C'est le retour à la dure réalité pour la classe ouvrière après un battage incessant pour pousser chacun vers les urnes en lui faisant miroiter pendant des mois les illusions "d'un changement", "d'une rupture" par la voie électorale. Tout cela pour quoi ? Le gouvernement Sarkozy est en place, déjà en "ordre de marche" et la bourgeoisie n'a même pas eu besoin d'attendre les législatives pour annoncer la couleur de l'avenir qu'elle nous réserve : des attaques, encore des attaques, toujours des attaques. Son programme n'est pas seulement celui d'une "droite décomplexée", c'est celui de la défense pure et simple des intérêts de toute la bourgeoisie nationale, c'est celui que le PS et sa candidate auraient de toutes façons appliqué. La seule présence de transfuges de la gauche et du centre agrégés dans l'équipe gouvernementale démontre qu'il n'existe aucune barrière réelle entre le programme des uns et des autres, que tous défendent l'intérêt du capital national.
Pour la classe dominante, l'avantage réel de cette situation, à travers un gouvernement ouvertement marqué à droite, bénéficiant d'une large majorité dans tous les rouages de l'appareil d'Etat, c'est de pouvoir pratiquer un langage de vérité, sans s'embarrasser de détours ni de fioritures.
Le gouvernement peut ainsi se permettre d'attaquer plus vite et plus fort. Il a d'ailleurs, aussitôt annoncé un édifiant calendrier de ces attaques :
Le gouvernement a annoncé clairement son intention de tailler de plus belle dans les effectifs de la Fonction publique. Les plans de licenciements et de suppressions d'emploi vont continuer de pleuvoir.
Ceci ne constitue ouvertement qu'un préambule à une poursuite de l'attaque sur l'ensemble des retraites qui sera "revu" et corrigé pour l'occasion dans son ensemble avec le but avoué de repousser jusqu'à 67 ans l'âge requis comme en Grande-Bretagne ou en Allemagne.
Tout cela s'accompagne sans surprise de l'accentuation immédiate de l' appareil répressif : dès le lendemain des élections, les expulsions des clandestins sans papiers ont repris avec zèle, une première mesure du nouveau parlement sera de faire voter une loi fixant des peines-planchers pour les délinquants récidivistes.
"L'ère Sarkozy" qui se prépare à accroître fortement les inégalités sociales s'apparente déjà par beaucoup d'aspects à la politique de Reagan aux Etats-Unis ou encore davantage à celle de Thatcher en Grande-Bretagne au cours des années 1980...
Si les prolétaires, et en particulier les jeunes générations ouvrières, ont pu au cours de ces derniers mois être influencés par le matraquage idéologique de la gauche et de l'extrême gauche qui ont cherché à exploiter la peur de Sarkozy alors que ce dernier cristallisait leurs angoisses devant l'avenir, pour les engluer dans des illusions électoralistes et dans la mystification démocratique, ils ne doivent pas céder à la panique face à la perte de ces illusions qui s'ouvre devant eux. Leur conviction que le capitalisme ne leur réserve qu'un avenir de plus en plus sombre et bouché, ne peut que se renforcer aujourd'hui.
Ces jeunes générations de prolétaires ont déjà prouvé l'an dernier en France dans leur lutte contre le CPE leur capacité de s'opposer efficacement aux attaques de la bourgeoisie, de les faire reculer. Elles ont su mettre en avant que cette attaque était une attaque contre tous les prolétaires. Elles ont cherché à mettre en œuvre et à faire vivre, sans en avoir toujours clairement conscience, les véritables méthodes de la lutte prolétarienne dans les universités : AG ouvertes non seulement aux enseignants et au personnel de l'Education nationale mais à tous les ouvriers, en activité comme au chômage, nomination de délégués élus et révocables à tout moment par l'AG, interventions ou tracts d'appel aux travailleurs salariés pour rejoindre la lutte. Les prolétaires doivent renouer avec cette expérience qui démontre que le développement de la lutte de classe est la seule réponse possible aux attaques de ce système qui condamne tous les prolétaires à une exploitation et à une misère grandissantes. Le développement de ces luttes dépend de la capacité d'affirmer l'union et la solidarité active de tous les ouvriers au-delà de l'usine, de l'entreprise, du secteur et des frontières nationales.
Pour mener à bien les coups qu'il nous prépare, le gouvernement s'est engagé à pratiquer une large "politique préalable de concertation sociale" avec les syndicats. Qu'est ce que cela signifie ? Que ces derniers seront étroitement associés au gouvernement pour faire passer la pilule. On voit déjà comment ce scénario a été amorcé. Tous les leaders syndicaux (Le Duigou ou Maryse Dumas pour la CGT, Mailly pour FO et Chérèque pour la CFDT) se sont relayés sur les plateaux de télé pour proclamer "on est prêts au dialogue et à la négociation". Ils se sont félicités à leur sortie de l'Elysée du "climat positif de coopération" du gouvernement. Et pour cause ! S'ils proclament haut et fort leur "intransigeance" sur le respect "de principe" du "droit de grève", ils martèlent en même temps déjà l'idée que dans la pratique, concernant par exemple le projet d'un "service minimum" : "les problèmes sont à examiner au cas par cas, branche par branche". Ils sont bel et bien sur la même longueur d'ondes que le gouvernement Sarkozy qui ne se livre à cette parodie de "concertation" que pour empêcher une mobilisation unitaire et d'ensemble face à ses attaques et pour permettre précisément aux syndicats de diviser ainsi les ouvriers secteur par secteur.
La bourgeoisie craint la réaction des prolétaires à toutes ces attaques. Elles frappent en effet l'ensemble de la classe ouvrière. Plus clairement que jamais se pose donc le développement de sa riposte dans une unité plus grande et une solidarité plus active.
C'est pourquoi les syndicats sont appelés à occuper sur le devant de la scène un rôle de premier plan, qui leur est assigné par toute la bourgeoisie dans le sabotage des luttes.
Gouvernement et syndicats se partagent le travail pour éviter toute mobilisation d'ouvriers, susceptible par l'exemple qu'il donnerait par leur lutte, d'entraîner d'autres ouvriers d'autres secteurs à les suivre sur la même voie.
Face aux luttes, l'Etat peut compter sur les syndicats pour tout mettre en oeuvre afin de stériliser par leurs manoeuvres toute expression de solidarité ouvrière en confinant les réactions des ouvriers dans le cadre corporatiste, de l'entreprise, comme à Alcatel, Airbus ou dans le secteur de l'automobile.
Souvenons-nous comment en 2003 les syndicats ont causé la défaite de la mobilisation générale contre la "réforme des retraites" en organisant l'isolement du secteur de l'Education nationale.
Les mois qui viennent vont démontrer que "l'homme de fer" Sarkozy n'est pas le seul ennemi de la classe ouvrière : il ne fait aucun doute que son rôle consiste à attaquer la classe ouvrière pour la défense ouverte des intérêts du capital national. L'ennemi le plus dangereux, ce sont les faux amis, les syndicats, qui sabotent en permanence nos luttes et nous mènent à la défaite afin de permettre au gouvernement et au patronat de faire passer leurs attaques.
W. (1er juin)
Les luttes spontanées, en dehors de toute consigne syndicale qui se sont affirmée fin avril et début mai sur plusieurs sites d'Airbus démontrent toute la combativité et la détermination de la classe ouvrière. Pour la plupart, ce sont de jeunes ouvriers, une nouvelle génération de prolétaires qui ont pris la part la plus active dans ces luttes, notamment à Nantes et Saint-Nazaire, où s'est avant tout manifestée une réelle et profonde volonté de développer une solidarité active avec les ouvriers de la production de Toulouse qui avaient cessé le travail la veille (le 26 avril) en réponse à une véritable provocation de la direction.
