Massacre des ouvriers en inde

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Le tract qui suit a été récemment envoyé au CCI d'Inde; il est non signé et de source inconnue. Nous le publions parce qu'il relate un épisode important et tragique de la lutte de classe en Inde, épisode qui apporte des leçons à l'ensemble de la classe ouvrière internationale. Le massacre des ou­vriers de l'usine textile de Swadeshl à Kanpur restera pour longtemps un témoignage brutal de la bar­barie capitaliste et iI rappellera à tous les ouvriers que c'est la seule réponse que peut offrir le capitalisme à l'humanité dans cette époque de déclin de la "civilisation" capitaliste. Le massacre de Kanpur n'est qu'un événement parmi tant d'autres d'une série d'actes brutaux de répres­sion de la part du régime "démocratique" Desai. Ces derniers mois, des ouvriers, des étudiants et des paysans ont été tués lors de manifestations par la police Janata dans toute l'Inde : Utar Pradesh, Madya Pradesh, Tamil, Binar, Punjab etc. Le massacre de Kanpur a aussi bien des ressemblances avec celui des 200 ouvriers de l'usine de sucre "Aztra" en Equateur en octobre dernier. Là, tout comme à Kanpur, l'armée, à défaut de la police, a utilisé la seule politique consistante pour le capital aujourd'hui face à des ouvriers en lutte : la répression cynique et sanglante. Les récents événements du Pérou, du Nicaragua, etc. confirment cette tendance qui accompagne le resurgissement du prolétariat au Tiers-Monde. En Inde, le resurgissement de la classe ouvrière a été annoncé par la grande grève des chemins de fer en 1974 qui n'a pu être écrasée par le régime de Gandhi qu'au prix de la répression la plus massive (25000 ouvriers jetés en prison) et de la collaboration la plus éhontée entre les syndicats et le gouvernement. Le régime Janata a été mis en place en 1976 pour remplacer la "dictature" de Gandhi et contrôler mieux les ouvriers grâce à la promesse de "démocratie" et de "droits humains"; mais à peine le gouvernement Dosai était-!I au pouvoir qu'il se trouvait confronté à une vague de grèves sauvages dans la classe : les dockers do Bombay,  les mineurs dé Rajhara, les fonctionnaires du gouvernement et bien d'autres ont mené des luttes très dures, souvent en dehors du contrôle syndical ; et la plu­part du temps elles ont reçu la même réponse sanglante que la grève de Kampour décrite dans le tract. . Les ouvriers Indiens ont payé avec bien des vies le privilège d'apprendre ce qu'est la réalité cachée derrière la façade de la démocratie Janata : la terreur de l'Etat bourgeois.

Mais le tract contient certaines faiblesses. Inévitables dans un mouvement prolétarien International qui renaît depuis peu. On les trouve quand le tract critique les leaders "révolutionnaires" du mou­vement ouvrier pour leur légalisme et leur collaboration de classé avec le régime Janata. De même, Il ne reconnaît pas que le rôle de division des syndicats est produit du fait qu'ils sont eux-mêmes des organes de répression de l'Etat au sein de la classe ouvrière. En fait, le PC (M) soi-disant "ouvrier" et les autres organisations de gauche du même type sont des partis capitalistes qui soutiennent plei­nement les besoins du capitalisme d'Etat et de l'austérité économique. Ils ne"trahissent" personne, pas plus qu'ils no "collaborent" avec le capitalisme, lis sont une partie do l'appareil politique du capitalisme, tout comme les syndicats. S'ils parlent de "la classe ouvrière", c'est pour mieux la mystifier. Mais dans la vie réelle, lis contribuent à la répression physique du prolétariat en le dupant, en le divisant et en l'Isolant, le tout au nom de "l'Intérêt national". La force du tract se trouve assurément ailleurs, dans sa claire dénonciation du massacre et son Internationalisme : "Ou­vriers du monde entier, unissez-vous !". C'est pourquoi ce tract apporte avec lui un souffle d'air frais depuis le sous-continent Indien, pour servir d'inspiration aux révolutionnaires et à leur classe partout ailleurs.

