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Depuis les élections fédérales de juin 2010, soit pendant près de 540 jours, les projecteurs des médias bourgeois ont été centrés sur les rebondissements de l’interminable feuilleton communautaire: négociations, compromis, ruptures, trahisons; le «citoyen» a été amené à osciller constamment entre l’espoir d’un compromis national et le désespoir de l’éclatement du pays. Aujourd’hui, après un accord péniblement conclu sur une réforme communautaire et un plan budgétaire pluriannuel, un nouveau gouvernement se met en place. Dans ce contexte, pour comprendre la situation à laquelle la classe ouvrière devra faire face dans les mois à venir, le rapport veut répondre aux questions suivantes:
-Où en est la Belgique sur le plan économique face à la dépression mondiale?
-Comment comprendre ces 18 mois de crise politique communautaire?
-quelles en sont les conséquences pour la population et plus spécifiquement pour la classe ouvrière?
-quelles sont les perspectives pour la lutte de classe?
1.La Belgique dans l’œil du cyclone de la crise
Depuis 2008, la bourgeoisie n’arrive pas à endiguer la tendance à la récession mondiale. Plus précisément depuis l’été 2011, on a vu s’accélérer la spirale infernale de la crise de la dette souveraine des États et la pression sur les obligations d’État en Europe, la crise de l’Euro, la pression sur les banques et la bourse, une économie mondiale glissant de plus en plus clairement vers une profonde récession mondiale, de nouvelles faillites d’établissements financiers, etc.
La Belgique est une des économies les plus ouvertes au monde mesurée en termes de la part du commerce extérieur au PIB. La Belgique est très dépendante de la situation qui prévaut chez ses principaux partenaires économiques, en particulier l’Allemagne, la France et les Pays-Bas. Le secteur manufacturier (21% du PIB), spécialisé dans les biens intermédiaires et semi-finis (produits métalliques et chimiques) et fortement exportateur, expose fortement le pays aux fluctuations de l’économie internationale.
1.1.Dans la première phase de la crise ouverte (en particulier de 2008 à 2010), la bourgeoisie a présenté la situation économique en Belgique comme une exception en Europe:
-Un État relativement épargné par la crise et l’austérité;
-Un État où le problème essentiel n’était pas la question économique ou sociale, mais les tensions communautaires entre Wallons «profiteurs» et flamands «arrogants».
Cette mystification sur la bonne santé de l’économie belge a été entretenue par l’ensemble des partis politiques et par le gouvernement «démissionnaire» Leterme qui affirme que «le gouvernement avait tout sous contrôle». Qu’est-ce qui a donné un semblant de crédibilité à cette illusion d’une «Belgique qui échappe à la crise» ? En réalité, trois facteurs l’ont favorisé:
-entre 2008 et 2011, l’économie belge a pu «parasiter» pendant quelques années sur la croissance allemande et sur les plans de relance de la France, dont elle est dépendante pour 65%;
-le gouvernement fédéral a continué à gérer les «affaires courantes», évitant la pression sur le budget des dépenses «partisanes» classiques imposées par les partis gouvernementaux pour satisfaire leur électorat traditionnel. D’autre part, les gouvernements régionaux, non démissionnaires, responsables de larges domaines de la gestion étatique, comme l’enseignement, la santé publique, l’écologie et la culture, ont donc pu pleinement prendre les mesures d’austérité qui s’imposent dans ces domaines;
-toute une série de mesures cadres pluriannuelles pour imposer l’austérité avaient déjà été prises dès 2009 par le gouvernement Van Rompuy dans le but de passer d’un déficit budgétaire de 6% en 2009 à 0% en 2015, soit 22 milliards d’Euros d’économies en 2011. Celles-ci ont continué à être appliquées.
