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La grève des ouvriers municipaux contre les attaques sur les pensions se déroule le même jour que la grève générale en France contre une attaque sur la sécurité d'emploi des jeunes travailleurs. Donc, deux des parties les plus anciennes et les plus expérimentées de la classe ouvrière internationale montrent clairement à la classe dominante qu'elles ne veulent pas accepter ses attaques. Elles rejettent la logique des capitalistes qui dit que les ouvriers doivent sacrifier leurs conditions de vie et de travail pour le bien du système capitaliste; que les retraités, les ouvriers au travail ou au chômage doivent travailler plus dur et plus longtemps pour maintenir ce système délabré.
La grève des ouvriers municipaux est probablement une des plus grandes luttes en Grande-Bretagne depuis de nombreuses années. La détermination des ouvriers, qu'ils soient jeunes, âgés ou retraités, employés à temps plein ou partiel est une expression de l'une des armes les plus puissantes de la classe ouvrière: sa solidarité.
Plutôt que de se laisser diviser et dresser les uns contre les autres, ils se sont rejoints dans une lutte commune.
Une telle solidarité est la seule réponse aux attaques de la classe dominante. On raconte aux ouvriers municipaux, comme à tous les ouvriers, qu'ils doivent accepter de perdre le bénéfice de la retraite, qu'ils ne peuvent prendre leur retraite qu'après 40 ans d'exploitation! Pourquoi? Soi-disant, parce que beaucoup trop d'ouvriers vivent trop longtemps, et sont devenus un poids pour les jeunes générations! Les ouvriers municipaux ont rejeté cette logique. Vieux et jeunes s'unissent dans la lutte, parce qu'ils comprennent que c'est la responsabilité de la génération actuelle de défendre les intérêts des générations à venir.
Ce faisant, ils s'inscrivent dans un mouvement international qui a vu des travailleurs en France, en Autriche et aux USA refuser les attaques sur leurs pensions et sur celles de leurs enfants. En 2003, les travailleurs des services publics en France ont massivement manifesté contre les attaques sur leurs pensions, comme l'ont fait les ouvriers en Autriche, où l'on a vu les manifestations les plus importantes depuis la seconde guerre mondiale. A Noël dernier à New York, les ouvriers des transports se sont mis en grève pour défendre les pensions et ils ont explicitement montré qu'ils le faisaient aussi pour les générations à venir.
Et ce n'est pas que pour les pensions que les ouvriers se sont battus. En 2005, les ouvriers du secteur automobile et d'autres travailleurs en Allemagne ont participé à des manifestations contre les licenciements à Daimler-Chrysler, alors qu'en Espagne, les ouvriers de Seat à Barcelone engageaient des grèves sauvages contre le licenciement de 600 de leurs camarades. Et depuis début mars, les étudiants en France se sont battus contre l'imposition du "CPE", une loi qui signifie que les moins de 26 ans peuvent être licenciés n'importe quand durant les deux premières années de leur emploi. Les étudiants sont allés vers des usines, demander aux ouvriers de les soutenir, tandis que des centaines de milliers de travailleurs ont participé aux manifestations.
Les médias n'ont parlé que "d'émeutes" concernant la France, et certains éléments (encouragés par l'Etat) se sont livrés à des actes de violence sans lendemain, mais la majorité a tenu des assemblées générales (AG), dans lesquelles ils ont discuté de ce qu'il fallait faire d'une manière consciente et unitaire. Les AG les plus avancées ont invité des ouvriers à se joindre à leurs discussions, et sont allées discuter avec des ouvriers au travail ou au chômage.
En Grande-Bretagne, les médias et les politiciens ont présenté les ouvriers municipaux comme des "privilégiés" et des "protégés", comparés aux travailleurs du secteur privé. C'est un mensonge répugnant destiné à diviser la classe ouvrière. La réalité, c'est que tous les ouvriers voient leurs pensions attaquées. Dans le secteur privé, des ouvriers comme ceux de Rentokil ont subi l'arrêt du paiement de leurs allocations de retraite, tandis que 80.000 d'entre eux ont totalement perdu leurs pensions suite à l'effondrement d'entreprises. La même chose se passe dans le secteur public. Si les patrons peuvent imposer les attaques actuelles, ils reviendront à la charge: suppression totale des pensions, réduction de pensions, report de l'âge de la retraite... Le rapport Turner recommande de nous faire travailler jusqu'à 68 ans, et ce n'est qu'un début!
Les travailleurs du secteur privé se sont aussi battus contre ces attaques. A l'automne dernier, les assembleurs de British Gas se sont mis en grève pour le maintien du niveau des pensions pour tous les nouveaux embauchés. Les tentatives de diviser la classe ouvrière doivent être rejetées.
Les syndicats nous divisent
La division n'est pas seulement entretenue par les médias et les politiciens, mais aussi par les syndicats. L'an dernier à la même époque, il a été question d'une grève du secteur public contre les attaques sur les pensions. Que s'est-il passé? Rien. En fait, les syndicats ont fait beaucoup. Le syndicat des fonctionnaires a marqué son accord pour aider à imposer une attaque sur les pensions déniant le droit de tous les nouveaux travailleurs à la pension. Dans les municipalités, les syndicats ont terni la perspective de luttes futures avec de sombres discours à propos d'autres travailleurs du secteur public bénéficiant de meilleures propositions. Par conséquent, à partir d'une situation où il existait un mécontentement important dans tout le secteur public, les syndicats ont maintenant divisé la force de travail en trois groupes: fonctionnaires, travailleurs de la santé et ouvriers municipaux, et tentent à présent d'opposer les ouvriers municipaux aux autres.
L'actuelle grève d'un jour fait partie de cette stratégie. Les syndicats savent que les travailleurs municipaux sont furieux à propos de l'attaque, et qu'il leur faut afficher une attitude de défense des intérêts de leurs "membres". Cependant, tandis que la grève montre certainement que les ouvriers municipaux veulent se battre, elle permet aussi aux syndicats de contrôler la colère des travailleurs. Ils l'utilisent également pour diviser les ouvriers municipaux eux-mêmes. Tous les syndicats ne sont pas impliqués dans la grève; ceux qui sont membres de syndicats n'appelant pas à la grève vont se retrouver face au choix de rejoindre illégalement le mouvement et donc d'encourir des actions disciplinaires, ou de franchir les piquets de grève. Par ailleurs, beaucoup d'ouvriers municipaux ne sont membres d'aucun syndicat, et sont donc confrontés au même dilemme.
Cette dispersion délibérée des travailleurs illustre le besoin de se retrouver dans des réunions massives, par-delà les divisions syndicales, pour aller directement vers d'autres lieux de travail, d'autres secteurs, pour discuter de la façon de combattre ensemble les attaques. Personne ne fera cela pour nous; le futur est entre nos mains!
Courant Communiste International, 25.3.06