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“L’Affaire des neutrinos” a débuté en septembre 2011, lorsque l’équipe internationale de scientifiques participant à l’expérience OPERA rendit publics ses résultats selon lesquels les neutrinos se déplaçaient à une vitesse supérieure à celle de la lumière, remettant par là-même en question un des cadres théoriques fondamentaux de la physique actuelle, la théorie de la relativité restreinte, élaborée par Albert Einstein en 1905 et jamais infirmée depuis ([1]).
Considérant ses propres résultats comme très probablement erronés mais incapable d’identifier l’origine de cette erreur, l’équipe scientifique d’OPERA comptait ainsi sur l’aide de la communauté scientifique internationale afin de résoudre cette énigme. Après plusieurs mois de minutieuses vérifications couplées à de nouvelles expériences, les conclusions furent officiellement présentées à l’occasion de la 25e Conférence internationale sur la physique du neutrino et l’astrophysique, qui s’est tenue au mois de juin au Japon : “Au final, deux défaillances étaient en cause, d’une part la liaison GPS-ordinateur, mais aussi une horloge atomique mal réglée. Les problèmes étant résolus, l’expérience a été tentée une dernière fois avec succès : les neutrinos se déplacent bien moins vite que la lumière. De plus, trois autres expériences menées en parallèle ont conclu au même résultat” ([2]).
Sans attendre l’annonce officielle, les deux principaux responsables d’OPERA, poussés vers la sortie par certains de leurs pairs suite à de nombreuses tensions internes, avaient déjà démissionné. Quant aux principaux médias, après avoir multiplié les annonces aussi racoleuses que stupides au début de ladite “affaire”, leur attitude oscille désormais entre silence assourdissant et mépris ostensible : un des responsables d’OPERA a ainsi été qualifié de “physicien du flop” par le journal italien Corriere della Sera.
Et pourtant, comme le souligne le communiqué fait lors de la Conférence internationale, il est tout à fait normal que les scientifiques acceptent “le questionnement de principes, même et surtout les plus fondamentaux, et se basent avant tout sur l’expérience et l’examen par les pairs afin de faire progresser notre connaissance des lois de la nature. [...] La démarche critique qui a été effectuée constitue un bel exemple du fonctionnement de la science et du doute scientifique [...] si in fine nous avons eu affaire à une erreur expérimentale, il est impossible de parler de faute” ([3]).
Finalement, quelles leçons tirer de toute cette histoire ? “L’annonce de ces résultats à coups de grands titres dans les médias, puis leur réfutation peu après, a – selon certains – contribué à faire que les gens croient moins en la Science. Cependant, la Science n’est pas la magie, et la Science – souvenons-nous du système solaire géocentrique – n’a pas été exempte d’erreurs au cours de l’histoire. C’est donc à force de remises en question, d’erreurs commises que l’on avance. Cette pensée est au final bien résumée dans la conclusion de l’édito de Nature : “Le message [d’OPERA] est que les scientifiques n’ont pas peur de se frotter aux grandes questions. Ils n’ont pas peur de soumettre à la vue du grand public leur activité de recherche. Et ils ne doivent pas avoir peur de se tromper”” ([4]).
DM, 28 juin
[1]) Pour en savoir davantage sur les aspects scientifiques de cette expérience, voir : sciences.siteduzero.com/news-62-42559-p1-la-relativite-restreinte-remise-en-question.html. Voir aussi notre article de Révolution internationale no 427 : http ://fr.internationalism.org/ri427/confirmation_de_l_existence_des_neutrinos_le_progres_scientifique_est_il_plus_rapide_que_son_ombre.html , dont le titre contient une erreur factuelle importante ; en effet, la confirmation de l’existence des neutrinos date en réalité de... 1956 ! (voir à ce sujet : http ://fr.wikipedia.org/wiki/Exp%C3%A9rience_du_neutrino).
[2]) sciences.siteduzero.com/news-62-44749-les-neutrinos-supraluminiques-qui-ne-l-etaient-pas.html
[3]) Idem.
[4]) Idem.