1.2.Depuis l’automne 2011, le réveil est particulièrement dur et met en évidence une situation économique précaire, bien plus difficile que celle de ses voisins immédiats:
-les banques belges (Fortis, KBC, Dexia) ont fortement subi la crise bancaire et sont encore déstabilisées par des créances douteuses, en particulier envers certains pays de l’Europe de l’Est et du Sud, ce qui a mené récemment à la faillite de la banque franco-belge Dexia;
-si le PIB belge recule pour le moment moins que celui de ses principaux voisins, le déficit budgétaire 2010 est de 5,2%, au lieu des 4,8% prévu il y a un an (+1,3 milliards d’euros) et le soutien massif aux banques a fait regrimper la dette qui atteint actuellement les 96% du PIB;
-la Belgique subit de plus en plus la pression des marchés et les taux d’intérêts payés par l’État belge sur les marchés internationaux tendent à se rapprocher des niveaux des pays du groupe des PIIGS;
-l’agence de notation Standard en Poor’s (S&P) a dégradé le 25 novembre soir la note de la Belgique de AA+ à AA, avec une perspective négative.
Malgré la formation d’un nouveau gouvernement qui devrait faire disparaître «l’incertitude politique» tant décriée par les institutions bourgeoises internationales, la bourgeoisie belge sous-évalue encore la situation catastrophique dans laquelle ses contradictions internes l’ont placée. Ainsi, dans l’appréciation relative du poids de l’austérité imposée, les mesures prises depuis 2008 et celles inscrites dans le nouvel accord gouvernemental restent globalement au niveau de l’effort d’austérité imposé au début des années 1980 (dévaluation du franc) ou de celui pour intégrer l’euro à la fin des années 1990. Or, le tourbillon de la dette souveraine et de la dépression mondiale accentueront la pression pour imposer des attaques encore plus larges et globales sur les systèmes de calcul des salaires, des allocations de chômage et des retraites: «La Belgique est décrite comme le premier exemple de l’État-providence bismarckien congelé. La plupart des sources considère que la réforme en Belgique (s’il y en a) reste progressive et insuffisante pour faire face efficacement aux défis de la restructuration et au vieillissement de la population » (8ième Conférence ESPAnet 2010, « Politique sociale et la crise mondiale: conséquences et réponses»).
2.La pression de la décomposition met en évidence les faiblesses de la bourgeoisie belge
Pourquoi alors cette focalisation pendant près de 18 mois sur les tensions communautaires et linguistiques? La division au sein des diverses fractions nationales exprime avant tout la pression croissante de la crise historique du capitalisme sur la cohésion de l’ensemble des bourgeoisies de la planète. De l’opposition entre Républicains et démocrates aux USA sur la politique à mener pour faire face à la dépression jusqu’aux oppositions entre les régions riches d’Italie du Nord ou d’Espagne (la Catalogne) et les régions pauvres de ces pays, ou encore le surgissement dans des pays comme les Pays-Bas de fractions ouvertement anti-européennes, on peut constater que ces tensions s’exacerbent un peu partout. Dans ce cadre il est erroné de voir les tensions (sous-)nationalistes comme une «exception Belge»,
Ceci étant dit, il est également incontestable que la bourgeoisie belge est caractérisée par un manque évident d’homogénéité: depuis la création artificielle de l’État belge en 1830, des tensions existaient en son sein. Ces tensions entre fractions régionales se sont particulièrement développées depuis la première guerre mondiale et se sont exacerbées depuis l’ouverture de la crise historique à la fin des années 1960. Le dernier avatar de ces tensions a été la montée en puissance lors des dernières élections du parti autonomiste flamand NVA (Nieuwe Vlaamse Alliantie) qui a mené au blocage de la vie politique de la bourgeoisie pendant 18 mois. Pendant des mois, les diverses fractions se sont déchirées comme des loups enragés afin de se positionner le mieux possible pour assurer leur survie dans la lutte sans merci qui est engagée sur le marché mondial, perdant même de vue à certains moments que cette lutte fratricide risquait de les mener tous à leur perte.
Si la bourgeoisie belge est effectivement divisée en diverses fractions nationales et régionales qui s’entre-déchirent, lorsque leurs intérêts vitaux sont menacés, celles-ci, repoussent ces conflits au second plan et s’unissent afin de défendre leurs intérêts communs. Il serait naïf de croire que, pour la défense de leurs intérêts communs fondamentaux - le maintien de leurs profits, de leurs parts de marché menacées par la concurrence exacerbée - ces fractions bourgeoises ne se coalisent pas pour imposer leur loi aux exploités.
3.La bourgeoisie exploite ses faiblesses dans un battage nationaliste intense contre la classe ouvrière
L’histoire de ces 50 dernières années nous apprend que la bourgeoisie belge utilise habilement ses divisions internes contre la classe ouvrière dans un double objectif:
3.1.Freiner la prise de conscience des attaques et du rôle central de l’état dans celles-ci.
