En Algérie, face à la crise, la colère gronde

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Depuis cet hiver, la classe ouvrière d’Algérie a repris le chemin de la lutte. Qu’il s’agisse des cheminots, des enseignants, des agents hospitaliers, des ouvriers de la métallurgie et de l’automobile, grèves et manifestations sont de plus en plus sur le devant de la scène sociale, avec pour toile de fond commune des revendications sur les salaires et les retraites, une méfiance grandissante, sinon un rejet, des centrales syndicales et une forte combativité. Avec une inflation de 5,7 % pour 2009, l’économie algérienne n’est pas mieux lotie que celles de l’Europe et les prix grimpent tandis que la valeur du dinar plonge.

Cinq mille salariés de la Société nationale algérienne des véhicules industriels (SNVI) se sont mis en grève début janvier, pendant presque une semaine, dénonçant les accords passés entre l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA), le patronat et le gouvernement, visant à baisser les salaires et à supprimer la retraite anticipée (passant de trente à quarante ans de cotisation pour les professions officiellement reconnues comme les plus pénibles !). “Comment ose-t-on demander à un homme qui ne mange chaque jour qu’un plat d’épinards de travailler pendant quarante ans devant un haut-fourneau ? » disait un ouvrier. Cette grève a été émaillée d’affrontements violents avec la police anti-émeute, en particulier lorsque cette dernière a empêché les ouvriers de marcher aux cris de “Non aux salaires de misère !” vers le centre de la ville de Rouiba, en banlieue d’Alger, et alors que la grève avait gagné sept autres entreprises de cette même zone industrielle. Qui plus est, les ouvriers pointaient clairement du doigt le patron de la centrale syndicale, Sidi Saïd, qualifié de “vendu” et de “syndicaliste bien grassouillet” par les grévistes.

Chez les enseignants, trois mois après le mouvement de grève de fin 2009, ceux du primaire et du secondaire repartaient en grève à nouveau pour des revendications salariales, malgré les tentatives de l’UGTA de briser le mouvement.

Dans les hôpitaux, 30 000 médecins ont arrêté le travail pendant plusieurs semaines, assurant seulement un service minimum et exigeant des revalorisations salariales.

Les employés communaux, pour les salaires et pour la retraite sans condition d‘âge, se sont mis en grève au mois de mars.

Durant le mois de mai, ce sont les cheminots qui sont entrés en grève totale plus d’une semaine, contre l’avis de la direction de la SNTF et de l’UGTA, qui déclaraient cette grève “illicite” et tentaient vainement d’imposer un service minimum, et de surcroît en-dehors du contrôle de la Fédération nationale des cheminots, accusée par les ouvriers de “trahison et de complicité avec l’administration”. Cette grève, dont la revendication principale portait sur les salaires1, a paralysé le trafic ferroviaire des gares principales du pays (Alger, Annaba, Oran, Constantine, etc.).

Sous la pression des grévistes, mais aussi devant le risque de discrédit de plus en plus ouvert de la Fédération nationale des cheminots, qui a progressivement essayé de reprendre les choses en mains, la direction et le gouvernement ont fini par reculer, acceptant une revalorisation des salaires des cheminots en les alignant sur le SNMG (SMIC algérien), à partir du 31 mai et avec effet rétroactif au 1er janvier 2010.

Anne

1) Un cadre cheminot, après 30 ans de carrière, touche 19 000 dinars algériens, c’est-à-dire 190 euros environ.

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