A une époque où le monde est plus que jamais ravagé par des bains de sang Inter impérialistes tra­vestis dans des "luttes de libération nationale", à une époque où l'on dit aux révolutionnaires dans les pays avancés qu'ils doivent soutenir ces guerres nationales parce que le prolétariat "n'existe pas" dans le tiers-monde, parce quo ces guerres peuvent préparer la voie à un "développement capita­liste progressif", ce tract nous dit très clairement qu'il y a une classe ouvrière dans le tiers-monde, qu'elle a déjà engagé sa lutte autonome et que dans cette lutte, elle s'affronte aux mêmes ennemis que les ouvriers des métropoles : la démocratie, les partis de gauche, les syndicats et, par dessus tout, l'Etat national dont la banqueroute historique dans toutes les parties du monde est clairement mise en relief par son recours à la terreur et au massacre contre le prolétariat.

MASSACRE DES OUVRIERS DE L'ENTREPRISE QUE S'EST-IL EXACTEMENT PASSE A SWAPESHI ? SWADESHI (KANPUR)

- 6 décembre 1977 : Environ mille ouvriers de l'entreprise de coton SwadeshI à Kanpur, encer­cle deux cadres pour exiger le paiement de leurs salaires, impayé depuis 51 jours; ceci se passe à 13h30;

15h30 : d'importants effectifs de  la police ar­mée et de la Provencial Armed Constabulary (PAC) entourent  l'entreprise de toutes parts;

15h50 : la police ouvre  le feu sans sommation;

Vers 17h30 : plus de 150 ouvriers sont morts, des centaines sont blessés et 237 sont arrêtés.

Le 6 décembre 1977, restera dans l'histoire de 13 classe ouvrière comme le MARDI NOIR, le jour où le capital lança une guerre ouverte et armée contre la classe ouvrière, le jour du massacre de sang froid le jour du "Jalianwala Bagh" ouvrier.

On se souviendra du bain de sang; l'entreprise Swadeshi, une des plus grandes entreprises texti­les de l'Inde, où les 8000 ouvriers doivent payer les frais d'une crise dont Ils ne sont pas responsables, étant contraints d'attendre le paiement de leurs salaires.

On retiendra  le nombre, sinon les noms des ou­vriers tués par les balles de la police. Et on se souviendra aussi des noms des meurtriers et avant tout ceux des  leaders et ministres du Par­ti Janata qui ont décidé et justifié  la fusillade.

Rien de tout cela ne sera oublié, parce que le 6 décembre fut le jour du massacre le plus barbare et prémédité d'ouvriers  Indiens, depuis l'indépendance. Le nombre exact d'ouvriers tués ne sera probablement Jamais connu, dans la mesure où les cadavres précipités dans le Gange ou la rivière Betwa ne seront jamais retrouvés et identifiés, non plus que ceux réduits en cendres dans les fours de  l'entreprise. Leur nombre parait être facilement de 200. Tandis que la bureaucratie censurait complètement  l'Information, la presse "Iibre" gardait le silence.

Nous donnons ci-dessous la version de la police et les faits rapportés par ces centaines d'ouvriers, des témoins visibles et quelques journalistes Indépendants.

Le rapport de police : Il a été nécessaire d'ouvrir le feu parce que les ouvriers étalent en train de tuer deux cadres - le directeur de production Sharma et le chef comptable lyenger -et qu'ils ont attaqué rageusement  les policiers qui essayaient d'intervenir. On suppose que le surintendant de police Rei a été assommé.

Les faits : Les cadres ont été encerclés au sein de l'entreprise à côté d'une fontaine, cependant leurs cadavres ont été trouvés dans une petite pièce à l'étage. Les trois ou quatre per sonnes qui ont été vues en train de porter les corps des deux cadres dans les escaliers n'avaient jamais été vus dans l'usine auparavant. Un journal de Kanpur rapporte que l'on a entendu Sharma crier à la police d'arrêter de tirer et que les cadres étaient vivants quand le feu a commencé. Un hebdomadaire a déclaré que les cadres ont été tués par la police après coup pour donner un bon prétexte à leurs orgies de meurtres. Le CID est jusqu'à aujourd'hui Incapable de fournir la moindre preuve de la culpabilité d'ouvriers dans le meurtre des deux cadres. On croit généralement que les deux ca­dres en savaient trop à propos des méfaits de la direction qui avait engagé quelques éléments (les trois ou quatre personnes dont on parlait ci-dessus), et qu'il fallait s'en débarrasser.

D'après le reportage d'un certain nombre de journaux, le surintendant de police Rei  n'était pas sérieusement blessé. Sarin, l'officier de sécurité de l'entreprise a déclaré à un magazine que Rei ‘’est sorti de l'usine sur ses deux jambes et n'était pas porté’’.

