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ICConline - avril 2025

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Argentine : le combat des retraités est aussi le nôtre

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Le mercredi 12 mars, la presse bourgeoise rapportait que : «La manifestation des retraités devant le Congrès s'est à nouveau terminée par une intervention de la police fédérale qui a utilisé des gaz lacrymogènes et des matraques. C'était la troisième répression consécutive : les forces de sécurité en ont déjà pris l'habitude. Malgré la chaleur accablante et le chaos provoqué par les coupures de courant dans la ville de Buenos Aires, des centaines de manifestants ont répondu à l'appel lancé chaque mercredi par des groupes tels que Jubilados Insurgentes («Retraités insurgés», l'Union des travailleurs retraités en lutte (UTJEL) et le Plenario de Trabajadores Jubilados (l’Assemblée des travailleurs retraités). Cette fois-ci, des partis de gauche, l'Association des travailleurs de l'État (ATE) et même des «supporters de l’équipe de foot «Chacarita Juniors» se sont joints à eux»[1].

Crise économique, plans d’austérité et conditions de vie des retraités

Contrairement aux partis de la gauche du capital et aux organisations gauchistes qui prétendent que les causes des programmes d’austérité, des coupes à la tronçonneuse dans les budgets sociaux, des réductions de salaire et des attaques contre les conditions de vie des travailleurs (et des anciens travailleurs) sont la faute de tel ou tel dirigeant, qu’il soit  de gauche ou de droite, le CCI soutient qu'elles sont dues à la situation de crise mondiale du capitalisme, quelle que soit  la clique au pouvoir, dans le but de protéger les profit de leurs bourgeoisies respectives. C’est cette crise mondiale du capitalisme qui est à l’origine   des mesures qui sont assénées comme des coups de massue s’abattant sur le dos de la classe ouvrière.[2]

Comme nous l’affirmions déjà dès 2022, «Cette crise s'annonce plus longue et plus profonde que celle de 1929 [...] car l'irruption des effets de la décomposition de l'économie tend à semer la pagaille dans le fonctionnement de la production, provoquant de constants goulots d’étranglement et des blocages dans une situation de développement du chômage. (...) Elle se traduit surtout par une inflation effrénée que les différents plans de sauvetage n'ont fait qu'alimenter à travers une fuite en avant dans l’endettement»[3].

Depuis que Javier Milei a pris le pouvoir le 10 décembre 2023, il est arrivé à la Casa Rosada en déclarant : «Il n'y a pas d'autre choix que l’austérité et il n'y a pas d'alternative à un électrochoc». Ce plan d'austérité brutal laisse des milliers de familles sans nourriture et des milliers de travailleurs sans emploi. Il fait aussi plonger une large masse de retraités dans la misère. Le décret d'urgence (DNU), parmi ses points les plus importants, établit des déréglementations du commerce, de l'industrie et des services dans tout le pays.

Cela implique la libéralisation des prix, comme celle pratiquée par les entreprises commerciales de sécurité qui ont enregistré des hausses de 100%, et la suppression des subventions aux transports, entraînant des augmentations de 65% à 150% des prix pour les usagers. En outre, cela a entraîné une hausse des tarifs de l'électricité de 270%. La réduction du budget de l'État, la fermeture d’administrations et la suppression de postes dans les ministères, s'est traduite par des licenciements dans le secteur public avec plus de 75,000 emplois supprimés et d'autres sont prévus. La réduction brutale des travaux publics a provoqué l'effondrement de la construction, générant davantage de licenciements de travailleurs dans ce secteur.

La dévaluation du peso de plus de 50% a fait grimper les prix des produits et des services de plus de 100%, pulvérisant le pouvoir d'achat des salariés et bien plus encore celui de la majorité des retraités. Un salaire minimum qui couvre à peine un tiers du prix des produits de consommation de base. En Argentine, dont l’économie traditionnelle repose sur l’élevage, les prolétaires ne peuvent plus consommer de viande rouge, celle-ci ayant été remplacée par le poulet ou les pâtes.