Face au risque de défaut de paiement, tous les états européens lancé de gigantesques plans d’austérité pour tenter d’assainir leurs finances publiques et leur système bancaire. Ces plans dévoilent toutefois de plus en plus le rôle de l’État, ce pseudo ‘État social’, dans l’imposition de l’austérité capitaliste, ce qui risque d’orienter la colère ouvrière contre celui-ci. Loin d’être un arbitre au-dessus de la mêlée, garant de la justice sociale, «l’État démocratique» se manifeste ici pour ce qu’il est en réalité: l’instrument de la classe exploiteuse pour imposer des conditions de plus en plus impitoyables à la classe ouvrière.
Cependant, les diverses bourgeoisies nationales utilisent tous les moyens de mystification à leur disposition pour occulter le plus longtemps possible cette réalité aux yeux de la classe ouvrière et pour aux contraire embobiner cette dernière dans les illusions démocratiques. Dans ce contexte, la bourgeoisie belge et ses diverses fractions, attisent précisément les oppositions entre régions et communautés afin de noyer les attaques et le rôle central qu’y occupe «l’État démocratique» dans un imbroglio institutionnel.
De manière révélatrice, les années 1970, les années de la première manifestation de la crise historique du capitalisme, ont aussi été en Belgique le début d’une vaste série de mesures de restructuration institutionnelle, visant à régionaliser l’État et à diluer les responsabilités à divers niveaux de pouvoir communautaire, régional ou communal. Une flopée de gouvernements fédéral, communautaires et régionaux (sept au total) ont vu le jour, des regroupements de communes et de régions urbaines ont été mis en place, en plus de la privatisation partielle ou totale de certaines entreprises publiques (Poste, chemin de fer, téléphones, gaz et électricité, secteur des soins de santé, ...). Ceci a entraîné un partage ubuesque des compétences, une redistribution des fonctionnaires du secteur public sur les différents niveaux de pouvoir et la création de toutes sortes de statuts mixtes. Dans le concret, ces «réformes de l’État» ont abouti aux résultats suivants:
-accroître l’efficacité de l’exploitation: la «responsabilisation» des entités autonomes organise de fait la concurrence interne entre régions. Les travailleurs flamands sont appelés à être plus «performants» que leurs collègues wallons et vice versa, les régions, les communes, sont en concurrence pour gérer plus rationnellement les budgets sociaux ou mieux implémenter la flexibilité de leurs fonctionnaires, etc.
-accélérer les restructurations et les attaques contre les statuts du personnel, les salaires et les conditions de travail des fonctionnaires sous le couvert de réorganisation des structures de l’État;
-diluer l’ampleur des attaques, en les fragmentant sur divers niveaux de pouvoir ou en responsabilisant divers niveaux de pouvoir pour divers types de mesures.
3.2.Paralyser la capacité de réaction et d’extension des luttes de la classe ouvrière.
Lorsque les travailleurs s’insurgent contre les attaques dont ils sont victimes, la bourgeoisie -à travers en particulier de ses syndicats- se sert de l’intensification du battage (sous-)nationaliste et régionaliste pour entraver toute réaction unitaire des travailleurs et toute extension de leurs luttes face à l’agression subie. Cela aussi c’est une constante du rapport de force entre les classes en Belgique.
Depuis les années 1960 en particulier, la bourgeoisie utilise la mystification régionaliste pour freiner la prise de conscience au sein de la classe ouvrière de la nécessité d’une réaction unitaire et de l’extension de ses luttes face aux attaques. Lors de la grève générale de 1960, le syndicalisme radical, avec à sa tête André Renard, détourne la combativité des ouvriers des grands bassins industriels de Liège et du Hainaut vers le sous-nationalisme wallon, faisant croire qu’un sous-état wallon sous la direction du PS pourrait s’opposer au capital national et sauver du déclin les industries de la région. Les travailleurs paieront cher cette mystification, car ce sont ces autorités régionales qui liquideront progressivement l’industrie minière et sidérurgique wallonne dans les années 1970 et 1980. Depuis la fin des années ’80, la Flandre est confrontée aux mêmes problèmes avec le bassin minier limbourgeois, les chantiers navals (Boel Tamise) et l’automobile (Renault et dernièrement Opel). Une fois de plus, c’est la même mystification qui est utilisée: «Ce que nous faisons-nous mêmes, nous le faisons mieux» est le slogan des sous-nationalistes flamands. De fait, la liquidation des mines et des chantiers navals a été rondement menée et récemment, ce sont les travailleurs d’Opel qui se sont fait rouler dans la farine par les promesses du gouvernement flamand et les campagnes sur le «combat de la Flandre pour sauver Opel».