Face à cette provocation, les ouvriers ont spontanément débrayé. Le caractère provocateur du montant dérisoire de la prime est une évidence. Les ouvriers se sont sentis traités comme des chiens à qui on jette un tout petit os à ronger. C'était d'autant plus une incitation directe à partir en lutte qu'elle était lancée au milieu d'un double scandale : celui du parachute doré de l'ancien PDG Forgeard parti avec plus de 8 millions d'Euros d'indemnités et celui de la mise en cause de ses principaux dirigeants (Lagardère et Forgeard) fortement suspectés de "délit d'initiés".
L'annonce du versement de cette "prime" ne s'est pas faite en catimini, mais au contraire a fait l'objet d'une bruyante publicité de la part des syndicats pour tous les employés d'Airbus.
Il saute aux yeux que les syndicats ont été un vecteur actif de cette provocation. Et pourtant les syndicats, après avoir soufflé le vent, ont tout fait pour étouffer la tempête. Ils ont cherché à freiner au maximum la mobilisation et à s'opposer par tous les moyens aux débrayages spontanés en appelant immédiatement à la reprise du travail. Pourquoi cette réaction ?
Les syndicats et la direction savaient qu'un réel mécontentement couvait parmi le personnel et il fallait éviter qu'il s'exprime suite à l'annonce des licenciements, qu'il se focalise sur cette question des licenciements qui étaient le cœur de l'attaque. Ces licenciements concernaient essentiellement les postes administratifs, une partie au siège d'Airbus à Toulouse, une partie dans les autres centres administratifs et une partie concernant les sous-traitants.
Il s'agissait pour eux :
• D'abord de tester le niveau de combativité des ouvriers, surtout des jeunes, en les faisant partir sur la question des primes, pour amener cette combativité à s'épuiser. A Nantes et Saint-Nazaire, la colère qui s'est exprimée sur la question des primes était d'autant plus forte que les ouvriers savaient qu'ils allaient être sacrifiés quand leur usine serait reprise par un sous-traitant. La colère et la combativité se sont exprimées à travers la reconduction de la grève alors que le mouvement à Toulouse est globalement rapidement retombé. A Nantes en particulier, les grévistes étaient très remontés contre des syndicats vite débordés qui cherchaient uniquement à leur faire reprendre le travail. Sur les sites de Nantes et Saint-Nazaire, des comités de grève ont surgi, très rapidement transformées en "coordination" entre les deux sites. Une telle "coordination" exprimait donc une volonté de la part d'ouvriers combatifs d'organiser leur mouvement, en ne comptant que sur leurs propres forces. Mais en même temps, fait significatif des faiblesses de ce mouvement, des militants de LO revêtus de la casquette syndicaliste de base de la CGT ont pu récupérer immédiatement cette initiative dans le but de ramener les ouvriers derrière les syndicats. Un membre de cette coordination déclarait en effet : "Notre mouvement veut essayer de recréer une connexion entre le personnel et les syndicats. Il doit disparaître après" (Ouest-France du 4 mai 2007). Un militant de LO dans un forum sur Airbus le 27 mai organisé lors de la traditionnelle fête annuelle de cette organisation avouait lui aussi naïvement : "Je suis allé trouver les syndicats en leur disant : qu'est ce que vous foutez ? Si vous n'intervenez pas pour prendre le contrôle de la lutte, il y aura demain un nouveau Mai 68 qui vous pétera au nez !" Après quelques jours d'existence, cette coordination passait effectivement le relais à une "intersyndicale" pour reprendre le contrôle de la grève sur les deux sites jusqu'au moment où, à la suite des propositions de la direction pour casser le mouvement, la plupart des syndicats ont appelé à la reprise du travail à l'exception de la CGT minoritaire qui a entrepris de coller au mouvement jusqu'au vote général de la reprise du travail.
Entre temps, les syndicats avaient négocié avec la direction et Sarkozy l'octroi d'une prime portée à 800 Euros et des augmentations de salaire équivalentes à 2,7% de la masse salariale avec une augmentation minimum prévue de 40 Euros que les syndicats ont prétendu avoir "arraché" grâce à leur "attitude responsable de coopération" ; mais bien entendu ces "compensations" sont réservées aux ouvriers de la production. Pour la bourgeoisie, il fallait isoler les éléments partis en lutte tout en tentant de recrédibiliser momentanément les appareils syndicaux.
Il s'agissait de faire accréditer l'idée que partir en lutte hors des syndicats ne mène à rien, alors qu'avec des syndicats "responsables", on peut obtenir quelque chose.
• Il fallait également faire en sorte que la question des licenciements ne soit pas au centre de la lutte, et pour cela, entretenir la division entre "cols blancs" et "cols bleus". Il fallait que le scandale des primes masque le scandale bien plus grand des licenciements.
A travers son résultat, on perçoit mieux les buts de cette stratégie qui a permis de casser la dynamique de solidarité bien présente dans cette lutte :
• Tout a été fait pour entretenir la division entre les ouvriers à la production et les ouvriers administratifs (qui ne sont pas entrés en lutte parce que c'est sur eux que planait principalement la menace de licenciement).
Il est frappant de constater qu'à aucun moment dans tous ces mouvements, il n'y a pas eu le moindre appel à la solidarité entre "cols blancs" et "cols bleus", c'est-à-dire entre le personnel administratif, qui va être lourdement touché par les licenciements et les ouvriers à la production, qui eux ne seront pas touchés par ces mêmes licenciements, mais vont voir les cadences de travail encore s'accélérer.
• Ensuite en focalisant sur la prime, les syndicats ont poussé à séparer les "Airbusiens" et les ouvriers des entreprises sous-traitantes, menacés également de licenciements comme n'ayant pas les mêmes intérêts à défendre.
• Il s'agissait encore de renforcer le climat idéologique pourri de concurrence et de compétitivité nationalistes entre ouvriers français et allemands, laissant entendre que les ouvriers allemands, allaient toucher, eux, une prime plus conséquente.
• Cela permettait encore un enfermement sur les sites Airbus eux-mêmes et de pousser à fond "l'esprit de défense de l'entreprise" en mettant en avant des revendications spécifiques pour empêcher tout lien et toute solidarité avec les autres luttes (comme notamment à Alcatel et dans le secteur automobile chez qui les mêmes licenciements tombaient simultanément), alors qu'en Allemagne à Hambourg, les ouvriers d'Airbus ont rejoint dans une manifestation des ouvriers d'autres secteurs en grève (Sieta, Still, Blohm & Voss), de même à Berlin, ceux de BMW et ceux de Siemens ont pu manifester ensemble. En Espagne, des salariés d'une usine Airbus en Espagne sont également venus apporter leur solidarité dans une manifestation avec les licenciés de l'équipementier automobile Delphi.
A travers la combativité et la volonté de se battre en dehors même des consignes syndicales, dans cette lutte s'est ouvertement posée la question : comment développer la lutte, comment se battre pour résister efficacement aux attaques de la bourgeoisie ? Tant que les ouvriers se battront dans le cadre de leur entreprise, de leur secteur, des frontières nationales, ils continueront à subir licenciements et défaite boîte par boîte comme c'est le cas non seulement à Airbus, mais à Alcatel ou dans l'automobile
La peur que la lutte s'étende comme à Airbus a amené la bourgeoisie à "acheter la fin du mouvement" aux ouvriers à travers une prime et une augmentation de salaire. Il s'agissait d'empêcher les ouvriers de tirer la leçon que les syndicats poussent les ouvriers dans la division et le sabotage de la lutte. Il est nécessaire d'élargir et d'étendre la lutte en direction des ouvriers des autres entreprises, en particulier ceux qui subissent les mêmes attaques.
