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Il y a dix ans, en décembre 1991, on assistait à l'éclatement
de l'URSS. Voici ce que nous écrivions à l'époque à
propos de cet événement :
"C'est sur une nouvelle accélération brutale de l'histoire
que vient de s'achever l'année 1991 : l'URSS, ce gigantesque Etat capitaliste
qui fut pendant plus d'un demi-siècle la deuxième puissance mondiale
a été définitivement rayée de la carte du monde
le 21 décembre avec la création de la Communauté des Etats
Indépendants (CEI) au sommet d'Alma-Ata. Depuis deux ans les événements
qui ont secoué l'ex-empire soviétique, la rapidité vertigineuse
avec laquelle ils se sont succédé, n'ont cessé de mettre
en relief l'extrême gravité de la nouvelle situation historique
ouverte avec la fin de la 'guerre froide'. Le monde capitaliste entre aujourd'hui
de plain-pied dans une ère nouvelle, celle de la décomposition
du capitalisme ..."
Dans un autre article paru en octobre 1991 intitulé "URSS : ce n'est
pas le communisme mais le capitalisme qui s'effondre", nous ajoutions :
"Et cet irréversible processus déliquescent qui affecte chaque
jour davantage un Etat bourgeois (...) est l'éclatante manifestation
une fois de plus de la faillite totale du système capitaliste".
A l'opposé des déclarations de George Bush (le père) du
25 décembre 1991 : "L'Union Soviétique n'est plus. C'est
une victoire pour la démocratie et la liberté. Nous sommes ce
soir devant un nouveau monde d'espoirs et de possibilités pour nos enfants",
nous annoncions déjà : "Pour tenter de freiner le chaos mondial
et continuer à s'affirmer comme seul gendarme du monde, l'Etat américain
risque d'être amené, dans le futur, à utiliser une fois
encore les 'grands moyens' (...) L'anarchie qui gangrène ce gigantesque
territoire ne peut que favoriser, partout, la dissémination des armes
nucléaires, qui risquent d'être utilisées par n'importe
quel docteur Folamour local (...) Voilà ce qui se profile derrière
tous les projets de 'désarmement nucléaire' des dirigeants occidentaux
: de nouvelles guerres du Golfe sont aujourd'hui en gestation. Face à
la gravité des enjeux, on peut être sûr que s'il déclenche,
dans l'avenir, une nouvelle 'Tempête du Désert', le gendarme US
aura pour objectif essentiel d'exhiber aux yeux de tous (en particulier de ses
principaux concurrents impérialistes) son gigantesque potentiel militaire
et éventuellement nucléaire. C'est bien le sens qu'il faut donner
aux discours menaçants de Bush lorsqu'il affirme que la guerre du Golfe
aurait été une 'guerre pour rien', laissant entendre avec un cynisme
sans nom que 'les USA n'ont peut être pas été assez loin'.
Ainsi, de la même façon que la guerre du Golfe avait constitué
une conséquence directe de l'effondrement du bloc de l'Est, le déchaînement
du chaos et du 'chacun pour soi' résultant de la disparition de l'Etat
soviétique vient aujourd'hui aggraver à une échelle considérable
la menace de nouveaux bains de sang sur toute la planète. Une telle situation
ne peut que contraindre, à terme, les grandes puissances, et en premier
lieu les USA, à se lancer dans l'engrenage de la barbarie guerrière.
Voilà l'avenir que nous promet le 'nouvel ordre mondial' : la fin de
'l'équilibre de la terreur' tant saluée par la classe dominante
a cédé la place au déchaînement de la terreur où,
aux massacres, ne peuvent que succéder de nouvelles boucheries encore
plus sanguinaires. Et cette catastrophe planétaire contenue en germe
dans la situation historique présente n'est certainement pas le résultat
de la faillite du communisme. Si l'URSS a explosé, c'est parce qu'elle
constituait le bastion le plus fragile du système capitaliste décadent,
un bastion qui était condamné à s'effondrer sous les coups
de boutoir de la crise économique mondiale. La disparition de cet Etat
n'est qu'une des manifestations extrêmes de la décomposition générale
du mode de production capitaliste. En continuant à pourrir sur pied,
ce système moribond et barbare porte avec lui la menace de destruction
de toute la planète."
De fait, à quoi a-t-on assisté depuis une décennie ? Certes
pas à une explosion atomique mais bel et bien à une dissémination
de l'arsenal nucléaire issue de l'ex-URSS, alimentée par une décomposition
de l'armée (comme la revente incontrôlée d'armes radioactives
ou le pourrissement de déchets nucléaires dans la mer Baltique).
