Présentation de la Revue numéro 162

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Tout comme les deux précédents numéros de la Revue, celui-ci poursuit la célébration des centenaires d'évènements de portée historique ayant marqué la vague révolutionnaire mondiale de 1917 – 23.

Ainsi, après la révolution en Russie en 1917 (Revue n° 160), les tentatives révolutionnaires en Allemagne en 1919 (Revue n° 161), nous célébrons dans ce numéro le centenaire de la fondation de l'Internationale Communiste. Toutes ces expériences sont des pièces essentielles du patrimoine politique du prolétariat mondial dont la bourgeoisie fait tout ce qui est en son pouvoir pour qu'elles soient dénaturées (la révolution en Russie et en Allemagne) ou qu'elles tombent dans l'oubli comme c'est le cas de la fondation de l'Internationale communiste. Le prolétariat devra se les réapproprier pour que, demain, une nouvelle tentative révolutionnaire mondiale puisse être victorieuse.

Cela concerne en particulier les questions suivantes dont certaines sont abordées dans ce numéro de la Revue :

  • La vague révolutionnaire mondiale de 1917 – 23 avait été la riposte du prolétariat international à la Première Guerre mondiale, à quatre années de boucherie et d’affrontements militaires entre les États capitalistes pour le repartage du monde.
  • La fondation de l’Internationale Communiste en 1919 avait constitué le point culminant de cette première vague révolutionnaire.
  • Cette fondation concrétise d'abord et avant tout la nécessité, pour les révolutionnaires restés fidèles à l'internationalisme trahi par la droite des partis sociaux-démocrates (majoritaire dans la plupart de ces partis), d'œuvrer à la construction d'une nouvelle internationale. À l'avant-garde de cet effort et perspective se trouve en particulier la Gauche des partis sociaux-démocrates, regroupée autour de Rosa Luxemburg en Allemagne, Pannekoek et Gorter en Hollande, et bien sûr la fraction bolchevique du parti russe autour de Lénine. C’est à l’initiative du Parti communiste (bolchevique) de Russie et du Parti communiste d’Allemagne (le KPD, ex-Ligue Spartacus) que le premier congrès de l’Internationale a été convoqué à Moscou le 2 mars 1919.
  • La fondation du nouveau parti, le parti mondial de la révolution, qui intervient tardivement alors que la plupart des soulèvements révolutionnaires du prolétariat en Europe ont été violemment réprimés, a pour mission première de fournir une orientation politique claire aux masses ouvrières : le renversement de la bourgeoisie, la destruction de son État et la construction d’un monde nouveau sans guerre ni exploitation.
  • la plate-forme de l'Internationale communiste reflète le changement profond de période historique ouvert par la première guerre mondiale : "une nouvelle époque est née : l’époque de la désagrégation du capitalisme, de son effondrement intérieur. L’époque de la révolution communiste du prolétariat", si bien que la seule alternative pour la société est désormais : révolution prolétarienne mondiale ou destruction de l’humanité ; socialisme ou barbarie.

Tous ces aspects de la fondation de l'Internationale Communiste sont développés dans les deux articles de la présente revue que nous dédions à cette question, le premier en particulier, "Centenaire de la fondation de l’Internationale Communiste – L'internationale de l'action révolutionnaire de la classe ouvrière". Le second article, "100 ans de la fondation de l’Internationale Communiste - Quelles leçons tirer pour les combats du futur ? " développe plus particulièrement une idée déjà abordée dans le premier : à cause de la situation d’urgence, les principaux partis fondateurs de l’Internationale Communiste, notamment le parti bolchevique et le KPD, n’ont pas pu clarifier préalablement leurs divergences et confusions.

De plus, la méthode employée par le nouveau parti pour sa fondation n’allait pas l'armer pour le futur. En effet, une grande partie de l’avant-garde révolutionnaire fit primer la quantité en termes d'adhésions au détriment d’une clarification préalable sur les principes organisationnels et programmatique. Une telle démarche tournait le dos à la conception même élaborée et développée par les bolcheviks au cours de leur existence comme fraction au sein du POSDR.

Ce manque de clarification a été un facteur important, face au reflux de la vague révolutionnaire, du développement de l’opportunisme dans l’Internationale. Celui-ci sera à l'origine d’un processus de dégénérescence qui aboutira à la faillite même de l'IC, tout comme cela avait le cas pour la IIe internationale. Cette nouvelle Internationale a succombé, elle aussi, avec la trahison du principe de l’internationalisme par l’aile droite des partis communistes. Par la suite, dans les années 1930, c’est au nom de la défense de la "patrie soviétique", que les partis communistes, dans tous les pays, ont piétiné le drapeau de l’Internationale en appelant les prolétaires à s’entre-tuer, une nouvelle fois, sur les champs de bataille de la Seconde Guerre mondiale.