Le véritable combat de la classe ouvrière, c'est de se battre sans exclusive contre toutes les attaques qu'elle subit : contre les licenciements, pour des augmentations de salaires, pour des primes, contre l'augmentation des cadences... Etendre et développer ces luttes, c'est l'affaire de tous les ouvriers, quel que soit leur secteur d'activité. Dans chaque lutte, pour pouvoir affirmer leur solidarité active, les ouvriers ont à faire vivre des AG ouvertes à tous. L'exemple de cette lutte est porteuse d'espoir pour l'avenir si les ouvriers renforcent leur volonté d'être solidaires dans leurs combats. Ils ne pourront le faire que s'ils brisent le carcan de l'enfermement sur l'entreprise.
Wu (1er juin)
Une élection s'achève, une autre commence. Après les présidentielles du mois de mai, c'est au tour des législatives d'occuper le terrain de la campagne électorale. A peine le temps de reprendre son souffle et voilà le brave citoyen à nouveau mis à contribution.
Fort heureusement, pour prévenir tout risque d'indigestion, au beau milieu de ce gargantuesque gavage démocratique, la bourgeoisie sait qu'elle peut compter sur les services d'une extrême-gauche toujours prompte à ranimer l'appétit citoyen et convier les ouvriers à se joindre au grand banquet républicain.
Ainsi, Lutte ouvrière et la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), chacune dans un registre différent, ont ressorti leurs tambourins pour battre, à grand bruit, le rappel vers les bureaux de vote.
"Il est évident que la victoire de Sarkozy est une très mauvaise nouvelle et qu'on a pris un coup sur la tête le 6 mai. Mais ce n'est pas la fin de l'histoire" (Rouge 17 mai). Attention, personne ne descend du manège, c'est reparti pour 2 tours ! Contrairement à LO, sa vieille cousine, la LCR n'y va pas par quatre chemins et décide d'afficher sans détour son démocratisme façon "extrême gauche décomplexée" en allant, au culot, faire avaler aux ouvriers que le meilleur moyen de se défendre contre les attaques à venir, c'est encore de voter pour des représentants qui, une fois dans les assemblées (ou ailleurs), constitueront "une force anticapitaliste déterminée à lutter pied à pied contre la droite et le patronat... une force qui choisira toujours les salaires contre les profits". Bref, les ouvriers sont cordialement invités à mettre en sourdine leurs luttes ou, du moins, à remettre leur sort entre les mains des institutions démocratiques, celles là même qui ont été édifiées pour défendre les intérêts de la seule classe dominante de ce système : la bourgeoisie.
"Voter pour les candidats de la LCR, le 10 juin, ce sera dire [...] votre volonté de ne pas vous laisser faire. Ce sera un geste en faveur d'une autre répartition des richesses, pour reconstruire la solidarité et l'espoir. Ce sera un vote qui dira clairement qu'il est possible de faire reculer Sarkozy, un vote pour une gauche de lutte" (tract LCR du 29 mai).
Si les meilleures soupes se font dans les vieilles marmites, c'est toujours avec de jeunes carottes. Il est donc bien normal que la vieille LCR avec son jeune Besancenot nous resserve de cette mixture réformiste si efficace pour éloigner la classe ouvrière de sa perspective révolutionnaire en lui faisant espérer qu'un monde nouveau peu sortir des urnes républicaines.
Pour LO, par contre, ç'en est assez de ce cirque électoral... il est temps d'ouvrir les yeux.
"Tout dépend du monde du travail, de sa détermination et de la conscience qu'il aura que le bulletin de vote n'est qu'un chiffon de papier et que seules les luttes peuvent payer" (LO du 11 mai). Voilà que LO hausse le ton...
"Notre avenir est, en fait, entre nos mains. Pas par la grâce d'un bout de papier à glisser dans l'urne..." (LO du 25 mai). Et oui, les élections ne servent pas les intérêts de la classe ouvrière, mais uniquement ceux de la bourgeoisie, le prolétariat ne dispose pas d'autres moyens de défendre ses intérêts que sa lutte, sur son terrain de classe. Et pourtant, LO n'a jamais hésité a imprimer le nom d'Arlette Laguiller sur des millions de ces "chiffons de papier", et cela depuis 1974 !
Comment expliquer cette contradiction apparente ? Le plus simplement du monde, puisque à en croire LO, il n'y en a aucune !
"Les votes pour les grands partis ne changeront rien à rien, si ce n'est renforcer les illusions et les faux espoirs électoraux. [C'est pourquoi] ... les votes pour les candidats de Lutte ouvrière exprimeront au moins qu'une partie, fut-elle petite, de l'électorat ouvrier ne fait pas confiance aux bulletins de vote pour changer son sort" (LO du 25 mai).
Pour dire à la bourgeoisie qu'on "ne fait pas confiance au bulletin de vote" pour changer le monde, il faut... glisser un bulletin de vote dans l'urne ! On reconnaît bien là le double langage de LO qui nous dit d'un côté que voter ne sert à rien pour mieux nous appeler dans la même phrase à faire notre devoir de citoyen. Que l'on ne s'y trompe pas, tout ceci est on ne peut plus logique... du moins pour une organisation qui défend (tous compte fait et sous couvert de radicalisme révolutionnaire) les intérêts du capital, en invitant la classe ouvrière à exprimer sa colère à travers un moyen purement bourgeois et totalement dénué de la moindre efficacité pour remettre en cause l'ordre établi.
C'est à chaque élection que les trotskistes se prêtent à ces petits jeux. A chaque élection, ils font la promotion de la démocratie, cette mystification selon laquelle le "peuple" exercerait le pouvoir politique. Mais le seul pouvoir auquel la classe ouvrière puisse prétendre, c'est celui qu'elle prendra par ses luttes après avoir détruit tout l'appareil démocratique qui sert aujourd'hui à la bourgeoisie pour exercer sa dictature et maintenir le règne de l'exploitation.
GD (24 mai)
Tout ouvrier qui se rend à la CRAM (Caisse de retraite et d'assurance maladie) pour faire valoir ses droits à un départ "anticipé" risque d'avoir une très mauvaise surprise. En effet, il y a loin du discours bourgeois à la réalité ! Avoir "le droit" parait-il de bénéficier d'un des dispositifs de la loi du 21 août 2003 qui permet de partir à la retraite de manière anticipée est une chose, savoir qui et combien d'ouvriers peuvent y prétendre en est une autre ! Et ce dispositif n'est vraiment pas un cadeau de la part de la classe exploiteuse. La règle générale est la suivante : il faut avoir travaillé très jeune avant ses 16 ans et pendant 168 trimestres pour pouvoir prétendre à un repos légèrement anticipé et bien mérité. Ce dispositif de la loi Fillon de 2003, correspond à l'article L 351-11-1, du Code de la Sécurité sociale n'est en plus accessible qu'à la condition que les ouvriers eux mêmes fassent les démarches, sans qu'aucun organisme officiel ne les préviennent de son existence ! Bon nombre d'entre eux continuent ainsi à travailler, alors qu'ils pourraient être à la retraite. Pourtant, les ouvriers qui ont commencé à travailler à l'époque à 14 ans sont très majoritairement ceux qui ont effectués toute leur vie les travaux les plus pénibles et les plus usants. Il n'y a aucune illusion à se faire pour nos exploiteurs, il s'agissait à l'époque avec le saupoudrage de ce dispositif particulier et très limité par le nombre d'ouvriers concernés de faire passer au mieux l'ensemble de l'attaque sur les retraites et notamment l'allongement du temps de travail, pour la très grande majorité d'entre nous. En plus et mensongèrement cet article de loi ne comportait apparemment aucune limite dans le temps. Il était prévu d'en faire le bilan et de réexaminer le dispositif en 2008. Mais tout cela est du langage de technocrate bourgeois. En effet c'est depuis la mise en place du dispositif Fillon, que la "suspension" de la possibilité de départs anticipés pour carrières longues avait été programmée. En premier lieu la possibilité d'intégrer, comme temps travaillé, la période du service militaire, ou au titre d'une indemnisation pour maladie, maternité, accident du travail n'est valable que jusqu'au 31 décembre 2008. En second lieu les conseillers de la branche retraite sur la demande de la CRAM, ne peuvent en aucun cas s'engager au delà de décembre 2008. En réalité, il est dit clairement aux travailleurs qui viennent faire valoir leur droit à la retraite que ce dispositif ne va pas au delà de l'année 2008. Bien sur rien n'est dit officiellement pour le moment sur ce sujet. Ce qui est plutôt mis en avant, cyniquement c'est la suppression des régimes spéciaux, au nom de l'égalité entre tous les ouvriers ! Franchement, cette classe d'exploiteurs se moque totalement de nous. Si nous laissons faire cette classe de charognards c'est l'égalité dans la misère qui attend toute la classe ouvrière.
