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Ces dernières
semaines, l'actualité au niveau international et en France a
été marquée par une accumulation de "faits
divers" que les médias présentent comme des catastrophes
naturelles, comme le produit de la fatalité. Tremblement de terre
en Iran, crash aérien en Egypte, accident industriel en Chine,
épidémie de légionellose en France et l'on pourrait
continuer la liste. Au moment même ou nous terminons cet article,
des accidents mortels viennent d'avoir lieu dans l'industrie du gaz
en Algérie et dans la pétrochimie en Indonésie.
Pour le marxisme, ces catastrophes, accidents, épidémies
à répétition, illustrent le degré de décomposition
du capitalisme et notamment son incapacité chronique à
prévenir de telles tragédies, voire sa tendance à
les susciter, alors qu'il a accumulé les sciences et technologies
nécessaires, sinon pour les éradiquer, du moins pour en
limiter les effets les plus destructeurs. Le tableau apocalyptique de
ces récents "faits divers" est une nouvelle illustration
de ce que le CCI a régulièrement mis en évidence
dans les colonnes de sa presse: le capitalisme en pleine décomposition
est une véritable catastrophe et un fléau mortel pour
l'humanité.
Catastrophe naturelle ou catastrophe sociale ?
Fin décembre, c'est une immense tragédie humaine qui
s'est déroulée en Iran. Un séisme a détruit
en quelques secondes la ville de Bam et ses villages environnants, faisant
plus de 40.000 morts, 35.000 blessés et des dizaines de milliers
de sans-abri. Une fois encore, ce sont les couches les plus pauvres
de la population qui ont tout perdu dans cette tragédie. Le tremblement
de terre autour de la ville de Bam vient s'ajouter à une liste
déjà longue de séismes qui, rien qu'en Iran, sur
les trente dernières années, ont fait plus de 150.000
morts.
Certes, on ne peut reprocher au capitalisme d'être à l'origine
d'un tremblement de terre. En revanche, on peut mettre à son
passif le fait qu'un séisme qui ne fut pourtant pas parmi les
plus violents de ces dernières années, se transforme en
une immense catastrophe sociale. Alors que des progrès considérables
sont réalisés en sismologie au niveau mondial et que l'Iran
possède des compétences et de l'expérience dans
ce domaine, l'incurie de la classe politique est notoire ! Comme le
souligne un architecte iranien, "ce qui fait défaut, c'est
une volonté politique sans faille, un contrôle public systématique
et strict de l'application des normes, des moyens à la hauteur
du problème" (L'Humanité du 3 janvier). On est passé
de 30 millions d'habitants à dominante rurale à plus de
70 millions d'habitants majoritairement urbains, ce qui conduit en Iran
à une hypertrophie accélérée de beaucoup
de villes. "Dans ce contexte, les responsabilités en chaînes
sont nombreuses : inconscience ou impuissance des plus démunis
obligés d'auto construire leurs logements avec des moyens rudimentaires,
l'appétit vorace des promoteurs, des plus petits aux plus grands,
la gabegie et la corruption à certains niveaux, la pure négligence
criminelle à d'autres" (ibid., L'Humanité). A ces
multiples négligences criminelles, il faut ajouter que la ville
de Bam était en plus construite pour la plupart de ses habitations
en pisé ( mélange de terre argileuse et de paille) ou
en briques crues et lorsque de telles maisons s'effondrent, cela s'apparente
au déversement sur ses occupants d'un camion de gravats, laissant
à priori peu d'espoirs de retrouver des rescapés sous
les ruines.