Une fois de plus aujourd’hui, alors que les travailleurs commencent à engager la riposte face aux attaques, la régionalisation des différents niveaux de pouvoir et le battage (sous-)nationaliste sont exploités par la bourgeoisie et ses organisations syndicales, d’abord pour diviser, isoler et enfermer les mouvements de lutte dans des carcans qui n’offrent aucune perspective d’avancée pour la classe ouvrière. Ainsi, lorsque les fonctionnaires subiront des attaques contre leurs salaires et les conditions de travail, ils seront amenés à manifester, chaque groupe devant son pouvoir de tutelle (fédéral, communautaire, régional, provincial, communal, ...). D’autre part, les syndicats n’hésitent pas à entraîner la lutte ouvrière vers le terrain pourri de la division régionale, voire des intérêts nationalistes. Ainsi, les enseignants flamands et francophones sont appelés à lutter pour des revendications différentes dans chacune des régions. Et récemment encore, les organisations syndicales appelaient les travailleurs à manifester pour une sécurité sociale belge unitaire, contre les velléités des nationalistes flamands de la régionaliser.
4.Au-delà du programme d’austérité du nouveau gouvernement, des attaques d’ampleur se préparent
4.1.Le programme du nouveau gouvernement Di Ruppo contient des attaques contre la classe ouvrière sur deux plans.
Les mesures budgétaires pluriannuelles impliquent des mesures d’attaques globales contre l’ensemble de la classe ouvrière, en sus des mesures déjà prises dans le cadre du plan pluriannuel 2010-2015 de Van Rompuy, justifiées à partir de la défense de la crédibilité de l’État belge face aux marchés:
-réduction des allocations pour les chômeurs de longue durée, y compris chefs de famille, à partir de la 2ième année de chômage;
-la limitation de l’accès à la retraite anticipée, qui passe progressivement de 60 à 62 ans;
-suppression de la prise en compte des périodes de chômage, de retraite anticipée et de crédit d’heures pour la retraite;
-limitation du droit au crédit d’heures et à la pause carrière;
-réduction budgétaires dans les soins de santé, menaçant la qualité des soins aux patients. “
Les mesures de réforme de l’État impliquent une exacerbation de la concurrence entre les régions. Elles mèneront à l’exploitation des tensions communautaires sur le plan économique à travers de l’organisation d’une concurrence interne entre régions: fiscalité différenciée entre régions pour «attirer les entreprises», financement des régions partiellement lié à l’atteinte de critères de rentabilité et d’efficacité (exemple le budget pour les allocations chômage sera lié à l’efficacité de la politique de «mise au travail» des chômeurs). La concurrence et la course à la performance entre les régions impliqueront une pression accrue sur les conditions de vie et de travail de la classe ouvrière.
4.2.Quelles sont les mesures prises dans les autres pays d’Europe? Allemagne, 82 milliards d’euros; Grande-Bretagne, 7,2 milliards d’euro en 2010; Italie, 13 milliards d’euro en 2011 et depuis lors, deux autres plans d’austérité; Espagne, 15 milliards d’euro extra. Ces attaques impressionnantes impliquent des suppressions massives d’emplois dans le secteur public, la réduction des salaires (par exemple -5% pour les fonctionnaires en Espagne), le recul de l’âge de la retraite et la baisse des pensions (baisse des allocations de certains fonds de pension en Hollande par exemple) ou des allocations de soins de santé. Bref, elles signifient une baisse conséquente du niveau de vie de la classe ouvrière, comparable à celle qu’elle a connue dans les années 1930.