Tino
Et rebelote, pas de repos pour les braves électeurs. Les "citoyens français" sont à nouveau conviés à se rendre aux urnes, les 10 et 17 juin, afin d'élire cette fois ces dames et ces messieurs députés de l'Assemblée nationale.
Décidément, les enjeux électoraux auront été cette année au cœur de toutes les préoccupations, omniprésents à la télévision, à la radio et dans la presse. L'intérêt suscité par tout ce remue-ménage semble bien réel puisque les taux de participation aux présidentielles ont atteint des sommets. Voter, ce "geste citoyen", est aujourd'hui ressenti par la très grande majorité de la population comme un véritable devoir. Dans le climat actuel, celui qui ose avouer à ses collègues ou à son entourage qu'il ne vote pas, s'attire instantanément les foudres et la désapprobation générale.
S'inquiéter pour l'avenir, vouloir mettre un terme à la dégradation continuelle de nos conditions de vie est tout à fait légitime. Mieux, c'est une nécessité. Mais est-ce vraiment en se mobilisant ainsi massivement sur le terrain électoral que les ouvriers pourront faire face ensembles à toutes ces attaques ?
Officiellement, le droit de vote est un bien précieux. Grâce à lui, chaque citoyen a entre ses mains le pouvoir de choisir la politique à mener dans sa commune, son département, sa région, sa nation. C'est le fondement de la démocratie. Mais ce "pouvoir" n'est-il pas qu'une farce ?
A chaque élection, des projets différents pour l'avenir de la société sont censés s'affronter. Ainsi, pour ces législatives toutes proches, le Parti socialiste martèle qu'il faut absolument éviter la concentration de tous les pouvoirs entre les mains d'un seul homme, Sarkozy. En donnant du poids à la gauche dans l'hémicycle de l'Assemblée, le PS pourrait, soi-disant, s'opposer à la politique d'austérité de la droite et se battre en faveur de mesures sociales. Du vent ! La politique menée par les socialistes depuis des décennies et ressentie dans sa chair par la classe ouvrière, ne diffère en rien de celle de la droite. D'ailleurs, toutes les attaques à venir du gouvernement Fillon faisaient aussi parti du "plan d'action" de Ségolène Royal : réforme des retraites et des régimes spéciaux, démantèlement progressif des couvertures de santé, augmentation des charges de travail... Et il ne pouvait en être autrement. Toutes ces mesures sont nécessaires pour la compétitivité de l'économie nationale et, donc, toute fraction au pouvoir a pour mission de les mettre en place.
La propagande électorale est justement là pour cacher cette vérité toute crue en faisant croire à l'éventualité d'une alternative: "oui, une autre politique est possible... à la condition de bien voter". Mensonges et poudre aux yeux! Que signifie ce nouveau gouvernement, cette "équipe de France" teintée du rose des transfuges socialistes tels Kouchner ou Besson, si ce n'est que tous ces gens là appartiennent bel et bien à la même famille... la bourgeoisie. Les différences qui séparent les partis bourgeois ne sont rien en comparaison de ce qu'ils ont en commun : la défense du capital national. Pour ce faire, ils sont capables de travailler très étroitement ensemble, surtout derrière les portes fermées des commissions parlementaires et aux plus hauts échelons de l'appareil d'Etat. Ce n'est qu'un petit bout des débats de la bourgeoisie qui se montre au parlement. Et les membres du parlement sont en fait devenus des fonctionnaires d'Etat qui de temps à autres gesticulent dans l'hémicycle devant les caméras de France 3 pour feindre l'indignation face à telle ou telle mesure, tel ou tel mot "déplacé" d'un autre député... tout ceci afin d'épater la galerie et faire croire à l'intensité de la vie démocratique.
Les élections n'offrent donc en vérité aucune véritable alternative, aucune issue de secours. La possibilité de faire entendre sa voix par les urnes n'est qu'une illusion savamment entretenue.
Si la classe ouvrière n'a rien à gagner sur le terrain électoral, la bourgeoisie, quant à elle, remporte la mise à tous les coups. En transformant les ouvriers en citoyen-électeur, elle les dilue dans la masse de la population, les isole les uns des autres. Seuls et donc impuissants, elle peut ainsi leur bourrer le crâne à sa guise.
"Tous les hommes naissent libres et égaux en droit" comme cela est gravé dans le marbre de la déclaration universelle des droits de l'homme. Pour ce faire, chaque citoyen a un droit inaliénable, celui de voter. Cette idéologie peut se résumer en une simple équation : un individu = un vote. Mais le problème, c'est justement que cette belle déclaration de principe n'est que virtuelle. Dans le monde réel, les hommes sont tout sauf égaux. Dans le monde réel, la société est divisée en classes. Au dessus et dominante, tenant les rênes, il y a la bourgeoisie; en dessous, il y a toutes les autres couches de la société et en particulier la classe ouvrière. Dans la pratique, cela signifie qu'une minorité détient l'Etat, les capitaux, les médias... La bourgeoisie peut ainsi imposer au quotidien ses idées, sa propagande.
Ce rouleau compresseur médiatique passe et repasse sur le corps électoral depuis plus d'un an. Pas une seule minute la propagande n'a cessé. Les magazines, les journaux, les émissions spéciales se sont succédées à un rythme infernal afin que jamais, oh grand jamais, les ouvriers puissent réfléchir un instant par eux-mêmes. Ce bourrage de crâne n'est pas nouveau, le premier congrès de l'Internationale communiste affirmait déjà en 1919: "[la liberté de la presse] est un mensonge, tant que les meilleurs imprimeries et les plus gros stocks de papier sont accaparés par les capitalistes [...]. Les capitalistes appèlent liberté de la presse la faculté pour les riches de corrompre la presse, la faculté d'utiliser leurs richesses pour fabriquer et pour soutenir la soi-disant opinion publique" 1.
Revenons à notre pauvre bougre qui dans un élan inconscient de témérité osa "avouer" à ses collègues son peu de foi dans le cirque électoral, recevant immédiatement en récompense d'autant de sincérité une volée de bois vert. Le dialogue à couteaux tirés est facile à imaginer. Lui, la goutte au front, bégayant que ça fait des années que nous nous faisons avoir, qu'ils sont tous pareils ces politiciens, que lui refuse de choisir entre la peste et le choléra. Tous les autres coupant court à la discussion puisque ne pas voter c'est... faire le lit du Front national !
En s'appuyant sur la peur du fascisme, telle une ombre planant de façon lointaine au dessus des têtes, la bourgeoisie insiste inlassablement sur la fragilité de la démocratie, sur la nécessité pour tous de la défendre et de la faire vivre. Elle est ainsi parvenue à annihiler d'avance toute discussion potentiellement honnête et constructive sur la question électorale. Le ressort de l'argumentaire est simple: même si la démocratie n'est pas parfaite, elle permet à chacun de se faire entendre. Il est donc interdit de gâcher cette chance.
Mais à y regarder de plus près, là encore, la réalité est toute autre. La démocratie bourgeoise sert de masque à la dictature qu'exerce le capital. Voter donne l'illusion d'agir. L'électeur est acteur juste pendant 3 secondes, le temps de glisser le bulletin dans l'urne, et encore un acteur contraint de jouer un script écrit par un autre. Une fois "le responsable politique" élu, l'électeur n'est plus qu'un spectateur.