Le rapport de police : Le tir a duré "au plus cinq ou dix minutes". Douze ouvriers"seulement" ont été tués et une vingtaine blessés.

Les faits : Les tirs ont commencé à 16h50 et se sont arrêtés aux alentours de 17h30. Au moins 15 ouvriers ont été tués et largement plus de cent blessés. Des propriétaires de petites échoppes en face des portes de l'entreprise, certifient que le tir de la police a duré sans discontinuer jusqu'à 17h30. Les ouvriers qui ont survécu, déclarent qu'ils ont été obligés de porter les cadavres de leurs camarades dans des camions. Ils disent qu'ils ont porté des "quantités de corps".

Cinq semaines après le 6 décembre, les autorités ont enfin commencé 5 verser les payes dues aux ouvriers. 238 ouvriers ne sont jamais venus pour recevoir leurs salaires. Où sont les 220 ouvriers qui manquent, si l'on admet la version officielle de 12 morts ?).

La police a tiré a l'intérieur de l'entreprise et aussi dehors, sans distinction et en toutes directions. Un jeune garçon de huit ans nommé Pappu et un autre de douze ans ont. été tués. Ils étalent tous deux à une bonne centaine de mètres de la porte de l'usine. Des enseignes de magasins et des maisons portent des traces de balles. Une longueur de un kilomètre de route a été complètement bloquée par la police durant trois jours pour effacer les traces de leur sauvagerie. De toute façon, les stores de Arvind Cloth Stores (magasin de vêtements), portent encore des traces de balles. Un corres­pondant de "Aaj", un quotidien de Kanpur a été battu et sa caméra a été détruite alors qu'il essayait de prendre des photos à l'extérieur de l'entreprise, le 6 décembre au soir.

Tout nous amène à la conclusion que les déclarations de police sont fausses et sans fondements et que les tirs n'ont pas été provoqués par les "violences ouvrières". Le feu était aussi "illégal" d'après le India To-Day, un prestigieux magazine peu suspect de sympathies de gauche.

La police n'a jamais envisagé des étapes intermédiaires telles des gaz lacrymogènes, des balles de caoutchouc avant d'ouvrir le feu. Dans le manuel de la barbarie, il n'y a pas de place pour les "détails de procédure".

POURQUOI CE MASSACRE DE SANG FROID DES OUVRIERS A SWADESHI ?

La toile de  fond du massacre est  la crise présente de l'industrie textile en Inde en général, la "solution" particulière recherchée par la direction Jaipuria de Swadeshi avec la sympathie et le soutien à la fois du Congrès et du régime Janata, l'expérience des ouvriers de Kanpur (qui n'est pas unique aux Indes) face aux syndicats, et la tendance récente des ouvriers à l'esprit militant et à l'auto organisation. La période de l'état "d'urgence" fut bien sûr le  feu vert des capitalistes pour "discipliner" les ouvriers et augmenter le taux d'exploitation du travail. Le Jaipuria a fait un pas de plus; depuis août 1975, il verse les salaires des ouvriers avec 45 ou 60 jours de  retard. Tandis que les salaires des ouvriers devenaient ainsi un apport additionnel de capital libre et intéressant pour l'entreprise, atteignant 500 000 ou 600 000  roupies, les ouvriers, eux, étalent obligés de vivre d'emprunt, dont le taux d'Intérêt montait jusqu'à 120 % par an dans la plupart des cas.

Depuis  septembre   Î975, les ouvriers ont dû entourer  la direction, pas moins de six fois, rien que pour obtenir le paiement de leurs salaires longtemps après la date normale de paie. On peut signaler au passage qu'en aucun des cas antérieurs, les ouvriers n'ont tenté de tuer les cadres, même dans les cas où les occupations ont duré 48 ou 50 heures. Au cours de ces tortueuses batailles pour leur simple survie, les ouvriers en sont arrivés à perdre foi dans les appareils de conciliation de l'Etat d'un côté et dans ceux de  "leurs" syndicats qui ont prouvé leur incapacité à sortir du cadre de la "légalité bourgeoise et à porter le mouvement plus loin".