Tout cet ensemble de mesures a provoqué une flambée de la pauvreté, qui existait déjà sous les gouvernements de Kirchner et du péronisme, et qui est passée de 49,5% en décembre 2023 à 57,4% en janvier 2024.

«Il y a un énorme amoncellement de personnes pauvres ou presque pauvres, une classe moyenne laminée et quelques privilégiés. C'est la nouvelle reconfiguration des revenus en Argentine, qui n'a pas été provoquée par le gouvernement de Javier Milei, mais qui s'est encore accélérée depuis que Milei est arrivé au pouvoir.» (déclaration à l'agence de presse EFE de l'économiste Alfredo Serrano Mantilla, directeur exécutif du Centre stratégique latino-américain de géopolitique (CELAG)).

Ces coups de massue brutaux sur le dos des travailleurs, des chômeurs et de la population non exploitée sont subis avec des conséquences terribles pour les retraités et les pensionnés argentins de toute nature. Les mesures d’austérité ont entraîné une amputation de plus de 38% du budget pour les chômeurs, justifiée sous le cynique prétexte de «faire des économies «pour permettre  la réduction  de… 14 milliards de dollars du montant de la dette nationale !

L'Argentine compte près de 7 millions et demi d'anciens salariés. 63% d'entre eux perçoivent une retraite de misère estimée en moyenne à 280,000 pesos (environ 340 dollars mensuels). Les autres vivent avec moins de 400,000 pesos par mois, alors que le coût des dépenses courantes par foyer dépasse 1,200,000 pesos. Beaucoup de personnes âgées errent désespérément dans la rue et sont réduites à faire la queue dans les quelque 230 soupes populaires que compte le Grand Buenos Aires. Non seulement l’aide sociale de l'État bourgeois est largement insuffisante pour assurer leur survie mais en plus, près de la moitié des retraités (3 des 7,5 millions existant dans le pays) ont été exclus de la couverture d’obtention gratuite de médicaments, ce qui est dramatique si l'on considère que les prix de ceux-ci ont augmenté de 119% en 2024! Tout cela a poussé les anciens ouvriers, exaspérés et lassés des attaques incessantes qu’ils endurent, à se rassembler dans les rues pour clamer «On en a assez d’être affamés et réduits à la misère!».

La lutte face à la répression brutale du gouvernement

C'est dans ce contexte d'attaques contre les conditions de vie de cette partie de la classe ouvrière que s’est déroulée la répression violente du 12 mars. Ce jour-là, comme tous les mercredis, les retraités s’étaient réunis pour manifester devant le Congrès. Le même jour, la centrale syndicale CGT, contrainte par les événements, avait appelé à une marche de «solidarité» avec les retraités, à laquelle se sont jointes d'autres organisations de la gauche du capital (toutes les organisations trotskistes, comme dans le PTS-Front de gauche (FIT), Polo Obrero ou, dans une autre coalition, le MST). Des collectifs et des organisations citoyennes se sont également joints à eux, et surtout les «barras bravas», c’est-à-dire les supporters des principales équipes de football d'Argentine, comme Boca, River, Rosario Central, car quelques jours auparavant, un retraité portant un maillot de l'équipe de Chacarita avait été frappé lors des charges policières et ils étaient là pour «régler leurs comptes», pour «en découdre» en s’affrontant à la police.

La ministre de l’intérieur chargée de la répression, Patricia Bullrich, avait déjà mis en garde contre les «désordres et la violence des piqueteros et des barras bravas» et avait juré de ne pas tolérer le moindre désordre ni leur permettre de passer. Des contingents de nombreux policiers armés jusqu'aux dents et utilisant des tactiques quasi-militaires ont déclenché une répression féroce dès le début de la marche vers le Congrès. Aux coups de matraque, aux balles en caoutchouc et aux bombes lacrymogènes de la police, les supporters ont notamment répondu en jetant des pierres et en brûlant des véhicules de police et des poubelles. Une retraitée a été blessée à la tête après avoir été poussée et frappée par un policier et un caméraman a reçu une bombe lacrymogène en plein visage. Au total, le bilan de la journée a été de 50 blessés et il y a eu plus d’une centaine d’arrestations.

