Révolution Internationale n° 428 - décembre 2011 - janvier 2012

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Le capitalisme est en faillite, il faut le renverser !

Il fut un temps, pas si lointain, où les révolutionnaires ne rencontraient que scepticisme ou raillerie lorsqu’ils affirmaient que le système capitaliste allait vers la catastrophe. Aujourd’hui, ce sont les plus chauds partisans du capitalisme qui le disent : “Le chaos est là, juste devant nous” (1) (Jacques Attali, ancien collaborateur très proche du Président Mitterrand, ancien Directeur de la BERD (2) et actuellement conseiller du Président Sarkozy). “Je crois que vous ne vous rendez pas compte que d’ici deux jours, ou une semaine, notre monde pourrait disparaître. C’est Armageddon… Nous sommes tout près d’une grande révolution sociale” (3) (Jean-Pierre Mustier, directeur de banque, anciennement à la Société Générale). Ce n’est pas de gaieté de cœur que ces défenseurs du capitalisme admettent que leur idole est moribonde. Ils en sont évidemment désolés, d’autant plus qu’ils constatent que les solutions qu’ils envisagent pour la sauver sont irréalistes. Comme le fait remarquer la journaliste qui rapporte les propos de Jean-Pierre Mustier : “Pour les solutions, on reste un peu sur sa faim.” Et pour cause !

Ce n’est certainement pas ceux qui, malgré leur lucidité sur les perspectives du capitalisme, considèrent qu’il n’y a pas d’autre système possible pour l’humanité qui peuvent proposer des solutions à la catastrophe qui s’abat aujourd’hui sur l’humanité. Car il n’y a pas de solution aux contradictions du capitalisme dans ce système. Les contradictions qu’il affronte sont insurmontables parce qu’elles ne découlent pas de sa “mauvaise gestion” par tel ou tel gouvernement ou par la “finance internationale” mais tout simplement des lois même sur lesquelles il est fondé (4). C’est uniquement en sortant de ces lois, en remplaçant le capitalisme par une autre société, que l’humanité pourra surmonter la catastrophe dans laquelle elle s’enfonce inexorablement.

La seule solution : libérer l’humanité du joug capitaliste

Au même titre que les sociétés qui l’on précédé, l’esclavagisme et le féodalisme, le capitalisme n’est pas un système éternel. L’esclavagisme prédominait dans la société antique parce qu’il correspondait au niveau d’alors des techniques agricoles. Quand celles-ci ont évolué, exigeant une plus grande attention de la part des producteurs, la société est entrée dans une crise profonde (par exemple la décadence romaine) et il a été remplacé par la féodalisme où le serf était attaché à sa terre tout en travaillant sur celles du seigneur ou en cédant à ce dernier une partie de ses récoltes. A la fin du Moyen-Âge, ce système est devenu caduc plongeant la société dans une nouvelle crise historique. Il a été alors remplacé par le capitalisme qui n’était plus fondé sur la petite production agricole mais sur le commerce, le travail associé et la grande industrie, eux-mêmes permis par les progrès de la technologie (par exemple la machine à vapeur). Aujourd’hui, du fait de ses propres lois, le capitalisme est devenu caduc à son tour. à son tour, il doit céder la place.

Mais céder sa place à quoi ? Voilà LA question très angoissante que se posent tous ceux qui, de plus en plus nombreux, prennent conscience que le système actuel n’a plus d’avenir, qu’il emmène avec lui l’humanité dans le gouffre de la misère et de la barbarie. Ce serait se prétendre devin que de décrire dans ses moindres détails cette société future, mais une chose est certaine : elle devra en premier lieu abolir la production pour un marché et la remplacer par une production n’ayant comme seul objectif que la satisfaction des besoins humains. Aujourd’hui, nous sommes devant une véritable absurdité : dans tous les pays, l’extrême pauvreté progresse, la majorité de la population est contrainte de se priver de plus en plus, non pas parce que le système ne produit pas assez mais au contraire parce qu’il produit trop. On paye les agriculteurs pour qu’ils réduisent leur production, on ferme les entreprises, on licencie en masse les salariés, on condamne au chômage des proportions considérables de jeunes travailleurs, y compris lorsqu’ils ont fait de longues années d’études et, à côté de cela, on oblige les exploités à se serrer de plus en plus la ceinture. La misère et la pauvreté ne sont pas la conséquence d’un manque de main d’œuvre capable de produire, d’un manque de moyens de production. Elles sont les conséquences d’un mode de production qui est devenu une calamité pour l’espèce humaine. C’est seulement en rejetant radicalement la production pour le marché, en abolissant tout marché, que le système qui doit succéder au capitalisme pourra réaliser la devise : “De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins”.