Comme en Turquie il y a quelques années, l'Etat iranien a démontré
qu'il n'avait tiré aucune leçon des précédents
séismes qui ont secoué la région, laissant construire
de manière anarchique et n'imposant pas le respect de normes
de construction antisismique. Cette incurie des pouvoirs publics et
religieux, leur mépris pour la population, s'est traduit par
le fait que le séisme a eu lieu à 4h30 du matin et les
premiers secours ne sont arrivés qu'en fin de journée
vers 17h. Alors que l'ensemble des habitants des grandes métropoles
iraniennes se sont mobilisés, notamment à Téhéran
pour apporter leur solidarité sous la forme de vêtements,
nourriture, tentes pour les survivants, les autorités étaient
incapables de les acheminer vers la zone sinistrée. Pire encore
! Face à cet élan de solidarité humaine de la population,
la bourgeoisie iranienne n'a rien trouvé de mieux à faire
que d'utiliser cette tragédie pour ses mesquins intérêts
électoraux. Dés les premières heures du séisme,
alors que des élections législatives sont prévues
en février, on a vu les deux clans politiques rivaux, les réformateurs
de Mohamed Khatami et les conservateurs religieux de Ali Khamenei se
précipiter vers le lieu de la catastrophe en hélicoptère,
alors que les secours n'avaient pas les moyens d'acheminer de l'aide,
ni la capacité d'évacuer les blessés. Tels les
charognards, c'est sur les décombres et au milieu des cadavres
qu'ils ont rivalisé de rapidité pour annoncer aux sinistrés
que leur ville et leur citadelle seraient reconstruites, alors que ces
crapules sont responsables du carnage, car même les bâtiments
récemment construits, notamment les hôpitaux et les écoles,
se sont effondrés du fait du non-respect des normes antisismiques.
Le capitalisme est le responsable des catastrophes à répétition
Au même moment où la ville de Bam était dévastée par le séisme, une explosion de gaz dans le sud-ouest de la Chine, faisait 191 morts dont la moitié sont des enfants, des centaines de blessés et plus de 3000 personnes intoxiquées à des degrés divers. Cet accident n'a rien de fatal. Il est le résultat immédiat d'une course effrénée au profit capitaliste, au mépris des conditions élémentaires de sécurité sur les lieux de production. Pour la seule année 2003, "13 283 personnes ont été tuées sur des chantiers, dans des usines ou des mines en Chine, soit une hausse de 9,6% par rapport à 2002" (Le Monde du 27 décembre 2003). A chaque fois pour cacher sa responsabilité, pour préserver sa domination de classe, la bourgeoisie met en exergue à coup de campagnes médiatiques que c'est la faute d'un tel ou tel. C'est le mensonge qu'elle nous raconte depuis la fin décembre, à propos du crash d'un Boeing au large de Cotonou faisant plus d'une centaine de morts et disparus et pour le Boeing 737 qui s'est écrasé à Charm El-Cheikh en Egypte faisant 148 morts dont la plupart était des ressortissants français. Dans les deux cas, elle a accusé sans vergogne les compagnies libanaises et égyptiennes qui avaient affrété ces avions et s'il est vrai que ces appareils ne remplissaient pas toutes les conditions de sécurité, c'est le prix à payer aujourd'hui dans le capitalisme pour obtenir des voyages à des tarifs préférentiels, les fameux charters. Mais contrairement à ce que raconte le ministre des transports français, cela n'est pas une spécificité des compagnies "exotiques", ni des compagnies spécialisées dans le dumping aérien. Il suffit de rappeler le crash du concorde d'Air France en juillet 2000 à Roissy avec ses 113 victimes ou la collision entre un Tupolev et un avion cargo au-dessus du lac de Constance en Suisse (71 morts), dont l'enquête a conclu à une défaillance du contrôle aérien suisse ou bien encore les déboires juridiques des familles des victimes de l'Airbus A-320 qui a fait 87 morts sur le Mont Sainte Odile en Alsace il y a 10 ans, alors que l'on sait pertinemment qu'il y a eu des négligences techniques sur cet avion. Ces