La classe ouvrière se doit de développer une façon de vivre, d'agir et de décider collectivement radicalement différente. Dans la démocratie bourgeoise, une fois tous les cinq ans, la société fait semblant d'avoir un grand débat collectif où tout le monde est impliqué. Dans la lutte, au contraire, cette implication de tous est réelle. Dans les assemblées générales authentiquement prolétariennes, la parole est partagée, les débats y sont ouverts et fraternels et, surtout, les délégués sont révocables. Cette révocabilité est importante, elle signifie que le pouvoir reste entre les mains des masses. Si le délégué ne défend plus l'intérêt général, eh bien on en change. La lutte en Pologne en 1980 est un exemple frappant de cette vie ouvrière en action, de cette volonté d'agir réellement collectivement. Quand le comité de grève se réunissait, constitué des délégués élus, la foule écoutait dehors, grâce à des micros et des hauts-parleurs, l'avancée des discussions et manifestait par des cris son approbation ou son mécontentement ! Il n'était pas question de laisser une poignée décider pour tout le monde 2.
C'est donc un gouffre qui sépare la démocratie bourgeoise de la vie politique prolétarienne. D'un côté, les manœuvres, les manipulations, le pouvoir au main d'une minorité dominante. De l'autre, la solidarité, le débat ouvert et fraternel, le pouvoir entre les mains des masses ! Depuis des décennies, les élections se suivent et se ressemblent. Le temps de la campagne, les candidats rivalisent de promesses, jurant la main sur le cœur qu'avec eux, l'avenir sera meilleur. Une fois élus, de gauche ou de droite, toutes leurs belles paroles s'envolent pour retomber sous la forme d'attaques brutales. Toujours la même politique anti-ouvrière, toujours la même austérité. Ces "désillusions", la classe ouvrière en a soupé jusqu'à la nausée.
Le terrain électoral est LE terrain de la bourgeoisie. Sur ce champ de bataille, toutes les armes sont entre les mains de la classe dominante. Elle en sort chaque fois victorieuse et le prolétariat chaque fois vaincu. Par contre, dans la rue, dans les usines, en assemblée générale, les ouvriers peuvent s'unir, s'organiser et se battre collectivement. La solidarité de la classe ouvrière est une des clés de l'avenir contrairement à ces petits bouts de papiers nommés bulletins de vote !
Pawel
1 Thèses sur la démocratie bourgeoise et la dictature prolétarienne présentées par Lénine le 4 mars 1919.
2 Lire notre brochure "Sur la Pologne" (non disponible en ligne à ce jour) .
Réunis pour la troisième fois à Bangkok (du 30 avril au 3 mai) les 120 délégations nationales composant le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) se sont finalement accordées pour livrer, au terme des débats, leur "résumé à l'attention des décideurs" portant sur les "mesures d'atténuation" à prendre d'urgence pour lutter contre le réchauffement climatique.
Précédemment, dans le volet "scientifique" de leur 1er rapport (rendu à Paris en février) ces experts en tous genres avaient posé le constat d'un risque majeur d'élévation des températures mondiales comprise entre 2 et 4 °C d'ici 2100 "dû à l'augmentation des concentrations de gaz à effet de serre engendrées par l'homme" 1.
Quant aux conséquences meurtrières de cette hausse des températures encore jamais vue dans l'histoire de la Terre (du moins sur une si courte période), elles ont été répertoriées par le groupe II du GIEC (réuni en avril à Bruxelles) dans une série de scénarios catastrophes tous plus apocalyptiques les uns que les autres : inondations, sécheresses, ouragans plus fréquents et plus violents, montée du niveau des mers, immersion de terres habitées ou encore extinction de 20 à 30% des espèces animales et végétales. Bref, si le réchauffement climatique continue sa course la planète deviendra à ce point hostile que de nombreuses formes de vie, et en premier celle des hommes, seront impossibles.
C'est ici qu'entre en scène Ogunlade Davidson (co-président du groupe III du GIEC) pour signaler que si les nouvelles contenues dans les deux premiers rapports n'étaient "pas bonnes", le 3e rapport assure que "des solutions sont possibles et que vous pouvez le faire à un coût raisonnable".
Ouf ! Le monde est sauvé. Il fallait bien ça pour trouver un happy end à ce film catastrophe.
Après s'être échiné en février à évacuer la responsabilité du mode de production capitaliste en rejetant la faute (de façon grotesque mais par ailleurs très commode) sur "l'Homme" 2, cet "incorrigible égoïste" qui "saccage", "piétine" la vie et tout ce qui l'entoure depuis la nuit des temps, le GIEC boucle son plaidoyer à Bangkok par une nouvelle pirouette. En effet, au bout du compte, ce groupe d'experts nous invite à bien comprendre que le système capitaliste (et ce quelque soit sa "part" de responsabilité dans le bouleversement climatique) a les moyens de mettre en œuvre une politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Et cela pour un coût tout à fait modique, voir un bénéfice économique en matière (nous dit-on) de dépenses de santé ou de créations d'emploi.
Faut-il que la bourgeoisie soit si bête pour ne pas y avoir songé plus tôt ? Ou bien est-ce à nouveau notre guignol's band d'"experts" du climat qui continue à nous prendre pour des imbéciles ? C'est en tout cas ce que laisse entendre l'intervention clownesque du président du GIEC (Rajendra Pachauri) lorsqu'il invite les individus à adopter un mode de vie plus respectueux de la nature en suivant le conseil de l'ancien président des Etat-Unis, Jimmy Carter, qui dans les années 1970 recommandait au bon citoyen de baisser le chauffage à la maison en hiver et de porter un chandail plutôt qu'un T-shirt. Dans la foulée, Monsieur Pachauri n'a pas oublié de féliciter le premier ministre japonais qui a encouragé les cadres à renoncer à la cravate pour pouvoir réduire la climatisation dans les bureaux. Enfin, une autre option à prendre en considération a ajouté ce bon Dr Pachauri (de toute évidence gros contributeur d'émission de gaz à effet hilarant dans le monde)... devenir végétarien ! "Si les gens mangeaient moins de viande, ils seraient peut-être en meilleure santé. Et en même temps, ils contribueraient à réduire les émissions générées par l'élevage bovin." En résumé, pour sauvegarder l'environnement il faut mettre un chandail l'hiver, enlever la cravate l'été et devenir végétarien. A ce compte là c'est sûr, la lutte contre le réchauffement climatique ne risque pas de coûter bien cher !
Plus "sérieusement", il demeure dans le rapport du GIEC des mesures plus concrètes pour enrayer la menace d'un changement brutal du climat : développer les énergies non polluantes (éolien, solaire), construire des habitations mieux isolées donc moins énergivores, généraliser l'utilisation des biocarburants, amorcer une transition des transports routiers vers le rail et les voies fluviales, ou encore développer les technologies de "captage et de séquestration" du CO2 pour limiter les émissions des centrales électriques utilisant la houille par exemple. Voilà des mesures qui paraissent être efficaces. Mais dans ce monde, une grave préoccupation hante l'esprit du capitaliste, et la question fuse comme une balle : "Combien ça coûte ?"
"Et bien, des clopinettes !" répondent en chœur les experts du GIEC toujours soucieux de ne pas mettre en porte à faux le mode de production capitaliste.
"Une stabilisation des concentrations en équivalent CO2 (...) entraînerait une diminution de 0,1% du taux de croissance moyen annuel d'ici à 2030" (GIEC III).
Une goutte d'eau dans un océan, nous répète-t-on à l'envi. Et pourtant, elle n'en reste pas moins une goutte de trop.
Ce n'est pas pour rien si la question du coût des politiques à mettre en œuvre contre le réchauffement climatique a dominé les 5 jours de discussions du GIEC à Bangkok suscitant, entre les différentes délégations nationales, d'âpres débats.