Et surtout au réveil de conflits entre Etats dotés de la bombe
atomique comme l'Inde et le Pakistan qui continuent à faire planer la
menace d'une destruction massive. Mais ce que ces dix années ont pleinement
démontré et confirmé, c'est l'accélération
et l'enfoncement du monde dans la barbarie guerrière et dans un chaos
sanglant. On a ainsi assisté à l'éclatement de la Yougoslavie,
notamment sous la pression de certaines puissances européenne comme l'Allemagne,
qui en suscitant de nouveaux appétits impérialistes, a marqué
les années 1990 et débouché sur l'extension du chaos guerrier
aux portes de l'Europe occidentale en Croatie, en Bosnie puis au Kosovo. On
a vu la réaffirmation sanglante et brutale de l'impérialisme russe
qui, avec le soutien de toutes les puissances occidentales, perpètre
depuis huit ans des tueries sans fin en Tchétchénie. On a eu droit
à une succession quasi-ininterrompue de massacres en Afrique depuis l'intervention
américaine en Somalie en 1993 jusqu'aux tueries inter-ethniques au Rwanda,
au Burundi, au Zaïre, au Congo, particulièrement alimentées
par les intérêts impérialistes de la France et de la Grande-Bretagne
tandis que les guérillas armées téléguidées
par tel ou tel impérialisme se poursuivent de plus belle sur tout le
continent, de l'Angola au Soudan en passant par le Sahara occidental. On assiste
depuis deux ans à une escalade vertigineuse de la violence au Moyen-Orient,
d'attentats-kamikazes de nationalistes palestiniens en raids de représailles
de plus en plus atroces de l'armée israélienne qui plongent la
région dans un chaos sanglant. Et ce n'est pas la dernière proposition
de Sharon de créer des "zones tampons" pas plus que celle de
la gauche israélienne de construire un mur en Cisjordanie autour de l'enclave
palestinienne (treize ans après la démolition du mur de Berlin,
présentée comme le symbole du "triomphe de la démocratie
et de la paix") qui peut permettre de limiter l'accélération
des affrontements meurtriers.
La fuite en avant dans les aventures guerrières de l'impérialisme
américain pour préserver son statut de gendarme du monde s'est
pleinement confirmée, au nom de la nouvelle croisade anti-terroriste.
Les attentats du 11 septembre 2001 ont fourni un fabuleux prétexte, sous
couvert de traque aux "suppôts du terrorisme" et de combat implacable
contre "l 'axe du Mal" réaffirmé par Bush (le fils)
lors de son discours sur l'état de l'Union le 29 janvier dernier, au
déclenchement d'une guerre exterminatrice illimitée susceptible
de se déchaîner en n'importe quel endroit de la planète.
Cela constitue d'ores et déjà une menace imminente contre des
cibles favorites des Etats-Unis que sont toujours l'Irak comme il y a onze ans
lors de la guerre du Golfe ("le problème n'est pas de savoir si
nous interviendrons mais quand" a déclaré le secrétaire
d'Etat américain à la Défense), l'Iran ou la Corée
du Nord (alors que 37 000 soldats américains occupent déjà
la pseudo- "zone démilitarisée " entre les deux Corées
et que la tournée du président américain en Asie du Sud-Est
n'a pas apaisé les tensions). Elle a permis dans la foulée le
débarquement de 400 GI's aux Philippines. Et bien évidemment,
cette démonstration à la face du monde de la force militaire du
gendarme américain a justifié et justifie encore le bombardement
de l'Afghanistan (déjà au cœur des enjeux impérialistes
entre les blocs et dont la population subissait les ravages de la guerre depuis
son invasion par l'URSS en décembre 1979).
Dans ce contexte, plus que jamais, les "accords de paix", ne sont
que des moments de surenchères dans les rapports de force inter-impérialistes
qui engendrent à leur tour de nouvelles haines nationalistes et de nouveaux
massacres, démontrant que la guerre est irrémédiablement
devenu le mode de survie permanent du capitalisme décadent. Ainsi, en
Afghanistan, le gouvernement provisoire installé par la Maison Blanche
ne fait qu'intensifier les massacres entre bandes armées rivales pachtounes,
ouzbeks et tadjiks au sein desquelles différents impérialismes
occidentaux et régionaux placent leur pion et agissent en sous-main.
C'est ainsi que nous pouvions déjà affirmer dans notre Manifeste
"Révolution communiste ou destruction de l'humanité"
du 9e Congrès du CCI, rédigé en septembre 1991 : "Si
on laisse le capitalisme en place, il finira, même en l'absence d'une
guerre mondiale par détruire définitivement l'humanité
à travers l'accumulation des guerres locales". L'enjeu de cette
situation est patent aujourd'hui. Il est clair que la menace d'anéantissement
de l'humanité ne vient pas seulement d'une guerre atomique ou d'une catastrophe
nucléaire mais que le capitalisme précipite le monde dans un abîme
de chaos et de barbarie guerrière généralisée.
Si les événements ultérieurs ont confirmé et validé
en grande partie et même l'essentiel de nos pronostics, c'est parce que
les efforts du CCI pour comprendre la nouvelle période historique qui
s'ouvrait avec l'éclatement de l'URSS (nos analyses sur la phase de décomposition
du capitalisme, nos thèses sur le militarisme et la décomposition,
la mise en relief de la dynamique du chacun pour soi qui contrecarre la tendance
vers la reformation de blocs impérialistes, etc.) n'ont jamais cessé
de s'appuyer fermement sur la méthode, la vision révolutionnaire
et l'expérience historique du marxisme. Ces analyses sont une confirmation
de la faillite historique du mode de production capitaliste à laquelle
le combat révolutionnaire de la classe ouvrière mondiale, seule
classe porteuse d'un autre avenir pour l'humanité, peut mettre fin, à
travers le développement de ses luttes contre la crise économique.