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Dans une situation de chaos généralisé, de guerre civile permanente, d’attentats terroristes et d’enlèvements quotidiens d’otages de toutes nationalités y compris irakienne, une nouvelle offensive terrestre et aérienne de l’armée américaine a débuté en octobre. Pour la première fois depuis le début de cette guerre en Irak, des soldats irakiens entièrement armés par les Etats-Unis ont participé, directement sous commandement américain à la première phase de cette offensive. En effet comme le révèle le Financial Times : "Il est préférable de confier les opérations militaires aux forces irakiennes afin d’en minimiser les retombées politiques." Celle-ci s’est d’ailleurs traduite le 3 octobre dernier par la chute de Samarra (ville située à 100 km au nord de Bagdad). Pour arriver à ses fins dans cette offensive, des combats acharnés et un quadrillage maison par maison ont dû avoir lieu. On sait pertinemment que des femmes et des enfants sont morts au cours de cet assaut même si aucune statistique fiable ne peut donner un aperçu du massacre. Mais la ville de Samarra n’a été que le premier moment d’une offensive qui s’est développée en direction de Falloujah.
Dans ce pays livré aujourd’hui à l’anarchie, il y aurait eu au moins 2300 attaques envers les forces de la coalition, la police irakienne et la population civile, dans une vaste zone géographique allant de Mossoul au Nord, à travers le Kurdistan, y compris Kirkouk et le triangle sunnite (Tikrit, Samarra, Baquba, Ramadi, Falloujah et Bagdad), jusqu’à Bassorah au Sud. Pas une région de l’Irak n’est épargnée. Le bourbier irakien est tel que certains pays qui ont des troupes sur place se posent maintenant de plus en plus ouvertement la question de leur maintien. Le ministre polonais de la défense, Jerzy Somajdzinski a ainsi annoncé dans une interview à Gazeta Wyboteza un retrait possible des troupes d’ici 2005. " Un retour anticipé de nos troupes répondrait à la demande du premier ministre irakien Allaoui ", a affirmé de son côté le ministre italien de la défense au quotidien La Stampa (cité par Courrier International du 19 octobre). Il n’y a pas aujourd’hui un seul Etat impérialiste, embarqué dans la guerre en Irak aux cotés des forces anglo-américaines qui ne soit pas lui-même comme l’impérialisme américain en pleine impasse.
La perte de contrôle de la situation par les Etats-Unis, malgré la nouvelle offensive militaire en cours, est telle que l’éclatement futur de l’entité irakienne n’est plus totalement improbable. Au Nord de l’Irak, la ville de Kirkouk est aujourd’hui revendiquée, de manière de plus en plus agressive et belliqueuse, par les Arabes, les Kurdes et les Turkmènes. Mais beaucoup plus significatif encore est le fait que trois provinces du Sud menacent maintenant de faire sécession. " Des membres du conseil municipal de Bassorah, deuxième ville de l’Irak, à majorité chiite, auraient donc entamé des pourparlers avec leurs homologues dans deux villes voisines, Maysan et Dhiquar, afin d’envisager la création d’une région fédérale dans le Sud. " (Courrier International du 19 octobre). Si l’éclatement de l’Irak n’est pas encore à l’ordre du jour, tel que cela se passe dans le Caucase, dans les Balkans, partout où la guerre impérialiste fait rage, le démantèlement des entités nationales bourgeoises est à l’ordre du jour. Si le contrôle du pétrole en tant qu’arme stratégique et militaire est important, il n’est pas inutile de rappeler que 80% des réserves pétrolières de l’Irak se retrouvent justement dans ces régions du Sud où il existe des velléités d’autonomie. Dans ce Sud de l’Irak, les Chiites sont majoritairement très proches de l’Iran. L’évolution de la réalité du chaos dans cette région du monde permet donc de douter de la capacité de l’impérialisme américain de contrôler à terme les zones pétrolières irakiennes.
Les élections en Irak ne résoudront rien
Mais l’offensive guerrière actuelle des Etats-Unis a, en fait, un objectif prioritaire et immédiat. La bourgeoisie américaine misent sur un bien faible espoir, celui des élections prévues pour le 31 janvier prochain qui pourraient peut-être, à ses yeux, stabiliser momentanément la situation. Pour ce faire, tous les moyens disponibles sont utilisés. Pourtant, la tenue de ces élections semble d’ores et déjà bien compromise. Les autorités irakiennes et les représentants des Nations-Unies, qui s’efforcent d’organiser ces élections affirment que celles-ci seront très difficiles à tenir. Un membre du comité organisateur a même déclaré : "Les Balkans à coté d’ici, c’est la Norvège". La Maison Blanche a même envisagé, au pire, de ne tenir les élections que dans les zones sécurisées. Face à cette décrédibilisation à l’avance de ces élections, les autorités irakiennes ont été immédiatement obligées de réagir. Ce ne seront pas des élections partielles a assuré le premier ministre irakien, Iyad Allaoui. C'est en fait exactement le contraire que démontre la réalité, avec la perte de contrôle des Etats-Unis en cours dans ce pays. Pour limiter les dégâts, en plus de l’offensive militaire, les Etats-Unis ont été contraints d'injecter discrètement 100 millions de dollars dans "l’éducation des électeurs" (Courrier International). De plus, l’Etat américain a demandé une aide supplémentaire à la Grande-Bretagne :
"Pour venir en aide aux américains les troupes britanniques vont être déployées dans l’une des zones les plus violentes de l’Irak…650 soldats du bataillon Black Watch vont devoir prendre position dans la ville d’Iskandariyah située au sud de Bagdad, où les étrangers et les forces officielles irakiennes sont régulièrement la cible des rebelles." (The Independant)
Des sondages montrent que seulement 2% des Irakiens considèrent l’armée américaine comme des libérateurs. Aujourd’hui, les Chiites restent dans l’expectative. Etant majoritaires en Irak, ils espèrent profiter de ce processus électoral. La haine qui existe en Irak et dans le monde arabe à l'encontre des Etats-Unis est due à la politique impérialiste que mènent les Etats-Unis dans cette partie du monde. Jusqu’en 1967 et la guerre des Six Jours, c’était au contraire l’impérialisme français qui était voué à la vindicte populaire, une France qui combattait en Algérie et participait à l’agression militaire de l’Egypte. Une France impérialiste qui, à l’époque, était le principal fournisseur d’armes de l’Etat hébreu. Les alliances impérialistes ont aujourd’hui, sans aucun doute, complètement changé. L’affaiblissement du leadership américain est maintenant tel que, quel que soit le niveau de maîtrise ou de crédibilité des élections de janvier prochain en Irak, non seulement rien ne sera changé, mais tout sera pire.