Si, comme semble croire Stephan Singer, du fonds mondial pour la nature (WWF), "aucun gouvernement ne peut [au vu des derniers travaux du GIEC] faire valoir que ça nuirait à son économie" c'est tout simplement parce que ces choses là ne se disent pas en public, bien que certains ne s'en soient pas privé. Ainsi, James Connaugthon (président du conseil de la Maison Blanche sur la qualité environnementale) a estimé que les mesures préconisées à Bangkok "représentent un coût extrêmement élevé" pouvant aller jusqu'à "entraîner une récession". Faisant écho à l'inquiétude américaine, Jacques Chirac (pourtant l'un des plus fervent soutien aux conclusions du GIEC) a précisé que le coût des mesures à prendre seraient "non négligeable". En effet, celles-ci nécessiteraient une telle réorganisation de l'appareil productif que le coût de ce bouleversement serait insupportable, non pas en soi mais au regard de la compétitivité de chaque économie nationale face à ses concurents.
Le capitalisme n'a pas d'autres raison d'être que d'engranger des profits. Si demain un pays se mettait a financer la réduction de ses émissions de CO2 afin de rendre son économie "propre", alors il se ferait impitoyablement balayer du marché mondial par les nations concurrentes qui auront gardé intact leur niveau de compétitivité en continuant à produire à moindre frais.
Réduire les coûts de production au minimum pour être aussi compétitif que possible est la règle incontournable de ce monde. Dans la lutte acharnée que se livrent les rats capitalistes pour se maintenir sur le marché, le coût des mesures visant à endiguer la pollution industrielle (aussi "limité" ou "raisonnable" soit-il) devient un handicap intolérable.
Alors, qui prendra le risque de faire le nettoyage de son économie le premier ? Bien évidemment personne. Chacun sait que cela lui serait fatal. C'est pourquoi toutes les conférences sur l'environnement sont vouées à l'échec comme cela c'est vu dans le passé à Rio ou à Kyoto et comme cela se verra avec le nouvel accord climatique international qui se prépare pour la prochaine conférence ministérielle de l'ONU à Bali en décembre 2007.
Le comportement général du système capitaliste fait penser à celui de ce monstre légendaire dont l'appétit et la stupidité étaient si grands qu'apercevant le bout de sa queue il s'en saisit, commença à la manger et continua jusqu'à ce qu'il se fût entièrement dévoré. La différence entre cette créature et le capitalisme est que ce dernier n'est pas stupide, il n'a tout simplement pas le choix.
Son appétit insatiable pour le profit (but ultime de son existence) le conduit inévitablement à fouler aux pieds toutes les lois humaines. La vie et le bien être des hommes ne font pas le poids devant l'impérieuse nécessité de la rentabilité économique.
Le capitalisme est incapable d'éviter la crise climatique qui s'annonce. Parce qu'il produit sans se soucier des hommes et de leur milieu naturel, obsédé par la compétitivité économique, il est devenu l'unique artisan du chaos à venir.
L'urgence, plus que jamais, réside donc dans la mise à bas de ce monde afin de faire naître une nouvelle société où la vie sera enfin le bien le plus précieux.
Jude (15 mai)
1 Les émissions des gaz à effet de serre rejetées dans l'atmosphère ont en effet augmenté de 70% entre 1970 et 2004.
2 Lire notre article "Réchauffement climatique : le capitalisme ne peut que continuer à détruire la planète" dans RI n° 377.
"Nous touchons les limites de l'inhumanité, nous ne sommes plus en état de continuer à assumer ce travail si important pour le pays dans les conditions où nous sommes dirigés et traités. Nous n'avons plus confiance ni en nos équipements ni en ceux qui nous gouvernent. Nous travaillons les fusils braqués sur nous...". C'est ce message dramatique qu'ont adressé les contrôleurs aériens de Brasilia, de Curitiba, de Manaos et de Salvador dans un Manifeste avant de paralyser le service le 30 mars, d'entamer une grève de la faim et de s'enfermer dans les locaux pour faire pression sur les autorités du Commandement de l'Aéronautique, organe militaire responsable du contrôle du trafic aérien au Brésil 1. A 14 heures, à la fin de leur journée de travail, les contrôleurs de l'équipe du matin du Cindacta-1 (Centre intégré de défense aérienne et contrôle du trafic aérien) de Brasilia, qui contrôle 80 % du trafic aérien du pays et regroupe 120 contrôleurs, décident d'occuper les locaux pour poursuivre le mouvement. Face aux mesures répressives du Commandement de l'Aéronautique, qui ordonne l'arrestation de 16 contrôleurs et menace "d'appliquer le règlement" qui punit d'emprisonnement les "mutins", les contrôleurs décident d'amplifier le mouvement vers d'autres centres de contrôle ; le vendredi, à 18 h 50, ils paralysent 49 des 67 aéroports du pays. La grève est suspendue le samedi 31 à 0 h 30, après que le gouvernement ait annulé les ordres d'emprisonnement de grévistes et se soit engagé à étudier les revendications formulées, principalement la démilitarisation du service des contrôleurs aériens.
Depuis la collision d'avions au Mato Grosso, dans le centre ouest du pays, qui fit 154 victimes le 29 septembre, les contrôleurs ont déjà effectué plusieurs débrayages pour protester contre les accusations du gouvernement et des autorités militaires qui les en rendent responsables. Dans leur Manifeste, les travailleurs se défendent contre ces calomnies : "Six mois après la collision du 29 septembre, aucun signe positif n'a été fait pour résoudre les difficultés rencontrées par les contrôleurs aériens. Au contraire, ces difficultés ne font que s'aggraver. Comme si les difficultés d'ordre technique et de conditions de travail ne suffisaient pas, on nous accuse de sabotage dans le seul but de masquer les failles de gestion du système...". La grève exprime l'indignation des contrôleurs aériens face à la riposte du gouvernement et du haut commandement militaire : "Les mesures de représailles prises par le haut commandement militaire contre les sergents contrôleurs ont provoqué un tel mécontentement que nous ne supporterons plus de nous taire dans un tel contexte d'injustice et d'impunité des véritables responsables du chaos".
Cette grève met à nu toute l'hypocrisie de l'ensemble de la bourgeoisie brésilienne et sa responsabilité dans la crise des transports aériens, tant de la part de la gauche aujourd'hui au gouvernement que de la droite. Celle-ci dénonce l'incapacité du gouvernement Lula et son essaie d'occulter que la détérioration du système de contrôle aérien vient de très loin, bien avant son arrivée au pouvoir. Quant à Lula, il est aussi responsable de la situation, étant de notoriété publique qu'au lieu de travailler à répondre aux besoins de l'ensemble du système aérien, il a accordé la priorité aux investissements du Groupe de transports spéciaux (GTE) qui s'occupe de l'Airbus présidentiel et des vols des hauts dignitaires du gouvernement, civils et militaires. La bourgeoisie tente d'occulter aussi que le déchaînement de la concurrence entre compagnies aériennes, la politique de baisse des coûts, la survente de billets et l'augmentation du nombre de vols conduit le système de contrôle aérien à s'effectuer dans des conditions extrêmes.
L'action des travailleurs a mis le doigt là où ça fait mal. Elle a rendue publique une situation qui restait occulte quand elle n'était pas déformée pour l'ensemble des travailleurs du secteur aérien, des passagers et plus généralement de la population. Cette grève, brève mais ayant un puissant impact, est une manifestation de solidarité des contrôleurs aériens avec les autres travailleurs du secteur et avec la population qui peut être affectée par les accidents aériens. Elle exprime que le prolétariat, par sa lutte consciente, politique et organisée, possède la capacité de réaliser des actions contre le capital en faveur du travail et de l'ensemble de la société, qu'il a les moyens de dépasser l'impuissance à laquelle nous condamne la bourgeoisie.