Dans ce contexte Européen et dans le contexte de l’accroissement de la pression sur les banques et sur la dette de l’État, des mesures supplémentaires s’imposeront pour «restaurer la crédibilité de la Belgique». Dans les coulisses, les «think tanks économiques» de la bourgeoisie esquissent déjà les grandes lignes d’un redoutable plan d’austérité, basé sur une double orientation: une éduction drastique des dépenses budgétaires de l’État pour infléchir l’évolution de la detteet une éduction importante des salaires (évaluée globalement à 10% pour restaurer la position concurrentielle de la Belgique vis-à-vis de l’Allemagne (salaires +23,4% en 10 ans en Belgique, contre +8,8% en Allemagne) et pour reconquérir des parts de marché ou contrer la chute des investissements étrangers (-70%, faisant passer la Belgique de la 2e à la 10e place des pays attirant des investissements étrangers (De Morgen, 23.07.10).
5.Contexte et perspectives pour les luttes ouvrières
Le battage communautaire intense de la bourgeoisie, qui se développe en réalité de manière quasi ininterrompue depuis l’été 2008, a caché aux travailleurs la réalité de la crise et des enjeux et a créé des conditions difficiles pour leur mobilisation, pour leur lutte et surtout pour l’extension de celles-ci. Ceci explique pourquoi les réactions ouvrières sont jusqu’à présent moins marquées que dans les pays voisins comme la France ou l’Allemagne. Il serait par ailleurs illusoire de penser que la bourgeoisie s’attachera à dissiper le brouillard dans la période actuelle. Bien au contraire, elle tend à exploiter un certain soulagement au sein de la classe ouvrière du fait que les tensions au niveau de la gestion de l’État belge semblent réglées pour jouer à présent la carte de la nécessaire «unité nationale» face aux marchés en appelant à une «solidarité nationale» pour «défendre notre pays» contre les attaques d’un «monde extérieur agressif» et pour «corriger les erreurs du passé». Pour la classe ouvrière en Belgique, la situation a été difficile ces dernières années et cela va encore rester difficile pendant une certaine période.
En même temps, l’intensité du battage et la prudence de Sioux avec laquelle la bourgeoisie avance ses mesures est aussi révélateur de la peur de la bourgeoisie face à une classe ouvrière qui a montré dans les années ’70 et ’80 sa combativité. Mais la pression de la crise la contraint de plus en plus à rendre ses attaques plus directes. Par ailleurs, dès l’annonce des mesures du nouveau gouvernement, le front uni des organisations syndicales annoncent un programme impressionnant de mobilisations, de manifestations et de grèves afin d’occuper solidement le terrain social. Tous les éléments avancés dans ce rapport démontrent bien que le décalage avec la situation sociale dans les autres pays d’Europe est plus une question de perception et de prise de conscience qu’une réalité objective: la réalité économique et sociale en Belgique est tout à fait parallèle à celles de pays comme la France ou les Pays-Bas.
Aussi, la situation sociale peut évoluer très vite, comme l’ont illustré le «printemps arabe» et les événements en Espagne ou en Angleterre. Même si une période d’hésitations et de désamorçage de la combativité dans une multitude d’actions syndicales semble probable dans un premier temps, une dynamique de mûrissement de la combativité et de la réflexion dans des minorités est dès à présent perceptible:
-multiplications de débrayages: sidérurgistes à Liège; infirmières à Anvers et Bruxelles; grève dans les ateliers SNCB à Bruxelles; arrêts de travail dans les transports publics;
-apparition de minorités discutant de la situation et des perspectives à mettre en avant, dans différentes manifs ou assemblées dans le cadre des mouvements des «Indignés» ou «Occupy» à plusieurs endroits.
Ces derniers mouvements qui se développent depuis des mois révèlent une sincère volonté de vivre et de lutter ensemble, collectivement, de tourner le dos à l’individualisme du capitalisme pour occuper ensemble un lieu et y discuter; ces mouvements, aussi limités qu’ils soient encore, révèlent la volonté de débattre collectivement et de réfléchir collectivement. Le fait que ces mouvements se développent au niveau international leur donne leur importance décisive. Ils indiquent que la classe ouvrière en Belgique peut très vite retrouver le chemin de la lutte. Et une fois en mouvement, elle peut très bien réagir avec encore beaucoup plus de combativité et de détermination qu’ailleurs. Sur ce plan là aussi, contrairement aux campagnes de la bourgeoisie, la Belgique n’est pas une exception.
Internationalisme/11.2011