Face à sa dégénérescence, l’IC, tout comme la IIe Internationale, a sécrété des minorités de Gauche parmi les militants des partis communistes restés fidèles à l’internationalisme et au mot d’ordre "Les prolétaires n’ont pas de patrie. Prolétaires de tous les pays unissez-vous". Une des fractions ainsi constituées, la Gauche communiste d'Italie, et à sa suite la Fraction française de la Gauche communiste devenue par la suite la Gauche communiste de France (GCF) ont fait tout un travail de bilan de la vague révolutionnaire. Nous publions des chapitres du numéro 7 (Janvier / février 1946) de la revue Internationalisme, traitant de la question du rôle des fractions qui se dégagent du parti dégénérescent ("La fraction de gauche"), et de leur contribution à la formation du futur parti, en particulier la méthode à mettre en œuvre à cette fin ("Méthode de formation du parti").

Ces minorités révolutionnaires, de plus en plus réduites, ont dû œuvrer dans un contexte d'approfondissement de la contre-révolution illustré en particulier par l'absence de surgissement révolutionnaire à la fin de la deuxième guerre mondiale - contrairement à ce qui s'était produit suite à la première. Ainsi ce nouveau conflit mondial avait constitué un moment de vérité pour les faibles forces qui s'étaient maintenues sur un terrain de classe alors que les PC avaient trahi la cause de l'internationalisme prolétarien. C'est ainsi que le courant trotskiste trahissait à son tour, son passage au camp ennemi engendrant des réactions prolétariennes en son sein.

Le numéro 43 (Juin / juillet 1949) d'Internationalisme comporte un article, "Bienvenue à Socialisme ou Barbarie" (republié dans le numéro 161 de notre Revue, au sein de la première partie de l'article "Castoriadis, Munis et le problème de la rupture avec le trotskisme") qui prend une position claire sur la nature du mouvement trotskiste, lequel avait abandonné ses références prolétariennes en participant à la Seconde Guerre mondiale impérialiste. Cet article d'Internationalisme constitue un bon exemple de la méthode employée par la GCF dans ses relations avec les rescapés du naufrage du trotskisme dans le sillage de la Seconde Guerre mondiale. Dans la seconde partie de "Castoriadis, Munis et le problème de la rupture avec le trotskisme", publié dans ce numéro de la Revue, il est mis en évidence combien il est difficile, pour ceux qui ont grandi dans le milieu corrompu du trotskisme, de rompre profondément avec ses idées de fond et avec ses attitudes. Cette réalité est illustrée par la trajectoire de deux militants, Castoriadis et Munis qui, sans aucune doute, jusqu'à la fin des années 1940 et au début des années 1950, étaient des militants de la classe ouvrière. Munis l'est resté toute sa vie, ce qui ne fut pas le cas de Castoriadis qui a déserté le mouvement ouvrier.

En ce qui concerne Munis, il est mis en évidence sa difficulté à rompre avec le trotskisme : "Derrière ce refus d'analyser la dimension économique de la décadence du capitalisme se cache un volontarisme non dépassé, dont les fondements théoriques remontent à la lettre annonçant sa rupture avec l'organisation trotskiste en France, le Parti Communiste Internationaliste, où il maintient avec constance la notion de Trotsky, présentée dans les premières lignes du Programme de transition, selon laquelle la crise de l'humanité est la crise de la direction révolutionnaire".  À propos de Castoriadis, il est souligné que : "ce "radicalisme" qui faisait tant saliver les journalistes de haut vol était une feuille de vigne qui couvrait le fait que le message de Castoriadis était extrêmement utile aux campagnes idéologiques de la bourgeoisie. Ainsi, sa déclaration selon laquelle le marxisme avait été pulvérisé a apporté un soutien "radical" à toute la campagne sur la mort du communisme qui s'est développée après l'effondrement des régimes staliniens du bloc de l'Est en 1989".  Il est, en un sens, l'un des pères fondateurs de ce que nous avons appelé le courant "moderniste".

Nous poursuivons également, dans ce numéro de la Revue internationale, la dénonciation, entreprise dans son n° 160, de l'union de toutes les fractions nationales et des partis de la bourgeoisie mondiale contre la révolution russe d'abord, pour endiguer la vague révolutionnaire et éviter qu’elle ne se répande dans les grands pays industrialisés de l’Ouest de l’Europe. Contre les tentatives révolutionnaires en Allemagne ensuite, où le SPD jouera un rôle de premier plan, en tant que bourreau des soulèvements révolutionnaires dans ce pays.  Immondes furent alors les campagnes de calomnies, organisée au sommet de l'État, pour justifier la répression sanglante. Plus tard, le stalinisme s'imposa à son tour comme bourreau de la révolution, prenant en charge l'exercice de la terreur d'État, la liquidation de la vieille garde du parti bolchevik. Dès lors que l'URSS était devenue un État bourgeois impérialiste contre la classe ouvrière, les grandes démocraties sont complices avec lui pour liquider physiquement et idéologiquement Octobre 1917. Une telle alliance idéologique et politique mondiale a traversé les années et a été relancée, plus fortement que jamais, au moment de l'effondrement du bloc de l'Est et du stalinisme, une forme particulière du capitalisme d'État qui a été mensongèrement présenté comme la faillite du communisme.

Il n'y pas dans cette revue d'article sur des questions brulantes de la situation internationale.  Néanmoins nos lecteurs peuvent se diriger vers notre site où sont publiés de tels articles. De plus un prochain numéro de la Revue internationale accordera l'importance requise à ces questions.

(14/05/2019)