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Dans ce tract fumeux protestant contre « la casse de la SNCF 1 », la CGT a réussi le tour de force de ne pas mentionner une seule fois la grève menée par les cheminots l'automne dernier 2. Pas un mot non plus sur les autres secteurs de la classe ouvrière : la « casse » de l'hôpital, des écoles, des administrations, des usines est tout simplement passée sous silence, comme si la SNCF était un cas à part et isolé. D'ailleurs, les termes d'ouvriers ou de travailleurs sont introuvables ! Plus fort encore, pas un seul appel à la lutte ! La CGT préfère parler d'union des « USAGERS - CHEMINOTS » et appeler de ses vœux « le gouvernement [à] créer les conditions d'un large débat public sur le financement du service public SNCF ». Exit les « ouvriers » et « la lutte de classe » donc, place aux « usagers » et au « débat public ».
Pourquoi un discours aussi caricatural ? Pourquoi la CGT ne se couvre-t-elle pas d'un peu du verbiage prolétarien dissimulant d'habitude ses manœuvres ? Pourquoi n'y a-t-il même pas la moindre menace de grève, fusse-t-elle hypothétique et encore plus lointaine ? La raison en est simple. Toute la classe ouvrière subit de plein fouet la crise, tous les secteurs sont touchés. La colère gronde et monte peu à peu. La CGT, comme tous les syndicats, craint qu'un mouvement ne se crée en-dehors de son contrôle et ne fasse tâche d'huile. La CGT joue la "paix sociale" "pas de vague, surtout pas de vagues", pensent aujourd'hui secrètement tous les dirigeants syndicaux.
Et, pour mieux couvrir le grondement de la classe ouvrière, la CGT n'hésite pas à marteler une nouvelle fois "La SNCF appartient à la Nation. La Nation doit pouvoir s'exprimer sur l'avenir de la SNCF !...". Sonnez clairons et trompettes nationalistes !
Depuis des décennies, la CGT applique les slogans nationalistes de son parti de tutelle, le PCF (parti communiste FRANCAIS). Quand en 1945, au nom de la reconstruction, Maurice Thorez (alors secrétaire national du PCF) lance : "Retroussez vos manches pour l'économie nationale", la CGT relaie le message au sein des usines en affirmant que "produire est un devoir". Cela se traduit par la condamnation de chaque grève et la culpabilisation des ouvriers : Benoît Frachon (alors secrétaire général de la CGT 3) appellera ainsi les mineurs du Nord, alors engagés dans une grève dure, à reprendre le travail parce que "Le charbon est le pain de notre industrie". A la fin des années 1970 et tout au long des années 1980, le PCF et la CGT auront pour slogan commun le célèbre "Produisons français 4" ! Au nom de la défense de l'industrie française, les ouvriers seront appelés à défendre "leur" entreprise, quitte parfois à accepter de se "sacrifier" en acceptant les licenciements afin de "sauver l'entreprise" (comme l'avaient demandé en cœur la CGT et le maire PCF de Saint-Etienne lors de la restructuration de la manufacture d'arme Manufrance 5). Surtout, ce slogan puant du "Produisons français" permettra de diviser les ouvriers selon le découpage des frontières nationales, les commandos CGT entraînant par exemple les ouvriers de France à détruire le charbon arrivant d'Espagne.
Ce n'est pas l'intérêt des travailleurs que la CGT défend, mais celui de la nation. Parmi les chiens de garde du capital, la CGT est en tête de meute.
Le nationalisme est un poison !
Les prolétaires n'ont pas de patrie !
Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !
Pawel (25 avril)
1 Le budget 2008 prévoit la suppression de 2000 cheminots s'ajoutant aux 16 000 suppressions des cinq dernières années.
2 Et pour cause, on se souvient tous à quel point la CGT a tout fait pour casser ce mouvement et comment Thibault, le secrétaire général, avait été hué dans les différentes manifestations.
3 Il a aussi été membre du bureau politique du PCF.
4 Ce slogan sera d'ailleurs repris ensuite par Le Pen et son Front National avec un petit plus spécifique : « Produisons français avec des français » !
5 Cette usine finira évidemment par fermer, malgré tous ces « sacrifices ».