Mais comment parvenir à une telle société ? Quelle force dans le monde est capable de prendre en charge un tel bouleversement de toute la vie de l’humanité ?

Il est clair qu’un tel bouleversement ne peut venir des capitalistes eux-mêmes ni des gouvernements existants qui TOUS, quelle que soit leur couleur politique, défendent le système et les privilèges qu’il leur procure. Seule la classe exploitée du capitalisme, la classe des travailleurs salariés, le prolétariat, peut mener à bien un tel bouleversement. Cette classe n’est pas la seule subissant la misère, l’exploitation et l’oppression. Il est de par le monde des multitudes de petits paysans pauvres qui eux aussi sont exploités et vivent dans une misère souvent bien plus cruelle que celle des ouvriers de leur pays. Mais leur place dans la société ne leur permet pas de prendre en charge l’édification de la nouvelle société, même s’ils seraient évidemment intéressés eux aussi par un tel bouleversement. De plus en plus ruinés par le système capitaliste, ces petits producteurs aspirent à faire tourner à l’envers la roue de l’histoire, à revenir au temps béni où ils pouvaient vivre de leur travail, où les grandes compagnies agro-alimentaires ne leur retiraient pas le pain de la bouche. Il en est autrement des producteurs salariés du capitalisme moderne. Ce qui est à la base de leur exploitation et de leur misère, c’est le salariat, c’est le fait que les moyens de production soient entre les mains de la classe capitaliste (sous forme de capitaux privés ou de capitaux d’État) et que le seul moyen de gagner leur pain et leur toit est de vendre leur force de travail aux détenteurs du capital. Ainsi, l’abolition de leur exploitation passe par l’élimination du salariat, c’est-à-dire l’achat et la vente de la force de travail. En d’autres termes, l’aspiration profonde de la classe des producteurs salariés, même si la majorité de ses membres n’en a pas encore conscience, est d’abolir la séparation entre producteurs et moyens de production qui caractérise le capitalisme et d’abolir les rapports marchands à travers lesquels ils sont exploités et qui justifient en permanence les attaques contre leur revenu puisque, comme dit le patron (et tous les gouvernements), “il faut être compétitif”. Il s’agit donc pour le prolétariat d’exproprier les capitalistes, de prendre en main collectivement l’ensemble de la production mondiale afin d’en faire un moyen de satisfaire réellement les besoins de l’espèce humaine. Cette révolution, puisque c’est de cela qu’il s’agit, va se heurter nécessairement à tous les organes que s’est donné le capitalisme pour établir et préserver sa domination sur la société, en premier lieu ses États, ses forces de répression mais aussi tout l’appareil idéologique destiné à convaincre les exploités, jour après jour, qu’il n’y a pas d’autre système possible que le capitalisme. La classe dominante est bien décidée à empêcher par tous les moyens la “grande révolution sociale” qui hante le banquier que nous avons cité plus haut et beaucoup de ses pairs.

La tâche sera donc immense. Les luttes qui se sont déjà engagées contre l’aggravation de la misère dans des pays comme la Grèce et l’Espagne (5) ne sont ainsi qu’une première étape, nécessaire, des préparatifs du prolétariat pour renverser le capitalisme. C’est dans ces luttes, dans la solidarité et l’union qu’elles permettent de développer, c’est dans la prise de conscience qu’elles favoriseront de la nécessité et de la possibilité de renverser un système dont la faillite sera tous les jours plus évidente, que les exploités forgeront les armes nécessaires à l’abolition du capitalisme et à l’instauration d’une société enfin libérée de l’exploitation, de la misère, des famines et des guerres.

Le chemin est long et difficile mais il n’y en a pas d’autre. La catastrophe économique qui se profile, et qui suscite tant d’inquiétude dans les milieux de la bourgeoisie, va signifier pour l’ensemble des exploités de la terre une aggravation terrible de leurs conditions d’existence. Mais elle permettra aussi qu’ils s’engagent sur ce chemin, celui de la révolution et de la libération de l’humanité.

Fabienne (7 décembre)

 

1Le Journal du dimanche du 27/11/2011

2) Banque européenne pour la reconstruction et le développement.

3www.challenges.fr/finance-et-marche/quand-l-ex-patron-de-jerome-kerviel-prevoit-l-apocalypse_1294

4)  Lire notre article page 3, “La crise de la dette : Pourquoi ?” qui analyse ces lois et souligne les véritables racines de la crise historique du système capitaliste.

5) Lire notre article page 4 : “A propos de la mobilisation en Espagne : un pas vers l’internationalisme”.