Quel est le bilan de la lutte des retraités ?

La politique d'austérité, d’amputation des salaires et des retraites, la réduction drastique des budgets de la santé et des services sociaux de Milei et de son gouvernement font partie de l'offensive de la bourgeoisie pour maintenir en place l'ordre capitaliste en pleine putréfaction. À l'origine de tout cela se trouve la crise économique mondiale, accélérée par la décomposition, qui conduit toute camarilla arrivant au pouvoir à appliquer des féroces mesures d'attaque contre les conditions de vie de la classe ouvrière. Encore une fois, ce sont les travailleurs qui doivent payer la note de la crise pour que la bourgeoisie tente de sauver les intérêts du capital national.

La lutte des retraités et leurs revendications s'inscrit dans la défense d’un terrain de la classe, car elles sont une forme de résistance aux mesures que la bourgeoisie et son État imposent à toute la classe ouvrière. Par conséquent, la lutte des retraités en Argentine est aussi la nôtre. C'est un combat des travailleurs retraités pour résister aux attaques permanentes contre leurs conditions de vie déclenchées par l'État bourgeois dans le contexte de la crise économique mondiale et de ses politiques d’austérité draconienne. Et ils n'ont pas été seuls. Ils ont défilé accompagnés de jeunes travailleurs, d'adultes, et même d'enfants (certains enfants et petits-enfants de ces anciens travailleurs) qui sont descendus dans la rue pour se battre à leurs côtés. À chaque moment de la mobilisation, les retraités appelaient d'autres jeunes travailleurs à se joindre à la mobilisation avec des pancartes et des slogans, comme lorsqu'une personne les a interpellés : «Vous serez un jour vieux et vous sortirez vous aussi dans la rue pour lutter comme nous aujourd'hui». Par conséquent, la lutte des retraités et des chômeurs en Argentine est aussi celle de la classe ouvrière dans son ensemble.

Malgré sa combativité, le mouvement a montré de sérieuses faiblesses. Par exemple, les difficultés que rencontrent les travailleurs pour se reconnaître comme exploités, comme faisant partie d'une même classe et, en ce sens, pour unir leurs luttes à celles d'autres secteurs de la classe ouvrière qui subissent également les attaques brutales du gouvernement populiste. Nous avons déjà évoqué dans un article précédent la vague de grèves qui, depuis 2022-2024, a fait de ce territoire celui où il y a eu le plus de luttes en Amérique latine l'année dernière[4]. Nous avons déjà parlé des coups très durs que les travailleurs et les retraités ont reçus avec le gouvernement de Milei, mais qui avaient déjà commencé bien avant, en particulier avec les gouvernements de gauche successifs d’obédience péroniste-kirchneriste. Cependant, le mouvement des retraités n'a pas tenté de se connecter avec les travailleurs actifs qui sont en lutte (enseignants ou travailleurs des douanes ou des chemins de fer qui, à cette même période, préparaient des grèves contrôlées par les syndicats et soigneusement isolées, chacune dans son coin) et la plupart des dirigeants syndicaux n’ont cessé d’alimenter l’illusion que le syndicat était la seule organisation possible de «la lutte» pour les travailleurs. À cet égard, il est révélateur qu'une dirigeante de la gauche du Capital, Myriam Bregman (figure de proue du Parti des Travailleurs Socialistes (PTS), trotskiste et ancienne députée représentante du Front de la Gauche unie, ait affirmé que les retraités se plaignaient que la CGT ne vienne pas les soutenir et exigeaient que la centrale syndicale convoque une grève nationale[5].