Syndicats et gouvernement ont été surpris et débordés par les événements. Les autorités aéronautiques croyaient dur comme fer que les contrôleurs reculeraient devant les menaces d'emprisonnement et d'application de la discipline militaire. Ces mesures n'ont fait que radicaliser le mouvement. Face à cette radicalisation qui pouvait avoir des conséquences imprévisibles, Lula lui-même a dû intervenir (alors qu'il se trouvait lui-même dans son confortable Airbus, en route pour aller rencontrer son collègue Bush), faisant appel à toute son expérience de "pompier social" des luttes ouvrières, accumulée quand il était leader syndical à l'ABC de Sao Paulo. Ce n'est pas par "démocratisme" ni parce qu'il est un "président ouvrier" que Lula a obligé les hautes sphères des Forces aériennes brésiliennes à négocier avec les grévistes, mais parce qu'il a une forte expérience de syndicaliste, c'est-à-dire d'agent de l'Etat capitaliste dans le milieu ouvrier. Il a compris que les travailleurs étaient décidés à pousser le conflit jusqu'à ses dernières limites. Il sait très bien que quand se manifeste la colère des travailleurs, elle peut s'étendre comme une traînée de poudre. Il fallait d'abord désamorcer le mouvement.
Les syndicats et associations n'ont rien fait pour soutenir les travailleurs en lutte. Le "Sindicato Nacional dos Trabalhadores de Proteção ao Vôo" (SNTPV), qui regroupe les contrôleurs civils, s'est vu forcé de publier le Manifeste2 sur son site internet. Dans une tentative de diviser les contrôleurs, son président, Jorge Bothelo, est allé jusqu'à déclarer que "le Manifeste avait été signé par les contrôleurs militaires", alors que les contrôleurs civils s'étaient joints à la grève malgré l'opposition du syndicat. Quant aux syndicats des autres secteurs du service aérien, contrôlés par le PT, ils ont soigneusement évité de se prononcer pour ne pas gêner leur chef suprême en voyage à Washington.
Il existe cependant encore beaucoup d'illusions et de pièges autour de ce mouvement. Le Manifeste en exprime certaines quant à l'ouverture "démocratique" du gouvernement et à sa "transparence" : "Le Brésil vit des moments inédits de démocratie et de transparence grâce à la sauvegarde des valeurs éthiques de respect dans les affaires publiques". Les travailleurs ne doivent pas se laisser éblouir par les belles paroles de la gauche, par ses promesses. Elle est la gauche du capital, et utilise en tant que telle l'hypocrisie de la classe dominante. Droite comme gauche alimentent la démocratie bourgeoise, mécanisme politico-idéologique qui permet de maintenir la dictature du capital sur le travail.
Quelques jours après la grève, le gouvernement a déclaré illégal l'accord signé par ses propres représentants et les grévistes, accord qui donnait satisfaction aux revendications. Dans un violent discours adressé à la presse et à la population, le Président Lula a accusé les contrôleurs d'être des "irresponsables" et des "traîtres", pour n'avoir pas respecté les institutions et la hiérarchie militaire : "Les gens doivent savoir que dans un régime démocratique, il est fondamental de respecter les institutions et la hiérarchie" (Folha Online, 5-4-08). Ce discours a ouvert la voie de la répression ouverte, renforçant la volonté des organes militaires de punir, y compris d'incarcérer, les éléments les plus combatifs (ce qu'ils avaient déjà tenté de faire au début du mouvement lorsque 18 contrôleurs avaient été emprisonnés). Les négociations exigées par Lula n'avaient comme but que d'épuiser le mouvement et gagner du temps.
Il est évident que nous ne sommes pas le moins du monde surpris, car les gouvernements, qu'ils soient de droite comme de gauche, ainsi que les syndicats, ne sont que des instruments utilisés par la bourgeoisie pour sauver les intérêts de la classe dominante. Les prolétaires, au Brésil comme partout ailleurs, doivent apprendre quoi qu'il leur en coûte qu'en faisant confiance aux soi-disant libertés démocratiques, aux promesses des patrons et des gouvernants, ils permettent non seulement à la bourgeoisie de combattre les mouvements de lutte, mais qu'ils s'exposent désarmés à de vastes offensives avec leurs cortèges de répressions, de représailles, de licenciements et de violences.
L'explosion du mouvement des contrôleurs nous montre que ni les baïonnettes, ni les syndicats - qu'ils soient contrôlés par des partis de droite ou de gauche - ne peuvent empêcher la lutte du prolétariat. Cette lutte montre que si la gauche du capital, sous les ordres de Lula, est parvenue jusqu'ici à repousser dans le temps les luttes ouvrières, elle ne les a pas fait disparaître. Malgré l'action anti-ouvrière du PT et de la CUT, le prolétariat brésilien vit encore. Dans ce sens, les réformes du travail avancées par le gouvernement Lula peuvent provoquer des réactions dans le prolétariat brésilien 3.
Pour atteindre ses véritables objectifs, le prolétariat doit tirer les leçons de ses propres luttes, des luttes de l'ensemble de la classe, il doit faire la critique de ses illusions sur la capacité d'une société divisée en classes à trouver une issue contre la dégradation des conditions de vie. La grève des contrôleurs aériens a mis en évidence que la force du prolétariat n'est pas seulement quantitative, elle est surtout qualitative. Bien qu'ils ne soient pas plus de 3000, grâce à leur sens élevé de la solidarité, à leur organisation et à leur politisation, et parce qu'ils bénéficiaient du soutien implicite d'importants secteurs de la classe ouvrière, les contrôleurs aériens sont parvenus à s'affronter victorieusement à l'Etat le plus puissant d'Amérique du Sud.
1 Dans leur grande majorité, les contrôleurs aériens au Brésil sont des fonctionnaires militaires ayant le grade de sergent. Sur 2289 contrôleurs, il n'y a que 154 civils.
2 Le texte complet du Manifeste des contrôleurs peut se trouver sur les site du "Sindicato nacional dos trabalhadores de proteção Ao Vôo" (SNTPV), https://www.sntpv.com.br/principal.php [8], qui regroupe les contrôleurs aériens civils. Le syndicat, bien qu'il n'ait pas appelé à la grève, s'est vu obligé de publier le Manifeste sous la pression du mouvement.
3 Le gouvernement développe une réforme législative du droit du travail et des syndicats, sous prétexte de "créer des emplois". Ces réformes, en réalité, ne font que flexibiliser le travail, accentuant la précarisation du prolétariat brésilien pour le plus grand bénéfice du capital national.
Depuis bientôt une quinzaine de jours, des combats d'une violence chaque jour plus exacerbée ont éclaté dans le nord du Liban. Officiellement, on dénombre plus de 90 morts, parmi les soldats libanais et les combattants du Fatah al-Islam, mais aussi dans la population civile palestinienne du camp de Nahr al-Bared, l'un des douze que compte le pays et dans lesquels survivent 400 000 Palestiniens, "réfugiés" de la guerre israélo-arabe de 1969 ! Sur les 31 000 personnes de ce camp, 26 000 ont fui les affrontements, certains pour s'entasser dans le camp voisin de Baddaoui, d'autres dans une errance incertaine, passant de la misère et de la soumission aux lois maffieuses opérés par les groupes palestiniens qui les "protègent" à l'état de bêtes parquées ici et là sous la surveillance de la Croix Rouge et de l'ONU. Pour les 5000 Palestiniens restants, c'est purement et simplement l'horreur. Pris sous le feu croisé des forces libanaises qui encerclent et mitraillent ou bombardent à coups de missiles le camp, et de celles du Fatah al-Islam qui s'en servent de boucliers humains, hommes, femmes, enfants sont étranglés dans une terrible souricière.
