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Deux mois après l’invasion du Koweït par les troupes irakiennes, la situation mondiale n’a cessé de s’aggraver. Aujourd’hui, dans la partie de bras de fer entre S. Hussein et ce que les médias bourgeois appellent "la communauté internationale", il est clair qu’il n’y a aucune place pour une quelconque solution négociée. Des deux côtés, les positions n’ont fait que se durcir semaine après semaine : blocus des ambassades de Koweït-City, échec de la mission diplomatique de Perez de Cuellar, résolutions de plus en plus énergiques de l’ONU, provocations irakiennes telle l’agression des ambassades occidentales au Koweït... Et le signe le plus évident de l’accroissement de la tension, c’est bien le renforcement incessant du gigantesque arsenal militaire des USA et de leurs acolytes dans le Golfe.
Toutes ces grandes manœuvres ne sont pas de simples gesticulations comme voudraient nous le faire croire tous ceux qui s’imaginent que cette accumulation pharamineuse d’armements ne serait là que pour la parade. L’escalade guerrière qui se déchaîne aujourd’hui dans le Golfe nous montre le seul avenir que nous réserve le capitalisme. Elle n’est qu’une première manifestation de la nouvelle situation historique qui s’est ouverte pour l’ensemble du monde capitaliste avec la fin de la "guerre froide". Cette nouvelle situation, ce n’est certainement pas celle d’une "paix mondiale" assurée avec l’effondrement du bloc impérialiste russe comme nous l’avaient vanté, ces derniers mois, tous les chantres de la bourgeoisie. C’est au contraire une ère de barbarie et de chaos généralisé que le capitalisme décadent nous promet à coup sûr dans toutes les parties du monde et qui contient la menace de destruction de la planète si le prolétariat le laisse faire.
L’extrême gravité des tensions impérialistes, prêtes à se déchaîner à tout moment dans le Golfe, vient aujourd’hui apporter un démenti cinglant à tous les mensonges pacifistes auxquels nous avons eu droit après l’effondrement du bloc de l’Est. On nous avait promis qu’avec la fin de la "menace russe", la paix et la stabilité mondiale allaient enfin pouvoir s’installer de façon durable dans un capitalisme éternel et bienfaisant. Aujourd’hui la réalité monstrueuse, hallucinante de l’escalade guerrière dans le Golfe, vient dévoiler au grand jour la seule perspective que porte en lui ce système en pleine putréfaction qu’est le capitalisme mondial : guerre, massacres, destructions de plus en plus massives. Et u n’y a pas d’illusion à se faire, ce ne sont pas uniquement les régions pétrolifères, présentant un intérêt économique et stratégique vital pour la bourgeoisie mondiale, qui sont aujourd’hui menacées par le déchaînement de la barbarie capitaliste. La crise du Golfe n’est pas une guerre lointaine et exotique, circonscrite aux seules frontières des Etats du Moyen-Orient. Cette crise ne fait qu’annoncer et préparer d’autres conflits militaires où aucune partie du monde ne saurait être épargnée. Elle est aujourd’hui le symptôme le plus criant de la gangrène généralisée du capitalisme décadent qui, livré à sa propre logique infernale, est condamné à périr dans la boue et le sang, dans un déluge de bombes et de feu.
Avec la fin de la "guerre froide", le règne de l’impérialisme déchaîné
Depuis la première guerre mondiale, l’impérialisme est devenu une des caractéristiques majeures et permanentes du capitalisme, traduisant l’entrée de ce système, confronté à des contradictions économiques insolubles, dans sa période de décadence, de déclin historique. Plus de trois quart de siècle où la guerre est devenue la conséquence et la manifestation suprême de la concurrence exacerbée que se livrent toutes les nations petites ou grandes, "démocratiques” ou "dictatoriales", sur un marché mondial de plus en plus saturé. Et depuis la fin de la deuxième boucherie mondiale, même en temps de "paix", le capitalisme n’a jamais cessé de déchaîner sa folie meurtrière aux quatre coins de la planète : guerres coloniales, guerres de "libération nationale" résultant de l’affrontement militaire par pays du tiers-monde interposés entre le bloc russe et le bloc US, développement pharamineux de l’économie d’armements dans tous les pays...