Les supporters d’équipes de football qui ont participé à la mobilisation des retraités se sont exprimés en tant que «supporters» et non en tant que travailleurs, en tant que classe, mais en tant que membres d'un groupe de la société bourgeoise, comme les hooligans ou les Kops ultras fanatisés en Europe, pour manifester leur soutien inconditionnel à une équipe de football. Les méthodes utilisées par ces derniers ne sont nullement  celles de la tradition de lutte de la classe ouvrière, mais une pratique qui lui est totalement étrangère, de lumpen,  proclamant et revendiquant une soif de vengeance et un déchaînement nihiliste de  violence aveugle comme l’incendie de voitures et la destruction de vitres et de vitrines, une situation qui a rappelé le vandalisme des piqueteros[6] lors des émeutes du «corralito» au début de ce  siècle à Buenos Aires et dans d'autres villes. Toutes ces actions ne sont que des expressions désespérées d’un no future, propres à la petite bourgeoisie et non à la classe ouvrière [7].

C'est pourquoi, en pleine manifestation, on a pu entendre à nouveau des slogans tels que «Milei à la poubelle», «SOS dictature !», «La patrie n’est pas à vendre» ou le désormais classique «Qu'ils s'en aillent tous» qui, au lieu d’appeler à une mobilisation de l’ensemble des travailleurs pour défendre leurs conditions de vie face aux attaques du capitalisme,    dévoie la colère  sur le  terrain bourgeois en l’enfermant dans les pièges d’une lutte pour la défense de la démocratie, contre la dictature ou l’autocratie et finalement derrière l’impasse du nationalisme en s’attaquant ou en faisant obstacle au développement de leur conscience de classe.

Les syndicats et les organisations de la gauche du capital, de la CGT péroniste aux organisations trotskistes et citoyennes, ont joué leur sale rôle de diviser les travailleurs pour affaiblir leur lutte. À contrecœur et pour «bien faire», ils ont convoqué une marche censée être de solidarité avec les retraités, puis appelé à une grève nationale de 36 heures le 9 avril dernier, mais qui, en réalité, ne cherchait qu'à récupérer le sentiment de colère et d’exaspération de plus en plus largement répandu au sein de la classe ouvrière et partagé dans tous les secteurs, chez les retraités, les chômeurs ayant perdu leur emploi comme chez les travailleurs encore en activité, en exploitant les fortes illusions et toutes les faiblesses et les confusions qui se sont exprimées dans ce mouvement  pour mettre en avant une fausse unité interclassiste autour du seul dénominateur commun, l’opposition à Milei et à son gouvernement  ou carrément autour de revendications bourgeoises. Péronistes, syndicats, partis de gauche, organisations gauchistes sont ainsi tous main dans la main pour maintenir les ouvriers divisés, chacun dans son secteur, sa catégorie sociologique et avec sa propre revendication : les chômeurs d'un côté, les actifs de l'autre, les retraités ou pensionnés encore d'un autre. Les autres organisations «citoyennes»,  allant de la cause féministe aux défenseurs de telle ou telle minorité  comme LGTB+ jusqu’aux aux supporters «radicaux» de clubs de foot ont également apporté leur part  pour contribuer à cette entreprise de boycott ou de sabotage de l'auto-organisation des travailleurs et de l'extension des luttes, en le dénaturant, en le transformant soit en appels «au «peuple» ou «aux citoyens» à «se venger de Milei» lors des prochaines élections», soit pour les plus «radicaux»   en préconisant  «l'abstentionnisme politique» pour cette échéance, afin de masquer et d’empêcher la prise de conscience de  la nécessité de se battre unis sur un terrain de classe en se mobilisant contre les attaques  d’un système capitaliste moribond en pleine putréfaction qui n’a plus rien à offrir à ses exploités que toujours plus d’exploitation et de misère.

Tr.


