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Cet été, dimanche 1er août, la classe ouvrière a encore une fois vécu dans sa chair la réalité meurtrière du capitalisme. Ce jour là, dans une banlieue d’Asunción, la capitale paraguayenne, une fuite de gaz déclenche un immense brasier au coeur d’un centre commercial. Sous le toit en flammes, des familles entières tentent de s’échapper en vain. Les portes viennent d’être cadenassées sur ordre du gérant du magasin afin d’éviter que les clients partent sans payer. Et, pire encore, c’est à coups de fusil que les vigiles empêcheront la foule de forcer les grilles. Cette barbarie n’a pas de nom. Plus de 450 personnes mourront assassinées, piégées comme des rats au milieu des flammes.
Comme à son habitude, la bourgeoisie a immédiatement déclenché
le battage médiatique suivant une mécanique idéologique
bien huilée. Une véritable pièce de théâtre !
Premier acte : le président du pays, Nicanor Duarte Frutos,
verse toutes les larmes de son corps et décrète trois
jours de deuil national. Quel cynisme ! Venir profiter de la mort
de prolétaires afin de donner un visage humain et compatissant
à l’Etat, lui le premier garant du système capitaliste.
La bourgeoisie s’enorgueillit même de ce machiavélisme.
"L’Etat peut sortir renforcé du drame s’il
réagit rapidement" claironne, non sans ironie, Fernando
Abruciò, expert en politique internationale (Libération
du 3 août).
Second acte : la justice aux ordres pointe du doigt un bouc-émissaire,
un individu qui endossera toutes les responsabilités du massacre.
Il s’agit de Victor Daniel Paiva, manager général
du centre commercial inculpé d’homicide volontaire dès
le mercredi 4 août. Le président Duarte l’avait exigé,
il voulait une enquête rapide "pour que les coupables
soient punis". Evidemment, la photo de cet homme est placardée
dans tous les journaux, exposée à la vindicte populaire.
Une telle focalisation haineuse évite ainsi d’aller chercher
plus loin. Elle masque le véritable responsable de ces assassinats
qui n’est autre que le capitalisme, un système basé
sur l’exploitation des prolétaires, la production de marchandises,
l’argent et la recherche du profit. Aux yeux du capital, la vie
humaine n’a aucune valeur. La catastrophe d’Asunción
n’a fait que révéler une fois encore la logique barbare
de ce système qui n’a aucun scrupule à massacrer
ceux qu’il exploite pour tenter de sauver ses marchandises. C’est
cette vérité là, toute nue, qui éclate dans
cet abominable carnage. Le manager général du magasin
n’est pas un psychopathe, il est le digne représentant de
sa classe.
Troisième et dernier acte : la bourgeoisie des pays centraux
reconnaît l’existence de causes beaucoup plus profondes et
communes à tous les pays de la périphérie. Les
journaux français dénoncent à cor et à cri
la corruption généralisée du Paraguay ou la vétusté
des infrastructures sécuritaires. Le fait que les pompiers tentaient
désespérément de boucher les trous de leur tuyau
avec leur bottes, pour éteindre le feu, a été martelé
à longueur de colonnes. Effectivement, c’est une réalité,
l’incendie du centre commercial d’Asunción a pour cause
première l’état désastreux du matériel,
des bâtiments. Les règles minimales de sécurité
étaient totalement inexistantes. Mais ce n’est pas une particularité
des pays du tiers-monde.
Derrière ses cris d’orfraie, la bourgeoisie des pays développés
veut nous faire croire qu’ici les prolétaires seraient traités
de façon plus humaine. Mensonges ! Au Paraguay, comme en
France, comme partout ailleurs, la bourgeoisie est contrainte, sous
les coups de boutoir de la crise, de faire des économies au mépris
de la vie des prolétaires. Les infrastructures industrielles
se délabrent, ne sont plus entretenues. Partout sur la planète,
la menace de catastrophes, d’explosions se fait chaque jour un
peu plus grande. Deux jours avant Asunción, c’est à
Ghislenghien, en Belgique, que l’explosion d’une conduite
de gaz tuait 18 ouvriers. Souvenons-nous encore de l’explosion
de l’usine AZF à Toulouse en 2001 et qui a fait plusieurs
dizaines de morts et 9000 blessés. Aujourd’hui encore, trois
années après la catastrophe, l’Etat, les assureurs,
les patrons, se rejettent la faute tandis que la classe ouvrière
continue à payer la note financièrement et physiquement.
En dénonçant la vétusté des infrastructures
et la sauvagerie des capitalistes dans les pays sous-développés,
la bourgeoisie des pays industrialisés tente tout simplement
de faire oublier ses propres mœurs, son propre mépris pour
les vies humaines. Et surtout, elle cherche à masquer la responsabilité
de son système en pleine décomposition. L’incendie
du centre commercial d’Asunción n’est pas une tragédie
résultant de "spécificités locales".
Il est le miroir de cette décomposition de la société
bourgeoise avec à sa tête une classe dominante sanguinaire
qui, pour défendre ses intérêts, n’hésite
jamais à massacrer ceux qu’elle exploite.