroles sont toujours d'actualité. Elles pourraient avoir été écrites aujourd'hui. Seule la classe ouvrière mondiale, le prolétariat, peut offrir l'unique perspective alternative à l'effroyable cataclysme du capitalisme en putréfaction : le communisme.

La terrible récession ouverte qui commence aux USA, et par contrecoup sur l'économie mondiale, va représenter pour l'ensemble du prolétariat mondial, et tout particuliè­rement des pays industrialisés d'Europe, des attaques encore exacerbées sur leurs conditions de vie : licencie­ments par millions, salaires en baisse, conditions de travail aggravées comme jamais, etc. alors qu'il subit déjà depuis longtemps une détérioration drastique de sa situation, dété­rioration qui s'est déjà énormément accélérée ces derniers mois. Et qui plus est, la bourgeoisie mondiale profite, sans attendre, du conflit au Moyen-Orient, pour faire passer les sacrifices au nom de l'unité nationale et du... choc pétrolier. On nous l'a déjà fait deux fois ce coup-là ! C'est clair : ce sont les ouvriers qui vont payer la note de l'intervention militaire, les ouvriers en uniforme enrôlés dans l'armée irakienne, mais aussi ceux des pays occidentaux.

La classe ouvrière ne doit pas céder aux sirènes de l'unité nationale et de la défense de l'économie capitaliste. Elle ne doit pas suivre la bourgeoisie et prendre part au conflit contre l'Irak. Ce conflit n'est pas le sien. Elle a tout à y perdre et rien à y gagner. Son combat, le seul terrain sur lequel elle puisse se battre, c'est celui de la lutte contre le capitalisme comme un tout, c'est la lutte pour la défense de ses conditions de vie, contre les attaques économiques, contre l'austérité et les sacrifices, contre la logique du capital qui ne conduit qu'à la misère et à la guerre, partout dans le monde, mais aussi contre l'unité nationale, contre la défense de la nation et de la démocratie bourgeoise dans tous les pays.

Aujourd'hui, un an après la dislocation du stalinisme et l'effondrement du bloc de l'Est, après l'énorme propagande sur la victoire du capitalisme et la paix, il est clair pour tout ouvrier que le capitalisme mondial est dans une faillite insoluble et irréversible. Il est tout aussi clair que le capita­lisme décadent, c'est inévitablement la guerre impérialiste. Crise et guerre sont deux moments du capitalisme qui ne font que s'alimenter et se renforcer l’un l'autre. Les deux faces d'une même pièce. Mais en plus, fait historique nou­veau, la pièce se décompose entraînant avec elle l'ensemble de l'humanité dans un cours où crise et guerre vont de plus en plus tendre à s'entremêler, à se confondre.

Plus l'agonie du capitalisme se prolonge, plus dévastateurs sont ses ravages de tout ordre. La décomposition du rap­port social qu'est le capital, en se prolongeant, commence à hypothéquer chaque fois un peu plus la perspective même de la révolution prolétarienne, et à handicaper la construc­tion future du communisme. La destruction massive et croissante de forces productives, usines, machines, ouvriers rejetés de la production, la destruction de l'environnement, des campagnes, l'accroissement anarchique de villes-dépo­toirs de millions d'êtres humains, vivant dans des conditions atroces, la plupart du temps sans travail, l’atomisation et la destruction des rapports sociaux, les dégâts causés par les nouvelles épidémies, la drogue, la faim, les guerres - et nous en oublions -, autant de drames et de catastrophes qui rendront plus difficile la construction de la société commu­niste.

Les enjeux deviennent de plus en plus dramatiques. Le prolétariat ne dispose pas d'un temps illimité pour accom­plir sa tâche historique. Révolution prolétarienne triom­phante ou destruction de l'humanité, telle est l'alternative. Pour le prolétariat, il n'est d'autre voie que la destruction du capitalisme et la construction d'une autre société, où la faim, la guerre et l'exploitation auront disparu.

Le chemin jusqu'à la société communiste sera long et ardu. Mais il n'en est pas d'autre.

RL. 4/9/90

"Souillée, déshonorée, pataugeant dans le sang, couverte de crasse ; voilà comment se présente la société bourgeoise, voilà ce qu'elle est. Ce n'est pas lorsque, bien léchée et bien honnête, elle se donne les dehors de la culture et de la philosophie, de la morale et de l'ordre, de la paix et du droit, c'est quand elle ressemble à une bête fauve, quand elle danse le sabbat de l'anarchie, quand elle souffle la peste sur la civilisation et l'humanité qu'elle se montre toute nue, telle qu'elle est vraiment...

"Nous sommes placés aujourd'hui devant ce choix : ou bien triomphe de l'impérialisme et décadence de toute civilisation, avec pour conséquences, comme dans la Rome antique, le dépeuplement, la désolation, la dégénérescence, un grand cimetière ; ou bien, victoire du socialisme, c'est à dire de la lutte consciente du prolétariat international contre l'impérialisme et contre sa méthode d'action : la guerre. C'est là un dilemme de l'histoire du monde, un ou bien-ou bien encore indécis dont les plateaux balancent devant la décision du prolétariat conscient. Le prolétariat doit jeter résolument dans la balance le glaive de son combat révolutionnaire : l'avenir de la civilisation est de l'humanité en dépendent."

Rosa Luxembourg, Brochure de Junius.


[1] Voir l'article sur la crise dans ce numéro.

[2] Lénine, Résolution sur "Le pacifisme et la consigne de la paix" de la Conférence des sections du POSDR à l'étranger, mars 1915.
 

[3] Un ancien membre de la CIA a récemment fait des déclarations (re­produites par divers journaux dans différents pays : Libération en France, Cambio 16 en Espagne), rendant compte d'accords secrets établis entre la CIA et les autorités iraniennes de l'époque, pour faire durer suffisam­ment longtemps la prise d'otages afin d'assurer la défaite de Carter aux élections...

[4] Comme le rappellent le New-York Times et Le Monde Diplomatique, août 1990.

[5] "Le Monde", 29/8/90.

[6] Ce ne serait pas la première fois que la bourgeoisie américaine pro­cède de cette façon. Ainsi, à une échelle bien plus vaste, cette bourgeoisie a eu l'occasion de tendre la perche à son futur ennemi pour que celui-ci fasse le premier pas dans une guerre devenue inévitable et se présente de la sorte comme l'"agresseur". Il s'agit de l'attaque japonaise du 8 décembre 1941 contre la flotte américaine du Pacifique basée à Pearl Harbour (Hawaii), qui provoqua l'entrée officielle des USA dans la seconde guerre mondiale. Il a été clairement démontré, à posteriori, que c'est le président américain Roosevelt qui a tout fait pour inciter le Japon à prendre une telle initiative, notamment en réduisant au minimum les moyens de défense de la base (la presque totalité des soldats US étaient en permission) alors qu'il savait pertinemment que ce pays s'apprêtait à entrer dans la guerre. L'attaque japonaise de Pearl Harbour allait ainsi permettre de constituer, autour de Roosevelt, l'"union nationale" pour la guerre et faire taire les résistances, tant dans la population que dans cer­tains secteurs de la bourgeoisie US, contre cette politique.

[7] "As for Germany and Japon, neither has begun to contribute at a level equal to its need for secure oil suppty. To be sure, Bonn is preoccupied with reunification. Yet Germany would be shortsighted to underestimate its debt to America's sacrifice. That is even more true for Tokyo", The New-York Times for the International Herald Tribune, 31/8/90.

[8] Rosa Luxembourg, Discours sur le Programme du Parti Communiste Allemand, dec. 1918, édition Spartacus.

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