[1]  Un clásico de los miércoles: palos y gases para los jubilados en el Congreso [1]

[2] En Argentine, la crise frappe les travailleurs [2] ;  ICConline - mai 2023 [3]

[3] L’accélération de la décomposition capitaliste pose ouvertement la question de la destruction de l’humanité [4], Revue Internationale 169, 2e semestre 2022.

[4] Agence de presse en espagnol spécialisée dans les informations économiques destinées aux entreprises.

[5] En Argentine, comme ailleurs… Les travailleurs doivent tirer les leçons de leurs luttes passées pour préparer celles de l'avenir [5]

[6] Argentine : la mystification des "piqueteros" (NCI [6])

[7] Propos rapportés dans une interview accordée dans le journal La Izquierda.

Géographique: 

  • Argentine [7]

Conscience et organisation: 

  • Courant Communiste International [8]

Personnages: 

  • Javier Milei [9]
  • Cristina Kirchner [10]
  • Alfredo Serrano Mantilla [11]
  • Myriam Bregman Patricia Bullrich [12]

Questions théoriques: 

  • Populisme [13]
  • Décomposition [14]

L'importance historique du divorce entre les États-Unis et l'Europe

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Pour le CCI, ce divorce est la conséquence du chaos et de la décomposition de la société impulsés par l’effondrement du bloc de l’Est en 1989. Il constitue à son tour une impulsion supplémentaire à ce même chaos notamment sur les plans impérialistes et économiques.  

La classe ouvrière est confrontée aux implications de cette situation qui est synonyme pour elle de plus d’exploitation et de misère, de multiplication et aggravation des guerres, d’exposition à toutes les manifestations de la décomposition de la société[1]. Quelle réponse peut et doit-elle opposer à la guerre, aux conséquences d’une exploitation terriblement accrue ? … Comment les organisations révolutionnaires doivent elles contribuer au processus de développement de la conscience au sein de la classe ouvrière ? Ces questions ont été au centre de notre dernière réunion publique internationale.

La place des réunions publiques dans l’intervention du CCI

Pour le CCI, seul le développement de la lutte de classe, qui porte en elle la perspective de renversement du capitalisme, est à même d’offrir une alternative à la situation actuelle. C’est pourquoi, nous soulignons dans notre presse et en tout autre occasion d’intervention : « il revient aux minorités révolutionnaires, à tous les éléments en recherche, à tous ceux qui aspirent à une autre perspective que ce capitalisme décadent et barbare, de se regrouper, de discuter, de faire le lien entre la guerre, la crise économique et les attaques contre la classe ouvrière, d'indiquer la nécessité de lutter de façon unie, en tant que classe. [2] ». Les permanences et réunions publiques du CCI offrent des moyens d’assumer ce type d’intervention envers ces éléments en recherche, en particulier les réunions publiques internationales via internet qui présentent le gros avantage de permettre une discussion politique entre éléments répartis de par le monde.

Nous avons tenu notre dernière réunion publique internationale le 5 avril 2025. Signalons que d’autres réunions de ce type ont eu lieu antérieurement et toutes nous confortent dans notre opinion concernant l’importance de ce type d’intervention : 

  • Le 16 novembre 2024, sur le thème « Les implications mondiales des élections américaines ». Nous en avons publié un compte rendu dans notre presse, « Un débat international pour comprendre la situation mondiale et préparer l’avenir [15] ».
  • le 25 janvier 2025, autour des conséquences des élections américaines, « L’élection de Trump va accélérer la décomposition du capitalisme »  
  • le 2 mars, une nouvelle réunion est organisée dans le but de poursuivre certains débats engagés envers ces éléments en recherche lors de la réunion précédente du 25 janvier.