Aujourd’hui, l’engagement militaire des principaux Etats du monde dans la crise du Golfe constitue non seulement un concentré de la barbarie de ce système moribond qui, tout au long du 20ème siècle n’a su que provoquer des destructions toujours plus massives, mais elle confère à l’impérialisme et à la guerre une dimension nouvelle résultant directement de la fin de la division du monde en deux blocs militaires rivaux.
En effet, avec l’effondrement du bloc de l’Est, avec la disparition de ce qui constituait le principal ciment des différents Etats du bloc occidental, celui-ci ne pouvait qu’entrer, à son tour, dans un processus de désagrégation. Et ce processus prend une forme d’autant plus extrême que la disparition du bloc de l’Est marquait également l’entrée du capitalisme, sous les coups de l’aggravation de la crise économique mondiale, dans une nouvelle et dernière étape de la décadence de ce système, celle de la décomposition générale de la société, de son pourrissement sur pied. Cette décomposition s’exprime par une tendance croissante à l’éclatement, à la dislocation de tous les aspects de la vie sociale qui ne pouvait qu’aggraver encore la désagrégation du bloc occidental. C’est dans te cadre de cette nouvelle situation historique qu’il faut comprendre l’aventure militaire dans laquelle s’est engagée l’Irak et qui constitue la première manifestation majeure des convulsions qui frappent à son tour le bloc US. C’est ainsi que l’Irak qui, jusqu’à présent, avait été un bon et loyal serviteur du bloc US pour le compte duquel il accomplissait les basses besognes de remise au pas de l’Iran, a été poussé, sous la pression de la crise économique, à tenter de jouer sa propre carte en mettant la main sur le Koweït.
En ce sens, la crise actuelle dans le Golfe persique revêt une signification particulièrement grave par les enjeux et les perspectives qu’elle contient : elle constitue la première manifestation d’une nouvelle période où l’arène impérialiste mondiale va être de plus en plus marquée par le déchaînement de tous les impérialismes locaux, où, dans la guerre de tous contre tous, chaque capital national va tenter, en usant des armes les plus sophistiquées, de défendre ses propres intérêts particuliers au détriment des nations voisines. Dans une telle situation, la seule perspective que porte avec lui le capitalisme, c’est celle d’un chaos toujours plus meurtrier, toujours plus sanglant, où ce sont des régions entières qui risquent d’être rayées de la carte du monde. La menace d’un embrasement militaire au Moyen Orient ne fait qu’augurer du futur qui attend l’humanité si le capitalisme parvient jusqu’au bout de sa logique suicidaire : la transformation de la planète en un immense charnier.
La crise du Golfe ne peut aboutir qu’à la guerre et au chaos généralisé
Face à cette situation de décomposition générale du capitalisme, c’est à la bourgeoisie la plus puissante du monde sur le plan économique et militaire qu’il revenait de tenter de sauver les meubles en s’efforçant de ralentir cette tendance à un chaos croissant. Ainsi, la démonstration de force des USA dans le Golfe, la pression qu’ils ont exercée auprès de leurs alliés pour les obliger à s’impliquer et à resserrer les rangs derrière la bannière US, n’a qu’une seule signification : affirmer leur leadership sur le monde, montrer qu’eux seuls ont les moyens de faire "respecter l’ordre", en empêchant que les appétits impérialistes de toutes les autres nations ne se déchaînent dans tous les sens. En ce sens, la fermeté avec laquelle Bush entend mener a bien sa politique de gendarme au monde dans la crise du Golfe, la gigantesque puissance de feu capable de détruire dix fois l’Irak qu’il étale aux yeux de tous les pays ne visent pas seulement à amener Saddam Hussein à une réédition complète et inconditionnelle. Elle constitue aussi et surtout un avertissement d’envergure à tous ceux qui seraient tentés de suivre l’exemple de l’impérialisme irakien. Elle n’a d’autre objectif que de prouver par le feu et par le sang que ce type d’aventure ne peut se solder que par des représailles impitoyables.
