Non au poison de la division entre les générations ouvrières!

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Les jeunes sont “responsables de la propagation du Covid-19”, voilà ce qu’affirmait, en août 2020, l’OMS et, derrière elle, toutes les bourgeoisies et tous les médias de la planète. En France aussi donc, et sans honte, Macron & co. ont dénoncé le prétendu égoïsme des jeunes, braquant tous les projecteurs sur le moindre rassemblement festif. Évidemment, il y a là une grosse ficelle, celle de tenter de masquer les vraies causes de l’hécatombe : la gestion anarchique de la pandémie au niveau international, chaque nation agissant en solo, à l’image de la guerre des masques et des vaccins, la destruction des systèmes de soin depuis des décennies engendrant une insuffisance du nombre de lits, de médecins, d’infirmiers, d’aide-soignants, etc. Mais cette mise en accusation de la jeunesse cache aussi une attaque idéologique plus sournoise et plus profonde. Par son discours, la bourgeoisie tente de distiller dans les veines de la classe ouvrière le poison de la division.

Parallèlement, la classe dominante a mis en avant son hypocrite préoccupation pour la “génération sacrifiée”, pour, cette fois, dresser les jeunes contre les vieux. Selon cette façon de voir, les vieux devraient être les seuls à devoir se confiner puisqu’ils courent le plus de risque de mourir. Des débats à la télévision ont même eu lieu sur le thème : “est-il normal que toute la société se fige alors qu’il suffirait d’isoler les vieux ?”

À l’image de son système, voilà ce que la bourgeoisie a à offrir : la division et la concurrence, la guerre de tous contre tous, le chacun-pour-soi ! Et le capitalisme n’a donc rien de plus en horreur que la solidarité ouvrière. La bourgeoisie saisit chaque occasion pour tenter d’enfoncer des coins, diviser et diviser encore, rejouant à l’écœurement la guerre des générations, afin d’amoindrir ce qui fait la force de notre classe, la capacité à se serrer les coudes, à lutter les uns pour les autres.

En 2006, le gouvernement Villepin fait voter une loi contenant un nouveau contrat de travail, le “contrat première embauche” (CPE) qui s’adresse en particulier aux jeunes entrant sur le marché du travail et offrant à l’employeur la possibilité de rompre le contrat pendant les deux premières années, sans indemnité ni droit au chômage. Cette profonde précarisation des jeunes travailleurs soulève un mouvement de colère parmi notamment les étudiants qui, pour beaucoup, goûtent déjà à l’exploitation capitaliste à travers leurs “petits boulots”. Rapidement, le mouvement étudiant se voit rallié par les générations de travailleurs aussi bien en activité, qu’au chômage ou à la retraite, tous refusant de voir les jeunes soumis à des conditions de vie aussi précaires et angoissantes. C’est cette solidarité entre les générations de prolétaires qui va donner une dynamique particulière à la lutte et conduire le gouvernement à retirer cette disposition de la loi “Égalité des chances” (sic).

C’est aussi cette solidarité entre les générations qui s’est exprimée au cours d’une grève de trois jours à New York pendant la période de Noël 2005. Des employés du métro se sont dressés contre le projet de la direction d’attaquer le système de retraite en mettant en avant qu’ils se battaient avant tout pour ne pas “trahir ceux qui ne sont pas encore nés” et pour défendre l’avenir des futures générations de prolétaires.

Plus récemment, en France, à la rentrée 2019, un projet de loi de réforme des retraites produit un fort mouvement de rejet dans les rangs de la classe ouvrière, conduisant les syndicats à organiser, en décembre, une première journée de manifestations, qui sera suivie par plusieurs autres jusqu’au début de l’année 2020. Ces manifestations ont vu une fréquentation bien plus large que celle qui aurait pu être attendue. En effet, au-delà des travailleurs concernés par la réforme (en fait, les générations les plus jeunes), beaucoup d’ouvriers plus âgés, “échappant” à la réforme, mais aussi beaucoup de retraités, sont venus manifester leur colère et leur refus de voir les jeunes générations sacrifiées sur l’autel de la crise capitaliste.

Pour l’ensemble de l’humanité, la jeunesse symbolise le futur, la continuité de notre espèce et de la civilisation. Pour la classe ouvrière, porteuse d’une tâche historique révolutionnaire, c’est bien plus que cela. Les conditions subies et promises aux jeunes prolétaires sont un marqueur palpable de la dégradation des conditions de vie de la classe ouvrière. Les vieux travailleurs qui ont sué toute une vie pour en retirer juste de quoi faire vivre leur famille refusent que les jeunes générations aient à subir des conditions encore pires. Pour la classe ouvrière, la jeunesse représente l’espoir de pouvoir transformer ce monde et quand on s’attaque à elle, on s’attaque à cet avenir. La solidarité entre les générations de prolétaires est alors capable d’orienter les luttes non pas seulement contre le présent et ses attaques immédiates, mais aussi pour le futur en vue de construire une autre société, lui donner une dynamique de transformation en profondeur du monde d’aujourd’hui pour construire celui de demain.

Il faut donc rejeter le poison de la division entre les générations distillé par la bourgeoisie, il faut développer les liens et la solidarité entre tous les secteurs et toutes les générations de la classe ouvrière. Particulièrement, la génération qui a signé le retour de la classe ouvrière à l’avant-scène de l’histoire en 1968 (après 50 ans de contre-révolution) et qui a accumulé dans les luttes des années 1970 et 1980 une précieuse expérience, doit en tirer des leçons indispensables et les transmettre aux nouvelles générations pour poursuivre le combat révolutionnaire de la classe ouvrière.

GD, 16 avril 2021

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Covid-19