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Mercredi 4 mars, la Cour pénale internationale (CPI) a ordonné un mandat d’arrêt contre Omar Al-Bachir, le président du Soudan. Formellement, le président soudanais est accusé de “crimes de guerre et crimes contre l’humanité”.
Qui est donc justement cet Omar Al-Bachir que prétend juger la CPI, ce jouet des gangs impérialistes qui siègent au Conseil de sécurité de l’ONU, donc au service de ceux-là mêmes qui gouvernent le monde et qui ont laissé ouvertement le président soudanais détruire, réduire à la misère et violenter toute une population durant bientôt vingt ans ?
Ils ont beau jeu aujourd’hui d’épingler Al-Bachir qui, depuis son arrivée au pouvoir, n’a jamais cessé d’orchestrer guerres et exactions des plus barbares, avec un bilan de centaines de milliers de morts.
“En avril 1990, dix mois après son arrivée aux affaires, il fait exécuter vingt-huit officiers pour ‘complot’. A partir de 2003, il lance ses milices Djandjawids sur des centaines de villages du Darfour avec mission de tuer, violer, piller. On connaît le résultat : trois cent mille morts, selon l’ONU” (1).
Voila, officiellement, le morbide “bilan” des victimes d’Omar Al- Bachir au Darfour, mais pour qu’il soit complet, rappelons qu’avant de commettre ses odieuses “œuvres” dans la région du Darfour, ce même tueur (dès sa prise du pouvoir) avait relancé et amplifié le sinistre conflit du Sud-Soudan qui s’est conclu par plus de 2 millions de morts.
Un criminel peut en cacher d’autres
Omar Al-Bachir est bien le principal massacreur des populations soudanaises, mais la question est : ce barbare a-t-il pu accomplir ces horreurs tout seul, ou a-t-il bénéficié du soutien d’autres criminels qui se cachent derrière lui ?
Pour nous et pour tous ceux qui observent l’attitude des grandes puissances au Soudan, il est clair que ce sont bien ces mêmes brigands capitalistes concurrents qui se disputent le contrôle de cette région, et qui ont armé, soutenu et fermé à dessein les yeux sur les agissements du “dictateur de Khartoum”. En effet, ce dernier a servi successivement les intérêts des uns et des autres. Par exemple, dans les années 1990-2000, il fut l’instrument de l’impérialisme français dans la lutte d’influence que ce dernier livrait contre les Etats-Unis pour le contrôle de la région soudano-tchadienne. Ainsi, c’est avec l’appui militaire du régime soudanais que l’impérialisme français a pu aider l’actuel président Idriss Déby à s’emparer du pouvoir tchadien en chassant l’ex-président Hissène Habré qui, de pion de la France, fut ensuite le pion de Washington. Par ailleurs, comme le signalait le Monde du 6 mars, Sarkozy aura été le dernier chef d’Etat occidental à rencontrer Omar Al-Bachir en novembre 2008 au Qatar. Car “la France souhaitait aussi préserver le Tchad, régime ami, de nouveaux soubresauts liés à la crise du Darfour”. Voilà pourquoi Paris reste si attaché au régime criminel d’Al-Bachir.
Pour ce qui concerne les Etats-Unis, on se souvient que c’est en “ami” que le président soudanais a été sollicité par l’administration Bush en vue de signer un “accord de sécurité” pour la “guerre antiterroriste”, ouvrant grand le territoire soudanais aux agissements de la CIA et plus généralement aux intérêts américains. Mais surtout, Omar Al-Bachir venait de commettre les abjects crimes “contre l’humanité” au Darfour quand il a été invité par Washington à négocier et à signer le fameux “plan de paix américain” ayant débouché en 2005 sur un “gouvernement d’union” entre le pouvoir de Khartoum et les anciens sécessionnistes du SPLM (Mouvement de libération du peuple du Soudan du Sud). Et le représentant américain à cette “table de négociation” a bien sûr évité de remarquer que les mains d’Al-Bachir suintaient encore du sang de ses victimes.
Quant à la Chine, depuis les années 1990-2000, elle a intensifié ses relations avec Khartoum et est devenue aujourd’hui son meilleur soutien politico-diplomatique (notamment à l’ONU), tout en lui achetant près de 70 % de son pétrole et en étant, par ailleurs, son premier fournisseur en armements. En clair, le Soudan d’Al-Bachir constitue aujourd’hui le principal pion et le bras armé de l’impérialisme chinois dans l’extension de l’influence de ce dernier en Afrique.
On voit donc que le “monstre” soudanais tant vilipendé aujourd’hui par des médias occidentaux, qui retrouvent une voix “horrifiée” pour l’occasion, continue à vivre et survivre, comme il l’a toujours fait, à l’ombre d’un protecteur impérialiste, dont les “ex”, ou autres prétendants au mariage, font tout leur possible pour lui offrir une porte de sortie. Comme le dit Jeune Afrique déjà citée :
“Si le président Al-Bachir pense que l’accusation de la CIP est infondée, il peut la contester (Etats-Unis) ; il ne saurait y avoir d’autre solution que politique à la crise du Darfour (France) ; Omar Al-Bachir bénéficie d’une immunité de chef d’Etat en vertu du droit international (Russie) ; la Chine s’oppose à tout acte qui pourrait perturber la situation pacifique globale du Darfour et du Soudan (Chine)”.
Pour résumer, Français, Américains, Russes, Chinois et tous les autres vautours impérialistes se fichent totalement du sort des populations du Darfour qui, aujourd’hui comme hier, sont littéralement livrées au bourreau de Khartoum. Parce que cette région est un des hauts-lieux géo-stratégiques d’Afrique, véritable plaque tournante du continent, toutes les grandes puissances impérialistes vont continuer à se disputer leur influence en semant la guerre et la mort. Avec ou sans condamnation d’Omar Al-Bachir par le CPI, l’enfer ne pourra donc que se poursuivre pour les habitants du Darfour.
Amina (23 mars)
1) Jeune Afrique, 14 mars 09.