Ainsi, la crise du Golfe ne peut déboucher que sur l’horreur des massacres, perpétrés du côté des grands brigands impérialistes au nom de la "paix" et de la "stabilité de monde", du côté du petit truand irakien au nom de la "résistance à l’impérialisme US".
Et si le grand caïd américain parvient à taire un exemple en infligeant une raclée cuisante à l’Irak, s’il parvient à dissuader les autres gangsters capitalistes de se lancer dans des aventures à la Saddam Hussein, cela ne signifie nullement qu’il réussira à porter un coup d’arrêt définitif au chaos et au déchaînement des rivalités impérialistes. De la même façon que la bourgeoisie la plus puissante du monde ne peut éviter l’aggravation de la crise économique, elle ne pourra fondamentalement rien contre les conséquences majeures de cette crise insoluble. Le capitalisme en continuant à s’enfoncer dans le marasme économique, en continuant à se décomposer, porte avec lui l’exacerbation des manifestations les plus barbares de cette décomposition. Les pressions vers la guerre ne sont pas le résultat de la bonne ou de la mauvaise volonté des dirigeants. Elles sont le produit de la logique infernale, irrationnelle, du capitalisme décadent dans laquelle chaque bourgeoisie nationale est entraînée et à laquelle elle ne peut se soustraire. Avec l’aggravation inexorable de la crise économique, la guerre commerciale que vont se livrer tous les requins impérialistes pour tenter de défendre leurs intérêts sur le marché mondial ne peut que déboucher sur une tendance croissante au "chacun pour soi”, sur la guerre des armes, sur la guerre de tous contre tous, c’est-à-dire sur une débandade et un chaos généralisés.
En ce sens, la gigantesque offensive militaire des USA dans le Golfe ne peut être qu’une tentative de ralentir un tant soit peu cette tendance inéluctable à l’enfoncement de toute la société dans les miasmes de la décomposition. Elle ne fait que préparer et annoncer d’autres interventions militaires des grandes puissances dans toutes les parties du monde.
Et si, dans la crise du Golfe, les USA s’avéraient, au bout du compte, incapables d’imposer un écrasement militaire à l’Irak et d’assumer ainsi leur responsabilité de gendarme du monde, s’ils ne parvenaient pas a défendre, en même temps que leurs propres intérêts particuliers, l’intérêt général du système dans son ensemble, c’est leur statut de première puissance mondiale, leur crédibilité-même qu’ils perdraient. Une telle capitulation des USA face à l’Irak signifierait que le hold-up de Saddam Hussein a fini par payer, ce qui ne pourrait qu’encourager tous les autres gangsters impérialistes à suivre son exemple. Cette situation n’aurait d’autre conséquence qu’une aggravation encore plus considérable de la situation mondiale dans la mesure où elle ouvrirait immédiatement la porte au déchaînement des conflits militaires, des guerres de rapines partout dans le monde.
Il n’y a aucune illusion à se faire. Aujourd’hui, encore moins que par le passé, la paix n’est possible dans le capitalisme. Ce système moribond ne peut que plonger l’ensemble de la société dans des convulsions de plus en plus sanglantes et lui faire subir ainsi les affres de sa propre agonie. Quelle que soit l’issue que va connaître cette partie de bras de fer entre S. Hussein et les autres brigands impérialistes, la seule perspective qui s’ouvre devant nous ne peut être que le déchaînement de massacres à grande échelle, d’une barbarie comme jamais le capitalisme n’en a entraînée depuis la seconde guerre mondiale et qui contient aujourd’hui la menace d’une destruction totale de l’humanité. La dimension effroyable d’une telle barbarie nous est d’ailleurs donnée par le spectacle quotidien de cette accumulation ahurissante d’engins de mort dont toute la bourgeoisie et ses médias aux ordres nous vantent froidement et sans la moindre pudeur la formidable... efficacité ! Un tel degré de cynisme et d’infamie ne fait qu’exprimer le degré de pourriture du mode de production capitaliste et de sa classe dominante elle-même.