Ce sont la décision de l'ONU de constituer un tribunal "à caractère international" chargé de juger les assassins de Rafic Hariri et la perspective d'élections présidentielles au Liban qui ont été les éléments déclencheurs de cet engrenage dans une violence jamais vue depuis le début des années 1970, au plus fort de la Guerre froide. Evidemment, la Syrie est particulièrement visée. L'apparition récente du groupe Hamas al-Islam, scission apparentée à Al-Qaïda d'un groupe pro-syrien, le Hamas Intifada, lui-même issu du vieux FPLP de George Habache opposé à Yasser Arafat et basé à Damas, ne peut que jeter la suspicion sur le rôle de l'Etat syrien dans la situation actuelle. Et cela d'autant que ce groupuscule ne présente aucune revendication palestinienne. De plus, le refus radical de création de ce tribunal par la Syrie, qu'elle rejette d'autant plus violemment que des responsables syriens ont été officiellement mis en cause, vient montrer à nouveau du doigt son implication dans le meurtre d'Hariri. Souvenons-nous que l'assassinat du dirigeant libanais en 2005 avait eu pour conséquence le départ des forces syriennes du Golan que revendique historiquement la Syrie et qui est une pomme de discorde permanente dans les relations entre Damas et Beyrouth.
Bien sûr, la "communauté internationale" s'émeut d'une telle situation, dans un pays qui compte 4500 casques bleus, cette "armée internationale de la paix", c'est-à-dire la plus grande concentration des forces de l'ONU au monde. Et ce sont la France et les Etats-Unis, pour cette fois apparemment sur la même longueur d'onde, qui ont été les plus prompts à proposer leurs bons offices. "Le gouvernement libanais fait ce qu'il a besoin de faire pour combattre un groupe terroriste très dangereux et pour rétablir la loi et l'ordre dans le pays", entendait-on à Washington le 25 mai. Et dans la même foulée, six avions-cargos américains bourrés d'armes et de munitions arrivaient donc au Liban afin de "soutenir" l'action de l'armée de Beyrouth.
Dans sa visite de "solidarité" au Liban, l'indispensable "french doctor" Kouchner, intangible amoureux des caméras, déclarait quant à lui que "la politique française [était] inchangée" et proposait sans réserve la fourniture d'équipements et d'armements militaires, bien sûr "humanitaires", au gouvernement libanais.
C'est clair, ces deux requins impérialistes ne font qu'attiser les affrontements guerriers et y participent même directement. La France et les Etats-Unis sont en effet directement intéressés à intervenir dans la situation au Liban.
Pour les Etats-Unis, qui avaient laissé le Golan à la Syrie au début des années 1990 pour lui rétribuer sa collaboration avec Washington tout en coupant le pied aux velléités impérialistes françaises au Liban, il s'agit de faire payer à la Syrie son soutien aux forces sunnites pro-irakiennes et aux terroristes d'Al-Qaïda qui sont stationnés et soutenus par la Syrie depuis l'invasion américaine en Irak. Aussi, la Maison Blanche ne va pas lésiner sur les moyens offerts à Beyrouth pour taper fort contre l'incursion effectuée par la Syrie à travers le Fath al-Islam.
Pour la France, dont les intérêts au Moyen-Orient sont toujours principalement passés par le Liban, il s'agit de tenter par tous les moyens de faire un retour dans le pays. Après le départ forcé en 1992 du général pro-français Michel Aoun, que les Etats-Unis avaient contraint de partir pour mieux permettre à la Syrie de s'installer dans le Golan et aux rênes de l'Etat libanais via des hommes dévoués à sa cause, l'Etat français n'a cessé de faire des pieds et des mains pour rétablir son influence dans la région.
Aussi, il n'est nullement question de voir une alliance entre l'Amérique et la France en vue d'instaurer la paix au Liban comme dans l'ensemble de la région. Tout au contraire, c'est une véritable concurrence impérialiste qui anime leurs intentions, concurrence qui n'augure strictement rien d'autre que de nouveaux affrontements et une nouvelle accélération des conflits guerriers dans cette zone du monde.
Leurs discours mensongers voudraient nous faire croire qu'un objectif commun les pousserait à régler la question. Loin s'en faut. S'ils ont le même intérêt à voir la Syrie et les terroristes du Hamas al-Islam reprendre leurs billes du Liban et déguerpir, il n'en va pas de même pour le Liban qui restera un enjeu d'importance pour ces deux concurrents impérialistes au Moyen-Orient. Pour les Etats-Unis, la stabilisation du Liban leur permet de contrôler la Syrie et de maintenir la pression sur ce pays qui est une base arrière des forces anti-américaines en Irak. Pour la France, c'est à la fois la question de continuer à prétendre au statut de puissance impérialiste mondiale "qui compte" dans la question moyen-orientale et aussi de continuer à détenir un appui dans cette région pour saboter la politique militaire et stratégique des Etats-Unis, que ce soit en Irak comme dans l'ensemble du Proche et du Moyen-Orient.
La poudrière que constitue le Proche et le Moyen-Orient n'est pas prête de s'éteindre. Les évènements au Liban ont leur pendant dans les territoires occupés de la Bande de Gaza que pilonne l'armée israélienne depuis des semaines. Et l'on retrouve les mêmes protagonistes des pays développés, bons samaritains toujours prêts comme le "Quartette pour la paix au Proche-Orient" (Union européenne, Etats-Unis, Nations unies et Russie) qui appelle en vain à l'arrêt des violences entre Israël et le Hamas dans la Bande de Gaza, comme celles entre le Hamas et le Fatah dans le Nord du Liban.
La véracité des déclarations de bonnes intentions de tous ceux qui gouvernent le monde est à mesurer à l'aune de ce qu'ils font subir partout aux populations et à la classe ouvrière : misère, sueur et sang. C'est le seul langage de la bourgeoisie, c'est le langage du capitalisme.
Mulan (2 juin)
Le 4 mai et les jours suivants se commémorait le 70e anniversaire des tragiques événements de mai 1937 où le gouvernement de la République - avec la complicité directe des dirigeants de la CNT et du POUM 1 - ont massacré les ouvriers de Barcelone qui s'étaient soulevés, exaspérés par une exploitation brutale accrue par "l'effort" de guerre. Nous pensons qu'un large débat est indispensable aujourd'hui pour tirer les leçons de ces événements-là et pour y contribuer, nous reproduisons ci-dessous l'article d'intervention que nos prédécesseurs, la Gauche communiste d'Italie et de Belgique avaient publié à cette époque dans la revue Bilan (1933-1938). Nous espérons ainsi susciter un débat sincère et ouvert allant jusqu'au fond des choses, permettant aux générations actuelles de la classe ouvrière de tous les pays qui n'ont pas vécu cette tragédie de se renforcer dans leur lutte contre un capitalisme chaque fois plus barbare et inhumain.
Courant communiste international (1er mai 2007)
1) Le Parti ouvrier d'unification marxiste (ou POUM, en espagnol Partido obrero de unificación marxista) était une organisation espagnole proche des trotskistes, créée en 1935 et dissoute en 1937, qui a participé activement à la Guerre d'Espagne contre le général Franco.
Links
[1] https://fr.internationalism.org/en/tag/situations-territoriales/situation-sociale-france
[2] https://fr.internationalism.org/en/tag/recent-et-cours/luttes-classe
[3] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/36/france
[4] https://fr.internationalism.org/en/tag/situations-territoriales/lutte-classe-france
[5] https://fr.internationalism.org/en/tag/recent-et-cours/elections-2007
[6] https://fr.internationalism.org/en/tag/courants-politiques/trotskysme
[7] https://fr.internationalism.org/en/tag/recent-et-cours/crise-economique
[8] https://www.sntpv.com.br/principal.php
[9] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/52/amerique-centrale-et-du-sud
[10] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/56/moyen-orient
[11] https://fr.internationalism.org/french/brochures/fascisme_democratie_Espagne_36_tract_Bilan.htm
[12] https://fr.internationalism.org/en/tag/evenements-historiques/espagne-1936