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Nous publions ci-dessous la traduction d’un article paru dans World Revolution, organe de presse du CCI en Grande-Bretagne.
Le 24 avril, plus de mille personnes, en grande partie des femmes, ont perdu la vie lors de l’effondrement de l’usine Place Rana à Dhaka, au Bangladesh. Huit autres personnes ont été tuées dans l’incendie du quartier Mirpur dans la même ville. Le nombre de morts aurait certainement été plus important si le feu s’était déclaré pendant la journée, comme cela s’est passé en novembre dernier à l’usine textile Tazreen où cent douze ouvriers sont morts.
Ces "accidents" sont l’expression du meurtre industriel. Il ne faut pas cacher le fait qu’il existe un terrible désintérêt pour la sécurité des ouvriers du textile au Bangladesh, qui triment dans des conditions épouvantables pour des salaires très bas. Mais il ne s’agit pas d’un excès regrettable que l’on pourrait imputer à quelques patrons sans scrupule. Cette situation est inscrite dans la structure profonde de l’économie mondiale. Diminuer les coûts de la force de travail profite non seulement aux gredins locaux à qui appartiennent les usines, mais aussi aux grandes entreprises internationales du vêtement : les belles marques de prestige comme Primark ont gonflé leurs profits grâce aux prix cassés du travail qu’on peut imposer dans le Tiers-Monde.
De plus, malgré les réformes effectuées et les progrès dans la production industrielle à l’Ouest, le capital fait partout le maximum de profit aux dépens de la vie humaine. Presque en même temps, avait lieu l’attaque terroriste contre la foule assistant au marathon de Boston et l’explosion d’une usine d’engrais à West, près de Wako au Texas, qui causa quatorze morts, deux cents blessés et souffla deux pâtés de maisons. Sur le moment, cela passa pour un accident. Plus récemment, un auxiliaire médical présent sur la scène fut accusé d’avoir provoqué l’explosion. Mais quelle que soit la vérité, l’explosion de West révèle la profonde irresponsabilité de la production capitaliste, dans la mesure où l’usine contenant des matériaux hautement volatiles était située près d’un établissement de soins, une école et un certain nombre d’immeubles résidentiels. Cela fait penser à l’explosion de l’usine chimique d’engrais de Toulouse, en France, au début des années 2000, où vingt-huit ouvriers furent tués plus un enfant. Dix mille cinq cents personnes furent blessées, un quart d’entre elles gravement. Finalement, le directeur de l’usine a été exonéré de toute responsabilité lors du procès qui a suivi. Nous pourrions également parler de l’installation de la centrale nucléaire de Fukushima dans un lieu hautement vulnérable aux séismes et aux tsunamis, qui est également situé tout près d’une zone résidentielle.
Dégoûté par les dernières nouvelles du Bangladesh, un sympathisant de notre organisation a envoyé ces observations sur notre forum de discussion1. Nous pouvons seulement dire que cette colère est amplement justifiée : "La situation au Bangladesh est en train d’atteindre des proportions grotesques, avec des désastres horribles –le meurtre industriel– qui surviennent avec une régularité écœurante. Pourquoi chacun s’embête–t-il encore à aller au travail au Bangladesh, à la fin ? Dieu sait qu’ils sont à peine payés, de plus ! Alors, pourquoi y aller ? La réponse, bien sûr, est que, sous le capitalisme, nous avons tous besoin même de la plus infime somme d’argent que la bourgeoisie peut nous donner –le salaire : ‘un salaire, juste pour un jour de travail’ ou quelque ordure de ce genre – contente-toi de survivre au jour le jour. Nous subsistons avec des salaires de misère pris aux capitalistes dans des circonstances qui mettent souvent nos vies en péril. Et les risques ne sont pas seulement physiques (incendies et effondrement d’immeubles ou environnements pollués par du poison), ils peuvent aussi être psychologiques, générant des détresses consternantes et du chagrin. Oh ! Comme nous devrions être reconnaissants à la bourgeoisie ; sa générosité et son humanité ; son engagement infini pour la planète et le règne de la paix à travers le monde ! Où serions-nous sans elle ? Comment pourrions-nous nous débrouiller sans elle, valorisant son mode de vie rapace sur notre existence, afin de lui permettre de réaliser son profit ? Et combattre dans ses guerres violentes ! Si l’on ne se fait pas écraser dans l’effondrement d‘une usine, ou carboniser à l’intérieur d’une usine fermée à clé, on a toujours la possibilité d’une mort lente dans un tsunami radioactif, un anéantissement soudain par des bombardements venus de loin de missiles ou de drones, ou une élimination pénible et angoissante par les armes chimiques, ou une disparition instantanée à cause d’un tireur d’élite d’un camp ou d’un autre des groupes perpétuellement en conflit : officiel ou autre. La bourgeoisie n’a pas seulement inventé le ‘monstre industriel’, elle a également transformé le meurtre de masse en industrie. C’est la seule chose qu’elle sache faire bien maintenant."
Amos (11 mai)
1 Nous profitons de cette occasion pour encourager tous nos lecteurs à venir débattre sur nos forums en français, anglais et espagnol.