Le plus Important de ces mouvements, fut celui du 26 octobre, avec l'encerclement du secrétaire de l'entreprise, Agarwal. L'occupation a duré 53 heures et ne s'acheva que lorsque les ouvriers eurent obtenu satisfaction pour leurs  revendications. Si l'aspect explicite est la lutte pour des salaires dus, la signification réelle de ces occupations réside dans l'exemple de l'unité de classe des ouvriers et leur combativité militante. Les jours d'occupations, les ouvriers s'armaient de pierres, de briquetons, de barres de fer et surtout de tubes de gaz chlorhydrique. L'entreprise était entourée de toutes parts par les ouvriers empêchant ainsi les forces armées de faire leur travail habituel, de briser l'encerclement. Les ouvriers menaçaient de faire exploser les tubes de gaz si la police faisait  la moindre tentative pour briser l'encerclement. Pendant 53 heures, les forces armées de l'Etat restèrent sans ressources, humiliées et paralysées.

La réponse des syndicats (la plupart des syndicats nationaux en Inde ont une "section" à Swadeshi) à ce degré de combativité de la classe, a été d'appeler les ouvriers à "dénoncer  l'occupation". Les ouvriers de Swadeshi avaient eu plus que leur part de déclarations pathétiques sur les  négociations, l'arbitrage, les compromis, les résolutions et les délégations. Pendant ces événements d'octobre, ils rossèrent les leaders syndicaux et les chassèrent. Il est notable que  les ouvriers, pendant l'occupation, prirent  la production en main, de même que l'organisation de la nourriture, etc. aux occupants de  l'entreprise. Cette victoire des ouvriers de Swadeshi en octobre a constitué un précédent dans le Kanpur.  En  une seule poussée d'activité militante, les ouvriers avaient défié en même temps les capitalistes, l'Etat et leurs "propres" institutions du passé, irrémédiablement responsables du "syndicalisme responsable" et de la  "légalité bourgeoise".

C’est dans cette démonstration de leur capacité d’auto organisation et leur combativité militante que se trouvent les racines réelles du massacre du 6 DECEMBRE.

Le défi de la classe ouvrière avait mis en mouvement l'appareil répressif de l'Etat. Quelques jours après le 26 octobre, le ministre de l'Intérieur et le DIG, police de  l'Uttar Pradesh, dans une interview à la télévision, déclaraient que le gouvernement était prêt à prendre des "mesures  définitives" pour éviter les incidents à Swa­deshi et ceci "à tout prix". Le 29 novembre, un agent provocateur tenta de transformer une querelle mineure entre deux ouvriers en une émeute communale, afin de briser  l'unité ouvrière.  L'occasion  de prendre ces  "mesures  définitives" se présenta enfin qui leur permit de faire une "contre démonstration" pour I’ exemple d'octobre. Certains pensent même que, bien qu'il y ait eu une réelle colère ouvrière qui ait poussé à l'occupation’’ du 6 décembre, cette occupation elle-même pourra bien avoir été échafaudée pour diviser les ouvriers impréparés. A cause d'une  panne d'électricité à Kanpur, seulement mille ouvriers étalent à l'entreprise cet après-midi là sur un total de quatre vingt mille.

Depuis le massacre du 6 décembre, l'usine a subi un "lock-out" illégal qui se perpétue jusqu'à aujourd'hui le 3 mars. Même le ministre "socialiste" Georges Fernandes aurait dit qu'il faudrait encore au moins un ou deux mois avant que l'entreprise ne rouvre. Apres le 15 janvier, le versement des salaires commença en présence de centaine de policiers, armés de mitraillettes, à l’Intérieur de l'entreprise et sur la route principale à l'extérieur. Les salaires payés 90 jours après échéance disparurent dans le gouffre des emprunts passés. La situation des ouvriers et de leurs familles est des plus précaires. Comme on l'a signalé plus haut, 238 ouvriers n'ont pas reparu pour récupérer leurs salaires pour des raisons évidentes. Une commission d'une seule personne nommée par le gouvernement pour enquêter sur les causes du tir, a abouti à la conclusion que celui-ci était justifié. Il y a même une critique au "Dy Magistrate" pour "n'avoir pas ordonné le tir plus tôt". Au même moment, un comité des Droits Civiques a vu le jour à Delhi défiant une fois de plus les affirmations de la bureaucratie. Le premier ministre de l'UP continue à refuser catégoriquement la tenue d'une enquête judiciaire.