"Aucun gouvernement irakien ne pourra tenir longtemps au-delà du départ des troupes américaines, s’il n’a pas fait ses preuves d’opposant à l’occupation." (John V.Whisbeck dans le journal Asharq al-Awsat)
Le prolétariat, seule force capable de s'opposer à la barbarie capitaliste
Les attentats terroristes qui viennent d’avoir lieu dans le Sinaï en Egypte, marquent une aggravation nette du chaos au Moyen-Orient. Cette région balnéaire de l’Egypte était devenu le dernier endroit où les Arabes et les Juifs pouvaient se côtoyer sans risque de violence ou d’attentats. Ces derniers attentats, quels que soient leurs auteurs, manifestent ouvertement qu’il n’y a pas de sanctuaire protégé de la barbarie et de l’horreur capitalistes. Pour les Israéliens, l’Egypte semble apparaître comme un allié de moins en moins fiable. "Il n’était pas nécessaire de subir la grossièreté, l’indolence, l’indifférence voire l’hostilité dont ont fait preuve de façon révoltante les autorités égyptiennes la nuit des attentats pour comprendre que la sécurité d’Israël et des Israéliens ne figure pas parmi les priorités des Egyptiens." (Martin Sherman dans le Yediut Aharunut) L’Egypte depuis longtemps proche des Etats-Unis, depuis longtemps aussi premier interlocuteur de l’Etat israélien dans le monde arabe, et néanmoins pays d’accueil pour des organisations terroristes tel que le Hamas palestinien, se retrouve maintenant, elle aussi, au cœur des affrontements, réduisant progressivement le Moyen-Orient à un tas de ruines. La poursuite de l’offensive militaire israélienne dans la bande de Gaza et en Cisjordanie, livrant son lot de massacres quotidiens, dans une fuite en avant guerrière qui ne peut connaître aucune limite dans un capitalisme en pleine faillite, démontre une fois encore la totale irrationalité de ce système nauséabond. Mais pire encore, la véritable bête noire de Tel-Aviv apparaît être aujourd’hui, sans contestation possible l’Iran. L’Iran qui ne peut que tirer profit des conséquences des affrontements inter-impérialistes grands et petits qui se déroulent depuis une bonne dizaine d’années dans toute la région. Depuis le renversement des talibans en Afghanistan, et la chute de l’Irak de Saddam Hussein, les principales forces rivales fondamentalistes et guerrières ont ainsi été éliminées. Dans la montée du chaos et du chacun pour soi, alors que plus aucune puissance ne peut durablement imposer sa loi sur un autre Etat impérialiste, l’Iran cherche à tout prix à se doter de l’arme nucléaire. Arme que possèdent déjà d’autres pays voisins et rivaux, tels Israël ou même le Pakistan. "Les responsables des services de sécurité israélien sont par conséquent confrontés à un paradoxe : satisfaits de la disparition d’un ennemi juré grâce à l’invasion américaine de l’Irak, ils s’inquiètent de plus en plus des occasions que cette même invasion a créées pour un autre ennemi. Et ils voient le Moyen-Orient basculer du stade des rivalités conventionnelles à celui, infiniment dangereux, des rivalités nucléaires." (Stevens Erlanger, The New York Times). C’est pourquoi de plus en plus de déclarations belliqueuses émanent de hauts fonctionnaires israéliens. Tout ceci ne correspond pas à des déclarations farfelues de quelques politiciens bourgeois, mais à une effroyable réalité, celle de la barbarie et de la décomposition capitalistes. Laissée à sa propre dynamique, cette perspective est inévitable, comme l’est le danger d’une guerre nucléaire entre l'Inde et le Pakistan.
Le prolétariat ne doit pas s’habituer à l’horreur et à la barbarie capitalistes montrées et remontrées en permanence sur tous les écrans de télévision du monde. Il est nécessaire qu’il développe son indignation face à ce flot de massacres, attentats et autres affrontements guerriers impérialistes. L’affaiblissement accéléré du leadership américain ne peut que pousser ses principaux rivaux à défendre par tous les moyens efficaces leurs intérêts impérialistes. Cela ne peut que pousser chaque Etat, chaque seigneur de la guerre dans toujours plus de violence. La classe ouvrière, seule classe pouvant s’unir et s’organiser à l’échelle de la planète, est la seule force en mesure d’offrir une autre perspective à l’humanité. Pour cela, elle doit intégrer la nature capitaliste des affrontements impérialistes en cours, en Irak comme au Moyen-Orient. Le prolétariat se doit d’opposer la révolution communiste à la barbarie capitaliste.
Tino (21 octobre)