Nous avons pu constater que ces réunions internationales rassemblaient à chaque fois une assistance plus nombreuse tout en constituant un réel lieu de débat. Un contact nous a cependant fait part de certaines de ses critiques à cette formule qui, selon lui, présente des inconvénients.  L’essentiel de ces critiques relatives à notre réunion du 16 novembre a été publié dans notre presse sous la forme d’un courrier de lecteurs accompagné d’une réponse de notre part[3]. Ce camarade, tout en soutenant les initiatives du CCI pour susciter la discussion au sein de notre classe, soulignait qu’une réunion publique en ligne en différentes langues, avec une assistance nombreuse, pouvait ne pas présenter les meilleures conditions pour le développement et l’approfondissement des débats. Si cela est juste d’un point de vue technique, nous avons opposé à cet argument que, pour l’avenir, les réunions publiques internationales sont toutefois primordiales pour les raisons suivantes : « Se rassembler depuis plusieurs pays pour discuter, élaborer, confronter les arguments et ainsi comprendre au mieux la situation mondiale est un moment précieux pour rompre l’isolement de chacun, nouer des liens, ressentir la nature mondiale du combat révolutionnaire prolétarien. Il s’agit de participer à l’effort de notre classe pour sécréter une avant-garde. Ce type de réunion est ainsi un jalon qui présage de la nécessaire organisation des révolutionnaires à l’échelle mondiale. Ce regroupement des forces révolutionnaires est un long processus, qui nécessite un effort conscient et constant. C’est là une des conditions vitales pour préparer l’avenir, pour s’organiser en vue des affrontements révolutionnaires décisifs qui viendront. » (Courrier de lecteur: Pourquoi les réunions publiques internationales sont primordiales pour l’avenir? [16]). Quant à l’approfondissement des grandes questions soulevées et confrontées au sein de ces réunions internationales, nous ne pouvons qu’encourager les participants intéressés à participer -lorsque c’est possible- aux réunions publiques et permanences que le CCI organise en présentiel dans différentes villes. Nous sommes également disposés à organiser des réunions par Internet avec un nombre de participants plus restreint en vue de permettre des discussions plus développées. Par ailleurs, il existe toujours la possibilité d’écrire au CCI qui répondra soit directement, soit à travers un courrier de lecteurs publié dans la presse, ou qui proposera des rencontres, etc.

Le déroulement de la discussion

L’introduction du CCI a présenté le cadre suivant concernant la signification et les implications du divorce transatlantique pour introduire la discussion.

La dynamique mondiale, qui est à l'œuvre depuis 1989 et qui culmine aujourd’hui avec l’élection de et l’éclatement des alliances scellées à la fin de la Seconde Guerre mondiale, a des implications à différents niveaux de la vie de la société. En témoignent, au niveau européen, les innombrables réunions au sein des états-majors politiques, les tentatives des États de se coordonner, d'établir une coopération militaire, l’engagement de la plupart de ces pays à investir massivement dans des programmes d’armements jamais vus en Europe, soutenus par un plan de 800 milliards d'euros dégagés par l’UE. Cette volonté de s’engager dans une politique de réarmement n'enterre cependant pas les intérêts contradictoires existant entre les pays européens.

Le programme que tous les capitalistes du monde entier réservent à la classe ouvrière, notamment face à la nécessité de financer de vastes programmes d'armement, est celui d'attaques brutales contre les conditions de vie et de travail de la classe ouvrière : licenciements de fonctionnaires et coupes massives dans les aides aux handicapés par le gouvernement travailliste de Starmer en Grande-Bretagne, annonce d'une série d'attaques contre les retraites, la sécurité sociale, l’assurance maladie, les allocations logement, etc. dans la plupart des pays européens, suppressions d'emplois dans de nombreux secteurs industriels. Mais ces attaques vont également susciter la résistance de la classe ouvrière.

Même si celle-ci est confrontée à de grandes difficultés, elle n'est pas vaincue et a commencé à relever la tête... C’est ce qu’avaient permis de comprendre les luttes au Royaume-Uni en 2022 ainsi que bien d’autres depuis lors, en particulier aux Etats-Unis et en Europe, et à présent en Belgique[4]. Face à ces perspectives de lutte de classe, les révolutionnaires doivent être prêts à intervenir en vue de soutenir la résistance de notre classe, de défendre l'auto-organisation et l'unification des luttes.