LA "DEMOCRATIE" JANATA ET LA CLASSE OUVRIERE

Sans aucun doute, le massacre de Swadeshi n'a pas de parallèle dans l'histoire de la classe ouvrière aux Indes. Mais cette répression san­glante ne doit pas être prise comme un cas unique au Swadeshi. Ce n'est pas non plus l'acte d'un "District Magistrate" à la gâchette facile. Ce n'est que la manifestation la plus crue de l’attitude de plus en plus répressive du régime de Janata à l'égard de la classe ouvrière. Dès qu'il fut installé au pouvoir, il dit explicitement que les occupations ne seraient pas tolérées, que des accords signés pendant des occupations ne seraient pas reconnus, que des mesures énergiques seraient prises pour prévenir de telles actions. Non seulement cela, mais, durant ces onze derniers mois, la police sous les ordres du régime Janata a ouvert le feu, y compris sur des grèves ordinaires et "légales" dans'-la logique de la "légalité bour­geoise". Dilli-Rajharmin (MP), llsccket Bojaro % (Bihar), Sahibabad et Lucknow (UP), Mulund (Maharashtra) en sont quelques exemples. Des tas d'ouvriers y ont perdu la vie et des centaines ont été gravement blessés. Dans les cam­pagnes où le travail agricole est plus ou moins organisé, la machine répressive a été peut-être plus dure. D'après les versions officiellement reconnues, dans le seul Etat de Bihar, la poli­ce a ouvert le feu huit fois sur des agriculteurs et onze y ont perdu la vie. Armés jusqu'aux dents, les propriétaires terriens qui défendent leurs intérêts dans la région ont déclaré une guerre ouverte aux salariés.

C'est une manifestation toujours plus évidente du caractère "démocratique" du régime Janata dont la répression est au maximum, précisément la où le Janata détient le pouvoir. Dans la grè­ve des quatre vingt mille enseignants du secondaire en UP, vingt trois mille ont été emprisonnés alors que quelques cinq mille y perdaient leur emploi. Une loi visant à réprimer le mouvement, "déguisée" en loi s'attaquent aux crimi­nels, est sur le point de passer au Dihar.

Dévoyant la vague de mécontentement do nasse contre le régime du parti "garlbi hatao" ("lutte contre la pauvreté"), le parti Janata se catapulta au pouvoir, se posant on "Parti de la Démocratie". Il fallait donner un sens aux slogans. Le Janata restaura le droit de grève formellement, élimina le "Compulsory Deposit Scheme" et restaura le bonus minimum de 8 1/3 % par an. On pouvait croire que le régime Janata avait des sympathies pour la classe ouvrière aussi longtemps qu'il croyait que les luttes ouvrières pouvaient être réduites à une lutte pour la "démocratie" et se dérouler dans une "ambiance libre" pour son exploitation; aussi longtemps qu'il croyait que la lutte de classe se déroulerait dans le même cadre salarié que pendant "l'état d'urgence". Mais il est de plus en plus clair aujourd'hui que les luttes des ouvriers ne sont pas basées sur tel ou tel aspect de l'esclavage salarié mais contre les fondements mêmes du système salarié. La lutte révolutionnaire de la classe ouvrière ne se fait pas pour la démocratie capitaliste mais pour la fin du capitalisme et de sa forme démocratique, basée sur l'exploitation.

Au fur et à mesure que le caractère de classe du mouvement ouvrier et son fondement révolutionnaire devint explicite, le caractère du régime Janata se révéla; son caractère de classe devint clair aussi. Aussi opposé que le régime Janata ait pu être au "Congress", avec ses slogans sur la démocratie, dans les récentes grèves des employés du gouvernement dans l'Etat du Maharastra, le premier ministre du Janata et le premier ministre du "Congress" ont affronté la lutte du même point de vue et avec une plateforme identique. Tandis que le Janata du Maharastra, les yeux fixés sur les élections à venir, soutenait la grève, son président demandait ouvertement que les ouvriers ayant de "bons" salaires n'aient pas le droit de faire grève. Pour autant que le salaire puisse être bon pour l'esclave du capital.

Aujourd'hui le langage et la politique du Janata changent très rapidement. Aujourd'hui, on entend des discours sur la condamnation des grèves, le maintien de la loi sur la détention préventive, les limitations de salaires, etc.

Pour les "champions de la démocratie", la constitution, la législation et les tribunaux industriels sont les seuls juges valables de la "légitimité" des revendications et des formes des luttes des ouvriers.

Pour la classe ouvrière, toute forme de lutte est "légitime" y compris et en particulier celles qui tendent à mettre fin à la "légitimité" de la société bourgeoise, il est clair aussi, pour la classe ouvrière, que quand elle défend ses intérêts, les champions du capital n'ont pas grand effort à faire pour laisser tomber le masque de la légalité et de la démocratie. Que coûte-t'il aux défenseurs du capital, après tout de refaire des lois dans le "parlement du peuple" ? L'imposition de l'Etat d'urgence, les justifications du maintien de la détention préventive par le Ministère de l'Intérieur, le massacre des ouvriers de Kanpur, l'introduction du "mini-Misa" en MP,  ne sont que quelques exemples des plus récents.

