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Dans le mouvement des Indignés en Espagne comme en France et dans tous les pays, le collectif Democracia Real Ya ! (DRY – “Démocratie réelle maintenant !”), a exploité le dégoût légitime des jeunes envers les partis politiques bourgeois (et la corruption des politiciens), pour promouvoir une idéologie extrêmement pernicieuse : celle de “l’apolitisme”. Ainsi, partout, on a pu entendre les mentors de DRY faire croire aux Indignés que leur mouvement de protestation contre les effets de la crise du capitalisme (notamment le chômage des jeunes) devait rester un mouvement “apolitique”, en dehors et contre tous les partis, associations et syndicats. Partout, les éléments politisés devaient donc respecter la consigne : ne pas prendre la parole au nom de leur groupe politique mais uniquement en tant que simples “citoyens” (1). Tous ceux qui font de la politique étaient ainsi suspectés de vouloir diviser ou récupérer le mouvement pour le compte de leur propre “chapelle”.
L’hypocrisie sans borne de DRY atteint son comble lorsqu’on sait que derrière cette vitrine prétendue “apolitique” se cachent en réalité non seulement toute la brochette des partis de la gauche du capital (PS, PC, NPA, Front de gauche, etc.), mais également des partis de droite et d’extrême-droite (puisque leurs militants ont droit de cité dans les assemblées en tant que “citoyens au-dessus de tout soupçon”).
C’est en réalité à une union sacrée de toutes les bonnes âmes respectueuses de la “citoyenneté” capitaliste que nous convie la politique démagogique et populiste de DRY. En réalité, ce que visent les leaders de DRY, c’est à attacher les jeunes prolétaires au char de l’ordre capitaliste.
Lorsque DRY appelle à revendiquer une réforme de la loi électorale en Espagne, lorsqu’elle nous demande d’aller voter et de rester ainsi de bons “citoyens”, lorsque ses slogans mensongers nous appellent à lutter contre la “dictature des banques” et nous fait croire qu’un capitalisme “propre”, “éthique”, à “visage humain” est possible, DRY ne fait rien d’autre que de la… “politique” ! Et cette politique réformiste, de gestion de la crise économique, c’est celle des partis de la gauche du capital, avec ses politiciens plus ou moins “propres” et corrompus (comme Strauss-Kahn, Zapatero, Papandréou et consorts).
“L’apolitisme” est une pure mystification et un piège dangereux pour les exploités ! Cette idéologie hypocrite ne vise qu’à les déposséder de leurs propres moyens de lutte afin de les rabattre sur le terrain pourri de la “légalité” de la “démocratie” bourgeoise. Les partis de gauche et les syndicats, après avoir porté tant de coups à notre classe, ont de plus en plus de mal à déverser leurs poisons : les divisions corporatistes ou sectorielles, le noyautage des luttes et des assemblées générales et, surtout, les illusions réformistes et électorales… Les exploités sont animés d’une méfiance grandissante à leurs égards, voire d’un réflexe de rejet ; ils ont appris à détecter la puanteur de leurs poisons. “L’apolitisme” de l’alter-mondialisme a donc pour mission de nous refourguer ce même poison mais en le rendant préalablement inodore ! Il s’agit d’un tour de passe-passe, ni plus ni moins, qui vise au bout du compte à ramener les prolétaires dans le giron des ennemis officiellement rejetés : les partis de gauche et les syndicats !
La classe exploitée ne doit pas oublier que c’est au nom de “l’apolitisme” que le fascisme est arrivé au pouvoir dans les années 1930. C’est sous couvert “d’apolitisme” que les mouvements sociaux ont toujours été récupérés par ceux qui se font les promoteurs patentés de cette idéologie, tels les “altermondialistes” de DRY ou d’ATTAC.
C’est ce que nous avions vu, par exemple en France, dans le mouvement des étudiants contre le CPE au printemps 2006 où de nombreux enfants de la classe ouvrière ont été récupérés, entre autres par le NPA, dans la perspective des élections présidentielles de 2007. Ils ont été dévoyés sur le terrain des isoloirs électoraux derrière un front uni “anti-Sarko”.
Pour ne pas se faire “récupérer” et dévorer par des loups déguisés en agneaux, les jeunes générations d’aujourd’hui doivent se souvenir du slogan des étudiants de Mai 68 : “Si tu ne t’intéresses pas à la politique, la politique s’intéressera à toi”.
Oui, il faut s’intéresser à la “politique” ! Confronter les idées politiques dans les assemblées générales est le seul moyen de démasquer nos faux amis, de déjouer leurs pièges et de ne pas se laisser confisquer nos luttes par des politicards “spécialistes” de la négociation et de la magouille. C’est dans la confrontation et le débat politique, notamment au sein des assemblées souveraines, que les exploités en lutte peuvent faire la distinction entre les groupes politiques qui défendent vraiment leurs intérêts et ceux qui jouent le rôle de chiens de garde du Capital.
La lutte de la classe exploitée contre la classe exploiteuse est toujours un combat politique. C’est uniquement dans ce combat, à travers le débat le plus large possible que les exploités peuvent construire un rapport de force en leur faveur face à l’ignominie du Capital et de ses politiciens de tous bords. C’est dans ce combat politique, dans la rue et au sein des assemblées massives, qu’ils peuvent retrouver leur identité de classe, développer leur solidarité, leur unité, et retrouver confiance en leur propre force.
La classe exploitée, qu’elle soit salariée ou au chômage, est la seule force politique qui puisse changer le monde, renverser le capitalisme et construire une société véritablement humaine, sans crise, sans guerre, sans exploitation.
Sofiane (29 juin)
1) Voir notre article “Altercation entre Democracia Real et le CCI : notre indignation face aux méthodes “démocratiques” de DRY”.