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Comme on s’y attendait depuis quelque temps, l’armée française est intervenue massivement en Côte-d’Ivoire en utilisant chars, missiles et autres armements lourds pour déloger Gbagbo de son bunker et installer Ouattara au pouvoir, en bombardant au passage résidences et autres édifices, provoquant sans doute nombre des victimes. Cependant, plusieurs jours après cette pluie de bombes et tirs de missiles, on ne sait rien du nombre de ces victimes. En effet, on a beau faire le tour d’une dizaine de médias (presse écrite et audiovisuels français), pas un seul chiffre n’a été avancé ; comme si on voulait nous faire croire qu’il s’agissait d’opérations ultra-“chirurgicales” évitant sciemment tout être humain. Tout au plus, certains projecteurs continuent de montrer des cadavres sauvagement exposés autour et au milieu des passages empruntés par les chars français au cours de leurs actions. Duplicité suprême, les autorités françaises justifient sans honte leur entreprise criminelle au nom de la “protection” des civils et à la demande de l’ONU. Gros mensonge et hypocrisie sans borne, car cela fait des mois que la population et les civils en Côte-d’Ivoire se font massacrer quotidiennement par les bandes et troupes armées sous les regards complices des forces de l’ONU et de la “Licorne”. Cette attitude de l’ONU et de la France relève du cynisme des grands charognards capitalistes.
L’impérialisme français retrouve ses accents interventionnistes
En effet, comme toutes ses interventions passées, cette fois-ci encore l’impérialisme français s’est mis en première ligne, mais hypocritement “sous couvert” de l’ONU, dont le rôle habituel consiste justement à accompagner les tueurs. La vérité dans cette histoire est celle que décrit si bien cet éminent connaisseur de la “Françafrique” : “Ainsi, donc loin des discours sans cesse martelés depuis 2007 sur sa volonté de rompre avec les turpitudes interventionnistes, auxquelles se sont livrés tous ses prédécesseurs de la Ve République, Nicolas Sarkozy a remis au goût du jour les propos de l’ancien ministre des Affaires étrangères, Louis de Guiringaud, qui, en 1978, déclarait sans ambages que “l’Afrique est la seule région du monde où la France peut se prendre pour une grande puissance capable de changer le cours de l’histoire avec 500 hommes”. […] Les bombardements aériens quotidiens, dont celui du 10 avril visant directement la résidence de Laurent Gbagbo, et le soutien logistique, stratégique et militaire apporté aux forces d’Alassane Ouattara n’entrent assurément pas dans le mandat donné par la résolution 1975 du Conseil de sécurité, en date du 30 mars.[…] Dans pratiquement tous les cas où l’armée française a agi pour voler au secours d’un président ami menacé par des troubles intérieurs, ou installer un chef d’Etat en lieu et place de celui qui est au pouvoir, les dirigeants français ne se sont jamais embarrassés de savoir si le droit, comme par exemple l’existence d’un accord international, les y autorisait. Pire, la protection ou l’évacuation des nationaux français a parfois été le prétexte pour une opération de maintien de l’ordre destiné à garder au pouvoir un président, comme ce fut le cas au Gabon, en 1990, où l’armée française, après avoir sécurisé les nationaux à Port-Gentil, a été surtout assignée à des tâches de maintien de l’ordre à Libreville qui ont permis d’asseoir le pouvoir d’Omar Bongo” (Albert Bourgi, le Monde du 16 mars 2011).
En réalité, la France préparait son intervention armée dès le lendemain de la proclamation des résultats de l’élection présidentielle de novembre/décembre 2010. C’est dans ce cadre qu’elle a préparé et armé le camp Ouattara en guidant celui-ci dans ses opérations, y compris les plus monstrueuses comme celles ayant abouti aux massacres de Duékoué.
“Massacres à dimension politico-ethnique, immolations, viols, exécutions sommaires, pillage : une série d’atrocités ont été commises dans l’extrême ouest de la Côte-d’Ivoire au mois de mars au moment où, à Abidjan, l’affrontement militaire entre le président sortant, Laurent Gbagbo, et le président élu, Alassane Ouattara, focalisait l’attention des observateurs. Si les soldats de M.Gbagbo ont alors tué plus d’une centaine de partisans de son rival, les massacres commis par les forces républicaines de Côte-d’Ivoire (FRCI) de M.Outtara semblent revêtir une autre dimension : elles ont tué des centaines de civils, ciblés comme étant prétendument pro-Gbagbo, violé au moins 23 femmes et brûlé au moins 10 villages pendant leur offensive du mois de mars, selon un rapport de l’organisation de défense des droits de l’homme Human Rights Watch (HRW) publié vendredi 8 avril au soir” (le Monde du 11 avril 2011).
Et, au bout du compte, on dénombre au moins 800 morts selon la Croix-Rouge, un millier selon l’ONG catholique Caritas. Ce sont là les nouvelles autorités ivoiriennes que l’armée française vient d’installer au pouvoir, c’est-à-dire un gouvernement Ouattara “démocratiquement élu” qui entame son mandat en sanguinaire ordinaire.
Ce terrible récit se passe de commentaires sur le degré de barbarie et de monstruosité dont ont fait (et font encore) preuve les deux camps sanguinaires.
Pour la France, Gbagbo devait surtout payer pour ses “infidélités impérialistes”
“Au repli identitaire ivoirien dont il se faisait le champion, Laurent Gbagbo avait greffé une semelle nationaliste. Celle-ci préconisait à terme “l’indigénisation” partielle de l’économie ivoirienne et la diversification des investissements étrangers en Côte-d’Ivoire. Il s’agissait alors pour M. Gbagbo d’affranchir son pays de sa dépendance systématique historique envers la France. Il s’est alors tourné vers la Chine. En moins d’une décennie, le volume des échanges entre la Côte-d’Ivoire et la Chine explose. D’une cinquantaine de millions d’euros en 2002, il oscille autour du demi-milliard d’euros en 2009. Favorisée par la crise économique en Occident et regorgeant de surplus commerciaux et de devises, la Chine a supplanté la France et les Etats-Unis en Afrique. Le triomphe de la diplomatie économique chinoise en Afrique de l’Ouest notamment confirme la proximité géopolitique entre M.Gbagbo et la gérontocratie pékinoise. L’éviction de la France par la Chine en Côte-d’Ivoire et en Afrique est perçue par le Quai d’Orsay comme une gifle géopolitique inacceptable. Dès lors, la destitution de M.Gbagbo faisait partie des priorités stratégiques de la France” (Willson Saintelmy, le Monde du 16 mars 2011).
Contrairement à la propagande véhiculée par les médias nationaux, cette intervention armée de Sarkozy n’a aucun objectif humanitaire mais elle a pour seul but de défendre les sordides intérêts du capital national. Et ce n’est pas par hasard que les principales forces politiques françaises, de droite comme de gauche, soutiennent cette sale intervention.
Amina (20 avril)