Les participants étaient ensuite appelés à intervenir plus précisément sur les thématiques suivantes :

  • derrière les promesses de paix de Trump, pouvons-nous nous attendre à autre chose que plus de militarisme et d'escalade guerrière? La dynamique à l'œuvre depuis 1989 a-t-elle maintenant atteint un nouveau palier historique ?
  • la classe capitaliste n'a d'autre choix, afin de financer de vastes programmes d’armement, que d'attaquer les travailleurs partout et de la manière la plus impitoyable. La classe ouvrière sera donc attaquée aussi brutalement que dans les années 1930. Et cette offensive est imminente, elle a d’ailleurs déjà commencé dans de nombreux pays.
  • Face à cette situation, la classe ouvrière doit plus que ne jamais se battre sur son propre terrain de classe, à savoir la défense de ses intérêts économiques ; c’est à travers ce processus que se développeront sa conscience de la nécessité de renverser le capitalisme et la confiance en ses propres forces.

La prise en charge ces questions brûlantes a été assurée au moyen de deux discussions distinctes au sein de la réunion publique :

  • La compréhension de la dynamique mondiale du capitalisme ;
  • Les conséquences pour la lutte de la classe ouvrière.

Les camarades qui sont intervenus ont exprimé un soutien global aux positions défendues par le CCI sur la question des tensions guerrières, avec toutefois des nuances, voire chez un camarade une vision différente à propos de la manière dont le monde s’enfonce dans la barbarie guerrière. Il a exprimé l’idée qu’il y avait un renforcement de « trois » blocs impérialistes rivaux. Dans le cadre de cette RP, il nous a semblé préférable de laisser cette question très importante en suspens afin de privilégier plutôt l’analyse du sens profond du changement historique occasionné par le divorce entre les États-Unis et l’Europe. Nous reviendrons donc sur cette idée ultérieurement à l’occasion d’un autre article.

Concernant les perspectives de la lutte de classe, la discussion a manqué de temps, en particulier pour explorer la question de sa dynamique. Les interventions se basaient en général sur l’analyse selon laquelle « Le prolétariat n'est pas près d'être mobilisé pour la guerre », ce qui est effectivement très important et vérifié dans les parties du monde où le prolétariat détient la plus forte expérience historique. Mais qu’est ce qui permet de dire que, face aux attaques économiques du capital, il va pouvoir récupérer pleinement sa conscience d’être une classe historique aux intérêts opposés à ceux de la bourgeoisie, capable de renforcer son combat en vue du renversement du capitalisme ? La position du CCI est que ce processus a démarré, les luttes au Royaume-Uni de l’été 2022 ayant constitué une rupture dans la dynamique mondiale de la lutte de classe, jusque-là prisonnière des campagnes idéologiques de la bourgeoisie sur « la fin de la lutte de classe » et sur la « non-existence même de la classe ouvrière » bâties à partir de l’effondrement du bloc de l’Est présenté comme l’effondrement du communisme. Mais le recouvrement de l’identité et de la conscience de classe sera un processus long, de plus entravé par de nombreux pièges idéologiques tendus par la bourgeoisie pour tenter de l’en détourner.

Quel bilan de cette réunion publique ?