accidents, qui ne peuvent que se multiplier, sont la conséquence de la guerre commerciale à outrance que se livrent les compagnies aériennes pour garder leurs parts de marché. De fait, cela les oblige à réduire les dépenses qui concernent la sécurité et l'entretien des infrastructures nécessaires au bon fonctionnement de ce moyen de transport. Mais le transport aérien n'est pas une exception, il suffit de voir les accidents de train à répétition, de métro ou de bateaux ( les marées noires de l'Erika ou du Prestige) ces dernières années aussi bien dans les pays du tiers monde qu'en Europe. A toutes ces horreurs, s'ajoute l'apparition d'épidémies mortelles qui sont une autre manifestation de la faillite du capitalisme. Alors que l'épidémie de "SRAS" n'est toujours pas maîtrisée en Asie ( cf. RI n°336, juin 2003) une épidémie de légionellose sans précédent se développe en France, dans le Pas-de-Calais, avec 76 personnes touchées dont 10 décès. Ce sont les tours aéroréfrigérantes de l'usine Noroxo qui sont en cause, nous dit-on. En fait, comme le révèle un spécialiste, le nombre annuel de cas en France est passé de moins de 50 à plus d'un millier et c'est à chaque fois la négligence de telle ou telle usine dans l'entretien des infrastructures de refroidissement qui est en cause. Ces négligences récurrentes font que les hôpitaux censés soigner la population sont devenus des lieux d'épidémies et d'infections. 800.000 personnes sont touchées chaque année par des infections nosocomiales et 4000 meurent de leurs suites.
La survie du capitalisme : une menace pour l'humanité
Face à de telles tragédies, les révolutionnaires
se doivent de dénoncer le cynisme crapuleux de la classe dominante
et réaffirmer leur solidarité de classe avec les victimes
de ces catastrophes, et particulièrement envers les prolétaires
en Iran, frappés par le séisme de Bam. A ce que la bourgeoisie
présente comme une énième catastrophe naturelle,
la fatalité ou le fait qu'il ne puisse exister de "risque
zéro", le marxisme oppose une analyse beaucoup plus pertinente.
"A mesure que le capitalisme se développe puis pourrit sur
pied, il prostitue de plus en plus cette technique qui pourrait être
libératrice à ses besoins d'exploitation, de domination
et de pillage impérialiste, au point d'en arriver à lui
transmettre sa propre pourriture et à la retourner contre l'espèce
(…) Le capitalisme n'est pas innocent non plus des catastrophes
dites "naturelles". Sans ignorer l'existence de forces de
la nature qui échappent à l'action humaine, le marxisme
montre que bien des catastrophes ont été indirectement
provoquées ou aggravées par des causes sociales(…)Non
seulement la civilisation bourgeoise peut provoquer directement ces
catastrophes par sa soif de profit et par l'influence prédominante
de l'affairisme sur la machine administrative(…) mais elle se révèle
incapable d'organiser une protection efficace dans la mesure où
la prévention n'est pas une activité rentable". (Espèce
humaine et croûte terrestre d'A. Bordiga (Ed. PBP), préface).
Encore une fois, ce n'est pas la nature, la malchance ou la volonté
d'une quelconque "divinité religieuse" qui est responsable
de telles tragédies. Le propre même du système capitaliste,
c'est de donner des explications partielles ou circonstancielles pour
éviter que le prolétariat ne prenne conscience que c'est
la logique même du capitalisme qui est porteuse de tant d'horreurs
et de tragédies humaines. Le responsable de cette barbarie, c'est
le capitalisme, ses règles, ses lois et sa classe dominante,
tout juste capable de comptabiliser les morts et de dénaturer
ce que représente la réelle solidarité humaine.
Voilà le monde barbare et inique que le capitalisme nous impose
aujourd'hui. Ce nouveau cortège de catastrophes dévoile
une nouvelle fois le degré de putréfaction atteint par
ce système et celui-ci ne laisse d'autre alternative aux exploités
que de le détruire avant qu'il ne détruise l'humanité.