Seul le prolétariat mondial peut et doit sauver l’humanité de l’apocalypse
Dans ce monde capitaliste en plein putréfaction, il n’existe qu’une seule force capable d’empêcher la bourgeoisie d’engloutir toute l’espèce humaine dans sa folie suicidaire : le prolétariat mondial. Seule la classe antagonique au capitalisme peut réellement combattre le mode de vie de ce système décadent, la guerre. Elle seule peut renverser le capitalisme et instaurer une autre société basée non sur le profit et la concurrence marchande mais sur la satisfaction des besoins de toute l’humanité.
Le développement de la barbarie capitaliste dans le Golfe constitue donc un appel au prolétariat des pays centraux du capitalisme. Devant l’extrême gravité de la situation historique présente et les enjeux vitaux qu’elle contient pour le devenir de l’espèce humaine, la classe ouvrière mondiale, notamment ses bataillons les plus expérimentés d’Europe occidentale, doit prendre conscience de l’immense responsabilité qui repose sur ses épaules.
Plus que jamais, face à l’orgie sanguinaire du capitalisme, face à l’union sacrée de tous ces massacreurs, la classe ouvrière des pays centraux du capitalisme n’a qu’une seule réponse à opposer : affirmer sa propre solidarité de classe avec le prolétariat irakien, en adoptant une attitude internationaliste intransigeante. Elle doit refuser de hurler avec les loups, refuser de resserrer les rangs derrière tous ces va-t’en guerre qui s’apprêtent à mettre la planète à feu et à sang, à semer la mort, aujourd’hui dans le Golfe, demain ailleurs. Elle doit refuser de soutenir un camp impérialiste contre un autre, refuser de prendre parti dans une guerre fratricide où les masses exploitées des nations belligérantes vont s’entr’égorger pour le seul compte de la bourgeoisie. Elle doit vomir l’ignoble propagande médiatique qui vise à lui faire accepter le massacre des populations civiles au Moyen-Orient et de tous ces ouvriers en uniforme, embrigadés, contraints, le fusil dans le dos, à marcher au pas sous le drapeau de l’impérialisme irakien. Seule cette attitude responsable de la classe ouvrière des nations les plus industrialisées pourra permettre au prolétariat international de retourner demain les armes contre ses propres exploiteurs dans tous les pays pour renverser le capitalisme.
Le déchaînement de la barbarie guerrière dans le Golfe doit renforcer aujourd’hui la détermination du prolétariat à développer son combat contre la logique implacable du capitalisme en crise. Car c’est bien cette logique infernale qui est responsable des massacres, de l’exploitation, de la misère, des famines...
Ce combat, le prolétariat doit le mener pour la défense de ses intérêts de classe contre la dégradation inexorable de toutes ses conditions d’existence. Mais il ne peut en rester à la simple défense de ses intérêts économiques immédiats. Pour être à la hauteur de ses responsabilités, il doit comprendre que ses luttes de résistance aux attaques capitalistes ne sont qu’un moment, font partie intégrante de l’affrontement général contre le capitalisme en vue de son renversement.
Le prolétariat ne pourra se sauver lui-même qu’en sauvant toute l’humanité de l’apocalypse. Et pour y parvenir, il n’a pas d’autre choix que de développer sa conscience, son unité et sa solidarité de classe en prenant dès aujourd’hui toute la mesure de l’horreur que nous promet à coup sûr ce système pourrissant.
Avril (22/9/90)