LA "GAUCHE: SOCIALISTE" DU PARTI JANATA

Il est utile de se demander pourquoi la "gau­che" du Janata reste aussi silencieuse que les hommes de  paille de Gandhi, à propos de la tuerie des ouvriers de Swadeshi. La répression de la classe ouvrière et des travailleurs agricoles va sans cesse croissant et les "socialistes-Gandhiens" resteraient silencieux ? Il devient clair aujourd'hui que la gauche du Janata est forcée de jouer le même rôle vis-à-vis des mouvements de la classe ouvrière que les courants "progressistes" et "socialistes" du Congress jouaient hier, agitant les plans de "gauche"pour l'exploitation du travail tandis que la "droite" continue ses manœuvres.

LA GAUCHE "COMMUNISTE"ET LA CLASSE OUVRIERE :

De plus, les choses ne s'arrêtent pas là. Il est des questions qu'il faut adresser aux partis "communistes" officiels eux aussi. En intervenant dans le débat au parlement sur l'incident de Swadeshi, Jyotirmoy Bosu, le PCM a proclamé que cet incident était le résultat d'une conspiration, préparée par les agents provocateurs d'un certain parti politique pour rendre impopulaire le ministre de l'Intérieur et pour battre le premier minis­tre de l'UP dans les prochaines élections (Times of India du 8/12/1977). Selon un ouvrier de Swadeshi, un chef du PCI, Harbans Singh, dans un discours public à Kanpur, a traité les ouvriers de Swadeshi "d'ingrats" (en référence claire aux occupations d'octobre et à la bagarre entre ouvriers et dirigeants syndicaux).

Bien sûr, la bourgeoisie voit toujours la combativité ouvrière comme le résultat d'une conspiration d’éléments « anti sociaux ». Ce chef « révolutionnaire » du mouvement ouvrier défend t-il le même point de vue ? Si les revendications imposées par sa situation et par son expérience de classe, dans le contexte de crise nationale et internationale du capital, requière que la classe ouvrière brise les barrières des formes légales de lutte, pour pouvoir porter la lutte sur son propre terrain de classe, et si les chefs restent enfermés dans la politique du passé, qu'attendent-ils des ouvriers ? Naturellement, aux yeux des chefs réactionnaires, les initiatives de la classe vers son uni­té de classe apparaissent comme "déloyales".

Apparemment, les journaux de ces partis ont dénoncé le massacre de Swadeshi. Mais la question est de savoir ce que valent ces dénonciations et résolutions. N'est-il pas clair que si le traitement odieux que!'Etat a fait subir à une fraction de la classe ouvrière reste sans réponse de la part des ouvriers de Kanpur et du mouvement ouvrier indien, cela ne peut finir qu'en laissant au capital et à ses représentants le rapport de forces décisif ? Combien de temps faudra t’il encore pour comprendre que la plus petite illusion vis-à-vis de n'importe que représentant du capital ne peut avoir que les conséquences les plus désastreuses sur le mouvement de la classe ouvrière ? Dans quel but et pour combien de temps encore parlera-t-on des alliances avec tel ou tel secteur de la bourgeoisie ?

Il n’y a qu'une voie pour la classe ouvrière aujourd'hui. Contre sa division dans des dizaines de syndicats, la constitution de son unité de classe passe par un défi militant au parti du Congres, au régime Janata et à tous les autres représentants de la bourgeoisie. Il est devenu clair, ces derniers mois, mémo si c'est de façon  sporadique, que des fractions de la classe commencent à surgir, conscientes de la tache historique qui Incombe au mouvement ouvrier. La lutte des ouvriers" de Swadeshi à Kan­pur n'était pas le résultat d'une "conspiration" maïs le début de la préparation historique du défi révolutionnaire à tout l'ordre bourgeois. Dans ce sens, il fait partie Intégrante de  la nouvelle phase du mouvement International de la classe ouvrière. Dans la période à venir, seuls pourront jouer un rôle révolutionnaire, ceux qui sauront saisir la dynamique interne et le contenu révolutionnaire des aspirations de la classe ouvrière.

PROLETAIRES DE TOUS LES PAYS, UNISSEZ-VOUS !

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