Introduisons ce bilan en citant une partie de l’intervention d’un participant, la dernière de la réunion : « Merci beaucoup, je suis très heureux de me joindre à vous. C'est une discussion très animée, avec un temps malheureusement limité. Je suis principalement d'accord avec les interventions et le point de vue du CCI. Je pense qu'il est très important de ne pas tomber dans les pièges « nationaux », mais plutôt d'être conscient de la nature internationale du problème auquel la Terre et l'humanité entière sont confrontées. Pour les discussions futures, « Que faire ?» est une question très importante (malheureusement, il ne reste plus beaucoup de temps), donc s'il y a une réunion de suivi à ce sujet, j'aimerais m'y joindre » (Robin)

Nous partageons son point de vue concernant les limitations induites par le temps imparti et sa mise en évidence de la question de « Que faire ? » dans la situation historique présente. Cette réunion a confirmé, de notre point de vue, l’importance des réunions publiques internationales, celle-ci ayant suscité un intérêt plus grand que les fois précédentes.

Pour terminer, nous voulons enfin signaler que, comme c’est son habitude, le CCI avait convié le milieu politique prolétarien (la Tendance Communiste Internationaliste et les groupes bordiguistes) à participer à cette réunion publique. Seul le groupe Internationalist Voice a pris en compte l’importance de telles réunions en participant activement à celle-ci. Il nous semble vital de prendre en compte l’importance de telles réunions, qui sont de rares lieux de vie du débat prolétarien et donc précieuses, en participant activement à celles-ci.

Le CCI (23 04 2025)

 

[1] Lire à ce propos Rapport sur la décomposition [17], Revue internationale 170.

[2] Quel monde allons-nous devoir affronter ? [18] Revue internationale 173.

[3] Un débat international pour comprendre la situation mondiale et préparer l’avenir [15] 

[4] Lire notre article « Belgique : la classe ouvrière face à la pression de la crise et du militarisme » [19].

Vie du CCI: 

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Réunions publiques internationales du CCI…

“Nouveau désordre mondial” : que faire ?

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L’élection de Trump aux États-Unis marque clairement une nouvelle étape dans la décomposition et le chaos du capitalisme. Le divorce historique entre les États-Unis et l’Europe et la « guerre des tarifs » qui est en cours sont tous deux le produit et des facteurs actifs de la tendance au « chacun pour soi » dans les relations internationales. Ils vont tous deux aggraver la crise économique mondiale et intensifier la tendance au militarisme et à la guerre.

Il ne fait aucun doute que cette situation obligera les capitalistes et leur État à intensifier les attaques contre la classe ouvrière, à exiger des sacrifices au nom de la défense nationale, à réduire les salaires, les emplois et les prestations sociales, tout en ravageant de plus en plus de régions de la planète par la guerre et la destruction écologique. Il ne fait aucun doute que les travailleurs devront se défendre contre ces attaques, mais il ne fait pas non plus de doute que la classe dirigeante tendra de nombreux pièges visant à empêcher une réponse prolétarienne massive et unie, notamment la fausse perspective de se ranger du côté de la « défense de la démocratie » contre la menace de l’extrême droite, des « milliardaires cupides » ou des autocrates avides de pouvoir. 

Les organisations révolutionnaires en particulier sont confrontées à une responsabilité croissante, à la fois pour analyser la direction des événements mondiaux et pour défendre les besoins de la lutte des classes face aux attaques économiques, à la barbarie croissante et aux illusions colportées par la classe dirigeante. Mais ces analyses et la manière de développer une réponse prolétarienne doivent être débattues et définies plus précisément. C’est l’objectif de la série de réunions publiques que le CCI partout où il est présent. Nous invitons tous ceux qui se posent la question « que faire face à ces défis ? » à participer à ces réunions.

En France, nos réunions publiques auront lieux à :

- Paris : samedi 26 avril 2025 de 15h à 18h. Adresse : CICP, 21ter rue Voltaire, Paris (métro « rue des boulets »).

- Lyon : samedi 26 avril 2025 de 15h à 18h. Adresse : CCO La Rayonne, Salle les jeunes ouvrières, 28 rue Alfred de Musset. Villeurbanne (Métro A. Arrêt  Vaulx-en-Velin la Soie)

- Marseille : samedi 26 avril 2025 de 14h à 17h. Adresse : La Ruche 28 Bd National, Marseille.


 

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